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Sébastien Peytavie
Question N° 14042 au Ministère du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire


Question soumise le 26 décembre 2023

M. Sébastien Peytavie alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la nécessité de protéger la santé des agriculteurs et agricultrices pouvant être exposés à la tuberculose bovine. On assiste, en effet, à une hausse des cas de tuberculose bovine ces dernières années en France. Si la France détient le statut « indemne de la maladie » depuis 2001, des centaines de foyers persistent toutefois chaque année dans certaines régions, notamment la Nouvelle-Aquitaine, qui subit une augmentation des cas depuis 2004. La Dordogne a ainsi été en 2021 le département le plus touché, avec 27 foyers et l'apparition de nouveaux variants. M. le ministre a annoncé en avril 2023 le renforcement des mesures visant à prévenir la tuberculose bovine, ces mesures comprenant une formation à la biosécurité, une revalorisation de l'indemnisation des abattages diagnostiques, un test de dépistage ou l'expérimentation d'un vaccin sur la faune sauvage. Si ces mesures sont à saluer, M. le député constate une absence d'initiatives concernant l'accompagnement médical et psychologique des agriculteurs et agricultrices. La tuberculose bovine peut, en effet, se transmettre aux êtres humains par voie respiratoire ou par un contact direct d'une blessure avec une lésion tuberculeuse. Les éleveurs de bétail, travailleurs des abattoirs ou vétérinaires, dont l'immunité est réduite en raison de maladies chroniques ou du recours à certains traitements médicamenteux, sont d'autant plus vulnérables. Si les cas de transmission aux êtres humains restent rares, la tuberculose bovine peut avoir un impact sérieux et fréquent sur la santé mentale des agriculteurs. Ceux pour lesquels tout ou une partie du cheptel a dû être abattu souffrent de répercussions économiques et psychologiques graves, impactant sévèrement leur santé et leur bien-être. Car malgré les indemnisations prévues en cas d'abattage, les répercussions d'une telle mesure, aussi bien pratiques (difficultés de trésorerie, perturbation du travail) que symboliques (culpabilité, incertitude), peuvent générer des risques psychosociaux importants, que le Gouvernement doit pleinement prendre en compte. Il faut rappeler à ce titre que la deuxième cause du stress des agriculteurs relève de difficultés financières ou de baisses de revenus. Le taux de suicide en France était également 2 à 3 fois supérieur dans les territoires ruraux touchés par la crise de la « vache folle », selon l'INSERM. Il est, de fait, urgent de remettre de l'humain dans l'accompagnement des agriculteurs touchés pour sortir de l'isolement. Plus largement, cela implique également d'augmenter les moyens dédiés aux contrôles sanitaires et à la médecine du travail des agriculteurs, dans un contexte de pénurie de médecins qui frappe également ce secteur. La crise du coronavirus a été révélatrice de l'importance de ne pas sous-estimer les cas de contamination entre la flore sauvage, les animaux d'élevage et les êtres humains. Prendre soin de la population dans une perspective de pleine santé implique également de prendre soin de notre environnement et de celles et ceux les plus exposés aux zoonoses. Dans ce contexte, M. le député exhorte M. le ministre de ne pas oublier la santé de celles et ceux qui contribuent à alimenter notre population au quotidien. Il souhaiterait savoir quelles mesures additionnelles, en matière de prévention, de suivi médical et psychologique, d'indemnisation et de moyens, il a prévues afin de protéger la santé et la santé mentale des agriculteurs pouvant être impactés par les cas de tuberculose bovine.

Réponse émise le 27 février 2024

La tuberculose bovine est une maladie soumise à surveillance et à déclaration obligatoire selon le règlement (UE) 2016/429 du 9 mars 2016 relatif aux maladies animales transmissibles. La France a été déclarée officiellement indemne de tuberculose bovine en 2001, garantissant un niveau sanitaire favorable ainsi que des débouchés commerciaux fluides pour les élevages de bovins. Toutefois, la gestion de cette maladie reste complexe : les voies de transmission, la faune sauvage, les différentes pratiques d'élevage et les spécificités territoriales sont autant de facteurs qui influencent la diffusion de cette zoonose. Aussi, pour atteindre l'objectif d'éradication de la maladie, il est nécessaire de maintenir un niveau intense de mobilisation des différents acteurs sur le long terme. Même si le risque de transmission à l'être humain est faible, il convient de préserver au mieux la santé et la sécurité des professionnels exposés à ce risque zoonotique (risque biologique). L'article R. 4422-1 du code du travail oblige l'employeur à prendre des mesures de prévention visant à supprimer ou à réduire au minimum les risques résultant de l'exposition aux agents biologiques, conformément aux principes de prévention énoncés à l'article L. 4121-2 du même code. Ces mesures de prévention consistent à rompre la chaîne de transmission le plus en amont possible, en agissant prioritairement sur le réservoir, puis sur l'exposition des professionnels et enfin au niveau du travailleur lui-même. Afin de pouvoir accompagner au mieux les éleveurs (salariés ou non-salariés agricoles) et les personnes chargées de la prévention des risques professionnels, le ministère chargé de l'agriculture a réalisé, en lien avec l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), la caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA), le ministère chargé du travail et l'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), une fiche synthétique sur la tuberculose bovine détaillant l'agent responsable de la maladie, les modes de transmission ainsi que les symptômes chez l'animal et chez l'être humain. Les mesures de prévention et la conduite à tenir en cas de contaminations sont ensuite précisées. Cette fiche fera l'objet d'une mise à jour en 2024. Le ministère chargé de l'agriculture a également initié, depuis 2022, en lien avec santé publique France (SpF), la CCMSA, les agences régionales de santé (ARS) et les cellules de lutte contre la tuberculose (CLAT) des différents centres hospitaliers universitaires (CHU), une instruction visant à clarifier les liens et les circuits d'information entre les services de santé animale et les services de santé humaine dans le cadre de l'enquête autour d'un cas animal de tuberculose bovin. L'objectif de ce dispositif est de pouvoir s'assurer de l'absence de contamination à l'être humain en proposant aux éleveurs concernés un suivi médical par les médecins de la MSA et le personnel hospitalier des CLAT. De plus, il demeure indispensable d'accentuer les efforts sur la qualité du dépistage, afin de conserver le statut officiellement indemne du territoire et ainsi continuer à pouvoir commercialiser sans contraintes supplémentaires pour les éleveurs des bovins en Europe et vers les pays tiers. En 2023, près de 16 000 éleveurs de bovins ont été concernés par une surveillance en élevage de la maladie et 92 foyers de tuberculose ont été identifiés sur le territoire national, la Dordogne restant le département le plus impacté avec 21 élevages déclarés infectés. La surveillance sanitaire des élevages puis les modalités d'assainissement des élevages infectés doivent être mises en œuvre en limitant au mieux le stress des éleveurs. C'est pourquoi une procédure d'assainissement des élevages infectés dit abattage sélectif, limitant le nombre d'animaux abattus tout en conservant une sécurité sanitaire satisfaisante, a été développée en alternative à l'abattage de la totalité du troupeau. Pour accompagner au mieux les agriculteurs impactés par des cas de tuberculose bovine, la cellule pluridisciplinaire mise en place dans chacune des 35 caisses de MSA, dans le cadre du plan de prévention du mal-être en milieu agricole peut être mobilisée. Ses objectifs sont d'apporter une écoute, d'analyser les situations de détresse et de développer un réseau d'aides et d'accompagnement adaptés à la situation de chaque agriculteur. La cellule pluridisciplinaire active l'ensemble des services de la MSA : action sociale, santé au travail, prévention des risques professionnels, médecine conseil, prévention santé, relation de service, services réglementaires, contentieux et professionnels de santé indépendants. Ils mettent en commun leurs compétences et leur expertise pour apporter les solutions nécessaires afin de désamorcer les situations de crise : - le risque psycho-social est pris en charge par les services de santé ; - l'action sociale peut proposer des prestations d'accompagnement individuel ou collectif ; - la relation-adhérent s'assure de l'accès à toutes les prestations de sécurité sociale ou d'aide sociale qui peuvent être mobilisées selon les cas. En lien avec cette cellule pluridisciplinaire, les comités de suivi ou de pilotage de la lutte contre la tuberculose bovine mis en place dans les départements sont invités à signaler les éleveurs en difficultés aux dispositifs d'aide locaux : les cellules « réagir » gérées par les chambres d'agriculture, « solidarité paysan » ou « faire face ensemble », de manière à identifier et prendre en charge les besoins psychologiques et sociaux éventuels. De plus, le dispositif Agri‘écoute est mis en place dans les 35 caisses de MSA, permettant aux bénéficiaires d'être écoutés, entendus et d'activer des pistes de solution pour améliorer leur situation et, par là même, de réguler le niveau de détresse psychologique. Dans le cadre de la loi du 2 août 2021 qui renforce la prévention en santé au travail, plusieurs mesures ont été mises en œuvre pour améliorer la prise en charge médicale des travailleurs agricoles, notamment la délégation de certaines missions des médecins du travail aux infirmiers. Ce processus permettra, à terme, de dégager du temps médical pour une meilleure prise en charge des travailleurs du régime agricole. Par ailleurs, les caisses de MSA proposent des aides complémentaires pour accompagner les adhérents en situation difficile. Elles peuvent notamment concerner l'accès aux loisirs et aux vacances, l'aide à la poursuite d'études secondaires ou supérieures pour les enfants, la prise en charge de frais de santé, par exemple des consultations chez un psychologue. Elles peuvent également concerner les projets ayant pour but d'améliorer les conditions de travail ; c'est le cas de l'aide financière simplifiée agricole (AFSA) ou de l'aide financière simplifiée exploitant (AFSE), qui permettent de bénéficier d'un soutien financier ainsi que d'un appui technique de la part d'un conseiller en prévention MSA pour réaliser les travaux qui permettent cette amélioration. La MSA peut aussi verser des aides financières exceptionnelles pour faire face à des charges courantes. Enfin, afin de limiter l'insécurité financière liée aux élevages infectés, une procédure permettant le versement d'une avance de 50 % des montants d'indemnisations fixés par voie d'expertise est régulièrement mise en place dans les départements concernés. Cela permet aux éleveurs de conserver une trésorerie et d'envisager plus sereinement le rachat d'animaux en vue d'un repeuplement de leur élevage.

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