Intervention de Marie-Charlotte Garin

Réunion du mardi 18 octobre 2022 à 21h35
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Charlotte Garin :

Je m'adresse à vous au nom du député Sébastien Peytavie, qui est toujours hospitalisé.

Vous présentez une augmentation générale du volet santé du PLF 2023 de 159,44 %. Nous rappelons que, d'après le collectif Nos services publics, le budget de l'État pour 2023 est le deuxième le plus marqué par l'austérité de ces vingt dernières années. Ce budget, présenté comme ambitieux, est pourtant très loin de couvrir l'augmentation des dépenses due à l'inflation.

Vous annoncez aussi une augmentation de 1,58 % des crédits alloués au programme 204. Cette aumône de 1,58 % est un trompe-l'œil qui cache la réduction constante du budget de ce programme. Il a été divisé par trois et est passé de 630 millions d'euros de crédits alloués en 2014 à 212 millions en 2023.

De plus, vous avez déclaré vouloir mettre la prévention et l'éducation pour la santé, « au cœur des politiques du programme ». Pourtant, la prévention ne représente que 6 % du budget total pour le volet santé du PLF. Vous reconnaissez vous-même que notre système de santé devra faire face à des mutations profondes. Alors qu'en est-il de la baisse de 2 millions d'euros pour le pilotage de la politique de santé publique ? Comment voulez-vous faire de la prévention une priorité lorsque vous coupez encore plus les vivres aux associations de terrain, qui font pourtant un travail essentiel sur les questions de santé sexuelle ou de prévention des addictions. Plus de cent trente centres qui pratiquaient l'avortement ont fermé en quinze ans. La prévention en matière de santé sexuelle est donc déjà sous-financée.

Quant aux 2 millions d'euros de moins dans le pilotage de la politique de santé publique, ce sont aussi 2 millions d'euros de moins pour la promotion de la santé mentale. Les cas d'anxiété et de dépression sont pourtant en hausse de 25 % dans le monde depuis la pandémie, en particulier chez les jeunes et les femmes.

Aussi, nous regrettons que les crédits du volet santé des populations stagnent et ne représentent que 0,03 % du budget total de la mission Santé. Les besoins sont pourtant réels, notamment dans les départements d'outre-mer où la santé périnatale s'est constamment dégradée ces dernières années. Alors qu'elle est censée constituer l'une des priorités de votre budget.

L'Inserm a mis en évidence la présence de particules fines dès la grossesse dans les organes des fœtus. Nous sommes contaminés avant même notre naissance. Votre budget met une fois de plus en lumière les œillères que porte votre Gouvernement quant à l'impact catastrophique de la pollution sur la santé des femmes et des hommes.

Le rapport sur l'impact environnemental du budget de l'État pour 2023 vient d'être publié. Le constat est sans appel : seul 1 % de ce budget est consacré au financement d'actions dans le domaine de la santé et de l'environnement. Le niveau d'engagement de votre Gouvernement sur ces questions se limite à 1 % !

Comment ne pas émettre de sérieux doutes quant à votre engagement pour la santé environnementale, alors que vous prévoyez une baisse drastique de 10 % des dépenses d'intervention, soit 13 millions d'euros. Ce poste finance pourtant directement les organismes chargés de mener les études et de mettre en place des politiques en matière de santé et d'environnement.

Réduire une fois de plus les budgets de la santé, c'est prendre le risque d'invisibiliser le phénomène de destruction de notre écosystème, qui détruit aussi notre santé. Vous revendiquez souscrire au concept de One Health (une seule santé) de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Vous êtes donc au fait du constat dressé par cette organisation, selon lequel l'augmentation des maladies chroniques est directement liée aux facteurs environnementaux et à nos modes de vie. Les symptômes sont connus : problèmes respiratoires dus à la pollution de l'air ; affections générées par les perturbateurs endocriniens ; troubles et pathologies liés à l'exposition à des pollutions toxiques, etc.

Investir dans une politique de prévention en santé environnementale permettrait pourtant, à terme, de faire des économies. Ainsi, le coût social de l'exposition au bruit, en France, est estimé à 155 milliards d'euros chaque année. Celui de la pollution de l'air serait de l'ordre de 70 à 100 milliards. La malbouffe, quant à elle, coûterait près de 50 milliards d'euros et le mal-logement 30 milliards.

Le Gouvernement ne peut donc prétendre faire de la santé des Françaises et des Français une priorité d'action si aux enjeux environnementaux ne répondent que des demi-mesures et si l'État poursuit son désengagement.

Le budget, qui symbolise l'engagement concret du Gouvernement au-delà des grands discours, ne peut faire l'impasse sur les inégalités sociales ni sur les injustices climatiques, qui frappent les plus vulnérables d'entre nous.

Un budget santé réellement ambitieux est un budget qui sort de la vision étriquée et court-termiste et qui remet le soin et la protection du vivant au cœur de ses préoccupations.

Parce que nous refusons que des coupes budgétaires se fassent une fois de plus sur le dos des Françaises et des Français, nous appelons à de réels investissements pour préserver leur santé et exprimons notre désaccord avec ce budget.

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