Intervention de Fabienne Colboc

Réunion du mercredi 19 octobre 2022 à 21h35
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabienne Colboc, rapporteure pour avis (Avances à l'audiovisuel public) :

Nous avons à examiner les crédits des six entités de l'audiovisuel public : cinq entreprises – France Télévisions, Radio France, Arte France, France Médias Monde, TV5 Monde – et un établissement public – l'Institut national de l'audiovisuel (INA).

Chacune de ces entités a des spécificités budgétaires, avec des missions aux périmètres très divers et des statuts qui témoignent de l'ouverture de la France à l'international par la diffusion des chaînes à l'étranger, en français et dans une vingtaine de langues. Les audiences de ces chaînes restent élevées, car elles ne cessent de se transformer pour répondre aux attentes des publics et à la concurrence des plateformes. Cependant, la création et l'information fiable et indépendante ont un coût, et le financement de l'audiovisuel public pour ces prochaines années reste un véritable sujet, qui sera au cœur du travail de notre commission.

Lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2022, les dirigeants de l'audiovisuel public ont salué le choix de l'affectation directe du produit d'une ressource fiscale, bien que partagée avec d'autres affectataires. Budgétairement, la réforme a conduit à placer les entités de l'audiovisuel public au même niveau que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale, jusqu'alors seuls bénéficiaires, en dehors de l'État lui-même, d'une fraction du produit de la TVA. C'est une façon de garantir leur indépendance.

La réforme n'a pas encore apporté toute la prévisibilité nécessaire à la conduite des activités de l'audiovisuel public. Elle s'accompagnera, dans les prochains mois, d'une réflexion plus large sur ce qu'attendent les Français du secteur public audiovisuel, sur les missions que le législateur lui assignera et sur les moyens qui y seront associés. Nous comptons pour cela sur les travaux de nos collègues Jean-Jacques Gaultier et Quentin Bataillon, dans le cadre de la mission d'information sur l'avenir de l'audiovisuel public.

Concernant le projet de budget pour 2023, les recettes du compte de concours financiers s'élèveraient à environ 3,8 milliards d'euros, soit une augmentation des dotations attribuées aux six entités de l'audiovisuel public de 190,4 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Sans qu'il y ait de lien direct, la hausse des dotations prévue pour 2023 correspond précisément à la baisse des crédits figurant dans la trajectoire décidée par le Gouvernement en 2018 et mise en œuvre jusqu'en 2022.

La dotation tient compte de la compensation des effets fiscaux de la suppression de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) à hauteur de 78,6 millions d'euros. La perception de la CAP était soumise à la TVA, afin notamment d'exonérer ses bénéficiaires du paiement de la taxe sur les salaires. Depuis la réforme, les entités de l'audiovisuel public doivent s'acquitter de cette taxe, dont le coût est estimé, pour 2023, à 42,6 millions d'euros.

Arte France, l'INA et France Médias Monde ont perdu le droit à déduction de TVA sur leurs achats, notamment de matériels et de programmes audiovisuels. En 2023, ces trois entités devraient voir leurs dépenses s'accroître de 36 millions d'euros.

Ainsi, hors compensation de ces effets fiscaux, l'augmentation de la dotation s'élèverait à 111,8 millions d'euros. Elle couvrirait principalement le financement de l'augmentation tendancielle de l'activité des entités pour les projets en cours, l'accroissement mécanique de leur masse salariale et la compensation des effets de l'inflation pour l'année 2023. À cet égard, France Télévisions et l'INA sont inquiets de l'ampleur de l'augmentation des prix, qui a d'ailleurs débuté en 2022, sans être compensée par l'État. Pour l'INA, le solde restant à financer s'établirait à 3 millions d'euros. Pour France Télévisions, il s'établirait à 30 millions d'euros, même si ce chiffre est plus incertain.

À la différence des années précédentes, les projets annuels de performances (PAP) de ces programmes ne comportent pas toujours le détail des prévisions budgétaires des entités pour 2023. Les projets d'avenants aux contrats d'objectifs et de moyens (COM) devront apporter des précisions à notre commission.

Dans la partie thématique de mon rapport, je présente un état des lieux des collaborations conduites par les entités de l'audiovisuel public, d'une part, en matière de gestion et de moyens, d'autre part, dans le domaine éditorial, conformément aux priorités définies dans les COM pour les années 2020 à 2022.

Beaucoup a été fait, mais je considère que nous pouvons faire davantage. Nous ne devons pas nous contenter d'offres communes qui se juxtaposent aux offres existantes. Nous pouvons aller plus loin dans le rapprochement des réseaux France Bleu et France 3. Du point de vue éditorial, nous avons besoin d'une stratégie commune pluriannuelle et d'une gouvernance dédiée. France Télévisions propose la constitution d'une offre numérique commune à l'audiovisuel public, dotée d'une marque commune. L'INA est volontaire pour engager des coopérations sur de nouveaux usages. France Médias Monde souhaiterait mettre l'accent sur les mutualisations d'infrastructures et de technologies, qui permettent des économies et des partages de savoir-faire. Tous ont de bonnes idées ; ils devront en faire part à la mission d'information, et nous devrons en tirer les conséquences dans les prochains COM.

S'agissant des partenariats, nous devons néanmoins veiller à tenir compte des spécificités de trois des entités de l'audiovisuel public : TV5 Monde est une chaîne multilatérale ; France Médias Monde est constituée de médias internationaux diffusés dans le monde entier ; Arte France est liée statutairement et financièrement par son partenaire allemand.

Pour finir, j'ai souhaité analyser la mobilisation des entités sur le plan de la transition environnementale, plus particulièrement de la sobriété énergétique. Deux types d'actions se dégagent.

D'une part, chaque entité conduit des actions en tant qu'entreprise responsable pour limiter sa propre consommation. Depuis peu, elles formulent également des exigences dans leurs rapports avec les fournisseurs de programmes. Par exemple, la démarche Écoprod permet de calculer l'empreinte carbone de chaque émission.

D'autre part, elles accomplissent des actions de sensibilisation des Français sur leurs antennes, en lien avec leurs missions de service public. Par exemple, le dispositif Écowatt, né d'un partenariat entre France Télévisions et Réseau de transport d'électricité (RTE), permettra aux Français de connaître en temps réel l'état de la tension électrique sur le réseau, ce qui pourra les inciter à réduire leur consommation. Il ne s'agit là que de quelques initiatives ; vous en trouverez le détail dans mon rapport.

J'ai été ravie de travailler sur le sujet de l'audiovisuel public, qui assure des missions essentielles de service public. Je continuerai à m'y intéresser dans le cadre de la mission d'information, qui entamera ses travaux très prochainement.

J'émets un avis favorable à l'adoption des crédits du compte de concours financier Avances à l'audiovisuel public.

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