Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dominique Potier
Question N° 11412 au Ministère du ministère de l’économie


Question soumise le 19 septembre 2023

Être alerté lorsque cette
question aura une réponse

e-mail
par e-mail

M. Dominique Potier attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la situation du groupe Saint-Gobain PAM. Le chômage partiel cet été pour 1 500 salariés constitue une alerte majeure. C'est un mauvais signal économique et c'est une fragilisation du pouvoir d'achat des salariés qui sont la première richesse de cette entreprise. Au-delà des difficultés conjoncturelles, M. le député affirme à nouveau le caractère stratégique de l'industrie de la canalisation car elle est garante de la souveraineté française et européenne dans la gestion de l'eau. Depuis une décennie, avec l'ensemble des élus lorrains de l'arc républicain, M. le député a attiré l'attention du Gouvernement sur deux risques pour le secteur de l'eau : la perte de contrôle des actifs stratégiques français et la concurrence déloyale de multinationales asiatiques. En dialogue avec la direction du groupe et l'ensemble des syndicats, ils sont profondément convaincus qu'une fragilisation de la filière eau serait extrêmement préjudiciable au vu des enjeux du dérèglement climatique. C'est vrai pour le cycle de l'eau avec des besoins importants de sécurisation pour tenir compte des stress hydriques et du besoin de renouvellement massif des réseaux de distribution afin de stopper le gaspillage d'un cinquième de la ressource. C'est le cas également de l'adaptation au changement climatique, notamment en matière de sécurité incendie. C'est enfin un maillon clé de la décarbonation avec le déploiement de l'énergie hydroélectrique et celui, sensible, de la sécurité nucléaire. Si une part de la solution aux problèmes rencontrés par PAM relève clairement de la responsabilité du groupe Saint-Gobain, l'autre dépend de décisions réglementaires et budgétaires propres à la puissance publique. À cet effet, M. le député se permet de porter au débat dix pistes de travail qui toutes méritent d'être approfondies et précisées. La première est de lancer un grand Fonds bleu pour l'investissement. Au-delà du Plan eau présenté le 30 mars 2023 par le Président de la République et à l'image du Fonds vert destiné à soutenir la performance environnementale, il propose que les collectivités disposent d'un Fonds bleu équivalent à celui engagé par d'autres pays de l'arc méditerranéen. Ce Fonds bleu doit remédier aux inégalités territoriales en matière d'investissement et au risque de diminution des aides dédiées au petit cycle, des fonds des agences de l'eau, des appels à projets eau, Aqua Prêts, etc. La deuxième est de jouer pleinement le bloc communal. Le transfert des compétences eau potable et assainissement aux communautés de communes sera effectif au 1er janvier 2026. On doit accompagner les communes et leurs regroupements afin de déjouer les mécanismes délétères de sous-investissement au cours de cette période transitoire. On doit ainsi imaginer un processus de déclenchement et de prise en charge financière des chantiers les plus urgents dès lors qu'ils font l'objet d'un consensus entre les communes concernées et leurs EPCI. La troisième est d'intégrer les critères RSE aux marchés publics. La loi « climat résilience » du 22 août 2021 qui a mis fin au critère unique du prix dans les marchés publics (achats, prestations et délégations de service public) avec l'obligation d'intégrer des critères techniques et environnementaux entrera en vigueur au plus tard le 23 août 2026. De même, elle oblige les 280 collectivités ayant un volume d'achats annuels supérieur à 50 millions d'euros à se doter d'un schéma de promotion des achats publics socialement et économiquement responsables (SPASER). La loi « industrie verte » actuellement en discussion au Parlement vise à accélérer la mise en œuvre de cette disposition. À l'aune de la nouvelle taxonomie qui doit être établie, l'eau, à l'instar des ENR, doit pouvoir bénéficier de cette mesure de façon prioritaire. La quatrième est d'exiger la réciprocité commerciale. L'article L. 2153-2 du code de la commande publique pour les marchés de fournitures dans les industries de réseaux transpose l'article 85 de la directive 2014/25/UE relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux. Il permet aux entités adjudicatrices de rejeter une offre contenant des produits originaires de pays tiers n'ayant pas conclu avec l'UE un accord assurant un accès comparable et effectif des entreprises de l'UE aux marchés de ces pays lorsque ces produits représentent la part majoritaire de la valeur totale des produits composant l'offre. Cette faculté largement méconnue est aujourd'hui peu mise en œuvre. L'État doit en faire une large publicité auprès des entités adjudicatrices concernées et doit accompagner techniquement ces dernières dans la détermination souvent complexe de l'origine des produits composant l'offre afin de les sécuriser juridiquement dans l'activation de cette clause. L'amendement n° 211 que M. le député porte dans le cadre de l'examen de la loi industrie verte va dans ce sens. La cinquième est de conditionner les aides aux équipements d'irrigation. Les gestionnaires des infrastructures de l'irrigation collective - qui représente 40 % des situations - achètent, avec le soutien d'importantes subventions françaises et européennes, des canalisations bon marché auprès des firmes étrangères, selon des critères qui ne retiennent pas les exigences de qualité et durabilité attendues pour de tels équipements. Le soutien public à l'achat des canalisations par les syndicats d'irrigation devrait s'aligner sur les critères RSE des marchés publics et les critères de réciprocité évoqué aux deux points précédents. La sixième est de mieux conditionner le « bonus climatique ». On observe depuis 2021 un dévoiement de ce dispositif de la direction générale du Trésor applicable aux prêts directs et concessionnels accordés par le ministère de l'économie et des finances dans le cadre de sa politique d'aide au développement et de la promotion des entreprises françaises. En effet, sous couvert de la faiblesse des filières françaises de l'éolien et du solaire, la restriction d'origine française de 70 % et 50 % des montants d'investissement a été revue à la baisse à 50 % et 35 %. Paradoxe, ces taux s'appliquent ainsi aux projets d'équipements d'énergie hydroélectrique voire de réseau d'eau potable dont la France est un des leaders mondiaux. La réduction de la part française a pour conséquence une mise en concurrence inéquitable avec des fabricants qui ne sont pas astreints aux mêmes normes sociales et environnementales que les fabricants français. Les taux de part française de 70 % et 50 % doivent redevenir la norme et seuls les projets relatifs à des secteurs ne présentant pas d'offre française significative doivent pouvoir y déroger. C'est le sens de la question écrite n° 5033 que M. le député a posée le 31 janvier 2023 à M. le ministre délégué chargé de l'industrie. La septième est de consolider l'aide publique au développement française. Celle-ci doit actionner tous les leviers qui sont à sa disposition, afin de rendre plus vertueuses les pratiques des entreprises basées ou ayant une activité dans les pays bénéficiaires. On doit ainsi inscrire normativement l'enjeu de la responsabilité sociale et environnementale pour l'Agence française de développement et ses filiales, et ainsi que pour l'ensemble de leurs actions de financement, garantie, prêts et participations auprès des pays bénéficiaires. De telles dispositions permettraient à l'Agence française de développement et ses filiales de jouer pleinement leur rôle de vigie éthique dans la mondialisation mais aussi de favoriser les entreprises françaises et européennes, parmi les plus vertueuses, notamment celles de la filière eau. C'est le sens de la PPL n° 5211 que M. le député a déposée le 5 avril 2022. La huitième est d'adapter les règles comptables françaises. La transition écologique suppose des investissements considérables qui permettront cependant de générer des économies immédiates de la ressource en eau et des économies financières avec un temps de retour variable. Il conviendrait de les distinguer par de nouvelles règles comptables afin de qu'ils ne viennent pas peser sur le taux d'endettement des investisseurs publics concernés. Il conviendrait également de permettre à ce type d'investissements, à l'instar de ceux en matière de rénovation énergétique, de bénéficier de dispositifs de financement innovants comme l'intracting. La neuvième est de donner la priorité à la décarbonation. L'effort de décarbonation a été partiellement engagé sur deux sites mais l'essentiel reste à réaliser. La transition vers la sortie de l'énergie fossile devra prendre en compte un cahier des charges exigeant en matière de fusion. Elle est néanmoins incontournable pour des raisons économiques sur les coûts de production et de valorisation commerciale. Sur le plan technique et financier, cela suppose une accélération majeure qui doit prioritairement être soutenue dans le cadre du programme de verdissement de l'industrie française. Enfin, la dixième est de conforter l'École française de l'eau. La France est un leader mondial dans les sciences et les technologies ayant traits au cycle de l'eau. De la connaissance des sols à celle de l'alimentation santé, en passant par la métallurgie, elle dispose d'un réseau de laboratoire publics et privés qui fonde une part de sa compétitivité et l'oblige en termes de coopération internationale. M. le député propose de doubler les crédits publics afférents pour renforcer la recherche fondamentale et appliquée de ce qui constitue aujourd'hui et demain l'excellence de « l'École française de l'eau ». Ces dix pistes de travail pourraient utilement être débattues dans le cadre d'une réunion, sous l'autorité du Gouvernement, de tous les partenaires de la filière eau ainsi que les élus territoriaux et des parlementaires concernés autour d'une conférence des solutions. Aussi, outre une telle rencontre qu'il appelle de ses vœux, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend adopter pour dépasser les effets d'une baisse conjoncturelle de la commande publique et ceux de l'inflation afin de consolider la filière eau française.

Réponse

Cette question n'a pas encore de réponse.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion