Intervention de Béatrice Roullaud

Réunion du lundi 10 octobre 2022 à 14h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Roullaud :

La proposition de loi qui nous est soumise ne comporte plus qu'un article, l'article 3, le Sénat ayant supprimé les deux premiers.

L'audition de Mme Sonia Arrouas, présidente du tribunal de commerce d'Évry, et de M. Jean-Luc Adda, président du tribunal de commerce d'Alençon, a été riche d'enseignements. Elle a montré qu'il est absolument nécessaire de modifier les conditions d'éligibilité des candidats aux fonctions de juge consulaire. En effet, l'absentéisme de certains juges met les tribunaux de commerce en difficulté. Les juges consulaires sont bénévoles, et on en manque. Élargir le vivier des candidats permettrait d'avoir davantage de juges et de remplacer ceux qui ne viennent pas siéger.

C'est ce que fait l'article 3, qui permet à des cadres d'être élus juges consulaires, et qui favorise la mobilité des juges et des anciens juges consulaires, sous certaines conditions de résidence. L'ouverture aux cadres répond aussi à un souci de qualité, comme l'a souligné Mme Catherine Védrenne, cheffe du bureau des magistrats. L'article 3 corrige également une rédaction défectueuse : il fallait inscrire dans la loi la conjonction « ou », et non la conjonction « et », qui restreignait encore la possibilité d'être élu juge consulaire. L'article 3 va dans le bon sens et nous le voterons.

En revanche, nous regrettons la suppression de l'article 2, qui était la clé de voûte de ce texte et l'une des revendications essentielles de la profession. Il aurait permis de lutter efficacement contre l'absentéisme des juges consulaires, en instaurant une sanction. L'article supprimé, qui modifiait le 5° de l'article 722-8 du code de commerce, permettait en effet de considérer comme démissionnaire d'office un juge refusant de siéger sans motif légitime. Cette disposition est on ne peut plus logique. Le législateur a d'ailleurs déjà prévu une sanction similaire pour les conseillers prud'homaux, qui sont eux aussi bénévoles et qui connaissent également des problèmes d'absentéisme.

Le législateur ne doit pas se montrer frileux : son rôle est de trouver des solutions efficaces et pérennes aux dysfonctionnements dont il est saisi. Les solutions amiables n'ont pas permis de résoudre cet épineux problème, pas plus que les recours hiérarchiques ou disciplinaires auprès du premier président de la cour d'appel. Les justiciables devraient supporter qu'un dossier prenne plusieurs mois, voire plusieurs années de retard, au seul motif que le législateur s'est montré frileux ? Je ne le crois pas !

Parce qu'il est à l'écoute des professionnels de terrain, le Rassemblement national défendra un amendement visant à réintroduire l'article 2. Nous proposerons toutefois de le modifier à la marge, afin de ne pas heurter la sensibilité des juges consulaires, qui sont volontaires et bénévoles. Ne serait ainsi sanctionné que le second refus de siéger non motivé. Dans la mesure où je suis la seule députée à avoir assisté à l'audition de Mme Arrouas et de M. Adda, je suis le témoin de ce qui a été dit, et je peux vous assurer qu'ils ont plaidé pour l'instauration d'une telle sanction.

J'espère, chers collègues, que vous ne resterez pas dans une posture politicienne et partisane.

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