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Olivier Falorni
Question N° 11944 au Ministère du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche


Question soumise le 10 octobre 2023

M. Olivier Falorni alerte Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur l'expérimentation animale et plus particulièrement des élevages de Mézilles dans l'Yonne et Gannat dans l'Allier. Selon une enquête réalisée par deux ONG, Anima au Danemark et Camp Beagle au Royaume-Uni, des milliers de chiens élevés aux États-Unis d'Amérique par l'entreprise d'élevage américaine Marshall BioRessources (qui a racheté l'élevage de Mézilles en 2021) seraient vendus aux laboratoires français en transitant par le Danemark. Ils seraient retenus dans des élevages à Mézilles et Gannat avant d'être remis à des laboratoires afin d'être soumis à des tests. Selon les dernières statistiques du ministères de l'enseignement supérieur et de la recherche en 2016, près de 2 millions d'animaux ont été sujets aux expérimentations des laboratoires français. En 2021, la situation est la même. La réglementation européenne (2010/63/UE) est pourtant claire. Elle définit la mise en application du dispositif réglementaire sur la démarche éthique et la classification du degré de sévérités des procédures. Elle consolide la règle des 3R imposée à tous les États membres de l'Union européenne : remplacer l'expérimentation animale dès que possible ; réduire le nombre d'animaux utilisés et raffiner les procédures, c'est-à-dire employer des méthodes qui adoucissent la douleur de l'animale. Dans les deux élevages cités précédemment, les chiens sont soumis à des injections de produits, des prises de sang, des prélèvements de tissus, d'organes, des ponctions, des biopsies, des gavages, des tests cutanés, cardiaques et cérébraux. Les femelles reproductrices enchainent les grossesses sans discontinuer. Les races beagle et golden retriever sont les plus utilisés en raison de leur docilité et de leur sensibilité. De plus le beagle partage avec la race humaine une plus grande proximité génétique que d'autres animaux. Ce qui rend les expérimentations d'autant plus cruelles. Enfin, la Commission européenne a créé en 2015 une base de données, nommée ALURES. Elle sert au regroupement de statistiques sur le niveau de souffrance reçu par les animaux dans le cadre des expérimentations. Il apparaît que les laboratoires ne respectent pas ces exigences ce qui rend difficile les rapports d'inspection publique permettant au service de l'État de contrôler, afin d'assurer l'application de la directive (2010/63/UE). Les associations de défense animale demandent depuis des années à avoir accès aux informations concernant l'élevage de Mézille. Les données compilées par l'association One Voice mettent en évidence un niveau de souffrance plus élevé dans le pays pour les animaux utilisés à des fins d'expérimentation, à l'inverse des pays scandinaves comme la Finlande qui tendent à limiter au maximum les expérimentations causant trop de souffrances aux animaux. La France et le Royaume-Uni sont les plus gros « consommateurs » de chiens de laboratoire, avec plus de 4 000 procédures par an chacun. Il aimerait connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour combattre les souffrances subis par les animaux de laboratoires et lui demande de tout mettre en œuvre pour que la législation soit respectée en matière d'exploitation et d'expérimentation.

Réponse émise le 12 mars 2024

L'utilisation d'animaux à des fins scientifiques est une activité fortement réglementée. Elle n'est possible qu'après l'obtention d'un avis favorable du comité d'éthique en expérimentation animale et l'autorisation du projet par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Malgré les progrès importants des méthodes alternatives et les efforts de recherche pour remplacer le recours aux animaux, ce recours reste une nécessité scientifique comme l'a rappelé la Commission européenne (réponse du 25 juillet 2023 de la Commission européenne à l'Initiative citoyenne européenne Save cruelty free cosmetics – commit to a Europe without animal testing). Le nombre d'animaux utilisés à des fins scientifiques, entre les années 2016 et 2021, est resté stable (- 1 %). Une analyse plus détaillée montre qu'au cours de cette période, le nombre d'animaux utilisés pour des recherches liées à la conservation des espèces a augmenté d'un facteur 3, tandis que le nombre d'animaux utilisés en recherche biomédicale (recherches fondamentale, translationnelle et réglementaire) a diminué de 4 %. Effectivement, la France importe des chiens en provenance des États-Unis d'Amérique. Les données statistiques montrent qu'en 2021, 603 chiens (23 % du total de cette année) provenaient des États-Unis soit deux fois moins qu'en 2016 (1 261 chiens). Le ministère considère que la présence et le développement d'élevages de chiens sur le territoire français contribuent non seulement à l'objectif de souveraineté nationale en recherche biomédicale mais également à préserver le bien-être de ces chiens en évitant les contraintes de leur transport par avion. La réglementation impose la collecte annuelle des données statistiques relative à l'utilisation d'animaux dans des procédures expérimentales puis leur transmission à la Commission européenne. Tous les ans, les services du ministère assurent la collecte, auprès de l'intégralité des laboratoires français, des données, leur synthèse, leur transmission à la Commission européenne et leur diffusion auprès du public. Les données transmises à la Commission européenne sont également adressées à l'association One Voice citée. Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ne clôt cette enquête que lorsqu'il dispose de 100 % des réponses et veille ainsi à ce que chaque laboratoire fournisse les données prévues par la réglementation européenne. En 2021, les procédures classées au niveau sévère en France représentent 14 % pour l'ensemble des espèces et 4 % pour les chiens. Le Centre français pour les 3R (FC3R) a initié, en lien avec le Comité national de réflexion éthique en expérimentation animale (CNREEA), un travail sur ce sujet. Une analyse de ce constat est nécessaire avant de définir des mesures : l'application des critères de classements sont-ils appliqués de façon similaire par les laboratoires français et européen ? Les pratiques de recherche sont-elles différentes en France ? Le ministère apporte son appui et travaille avec le FC3R et le CNREEA sur ce constat. À la différence de la Finlande, la France a une position forte dans les domaines de la médecine humaine ou vétérinaire avec plusieurs leaders mondiaux grâce à ses nombreux laboratoires de recherche et à ses nombreuses entreprises privées dans le secteur des biotechs. Ces acteurs contribuent à la souveraineté nationale dans le domaine de la santé. Le ministère veille à ce que leurs activités soient réalisées dans le respect de la réglementation française et européenne. Cette réglementation est la plus protectrice du bien-être des animaux au niveau mondial. Par ailleurs, le ministère soutient le FC3R, notamment ses appels d'offre permettant de limiter le recours aux animaux (2022 – remplacement : alternatives aux modèles animaux et produits d'origine animale en recherche ; 2023 – approches numériques). L'utilisation justifiée et nécessaire des animaux à des fins scientifiques, la garantie de leur bien-être et le rayonnement de la recherche française sont des préoccupations majeures du ministère.

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