Intervention de Sandra Regol

Réunion du mercredi 24 janvier 2024 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandra Regol, rapporteure :

Les mêmes arguments pour et contre ont souvent été répétés, mais une question centrale résume notre débat : quel est l'intérêt de supprimer la mention de l'annexe B ? Pour le moment, je n'ai entendu aucun argument qui justifierait cette suppression. D'après les études scientifiques – y compris celles qui tendent à montrer que les trophées de chasse sont un moyen de protéger certaines espèces par la valeur qu'ils leur confèrent –, les espèces classées dans les annexes A et B sont en danger direct ou indirect, immédiat ou proche. Le périmètre de danger étant le même, les objections faites à une mention de l'annexe B peuvent aussi valoir contre une mention de l'annexe A. Même si je ne suis évidemment pas d'accord avec eux, je comprends fort bien que certains n'approuvent pas notre proposition de légiférer en cette matière ; mais arguer d'une différence entre l'annexe A et l'annexe B n'a guère de sens.

Au demeurant, d'autres études prouvent l'effet sur le braconnage de la variation à la hausse ou à la baisse des quotas, en Tanzanie et en Namibie. Chaque fois que le prix des trophées de chasse augmente, le braconnage augmente également. En effet, lorsque l'on spécule sur des espèces, on parvient à les préserver en raison de l'intérêt de certains – en particulier les éleveurs venus d'Europe pour développer les élevages concernés et vendre très cher la chasse qui les accompagne –, mais l'on rend aussi intéressante l'organisation de la chasse de ces bêtes, à des fins de survie ou de profit. Ceux qui l'organisent ne gagnent pas les énormes sommes de la chasse aux trophées, mais des sommes importantes tout de même, issues de la vente des parties ou de l'intégralité des dépouilles. C'est bien naturel : quand une activité devient extrêmement lucrative, elle attire évidemment les activités illicites, en l'occurrence le braconnage.

Il existe pourtant des activités licites permettant la protection des espèces. Le fonctionnement vertueux du système des parcs naturels, outils touristiques et sources de fierté locale, illustre la possibilité de protéger la nature et de développer l'économie d'un seul et même mouvement et de façon durable.

La fondation Jane Goodall, qui travaille sur les grands primates et aide des villages entiers à vivre mieux, a constaté que jamais aucun des quelque 150 villages qu'elle a aidés n'a regardé la chasse aux trophées comme un moyen de se faire de l'argent, de développer une activité économique ou de vivre mieux, pour ses habitants ou pour la nature. J'ai également cité des sondages montrant qu'en Afrique du Sud, le pays qui exporte le plus de trophées de chasse, la population considère que la suppression de cette pratique renforcerait l'attractivité et l'économie locales. Nous n'avons pas le pouvoir d'interdire ces exportations – seule l'Afrique du Sud peut le faire –, mais nous devons saisir l'occasion de stimuler l'économie touristique de ce grand pays. Le tourisme d'observation, qui prend la forme de safaris-photos où aucun animal n'est tué, est une activité durable permettant de développer d'autres marchés.

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