Je commencerai par répondre à votre deuxième question, qui est plus proche de mon portefeuille. Le Fonds européen de défense est dédié à la recherche et au développement amont. Les produits européens sont ainsi développés en commun, avant d'être mis sur le marché. Il peut s'agir de missiles, de cyber-sécurité, de produits d'observation, soit les instruments les plus technologiques qui concourent à la défense. S'agissant des achats, il n'y a pas de débat à partir du moment où la disponibilité est bien réelle. Comme je le disais précédemment, nous savons tout faire mais nous sommes trop lents. Dès lors, il est impératif d'accroître notre capacité industrielle, laquelle concerne également les Allemands, qui sont en train de devenir un acteur important de l'industrie de défense, à l'image des entreprises Rheinmetall ou Diehl Stiftung. Naturellement, la faculté à pouvoir acheter européen concourt à notre souveraineté et à notre autonomie. Cette préoccupation est aujourd'hui très partagée en Europe, à plus forte raison dans la perspective des élections américaines. Des pays plus atlantistes comme les pays nordiques ou les pays baltes sont maintenant tous convaincus de cette nécessité.
Ensuite, je pense, comme vous, que la monnaie est un élément de souveraineté, raison pour laquelle nous n'avons pas voulu la laisser aux plateformes. Je fais partie de ceux qui luttent afin que les plateformes ne puissent pas battre monnaie, ni ne puissent vous donner votre certificat d'identité. À ce titre, nous promouvons le projet d'une identité numérique européenne. Des études sont en cours concernant l'euro numérique, le digital devant nous permettre de renforcer notre souveraineté en offrant par exemple une alternative européenne aux entreprises Visa et Mastercard, qui sont aujourd'hui en situation de monopole sur une très grande partie des paiements, sur lesquelles elles prélèvent leur dîme. Benoît Cœuré a notamment travaillé sur cette question et a produit un rapport remis à la BCE. S'agissant d'Amazon, la situation est désormais plus normalisée. Nous sommes extrêmement attentifs et je suis absolument convaincu qu'il n'y aura aucun risque que les données numériques de nos concitoyens européens quittent le territoire européen. J'ai personnellement mené ce combat. Tant que je serai commissaire, j'y veillerai.