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Joël Giraud
Question N° 3655 au Ministère auprès du ministre de la transition écologique


Question soumise le 29 novembre 2022

M. Joël Giraud appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports sur les obstacles au développement de l'offre de Trenitalia France dans les couloirs transalpins entre la France et l'Italie. Depuis son arrivée sur le territoire national, le groupe Trenitalia souhaite contribuer concrètement à la consolidation des synergies et des axes de coopération franco-italiens dans le secteur stratégique du rail et renforcer ainsi l'attractivité des territoires français. Dans ce cadre, Trenitalia France serait disponible à évaluer des solutions permettant de desservir une gare supplémentaire au sein de son offre à grande vitesse, sans impacter les temps de parcours actuels. Néanmoins, des barrières à l'entrée persistent et limitent les bénéfices attendus tant sur le plan économique que sur celui de la transition écologique. De fait, de nombreux travaux de maintenance et renouvellement de l'infrastructure ferroviaire, ainsi que les retards causés par les contrôles aux frontières, limitent la capacité et la fréquence des trains FrecciaRossa 1000. Ces limites risquent d'avoir un impact majeur sur la continuité de l'offre de Trenitalia France dans les années à venir. Parallèlement, sur le plan économique, la compétitivité et l'accessibilité du rail sont victimes d'un modèle de tarification des péages qui demeure peu incitatif. L'exemple italien démontre que la libéralisation du rail a incité le gestionnaire du réseau (RFI) à baisser ses tarifs de 45 % entre 2013 et 2015. Bien que le niveau des péages italiens soit parmi les plus bas d'Europe, RFI a affiché en 2020 une hausse des revenus liés aux péages de 4,3 % en raison de la forte augmentation de l'offre liée à la concurrence. Ce bilan témoigne de la compatibilité de la baisse du prix des péages avec une hausse des recettes. De surcroît, les bénéfices de cette dynamique ont conduit à une nette augmentation de la part du train sur les principaux axes du pays, au détriment de moyens de transport plus polluants, en passant de 36 % à 70 %. Le marché ferroviaire longue distance représente 8 milliards d'euros en France, soit environ 60 milliards de passagers-km. Une réduction du prix des péages à peu près égale à celle appliquée en 2022 au prix de l'essence, c'est-à-dire 20 %, correspondrait à un investissement de l'État de 1,6 milliard d'euros. Néanmoins, une telle action permettrait une augmentation de 20 % du nombre de passagers ferroviaires - soit 12 milliards de passagers-km qui privilégieraient ce mode de transport à la route avec un impact positif sur la consommation d'essence. Il souhaiterait donc connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour remédier aux difficultés causées par les obstacles mentionnés.

Réponse émise le 11 juillet 2023

La loi n° 2018-515 pour un nouveau pacte ferroviaire, promulguée le 27 juin 2018, a réformé en profondeur le secteur ferroviaire en permattant, notamment, l'ouverture à la concurrence du marché domestique de voyageurs. Ainsi, depuis la fin de l'année 2020 pour les services librement organisés (SLO), toutes les entreprises ferroviaires disposent d'un droit d'accès au réseau ferroviaire national et ont pu commander des sillons dès 2019. La société Trenitalia France représente le seul opérateur concurrent de la SNCF sur le marché intérieur français des services librement organisés, exploitant la ligne à grande vitesse Paris-Lyon depuis décembre 2021, désormais à raison de 5 allers-retours quotidien, dont deux jusqu'à Milan. La société Renfe s'apprête à ouvrir, pour sa part, au mois de juillet deux nouvelles lignes à grandes vitesse entre Barcelone et Lyon ainsi qu'entre Madrid et Marseille. D'autres projets d'opérateurs alternatifs sont également en cours. Dans son étude sur l'ouverture à la concurrence des services de transport ferroviaire de voyageurs publiée en juillet 2022, l'Autorité de régulation des transports (ART) souligne que les redevances d'accès au réseau ferroviaire perçues auprès des entreprises ferroviaires sont significativement plus élevées par train.km en France que dans les autres pays européens pour les services voyageurs, en particulier pour les services voyageurs librement organisés. Toutefois, l'ART souligne que l'emport moyen des trains en France est le plus élevé d'Europe. Rapportés au nombre de passagers.km et au nombre de tonnes.km pour ce qui concerne le fret, les écarts entre niveaux de redevance d'accès au réseau ferroviaire apparaissent de ce fait plus faibles entre pays européens. Sous cet angle, la tarification de l'infrastructure apparaît comme une barrière à l'entrée relative. Le ministère chargé des transports, dans le respect des compétences dévolues respectivement au gestionnaire d'infrastructure et au régulateur, souhaite néanmoins ouvrir la réflexion sur la tarification pour examiner dans quelle mesure elle pourrait être adaptée pour favoriser le développement du trafic ferroviaire, sans bouleverser pour autant l'équilibre économique de SNCF Réseau. En tout état de cause, la tarification actutelle offre d'ores et déjà aux opérateurs de transport de voyageurs opérant sur le marché des services librement organisés deux dispositifs dont l'objectif est de favoriser le développement de l'offre : l'aide au développement permet une réduction de péage pour deux ans et la tarification différenciée offre la possibilité de négocier une partie du péage pour deux ans également et une année supplémentaire optionnelle, après analyse par le gestionnaire d'infrastructures du plan d'affaire de l'entreprise. Ces deux dispositifs ne sont pas cumulables et l'opérateur remplissant les conditions pour y accéder est libre de choisir le plus avantageux. Leur mise en œuvre est assurée sous l'égide du régulateur. A la suite de sa demande, Trenitalia France est ainsi le premier opérateur à bénéficier de la tarification différenciée, avec des taux de réduction de la redevance de marché publiés au document de référence du réseau de 37% la première année et de 16% la deuxième année à compter du démarrage de ses circulations commerciales en décembre 2021. Au demeurant, par un avis conforme en date du 9 février 2023, le régulateur a validé les principes de la tarification pour la période 2024-2026 qui reconduisent les dispositifs d'aides. Parmi les principaux freins à l'ouverture à la concurrence évoqués dans son étude et qui concernent souvent l'accès aux matériels roulants, l'Autorité de régulation des transports (ART) pointe le processus de répartition des capacités, qui doit évoluer pour offrir davantage de visibilité aux opérateurs. Notamment, l'ART regrette qu'aucun accord-cadre de capacités d'infrastructure ne soit en vigueur, en France, pour des services de transport de voyageurs. SNCF Réseau a engagé la consultation du secteur afin d'établir un modèle d'accord-cadre. L'ART mène également une consultation. Une proposition de modèle pourrait donc être établie prochainement. S'agissant des perspectives d'évolution de l'offre de Trenitalia, SNCF Réseau étudiera toute demande de desserte d'une gare supplémentaire qui sera formulée par l'entreprise. Conformément aux règles de tracé des sillons, l'ajout de cet arrêt devrait rendre nécessaire l'allongement du temps de parcours initial dans un but de robustesse du sillon attribué. Par ailleurs, sur les trains internationaux, les impératifs liés à la coordination horaire au point frontière rendent complexes le tracé des sillons. Enfin, comme le prévoit le processus réglementaire d'allocation des sillons, SNCF Réseau veille à échanger avec l'ensemble des opérateurs et notamment Trenitalia sur les impacts des travaux prévus dans les années à venir, en particulier sur l'axe de la Maurienne, tout en s'attachant à les coordonner au mieux afin d'en limiter autant que possible les effets sur les circulations commerciales.

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