Cette matinée est importante, car nous avons d'abord auditionné le ministre en exercice, Marc Fesneau, et nous entendons à présent le ministre qui l'a été il y a dix ans. La borne des dix ans nous invite à relire cette décennie, qui a été en grande partie perdue du point de vue des objectifs que nous nous étions fixés. Nous sommes partis du rapport « Pesticides : Effets sur la santé » publié en 2013 par l'Inserm, qui alertait sur la prévalence de certaines maladies liées à l'exposition aux produits phytosanitaires, et nous inscrivons dans la perspective du plan Écophyto 2030, en cours de préparation, et de la proposition de la Commission européenne de règlement sur l'usage durable des pesticides (SUR). L'ancien député européen que vous êtes n'ignore pas qu'un règlement est plus puissant qu'une directive pour mobiliser l'UE sur un sujet.
Merci non seulement pour ce retour sur votre engagement dans la négociation de la PAC, en matière sociale et écologique, son verdissement et la répartition des aides – avec des débouchés très importants en faveur de l'élevage, de la taille des exploitations et la reconnaissance des actifs –, mais aussi sur la loi d'avenir, qui a opéré une véritable révolution culturelle et offert des dispositions pratiques autour de l'agroécologie.
Vous avez oublié de rappeler, et je ne vous en fais pas le reproche, qu'elle prévoyait aussi le principe de phytopharmacovigilance. Je le dis pour votre fierté personnelle, nous proposons d'étendre ce dernier à l'échelle européenne. De même, le biocontrôle, est en passe de devenir une norme au niveau de l'UE. Comme quoi lorsque la France est inspirée, elle peut inspirer l'Europe.
Autre précision, il y avait 2 000 fermes Dephy, que nous proposions de faire passer à 3 000, puis à 30 000. Aujourd'hui, c'est le triangle des Bermudes : que sont devenues ces 30 000 fermes ? On a décidé une politique qui n'a pas été pas mise en œuvre.
Comme il n'y a aucune complaisance dans une commission d'enquête, nous en venons à votre propre responsabilité. Après la présentation du rapport à la fin de 2014, les choses sont freinées : d'abord pendant six mois par le recours de la FNA, puis par une hésitation du Gouvernement. Je me souviens d'une déclaration du Premier ministre à un congrès de la FNSEA qui donnait l'impression de vouloir freiner la dynamique autour de l'agroécologie, telle que vous l'aviez pensée. Pouvez-vous nous dire, avec la rigueur exigée par une commission d'enquête, s'il y a eu un débat interministériel à ce sujet ? Les décisions qui ont été prises, notamment à partir des crises du lait et des céréales, n'ont pas toujours été à la hauteur de vos attentes concernant la mise en œuvre de la loi. J'ai le sentiment qu'il y a eu une hésitation au sommet de l'État. Est-ce que je me trompe ?