Intervention de Nicolas Sansu

Séance en hémicycle du lundi 10 octobre 2022 à 21h30
Débat sur la dette

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Sansu :

Ces comparaisons n'ont aucun sens et il faut exclure de la bonne analyse la valeur absolue de la dette, pour lui préférer la question de la soutenabilité. À ce titre, le rapport du Gouvernement offre bon nombre d'enseignements. Il montre que la dette est détenue à 49 % par des non-résidents. Il met aussi en évidence une hausse à venir des taux d'intérêt – 2,5 % aujourd'hui, 3 % d'ici à 2027 –, ce qui réduit le déficit stabilisant et renchérit la charge d'intérêts.

Quelle conclusion tirer de ces constats ? Faut-il s'en tenir à la conclusion du Gouvernement, de la Cour des comptes et de toutes les commissions ad hoc qui se sont succédé, à savoir réduire davantage le déficit en réduisant les dépenses, afin de rassurer les marchés financiers et les agences notation qui déterminent nos taux d'emprunt ? En somme, jouer le jeu dans le cadre fixé qui, depuis trente ans, a vu la dette s'accroître en même temps que les inégalités de richesse et de patrimoine ?

Nous, les députés communistes et ultramarins qui composent le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, demandons de modifier le cadre fixé, de sortir de la mainmise des marchés, de contrôler les détenteurs de la dette publique et de ne plus laisser les marchés dicter les taux auxquels nous empruntons. Les chantiers sont nombreux. D'abord, il convient de réhabiliter un système de réserves obligatoires semblable au circuit du Trésor qui fut en vigueur par le passé. Il permettrait de mobiliser l'épargne nationale pour financer le déficit de l'État et nous défaire, autant que possible, du carcan des marchés financiers. Les Français détiennent 6 000 milliards d'euros d'épargne financière : mobilisons-la ! Un tel système pourrait voir le jour à l'échelon européen, raison pour laquelle il semble plus que nécessaire d'entreprendre des démarches dès maintenant.

Ensuite, nous devons reprendre le contrôle sur la politique monétaire de la Banque centrale européenne. Alors que cette dernière a largement agi, depuis 2014, sur les marchés financiers, elle l'a fait en dehors de tout mandat politique. La politique monétaire fait partie intégrante de la politique économique d'un pays ou d'un espace économique – nous l'avons vu avec la dette covid. La sacrifier sur l'autel de la théorie fumeuse de l'indépendance de la BCE a été une erreur, comme l'a montré la crise de 2008.

Alors même que la guerre est aux portes de l'Europe, que notre pays a brûlé tout l'été et que nous ne pouvons savoir si nous aurons assez d'électricité pour passer l'hiver, la problématique de la dette financière ne peut se concevoir sans intégrer les enjeux majeurs de dette écologique et de besoins sociaux et humains, soit, tout simplement, ce qui doit faire sens dans une société qui assure la cohésion. Ce n'est pas le chemin que le Gouvernement emprunte : vous utilisez la dette publique pour justifier vos contre-réformes qui mettent à mal les fondements de notre République, alors que les investissements d'avenir – ceux de la transition écologique – devraient s'affranchir du calcul de la dette maastrichtienne. Là est l'urgence !

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