Intervention de Hervé Tonnaire

Réunion du lundi 12 février 2024 à 15h00
Commission d'enquête sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d'outre-mer

Hervé Tonnaire, directeur délégué aux outre-mer, directeur régional Pacifique de la Banque des territoires :

La Banque des territoires a fait de la prévention et de l'adaptation au changement climatique l'un des axes majeurs de son projet stratégique pour la période 2024-2028 et elle y consacrera 1,2 milliard d'euros. Elle considère par ailleurs que les outre-mer font partie des territoires à enjeu particulier, au même titre que les territoires de la zone littorale, des zones rurales ou de la politique de la ville. Selon une expression désormais consacrée, nous devons, face au changement climatique, « éviter l'ingérable et gérer l'inévitable ».

La Banque des territoires est un partenaire qui se place en deuxième ligne : j'entends par là qu'elle accompagne les acteurs principaux, c'est-à-dire l'État et les collectivités, sans avoir vocation à décider ou à imposer ses choix – elle n'a pas de dimension régalienne. Elle met, dans une logique partenariale, ses ressources privilégiées à leur disposition. Sa gouvernance particulière l'oblige à jouer un rôle dans une grande politique publique telle que l'adaptation au changement climatique. Ses principaux leviers d'action sont : l'ingénierie de projet, le financement et un outil bancaire spécifique, la consignation.

Sur le premier point, nous avons la possibilité soit de mobiliser l'ingénierie propre des collaborateurs de la Banque des territoires, soit de cofinancer de l'ingénierie de projet, au service principalement des collectivités.

C'est sur le deuxième axe, à savoir le financement, qu'on nous attend le plus. La Banque des territoires est un établissement public : ce n'est pas une filiale, mais une marque qui reprend l'ensemble des métiers qui s'adressent aux territoires. Elle dispose d'abord de l'outil très puissant des fonds d'épargne, adaptés aux sujets du temps long comme le changement climatique. Les prêts sur fonds d'épargne notamment peuvent être mobilisés sur des durées très importantes. Nous allons d'ailleurs étendre à quatre-vingts ans la maturité des prêts fonciers pour des projets visant à préserver des terrains qu'il s'agit de « thésauriser », parce qu'ils peuvent apporter une plus-value, par exemple pour la protection du littoral. À côté de ces projets à très long terme, nous avons aussi des outils comme l'Aqua Prêt ou les nouveaux prêts de transition énergétique, sur lesquels je pourrai revenir si vous le souhaitez.

La Banque des territoires peut également faire des investissements en fonds propres pour accompagner des acteurs dans leur stratégie, par exemple pour des travaux de confortation. Elle intervient aussi au travers d'opérateurs, puisqu'elle est actionnaire de nombreuses sociétés d'économie mixte (SEM). Je suis par exemple l'administrateur de la Société d'équipement de la Nouvelle-Calédonie (Secal), dont le plan de développement a fait de l'accompagnement des collectivités à l'adaptation au changement climatique un axe central. Bref l'investissement peut se faire au travers de véhicules intermédiés comme une SEM ou par l'accompagnement des projets d'acteurs privés.

Notre troisième mode d'intervention, c'est la consignation. C'est un outil très puissant, qui permet de « prendre en compte » des montants qui seront utiles pour des actions de remédiation ou de résilience et, le cas échéant, de les mettre à disposition après un incident qui met en jeu des responsabilités.

Tel est le triptyque qui structure les interventions de la Banque des territoires. Le plus souvent, nous commençons par de l'ingénierie de projet, en aidant nos partenaires à définir leur programme. Le financement ne vient que dans un deuxième temps : une fois que le projet existe, nous regardons s'il y a une capacité de financement. Le plus souvent, en outre-mer, plusieurs types de financement coexistent, avec les fonds européens, les fonds d'État, mais aussi ceux d'autres acteurs comme l'Agence française de développement (AFD).

Je vais prendre un exemple pour illustrer l'importance de la consignation en matière environnementale, même s'il n'entre pas tout à fait dans le cadre de votre commission d'enquête puisqu'il ne s'agit pas d'un risque naturel, mais minier. En Nouvelle-Calédonie, 100 millions d'euros ont été consignés à la demande de la province Sud pour prévenir un éventuel incident sur un bassin de rétention de boues de l'usine de Prony Resources – autrefois Vale. Cet opérateur, qui est un peu fragile, n'avait pas la possibilité de recourir à des modes normaux d'assurance ou à des dispositifs susceptibles de rassurer la collectivité. La Caisse des dépôts a donc consigné 100 millions d'euros comme garantie de la protection environnementale, qui ne peuvent être libérés qu'à la demande de la collectivité.

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