Intervention de Aurélie Trouvé

Réunion du mardi 11 octobre 2022 à 21h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélie Trouvé :

La mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales est absolument vitale pour le pays car la destruction massive des emplois et des exploitations agricoles continue, la dérégulation des prix et des marchés rend les revenus des agriculteurs de plus en plus instables et leurs dettes augmentent.

Ce n'est pas peu dire que je suis déçue par ce budget. Les rares hausses ne vont pas dans le bon sens puisque le Gouvernement augmente les subventions publiques aux assurances privées, et de façon inconditionnelle. Encore de l'argent public qui n'ira pas aux agriculteurs alors que, pour faire face aux risques climatiques, sanitaires et de marché, les exploitations doivent diversifier leurs productions, adapter les variétés, les races animales aux conditions du milieu, désintensifier les élevages, diversifier les rotations, implanter des haies et des bosquets – en somme, faire de l'agroécologie ! Croyez-moi, il n'y a rien de plus technique et de plus moderne que l'agroécologie, et cela vaut beaucoup mieux que de voir s'envoler des primes destinées à assurer un système insoutenable.

Nous avons un besoin vital de transformer notre agriculture pour la rendre plus résiliente et préserver notre planète. Alors que l'utilisation des pesticides augmente, que les indicateurs de biodiversité dans les champs empirent, qu'un tiers des eaux de surface et souterraines sont polluées par l'agriculture, rien n'est proposé dans le budget. Je ne vois pas d'aide qui augmente en faveur d'une agriculture plus économe et plus autonome, davantage créatrice d'emplois, usant moins de machines, d'engrais, de pesticides ou de concentrés alimentaires.

En revanche, le Gouvernement prolonge d'une année le TODE, un dispositif d'exonérations sur les salaires compris entre 1 et 1,2 Smic, une véritable trappe à pauvreté dont le coût, de 427 millions, plombe le budget et pèse sur l'ensemble des contribuables. Le Gouvernement se fait le chantre de la responsabilité budgétaire mais ces 427 millions équivalent pratiquement au budget de l'action 27 Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions. Ce budget diminue de 12 % : c'est autant de moins pour les techniciens et ingénieurs de l'État, pourtant indispensables à la conduite d'une politique sérieuse – je l'ai constaté durant vingt ans, comme fonctionnaire du ministère chargé de l'agriculture.

Ainsi, nous savons à quel point l'entretien des forêts est crucial pour prévenir les feux – de plus en plus souvent catastrophiques. Mais voilà, 95 postes à l'Office national des forêts (ONF) seront supprimés en 2023. Le Gouvernement peut toujours expliquer que les agriculteurs doivent voir leurs charges baisser pour faire face à la concurrence internationale, je répondrai que ce modèle n'est pas une fatalité et qu'il vaut mieux relocaliser notre alimentation, soutenir massivement les circuits courts et les cantines 100 % bio et locales. Mais protéger nos marchés, ce serait bien sûr refuser le dogme de la libre concurrence européenne…

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