Intervention de André Laignel

Réunion du mercredi 13 mars 2024 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

André Laignel, vice-président de l'Association des Maires de France et des présidents d'intercommunalité :

Quelle est la situation des collectivités locales et du bloc communal ? Aujourd'hui, le bloc communal est le plus souvent considéré comme une charge et non pas comme un levier. Ce n'est pas nouveau et cela recouvre plusieurs types de majorités.

Je crois que c'est une erreur fondamentale de dénoncer en permanence les collectivités comme dépensières. C'est pourtant la teneur des déclarations du ministre de l'économie lorsqu'il parle de revue des dépenses.

Cela est d'autant plus étonnant que nous avions expliqué lors de la seule réunion du Haut comité des finances publiques locales que nous ne participerions pas à ce comité s'il se limitait à la seule revue des dépenses. Nous avions demandé une revue des dépenses mais aussi des recettes et Bruno Le Maire présent ce jour-là avait donné son accord sur cette vision.

J'avais été très précis puisque j'avais listé les recettes à considérer, et notamment l'évolution de la DGF depuis 2010-2012 et la participation de nos collectivités. Nous estimons cette participation à un peu plus de 71 milliards d'euros mais un débat existe sur ces chiffres. J'attends qu'il me soit démontré que ces estimations ne sont pas justes mais nous n'avons aucune réponse sur ce sujet.

J'avais demandé également une revue des recettes sur les ressources fiscales et leur composition.

Par ailleurs, nous savons tous que sur le logement social, les dégrèvements sont très loin de compenser la perte des communes qui acceptent du logement social. Ces communes sont donc doublement pénalisées, par les charges qu'entraîne le logement social et par des compensations très insuffisantes.

Concernant la dépense effective des subventions d'investissement, il existe de gros écarts entre les annonces et la réalité des engagements.

Nous sommes favorables à une revue des dépenses à condition qu'elle s'accompagne d'une revue des recettes. C'est important car nous ne pouvons être présentés en permanence comme des dépensiers. C'est une attaque injustifiée à l'égard de nos collectivités qui mérite une riposte, graduée mais déterminée.

J'ajoute que les maires et les présidents d'intercommunalité ont le sentiment grandissant de n'être plus que des sous-traitants de l'État et une variable d'ajustement budgétaire. Ce sentiment est alimenté par la nationalisation de l'impôt qui fait reculer nos libertés et par le fléchage des dotations de plus en plus encadré. En définitive, des ressources nous sont accordées à condition de respecter les volontés de l'État. Notre volonté, qui s'exprime dans le cadre de la démocratie locale, est bafouée. C'est un immense recul de la décentralisation, et il est nécessaire que nous retrouvions notre libre administration.

Qui peut aujourd'hui parler de libre administration des collectivités territoriales alors que les marges financières qui nous sont laissées se sont réduites comme peau de chagrin ?

Il y a un problème central de démocratie locale et je pense que c'est un grand tort pour notre nation de faire reculer la décentralisation et de recentraliser les tâches qui sont les nôtres au quotidien sur le terrain.

Nous sommes soumis en permanence à des injonctions contradictoires. Ainsi par exemple, il est demandé aux collectivités d'être des acteurs de la réindustrialisation ou de l'industrialisation de notre pays. Les maires le souhaitent et ils y sont prêts mais ils doivent faire face à la suppression de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) et au ZAN. Par conséquent, des maires refusent des installations d'entreprises parce qu'ils n'auront plus le retour qu'ils avaient avec la CVAE. Je tiens d'ailleurs à poser une question que j'ai déjà posée en tant que président du CFL (Comité des finances locales) :

Quel montant a été raboté sur la compensation de la CVAE ?

Je dispose d'une estimation de 750 millions d'euros et je souhaite qu'elle soit vérifiée. Je demande des chiffres au ministère de l'économie depuis un an et à ce jour, je n'ai obtenu aucune réponse. Pourtant, l'État connaît ce montant puisqu'il a encaissé en 2023 la CVAE 2022. Pourquoi refuse-t-il de le communiquer ?

Je demande que cette estimation puisse être confrontée au montant de la CVAE. Retrouvons la vérité tous ensemble et il sera alors beaucoup plus facile d'avoir un dialogue républicain entre les collectivités territoriales et l'État.

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