Intervention de Eva Sas

Séance en hémicycle du mardi 9 avril 2024 à 21h30
Accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la france — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEva Sas :

Les études de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) ont clairement établi les conséquences néfastes de la financiarisation sur l'accroissement des inégalités.

Le capitalisme financier, enfin, c'est la réduction de l'entreprise à un actif financier, reléguant au second plan tout projet industriel, tout progrès collectif et tout effort de lutte contre le dérèglement climatique.

Pourtant, l'entreprise, c'est et ce doit être plus encore, le lieu d'un projet commun, partagé, qui redonne du sens au travail et à l'activité économique, et qui prenne en compte les préoccupations sociales et environnementales.

Nous ne soutiendrons donc pas un texte qui vise à accroître la financiarisation de notre économie, là où il faudrait au contraire bâtir une économie robuste, sur trois piliers : le renforcement du poids des salariés dans la gouvernance d'entreprise, pour mettre en place une cogestion sur le modèle allemand ; la responsabilisation des entreprises sur leur impact social et environnemental, en particulier leur responsabilité dans le dérèglement climatique ; la reconnaissance du caractère pluriel de notre économie, et donc de la place de l'économie sociale et solidaire (ESS), au-delà du couple État-marché.

L'économie, ce n'est pas d'un côté le secteur public et, de l'autre, les sociétés privées : c'est aussi l'ESS, qui représente 10 % des emplois en France. Ces 2,4 millions de salariés, créateurs de sens, créent aussi de la richesse. Ils ont toute leur place dans notre économie et sont appelés à en avoir plus encore – l'ESS a créé plus de 80 000 emplois en deux ans.

C'est pourquoi nous nous félicitons de l'adoption en commission de notre amendement facilitant l'accès au financement des sociétés coopératives de production (Scop) sous forme de titres participatifs.

Que prévoit le texte ? Tout d'abord, il vise à développer les actions de préférence, c'est-à-dire les droits de vote multiples, pour inciter les fondateurs d'entreprise – en particulier ceux des licornes – à réaliser des augmentations de capital, tout en conservant le contrôle.

Nous vous proposerons de limiter cette possibilité aux seuls salariés, et surtout d'en exclure l'application aux votes sur les rémunérations des dirigeants.

Nous plaidons également pour que le Say on climate, c'est-à-dire les résolutions soumises aux votes des assemblées générales sur les politiques climatiques des entreprises cotées, devienne une obligation. Nous avons été particulièrement surpris qu'en commission, à l'inverse de son vote sur le projet de loi relatif à l'industrie verte, et contrairement aux recommandations du rapporteur, le groupe Renaissance vote contre cet amendement alors qu'il prétend défendre la transition écologique.

Vous proposez d'élargir les possibilités d'augmentation de capital sans droit préférentiel de souscription, c'est-à-dire sans laisser de priorité aux actionnaires déjà en place. Cela risque de renforcer la dispersion de l'actionnariat et la domination des marchés financiers, et de rendre plus instable la structure actionnariale. Il aurait fallu en évaluer l'impact sur la gouvernance des entreprises.

Nous regrettons d'ailleurs qu'aucune étude d'impact n'accompagne ce texte. Bien que préparé par Bercy, il nous est soumis, étonnamment, sous la forme d'une proposition de loi. N'est-ce pas une façon pour le Gouvernement de contourner l'obligation d'étude d'impact qui accompagne tout projet de loi ?

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