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Cécile Untermaier
Question N° 11575 au Ministère de l’éducation nationale


Question soumise le 26 septembre 2023

Mme Cécile Untermaier attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la lutte contre le harcèlement scolaire, qui touche de plus en plus de jeunes en France. Selon les données du ministère de l'éducation nationale, en 2021-2022, 46 % des élèves déclaraient avoir été victimes d'au moins une violence de façon répétée durant l'année scolaire et 6,7 % des élèves signalaient cinq atteintes répétées ou plus. Enfin, seuls trois élèves sur dix, victimes d'une violence, en ont parlé à quelqu'un. Les effets sont dévastateurs sur la santé mentale des enfants et adolescents, allant parfois jusqu'au suicide. Pourtant, la France accuse un retard considérable, comparativement à d'autres pays, notamment ceux d'Europe du Nord. Les carences des dispositifs actuels sont nombreuses : sous-déclaration et sensibilisation limitée au harcèlement scolaire, manque de données scientifiques précises, culture du silence, manque de formation des personnels scolaires, manque de soutien psychologique pour les victimes, intervention insuffisante des autorités scolaires, difficultés institutionnelles, manque de coordination entre institutions etc. Les mesures annoncées par le Gouvernement, telles que le bannissement des cyberharceleurs des réseaux sociaux et le changement d'établissement des auteurs de harcèlement, avec le décret n° 2023-782 du 16 août 2023, ont fait l'objet d'expressions sceptiques sur leur efficacité. Si changer d'établissement l'enfant harceleur est, sur le plan moral, moins injuste qu'un changement d'établissement pour l'enfant victime, une telle mesure n'est pas sans effets négatifs dénoncés par les thérapeutes spécialisés sur ce sujet. Enfin, la réalité d'un transfert est difficile à mener à bien. Il importe d'organiser dans le cadre d'un protocole la prise en charge de l'enfant harcelé et de travailler avec lui sans remettre en question ses expressions. Les dispositions proposées par des professionnels de la santé mentale doivent être explorées sans délai avec, en particulier, la création d'une plate-forme en ligne nationale de signalements anonymes de cas de harcèlement scolaire et des violences sexuelles ainsi que d'un observatoire dédié, des campagnes de sensibilisation dans les écoles et les médias et des actions obligatoires sur ce sujet dans chacun des établissements scolaires, associant les enfants, premiers concernés, à leur élaboration. Une charte du comportement éthique devrait pouvoir être signée par chacun des collégiens et enfants des écoles primaires. Cette question passe par la mobilisation de toute la société et un changement profond de mentalité de même nature que celui qui est tenté pour lutter contre les violences intrafamiliales. Il importe enfin que le travail des inspections académiques ne soit plus celui de faire les calculs arithmétiques pour supprimer ou non le nombre de classes, mais bien de porter des projets d'épanouissement et de bien-être au sein de classes dont l'effectif plus réduit facilite leur mise en œuvre. Aussi, elle lui demande de bien vouloir lui préciser si ces quelques remarques peuvent prospérer, en particulier s'agissant d'une meilleure connaissance de la réalité des faits, de l'association des enfants au sein de chaque établissement à la résolution de ce fléau et de la concrétisation de cet engagement par l'adoption d'une charte éthique allant au-delà du règlement intérieur de l'établissement.

Réponse émise le 26 mars 2024

Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse a fait de la lutte contre le harcèlement en milieu scolaire sa priorité. Plus généralement, le bonheur des élèves à l'École est au cœur de la politique éducative et une attention toute particulière est portée dans ce cadre à la santé mentale des élèves. Plusieurs mesures du plan interministériel de lutte contre le harcèlement à l'École visent directement à renforcer la prise en compte de toutes les situations de harcèlement et à mieux répondre aux faits de harcèlement les plus graves : renforcement des moyens humains, formation de tous les personnels, généralisation du programme de lutte contre le harcèlement à l'École (pHARe) qui inclut un protocole de traitement des situations, sensibilisation des parents et des élèves, passation d'un questionnaire d'autoévaluation par les élèves à partir du CE2 et renforcement des sanctions envers les élèves harceleurs. La prévention par les pairs a démontré son efficacité. Elle repose à travers pHARe sur deux dispositifs : - les collégiens et lycéens ambassadeurs qui, après formation, interviennent dans les classes pour sensibiliser leurs camarades et peuvent donner l'alerte lorsqu'ils ont connaissance d'une situation ; - le prix « Non au harcèlement » qui consiste à faire produire par et pour les élèves des supports (affiches et vidéos) de communication et de prévention autour de la problématique du harcèlement. Chaque année, les lauréats sélectionnés par le jury de la communication du prix « Non au harcèlement » participent à la conception de la campagne nationale de sensibilisation. Ainsi, cette année, ce sont des collégiens de l'académie de Paris qui ont inspiré le scénario du film « Si le jeu blesse, il faut que cela cesse ». Le ministère met à disposition ce clip vidéo accompagné d'un livret pédagogique pour permettre aux équipes éducatives d'animer des séances de sensibilisation. En outre, tous les élèves signent en début d'année scolaire le règlement intérieur qui fixe l'ensemble des règles et des principes de vie de leur établissement, notamment le respect des principes du vivre ensemble, et les mesures de prévention contre le harcèlement. S'agissant des signalements des faits de harcèlement, notamment à caractère sexiste et sexuel, le plan interministériel centralise vers la plateforme nationale d'appels 3018, initialement dédiée aux violences numériques, toutes les situations de harcèlement en milieu scolaire. Les usagers bénéficient donc désormais d'un « guichet unique » pour les signalements au niveau national. Les élèves et leur famille y trouvent des conseils et peuvent, au besoin, être orientés vers des structures de soutien aux victimes en mesure de les accompagner. L'exclusion de l'élève harceleur ne préserve pas l'élève victime d'un risque de persistance du harcèlement en dehors de l'enceinte scolaire, dans la ville ou le village, un club sportif ou encore sur les réseaux sociaux. Afin que chacun poursuive sa scolarité dans les meilleures conditions, une telle décision est accompagnée et suivie dans la durée par l'ensemble des équipes éducatives et en relation avec les familles dont l'information régulière est primordiale. Les personnels des services sociaux et de santé du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse sont mobilisés dans le traitement des situations de harcèlement dans toutes leurs dimensions (prévention, repérage, accompagnement, sanction) ; ils peuvent être amenés à recommander aux familles, dans l'intérêt des enfants, une prise en charge extérieure par des personnels de santé ou bien des associations d'aide aux victimes partenaires de l'École. S'agissant du cyberharcèlement, le ministère coordonne une mobilisation collective interministérielle et contribue activement au dialogue entre les pouvoirs publics et les plateformes pour rendre effective la protection des mineurs en ligne. S'agissant de la santé mentale, le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse y porte une attention soutenue. Ainsi, depuis la rentrée de septembre 2023, deux adultes dans chaque établissement sont formés au secourisme en santé mentale et chaque établissement doit se doter d'un protocole en santé mentale qui permet de mobiliser tous les acteurs de l'établissement. En mobilisant ainsi l'ensemble des communautés éducatives et en consacrant des moyens très significatifs pour prévenir, repérer et résoudre le plus tôt possible les situations de harcèlement, le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse a initié le changement de mentalité afin qu'aucune situation ne demeure non résolue et que le climat scolaire soit, partout, plus favorable aux apprentissages.

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