Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Charles Fournier
Question N° 16831 au Ministère du ministère auprès du Premier ministre


Question soumise le 9 avril 2024

Être alerté lorsque cette
question aura une réponse

e-mail
par e-mail

M. Charles Fournier alerte Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement sur la décision du préfet de la Vienne quant à l'indemnisation des habitants membres du groupe de proposition et du comité méthodologique de l'assemblée citoyenne et populaire mise en place par la ville de Poitiers. La ville de Poitiers a instauré une assemblée citoyenne et populaire permanente et délibérative composée de 100 habitantes et habitants tirés au sort. Entre les journées grand public, un groupe de proposition, chargé de travailler plus finement les sujets et un groupe de méthodologie, chargé de l'organisation, se réunissent pour travailler en comité restreint. Dans une délibération en date du 26 juin 2023, la mairie de Poitiers a proposé d'indemniser les habitants membres de ces 2 groupes. Dans cette délibération la ville prévoit d'autoriser le versement d'une indemnité de 13,74 euros par heure et par habitant membre de ces instances, habitant dont le quotient familial est inférieur ou égal à 1 000 euros. Elle utilise pour cela le statut de collaborateur occasionnel du service public et complète cette indemnisation d'une prise en charge des frais afférents. Cependant, et c'est l'objet de la question de M. le député, le préfet de la Vienne a demandé à la maire de Poitiers de retirer la délibération du 26 juin 2023 proposant d'indemniser les citoyens de l'assemblée citoyenne et populaire de la ville de Poitiers. La décision conteste le recours au statut de collaborateur occasionnel du service public, considérant que celui-ci ne peut pas être reconnu aux membres de l'assemblée citoyenne et populaire et qu'il ne s'agit pas là d'une contribution effective à l'activité de service public. Le préfet conteste également le remboursement des frais, considérant qu'il n'existe là aucune base légale. Ce recours, s'il est possible d'en comprendre la lecture exclusivement juridique et réglementaire, pose de nombreuses questions. Il diffère d'une part, des décisions des préfets de Paris, Rennes Métropole ou encore Nancy sur le même sujet. D'autre part, il s'inscrit en contradiction avec les lignes directrices de la participation édictées par le ministère des solidarités qui acte lui-même le principe de la rétribution des personnes participant aux dispositifs de participation. Cela va également en contradiction avec les orientations du Centre interministériel de la participation citoyenne, rattaché au ministère de la transformation et de la fonction publiques, qui a récemment publié un guide de conception des démarches de participation citoyenne qui recommande également de prévoir une indemnisation des citoyens participants. Les orientations précitées ne constituent pas un cadre légal mais elles indiquent la volonté politique de répondre à ce besoin exprimé par de nombreuses collectivités, de faciliter la participation des habitants en les indemnisant lorsque cela paraît nécessaire pour le temps consacré à cette participation. C'est même devenu une pratique courante et le plus souvent, une lecture bienveillante des textes en vigueur a été appliquée. Il convient également d'ajouter que le Conseil d'État a précisé dans l'arrêt d'assemblée du 19 juillet 2017 (rec. n° 403928) « qu'il incombe en particulier à l'autorité administrative qui organise une consultation dans les cas qui relèvent de l'article L. 131-1 du code des relations du public et de l'administration d'en déterminer les règles d'organisation (...) l'autorité administrative prenne, en fonction de cet objet et du périmètre du public consulté, toute mesure relative à son organisation (...) ». On peut en conclure que les modalités financières relèvent des modalités fixées par l'autorité administrative. Au-delà de ces appréciations juridiques et règlementaires, cela soulève la question plus politique d'une juste participation. En effet, trop d'habitants se sentent éloignés des dispositifs de participation car cela impliquerait d'y consacrer un temps et des moyens dont ces citoyens ne disposent pas toujours. Il en résulte des dispositifs bien trop inégalitaires composés principalement d'habitants disposant de temps et de capacités financières le permettant. Cette recherche d'une plus grande équité et d'une meilleure représentativité de ces dispositifs implique d'ouvrir la voie à des réponses comme celle de l'indemnisation et de la prise en charge des dépenses individuelles afférentes. Au niveau international, la voie d'une juste rémunération des citoyens s'est déjà largement diffusée. Le rapport « Participation citoyenne innovante et nouvelles institutions démocratiques de l'OCDE » (2020) indique ainsi que 57 % des initiatives participatives au sein des pays de l'OCDE proposent une indemnisation financière des participants, sous forme pécuniaire dans 44 % des cas, contre 43 % ne proposant aucune indemnisation. Au-delà du bénéfice pour l'inclusion des publics éloignés, les collectivités font également remonter à M. le député que l'indemnisation apporte souvent un gage supplémentaire de légitimité du travail des citoyens participants, car elle traduit une forme d'engagement et d'exigence de la collectivité vis-à-vis de ces citoyens. Enfin, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) dispose d'un cadre permettant cette indemnisation au travers du décret n° 2021-1245 du 29 septembre 2021, en application des articles 4-3 et 12 de l'ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental. Cela a notamment été utile pour mettre en place les conventions citoyennes sur le climat et la fin de vie. Il est grand temps de sécuriser les collectivités territoriales qui innovent en matière de participation citoyenne et ont besoin de disposer d'une législation sans ambiguïté le permettant. La situation connue par la ville de Poitiers en raison de l'interprétation très stricte du cadre actuel et les solutions parfois incertaines auxquelles les collectivités ont recours indiquent combien il est nécessaire de proposer des solutions stables et universelles pour rendre possible ce renouveau démocratique. Il l'interroge donc sur les moyens d'encourager la participation citoyenne juste et sur l'opportunité de mettre en place un cadre clair et accessible pour les collectivités territoriales pour indemniser, lorsque cela est nécessaire, les citoyens associés à des dispositifs locaux de participation ; il l'invite également à s'interroger sur le sens à accorder à ce recours et les moyens d'envisager une lecture plus souple et bienveillante de la belle initiative portée par la ville de Poitiers.

Réponse

Cette question n'a pas encore de réponse.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion