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Cécile Untermaier
Question N° 3785 au Ministère de la justice


Question soumise le 6 décembre 2022

Mme Cécile Untermaier attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le malaise grandissant des acteurs de la justice au sein de l'institution judiciaire. Les magistrats, avocats, greffiers et personnels de justice, sous le coup de drames touchant des professionnels exemplaires, manifestent leur inquiétude de ne pas exercer correctement leur travail et leur fatigue immense. Cette souffrance a été exprimée dans une tribune publiée le 23 novembre 2021, signée par 3 000 professionnels, qui s'élèvent désormais à 8 000, créant une onde de choc dans la justice. Les États généraux de la justice présidés par Jean-Marc Sauvé, menés d'octobre 2021 à juillet 2022, ont confirmé un diagnostic très sévère, concluant à « l'état de délabrement avancé » de la justice et à la nécessité d'une réforme systémique, passant par l'augmentation des effectifs, une adaptation réussie du numérique et une meilleure organisation du travail du juge. Ce constat a fondé un budget en hausse de 8 % pour 2023. Et, si tout passe d'abord par une hausse du budget, il convient tout autant de repenser de manière la plus précise la réorganisation de la justice de sorte qu'elle devienne plus lisible dans ses actions et plus pertinente dans ses délais. Les violences intra-familiales ne cessent d'endeuiller le quotidien de tous et d'entraîner l'enfance au cœur de ce traumatisme tragique. Face à cette inquiétude et ce désespoir ainsi exprimés, elle lui demande de bien vouloir lui préciser d'une part quel dispositif est mis en œuvre pour garantir une approche systémique des réformes à venir, sur le long terme et d'autre part, s'agissant plus particulièrement des violences intra-familiales, les actions spécifiques qu'il entend mener, notamment sur la question d'une formation de jugement spécialisée dans chaque tribunal judiciaire, en lien avec les différents acteurs luttant contre ce fléau.

Réponse émise le 11 avril 2023

Avec une enveloppe budgétaire sans précédent de 9,6 milliards d'euros, le ministère de la Justice bénéficiera en 2023 d'une nouvelle augmentation de 8 % de son budget, soit 710 millions d'euros supplémentaires qui viendront abonder le service public de la justice et permettront d'améliorer les conditions de travail des agents, mais également de poursuivre les chantiers déjà amorcés, notamment le développement des projets numériques. Le projet de loi d'orientation et de programmation qui sera présenté au printemps au parlement ambitionne d'accentuer encore cet effort en portant les crédits du Ministère de la justice à environ 11 miliards d'euros en 2027 soit une augmentation de 7,5 milliards d'euros en cinq ans. La justice ne pouvant fonctionner sans des femmes et des hommes œuvrant quotidiennement à son service, ce sont 10.000 emplois supplémentaires qui seront créés d'ici 2027, soit une hausse de 11 % en cinq ans. Le ministère de la Justice bénéficiera ainsi de la création de 1.500 postes de magistrats et de 1.500 postes de greffiers pour renforcer les effectifs des juridictions. L'octroi de moyens supplémentaires aux magistrats est au cœur des préoccupations du ministère de la Justice, qui achève actuellement une réflexion sur l'évaluation de la charge de travail. Ainsi, la direction des services judiciaires est engagée dans le développement d'un outil de pondération des affaires, destiné à permettre une meilleure répartition des moyens humains sur le territoire national en tenant compte de l'évolution des besoins des magistrats en fonction des contentieux et de l'activité juridictionnelle. En outre, les juridictions sont soutenues dans leur travail par le renforcement de l'équipe autour du magistrat : avec 141 assistants spécialisés et 937 juristes assistants en poste au 1er janvier 2023, la pérennisation de ces fonctions de soutien a permis une réduction drastique des stocks des dossiers en attente dans les contentieux de proximité. Le renforcement annoncé de cette équipe juridictionnelle vise à répondre avec plus d'acuité encore à la solitude exprimée par la « tribune des 3000 », et à permettre de réduire le temps nécessaire pour rendre une décision, afin de recentrer le juge sur son cœur de métier, comme le préconise le rapport du comité sur les États généraux de la justice, remis en avril 2022. S'agissant enfin de la problématique de la lutte contre les violences intra-familiales, la création d'une « formation de jugement spécialisée dans chaque tribunal judiciaire » correspond déjà au quotidien des 164 tribunaux judiciaires répartis sur le territoire national. Afin de mieux répondre aux situations de violences intra-familiales, les juridictions ont mis en place des filières de l'urgence, caractérisées par le rôle moteur de l'autorité judiciaire, tant dans la détection en amont des situations à risque que dans la prise en charge des victimes, s'appuyant notamment sur des protocoles locaux avec les services d'enquête et les associations d'aide aux victimes. La célérité de l'institution judiciaire en la matière s'illustre à la fois par une politique d'audiencement et d'exécution prioritaire en matière pénale, la mise en place de circuits courts pour les ordonnances de protection et les bracelets anti-rapprochement, et l'élaboration de systèmes de transmission d'informations entre les différents services des juridictions, au siège et au parquet. La plupart des juridictions organisent également la réunion d'instances de concertation dédiées, associant aux acteurs juridictionnels leurs partenaires extérieurs impliqués dans le suivi particulier des situations de violences intra-familiales particulièrement signalées, pour parvenir à une prise en charge plus efficace. Conformément aux annonces de Madame la première Ministre, le Ministère a engagé des travaux importants pour structurer et donner corps à ces postes spécialisés. La représentation nationale sera étroitement associée à la mise en oeuvre rapide de ces postes.

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