Intervention de Marie-Charlotte Garin

Réunion du mardi 18 octobre 2022 à 17h15
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Charlotte Garin :

Je me dois, en commençant cette intervention faite au nom du groupe Écologiste - NUPES, de rappeler le contexte pour le moins désagréable dans lesquels ont lieu nos débats. M. Véran, porte-parole du Gouvernement, a regrettablement annoncé ce matin que le recours à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution serait probablement décidé demain. L'examen du PLF 2023 et du PLFSS a pourtant été un modèle de débat démocratique : les discussions ont été argumentées et disciplinées et plusieurs amendements ont été adoptés. Cette épée de Damoclès perturbe évidemment la sérénité et la sincérité des débats.

La dernière enquête sur l'ASE, diffusée dimanche 16 octobre dans l'émission télévisée « Zone interdite » faisait froid dans le dos. Le reportage présente une succession de situations dramatiques vécues par des jeunes gens et des adultes tous concernés par des services de la protection de l'enfance qui porte bien mal son nom. Prostitution dans les foyers, maltraitance en familles d'accueil, indifférence des services départementaux, tous les maux d'une politique publique qui concerne plus de 300 000 mineurs et 32 000 jeunes majeurs sont exposés à grands traits. C'est déjà à la suite de plusieurs enquêtes journalistiques que le secrétariat d'État chargé de la protection de l'enfance avait été créé en 2019 ; rien n'aurait donc changé depuis lors ? Madame la secrétaire d'État, vous qui avez travaillé à la protection judiciaire de la jeunesse, vous savez de quoi nous parlons. Un enfant meurt tous les cinq jours dans le cadre familial, et 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles tous les ans. Ce constat est alarmant mais nous ne voyons pas dans ce budget de modifications ou d'investissements massifs permettant une évolution positive. Vous évoquez des contrôles renforcés et davantage de formation, mais comment les finance-t-on et combien de postes supplémentaires vont être créés pour mener ces missions à bien ? Vous nous annoncez que le casier judiciaire des familles d'accueil sera bientôt systématiquement contrôlé – et l'on apprend ainsi avec surprise que ce n'était pas le cas jusqu'alors...

La Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles sur les enfants (Ciivise), installée par votre majorité, a remis en mars 2022 un rapport contenant plusieurs dizaines de recommandations. Pourquoi ne se traduisent-elles pas dans ce PLF ? Qu'en est-il par exemple de la formation au repérage systématique des violences sexuelles des professionnels en contact avec les enfants, les policiers et les gendarmes en particulier ? Qu'en est-il de l'accès à des soins spécialisés en psycho-trauma pour ces enfants ? Nous déposerons des amendements en ce sens.

L'examen des crédits en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes montre que ce PLF revoit à la baisse les objectifs de qualité de service du 3919, la ligne d'écoute des femmes victimes de violences. Pourtant, 150 000 appels au secours ont été dénombrés en 2021 contre 97 000 en 2019 ; c'est dire que si le budget alloué au 3919 n'a pas formellement baissé, il sera insuffisant pour répondre à des appels en hausse constante parce que le curseur de l'acceptable s'est déplacé. La plateforme 3919 est un outil puissant pour accueillir la parole des femmes ; il est nécessaire de financer des embauches supplémentaires dans ce service, puisqu'en 2023, il faudra augmenter le nombre d'écoutantes et améliorer la qualité de service, notamment les week-ends et en soirée : on constate désormais 250 appels par jour le week-end contre 150 en 2019. Il faudra aussi répondre à la question de ma collègue Karine Lebon portant sur les femmes des territoires d'outre-mer qui ne trouvent pas d'écoutants parlant les langues régionales lorsqu'elles appellent un service localisé, ce que l'on comprend, en métropole. Je rappelle qu'en 2021, 113 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint ; déjà, plus de cent femmes ont été assassinées depuis le 1er janvier 2022. La NUPES a fait campagne sur une proposition claire qui reprend la demande des associations en première ligne : 1 milliard d'euros pour protéger les femmes contre toutes les formes de violence. Nous avons aussi déposé des amendements en ce sens.

Enfin, le sujet du handicap me tient particulièrement à cœur. Nous avons déjà eu l'occasion d'interroger M. le ministre sur l'accompagnement des enfants en situation de handicap, le parcours du combattant que cela représente pour les parents, la précarisation des AESH. Sur l'aspect budgétaire de la question, je rappelle que le montant de l'AAH est aujourd'hui de 956 euros. En dépit des revalorisations récentes, cette allocation reste donc inférieure au seuil de pauvreté. Pourquoi ne pas, enfin, corréler le montant des minima sociaux à l'inflation ?

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