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Patrick Hetzel
Question N° 5324 au Ministère de la justice


Question soumise le 7 février 2023

M. Patrick Hetzel interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur les carences d'effectifs et de moyens de l'institution judiciaire. Alors que s'était ouvert le 5 janvier le procès d'un attentat déjoué à cinq jours de la présidentielle de 2017, la cour d'assises spéciale de Paris a renvoyé ce procès à une « date ultérieure », faute de pouvoir pallier l'absence d'un magistrat par manque d'effectifs. Aucun magistrat suppléant n'avait été désigné pour siéger, ce qui est incompréhensible. Un procès ne peut pas se poursuivre si la cour n'est pas au complet. Et il n'est pas possible, dans l'urgence, de faire venir un magistrat n'ayant pas assisté au débat. Aussi, dans l'impossibilité de poursuivre ses travaux, il a été décidé du renvoi de ce procès qui ne devrait pas se tenir avant plusieurs mois. La Présidente a considéré la situation « inadmissible ». Une avocate de la Défense parle de « naufrage pour la justice ». Face à un procès d'une telle ampleur et d'une telle gravité, il lui demande les raisons pour lesquelles il n'a pas été prévu d'assesseur supplémentaire pour le bon fonctionnement des services de la justice.

Réponse émise le 14 novembre 2023

Avec une enveloppe budgétaire sans précédent de 9,6 milliards d'euros, le ministère de la Justice a bénéficié en 2023 d'une nouvelle augmentation de +8 % de son budget suivant les deux précédentes hausses de +8 % déjà accordées en 2022 et 2021. Cet effort se poursuivra en 2024 avec un budget qui dépassera pour la 1ère fois la barre symbolique des 10 milliards d'euros, en atteignant 10,1 milliards en loi de finances. La justice ne pouvant fonctionner sans des femmes et des hommes œuvrant quotidiennement à son service, ce sont 10 000 emplois supplémentaires qui seront créés d'ici 2027, soit une hausse de 11 % en cinq ans, au service, entre autres, du renfort des effectifs en juridictions, de l'armement des nouveaux établissements pénitentiaires et des services de la protection judiciaire de la jeunesse. Le ministère de la justice bénéficiera de la création de 1 500 postes de magistrats, 1 800 postes de greffiers et de 1100 postes d'attachés de justice. L'octroi de moyens supplémentaires aux magistrats est donc au cœur des préoccupations du ministère de la justice, qui par ailleurs, achève actuellement une réflexion d'envergure entamée dans le cadre des États généraux de la justice quant à l'évaluation de la charge de travail, aux fins de répartir ces nouveaux moyens de manière optimale. S'il est difficile de rattraper en quelques mois des décennies d'insuffisance, les recrutements de magistrats ont connu une augmentation historique grâce à 470 postes offerts aux auditeurs de justice et 80 postes offerts au concours complémentaire pour l'année 2023. Les emplois de contractuels ont quant à eux été pérennisés. S'agissant plus particulièrement des effectifs de magistrats de la cour d'appel de Paris, l'activité à laquelle elle doit faire face a justifié l'octroi de moyens supplémentaires en 2022 puisque la CLE a connu une évolution positive à hauteur de 14 postes créés, répartis comme suit : au bénéfice du siège, deux postes de président de chambre, six postes de conseiller et trois postes de juge placé ; au bénéfice du parquet, un poste d'avocat général et deux postes de substitut placé. C'est ainsi que le nombre total de postes localisés est passé de 365 en 2021, en ce compris les magistrats placés, à 379 en 2022, dont 285 au siège et 94 au parquet. S'agissant des effectifs réels en juridiction au 1er septembre 2023, les effectifs du siège de la cour bénéficient de trois magistrats affectés en surnombre, afin de prévenir l'érosion des effectifs en cours d'année et de consolider les capacités de jugement. Les effectifs du parquet général de Paris connaissent quant à eux deux vacances dont l'une relative au poste à caractère intuitu personae de secrétaire général, qui fera l'objet d'une nomination dès que le calendrier des transparences le permettra. Par ailleurs, Monsieur le premier président de la cour d'appel de Paris et Monsieur le procureur général près ladite cour disposent respectivement de 37 et 18 magistrats placés afin de renforcer les juridictions du ressort. Là encore, les effectifs réels au siège seront supérieurs à ceux prévus par la CLE, qui mentionne 33 magistrats placés. Ces affectations en surnombre ont vocation à anticiper la surcharge prévisible d'activité liée à l'organisation d'évènements sportifs d'ampleur comme les jeux olympiques et paralympiques de 2024. L'absence de désignation d'un magistrat suppléant à l'audience criminelle qui devait se dérouler du 5 janvier au 3 février 2023 devant la cour d'assises de la Seine spécialement composée pour traiter d'infractions de nature terroriste s'inscrit enfin dans une situation conjoncturelle exceptionnelle tenant à la convocation concomitante de huit autres sessions d'assises (dont une en matière terroriste) sur cette période de cinq semaines. Pleinement conscients de la particulière complexité et de l'éminente sensibilité des contentieux relevant de la compétence du tribunal judiciaire et de la cour d'appel de Paris, notamment en matière terroriste, les services du ministère de la Justice resteront pleinement mobilisés et continueront de porter une attention toute particulière à la situation des effectifs du tribunal judiciaire de Paris, notamment dans le cadre des futurs mouvements. J'ajoute enfin que la cour d'appel de Paris se verra renforcée d'ici à 2027 de 184 magistrats, 258 greffiers et 154 attachés de justice supplémentaires grâce aux recrutements sans précédent prévus par la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice.

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