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Philippe Latombe
Question N° 1627 au Ministère de la culture


Question soumise le 27 septembre 2022

M. Philippe Latombe appelle l'attention de Mme la ministre de la culture sur la réponse donnée par ses services à la question n° 572 qu'il a posée le 2 août 2022 et qui concerne le paiement de droits de propriété intellectuelle pour la seule mise à disposition d'un poste de radio, d'une télévision ou d'un lecteur CD dans une location saisonnière. Il est obligé de constater que cette longue réponse ne répond aucunement aux problématiques très précises posées dans sa question, notamment sur la position de la ministre concernant la jurisprudence constante de la CJUE (la plus récente du 2 avril 2020, Affaire C-753/18), laquelle précise que cette société civile n'est pas fondée à réclamer le paiement de droits de propriété intellectuelle pour la seule mise à disposition d'un poste de radio, d'une télévision ou d'un lecteur CD dans une location saisonnière. Il n'est pas plus répondu au fait que, n'ayant aucune prérogative de puissance publique, les agents de la SACEM n'ont aucunement le droit de pénétrer de leur propre initiative dans des lieux privés non ouverts au public et de tels comportements pourraient donc relever de la violation de domicile par manœuvres, délit réprimé par l'article 226-4 du code pénal. Il lui rappelle que la SACEM est une société civile et que le ministère, dans son approche, doit observer à son égard une approche objective et juridiquement étayée.

Réponse émise le 13 décembre 2022

Saisi de quatre questions écrites concernant le paiement des redevances à la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) par les propriétaires d'hébergements touristiques, le ministère de la culture y a apporté une réponse commune. Compte tenu de la jurisprudence importante en matière de « communication au public », il a ainsi été rappelé qu'aux termes d'un arrêt du 7 décembre 2006, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a retenu que la distribution d'un signal au moyen d'appareils de télévision par un établissement hôtelier aux clients installés dans les chambres de cet établissement, quelle que soit la technique de transmission du signal utilisée, constituait un acte de communication soumis au droit d'auteur. Les juridictions françaises et européennes ont largement confirmé cet arrêt en admettant le paiement de redevance de droit d'auteur et de droits voisins dans le cas d'établissements hôteliers, et plus largement d'établissements intégrant une solution d'hébergement avec retransmission d'œuvres au moyen d'appareils de télévision dans les chambres. Cette solution n'est pas remise en cause par l'arrêt de la CJUE du 2 avril 2020 qui, loin de concerner le paiement de redevance de droit d'auteur par des locations saisonnières, concerne le cas particulier de location de véhicules équipés de postes de radio. Outre sa portée réduite, le sens même des motifs de cette décision se situe dans le prolongement de la jurisprudence constante de la Cour depuis son arrêt du 7 décembre 2006. En effet, si la CJUE retient que les sociétés de locations de véhicules ne réalisent pas un acte de communication au public d'œuvres soumis à redevance, elle prend soin de souligner que cette interprétation ne vaut que pour l'activité de location de véhicules qui « permet de capter, sans aucune intervention additionnelle de la part de la société de location, la radiodiffusion » et qu'elle n'est pas transposable aux activités « par lesquelles des prestataires de services transmettent délibérément à leur clientèle des œuvres protégées, en distribuant un signal au moyen de récepteurs qu'ils ont installés dans leur établissement » en renvoyant, pour la confirmer, à la jurisprudence précitée concernant les hébergements équipés de télévision. Ni la portée, ni le sens de cet arrêt ne remettent donc en cause l'approche dégagée par la Cour depuis son arrêt du 7 décembre 2006. Toutefois, au-delà du bien-fondé de l'intervention de la SACEM, la question de l'adéquation du montant des redevances réclamées demeure une préoccupation importante pour les professionnels du secteur. À cet égard, les discussions engagées par la SACEM avec les acteurs de l'hébergement touristique, et les fédérations de gîtes ruraux en particulier, se poursuivent en vue de proposer dès 2023 un système de tarification plus adapté à l'économie du secteur et une centralisation des démarches de paiement des redevances. S'agissant des contrôles opérés par les agents de la SACEM afin de recouvrer ces rémunérations, il y a lieu de rappeler que ces derniers doivent s'effectuer dans le strict respect des règles en vigueur, en ce compris le principe d'inviolabilité du domicile. En l'état actuel du droit, aucune disposition n'autorise ou ne permet aux agents assermentés désignés par des organismes de gestion collective, tels que la SACEM, de déroger à ce dernier principe. Aussi, lorsqu'ils sont amenés à effectuer des constats au sein de structures d'hébergement, les agents de la SACEM recueillent, en pratique, le consentement de l'utilisateur et fixent un rendez-vous en amont pour ce faire. Ces agents sont, pour rappel, agréés par le ministre chargé de la culture et prêtent serment devant les tribunaux judiciaires de leur résidence dans les conditions prévues à l'article R. 331-1 du code de la propriété intellectuelle. Ils sont habilités à constater toute infraction aux dispositions du code de la propriété intellectuelle et sont assermentés pour établir des procès-verbaux. Cet agrément peut toutefois être refusé ou retiré en cas de condamnation à une peine correctionnelle pour des faits incompatibles avec les fonctions à exercer. Le ministère de la culture demeure particulièrement vigilant quant au respect des contrôles effectués par les agents assermentés et n'a, à ce jour, pas eu connaissance de faits ou plaintes pouvant relever de la violation de domicile, lesquels justifieraient un retrait d'agrément et/ou un signalement au titre de l'article 40 du code de procédure pénale.

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