Intervention de Bérangère Couillard

Réunion du mercredi 12 octobre 2022 à 17h50
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Bérangère Couillard, secrétaire d'État :

Monsieur Brosse, la priorité du Gouvernement est de réduire la production de déchets, de développer le recyclage et la réutilisation, au détriment de l'élimination. État, collectivités, producteurs et consommateurs partagent le même objectif : réduire de moitié les quantités de déchets non dangereux encore valorisables mis en décharge d'ici à 2025, après quoi il faudra arrêter la mise en décharge de ces déchets. Le tri à la source des biodéchets favorise l'économie circulaire, contribue à la lutte contre le changement climatique et soutient des pratiques agricoles durables. En effet, la valorisation des biodéchets permet de produire du biogaz et du compost agricole, en remplacement du gaz naturel et d'engrais fabriqués avec ce même gaz. Il s'agit donc aussi d'un enjeu de souveraineté énergétique.

Dans cette perspective, le Gouvernement a déjà soutenu plus de 400 projets dans tous les territoires, ce qui représente plus de 100 millions d'euros d'aide engagés en 2021 et 2022, dans le cadre du fonds économie circulaire et du plan de relance. Afin de continuer à soutenir les collectivités, le Gouvernement prévoit de mobiliser des ressources supplémentaires en 2023, dans le cadre du Fonds vert, qui permettra d'accompagner financièrement les collectivités dans la mise en place de la collecte et la valorisation des biodéchets.

Au-delà de ce soutien spécifique à la gestion des biodéchets, les capacités financières des collectivités ont été renforcées pour les accompagner dans la gestion circulaire de leurs déchets, grâce notamment à l'allègement à 5,5 % de la TVA sur les activités de tri, à la réduction des frais de gestion perçus par l'État sur la taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative et à la mise en place de nouvelles filières REP, dont je vous ai donné les détails.

Par ailleurs, le fonds économie circulaire de l'Ademe a été renforcé : il augmente de 40 millions d'euros en 2023.

Vous le voyez, le Gouvernement est aux côtés des collectivités pour les accompagner dans cette transition. Il s'agit d'un sujet très important pour le ministère.

M. Barthès est parti ; c'est dommage…

Madame Meunier, les chasses traditionnelles sont un sujet complexe, qui trouve un écho dans de nombreuses régions de France, notamment dans l'Est et le Sud-Ouest, où elles sont particulièrement présentes.

La chasse à la glu, pratique qui posait le plus de problèmes, a été définitivement abandonnée. Les chasses traditionnelles se pratiquent en général sans armes à feu, posent le problème de la sélectivité mais sont la plupart du temps non létales pour les espèces capturées accidentellement, et ont donc un impact faible sur la biodiversité des espèces concernées. En outre, elles possèdent une forte dimension culturelle. Dans la mesure où le cadre réglementaire en vigueur depuis 1989 ne répondait pas à toutes les exigences de la légalité actuelle, comme l'avaient rappelé des décisions récentes du Conseil d'État, nous avons procédé cet été à une refonte intégrale des arrêtés servant de cadre à ces pratiques.

Les nouveaux arrêtés ont été préparés, en apportant toutes les justifications demandées par la directive européenne « oiseaux », pour autoriser la chasse aux pantes – il s'agit de filets – et à la matole – ce sont des cages servant de piège. Une nouvelle demande de suspension de ces pratiques sera très sûrement soumise par leurs opposants. Le ministre s'était engagé à attendre l'éclairage du Conseil d'État pour renforcer la qualité des textes et leur lisibilité juridique mais, l'avis du Conseil tardant à venir et les chasses commençant, nous avons décidé de publier ces textes pour 2022 et 2023, afin de ne pas laisser sans réponse les chasseurs ayant envie de pratiquer dans de bonnes conditions, et de ne pas geler l'ensemble de leur année de chasse. Néanmoins, la réponse du Conseil d'État ne devrait plus tarder.

Le financement des associations passe par l'OFB et par le programme 113. Nous augmentons leurs dotations, y compris, dans certains cas, pour financer leur fonctionnement. Ainsi, les conservatoires d'espaces naturels bénéficieront d'une dotation supplémentaire de 500 000 euros. Quant aux associations gestionnaires d'aires protégées, leurs crédits sont maintenus et seront complétés par le Fonds vert, qui consacrera 50 millions d'euros à la gestion de ces aires. Il existe donc bien, au-delà du système d'appel à projets, un système stable et pérenne pour financer leurs projets, et l'objectif est que le financement de leur fonctionnement soit stable, voire en hausse.

Je vous remercie, monsieur Delautrette, pour vos mots d'encouragements, car il est agréable d'en recevoir.

Quant à la TGAP, elle a pour vocation d'inciter tous les acteurs à privilégier le recyclage et le réemploi à la place des décharges. Sa baisse ou une réattribution sans condition pourraient supprimer cette incitation. Ainsi, pour soutenir les collectivités et les projets alternatifs aux décharges, le Gouvernement a choisi de privilégier des financements attribués par le fonds économie circulaire, à hauteur de 210 millions d'euros par an, et par le Fonds vert.

Merci à vous aussi, Madame Violland, pour vos mots d'encouragement. Nous nous accordons tous sur le diagnostic : notre territoire est touché par le manque d'eau et le déficit structurel des nappes. Nous l'avons observé cet été avec la sécheresse, y compris dans des territoires jusqu'ici très peu concernés. Notre politique de l'eau est déjà particulièrement forte mais notre réponse doit donc aller plus loin, et c'est bien l'objectif du chantier lancé à Marseille, le 29 septembre, avec M. Christophe Béchu et Mme Agnès Firmin-Le Bodo, en présence du président M. Jean-Marc Zulesi, mais aussi des présidents du Comité national de l'eau et des comités de bassin. Il s'agit de s'engager dans une réelle transition, selon trois axes.

D'abord, en ce qui concerne la sobriété des usages de l'eau, nous avons pour objectif de baisser les prélèvements de 10 % d'ici à 2025 et de 25 % d'ici à 2035. Cela implique de clarifier les règles de partage de la ressource et de consentir des efforts collectifs pour faire avec moins d'eau. Il ne sera pas évident d'y parvenir, mais ces objectifs doivent être atteints.

Ensuite, nous devons garantir l'accès à une eau potable de qualité, ce qui implique de fournir un effort important pour l'entretien des réseaux. Il faut aussi aller plus loin dans la protection des captages prioritaires car, dans certains territoires, nous ne sommes pas au rendez-vous. Nous devons rattraper notre retard sur ce sujet. Je l'ai dit pas plus tard qu'hier lors d'une réunion avec le comité de bassin d'Adour-Garonne. Nos concitoyens ont des attentes légitimes sur ce sujet ; nous devons y répondre.

Enfin, nous devons restaurer le grand cycle de l'eau, en ayant recours à des solutions fondées sur la nature, sur la restauration des continuités écologiques et la désimperméabilisation. Il ne s'agit donc pas de repartir de rien ni de développer un grand plan d'État, mais plutôt de mettre en œuvre un plan collectif, de faire remonter les bonnes pratiques, de consulter le terrain et ceux qui connaissent le sujet, de miser sur des travaux déjà réalisés – je pense aux assises de l'eau et au Varenne agricole de l'eau –, de s'appuyer sur les instances de gouvernance et les compétences existantes. Nous avons sollicité les différents acteurs impliqués et attendons leurs réponses, mais je peux vous assurer qu'ils sont déjà mobilisés.

Madame Belluco, l'idée est de repenser notre gestion de l'eau en prenant en compte l'ensemble des enjeux. Le secteur agricole en fait partie, mais il faut penser en même temps au secteur industriel et aux ménages. La question des bassines est souvent urticante pour le ministère, et nous regardons avec perplexité les projets proposés. Malgré tout, certains peuvent s'avérer intéressants en fonction des territoires, et on ne s'interdit pas de les considérer.

Par ailleurs, vous avez raison : les PTGE doivent être généralisés. Comme vous, je regrette que la Vienne n'en ait pas. Je me pencherai sur la question avec attention. Je vous propose donc de vous faire plus tard une réponse complète, quand j'aurai tous les éléments en ma possession. En tout cas, le manque d'eau ne peut pas entraîner une généralisation des bassines, et il n'est ni envisageable ni tenable que la consommation d'eau du secteur agricole reste inchangée. Il nous faut avancer – et nous avons entamé cette réflexion avec M. Christophe Béchu mais aussi avec M. Marc Fesneau – quant à une modification des cultures en fonction des régions de France. On peut difficilement imaginer, par exemple, que certains territoires particulièrement touchés par le réchauffement climatique, comme le sud de la France, continuent à produire autant de maïs.

Monsieur Ray, la répartition du Fonds vert se fera en fonction des projets plutôt qu'en fonction de critères géographiques. Le Fonds vert est doté de 2 milliards d'euros, M. Christophe Béchu donnera le fléchage s'il le souhaite pour les différents pôles, l'objectif étant qu'une cause ne soit pas plus favorisée qu'une autre, et que les collectivités intéressées puissent s'adresser à des sortes de guichets en fonction du projet proposé. Une fois que l'enveloppe dédiée aura fondu, que les projets seront nombreux, il faudra faire le point sur les budgets restants mais l'idée serait de conserver le fléchage afin d'avancer en même temps sur les différents sujets.

En ce qui concerne les dispositifs antigrêle, je dois vous répondre par la négative : le Fonds vert ne répondra pas à cet objectif. En effet, ils participent de la prévention des conséquences des aléas climatiques mais pas de la lutte contre la dégradation de la biodiversité, ni pour la réduction des émissions des gaz à effet de serre. Nous pourrions néanmoins imaginer un accompagnement avec le ministère de l'agriculture.

Le traitement des eaux usées est un enjeu important. Si j'ai évoqué la sobriété, nous devons aussi mieux réutiliser les eaux usées traitées. Il est vrai que nous sommes de mauvais élèves. Il faudra engager des projets. Sans doute les normes sanitaires sont-elles également drastiques. À titre d'exemple, on ne peut arroser un stade avec des eaux usées traitées par crainte que la bouche d'un enfant n'entre en contact avec la pelouse. Nous devons étudier avec le ministère de la santé et avec les agences régionales de santé la manière dont nous pourrions alléger les contraintes. Nous devons trouver des solutions efficaces et écologiques.

Madame Luquet, la protection des arbres est un enjeu important pour le paysage et pour la biodiversité ainsi que pour le patrimoine ; je vous sais très engagée. La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages puis la loi 3DS sont venues renforcer les outils permettant de veiller à leur protection. Quant au décret qui doit permettre de protéger les allées et alignements d'arbres, la consultation du public sera lancée dans les prochains jours. Elle devra durer vingt-huit jours, comme le prévoit le code de l'environnement, et débouchera sur la saisine du Conseil national d'évaluation des normes, qui représente les collectivités, puis sur la saisine du Conseil d'État. Le Gouvernement a pour objectif de publier le décret d'application en décembre 2022. Ce texte est issu de concertations longues et je souhaite en accélérer la publication.

L'industrie du textile représente en France six fois les émissions de carbone du transport aérien. La nouvelle filière REP doit accélérer le passage à des textiles plus durables, mieux collectés mais aussi mieux recyclés. Des réunions de concertation sur cette filière auront lieu à l'Hôtel de Roquelaure, au ministère, les 13 et 18 octobre, et une commission REP se tiendra le 20 octobre. Nous avons pour objectif de finaliser la feuille de route de la filière début novembre, pour un lancement effectif d'ici à la fin d'année. Il s'agira d'améliorer grandement la gestion de nos textiles au cours des six prochaines années. Si cet horizon peut paraître lointain, il est en fait très proche. Notre volonté est grande en la matière.

Monsieur Wulfranc, le plafond annuel de recettes pour les redevances des agences de l'eau est fixé à 2,2 milliards d'euros depuis la loi de finances 2021. Le PLF pour 2023 prévoit, comme en 2022, le maintien du plafond d'emplois pour ces agences, ce qui montre la reconnaissance de l'État vis-à-vis de ces opérateurs. Pour contribuer à l'adaptation au changement climatique, les agences de l'eau ont pu déployer, grâce à un relèvement de leur plafond de dépenses dès l'été 2022, un plan de résilience d'un montant de 100 millions d'euros, afin de soutenir les collectivités en matière d'économies d'eau, mais aussi pour lutter contre les pénuries – la sécheresse a parfois sévi dès le printemps –, accompagner les filières agricoles mais également améliorer la résilience des territoires et des milieux naturels.

Monsieur Saint-Huile, je suis empêchée par la loi Agec d'engager les discussions avant juin 2023 : étonnamment, le législateur avait fixé une date pour la reprise des négociations relatives à la consigne des plastiques. Néanmoins, la réflexion avance. Les échanges lors de l'examen du projet de loi Agec ont été utiles. Nous avions alors indiqué aux sénateurs et aux élus des collectivités qu'il était regrettable qu'ils n'abordent pas cette question et que nous y reviendrions. En effet, il apparaît dans les pays limitrophes, notamment en Allemagne, que ce dispositif fonctionne. Par ailleurs, depuis 2019-2020, nous observons le développement de consignes sauvages et les collectivités, qui perdent alors des quantités de plastique et donc de l'argent, commencent à s'interroger. D'après les derniers chiffres en ma possession, ces déchets plastiques se vendent en effet 700 euros la tonne, ce qui représenterait un montant important pour les collectivités. Quoi qu'il en soit, je n'ai pas attendu juin 2023 pour aborder la question avec des sénateurs lorsque j'en rencontre.

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