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Lise Magnier
Question N° 8378 au Ministère de la justice


Question soumise le 30 mai 2023

Mme Lise Magnier appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargée de l'enfance, sur l'égalité parentale en cas de séparation des parents. En France, 12 % des enfants, dont les parents sont séparés, bénéficient de la résidence alternée contre 48 % en Suède, 40 % en Italie, 37 % en Belgique et 30 % en Norvège, alors même que de nombreuses études internationales attestent que la résidence alternée est le mode de garde le plus bénéfique pour les enfants et leurs familles. Il est indispensable que les parents, en cas de séparation, puissent dépasser leurs désaccords pour le bien-être de leurs enfants. Au-delà du bien-être des enfants et de la cellule familiale, la résidence alternée va également dans le sens d'une meilleure répartition de la charge mentale et matérielle de la famille entre les deux parents. C'est également assurer concrètement l'égalité entre les femmes et les hommes en garantissant à chacun des parents, quel que soit son genre, les mêmes droits de fait. C'est pourquoi elle lui demande de faire de la résidence alternée un principe de base dans le mode de garde des enfants, qui ne pourrait être contourné que dans l'intérêt de l'enfant.

Réponse émise le 8 août 2023

Le droit en vigueur promeut largement la résidence alternée puisqu'il impose, d'ores et déjà, au juge aux affaires familiales d'envisager la résidence alternée en première intention et de la favoriser. Ainsi, l'article 373-2-9 du code civil, d'une part, dispose que « la résidence de l'enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux. » et, d'autre part, permet au juge de mettre en place une résidence alternée à l'essai, à titre provisoire, et laisse à ce dernier toute latitude pour en fixer les modalités et prévoir le cas échéant une progressivité. Il en résulte que la résidence alternée progresse de manière significative en France. A titre illustratif, en 2016, 400 000 enfants mineurs vivaient en résidence alternée (source INSEE Première n° 1728, janvier 2019). Selon l'étude de l'INSEE n° 1841 de mars 2021, en France hors Mayotte, 480 000 enfants mineurs partagent en 2020 de manière égale leur temps entre les domiciles de leurs parents séparés. La résidence alternée égalitaire a ainsi progressé de 20 % en quatre ans, de 2016 à 2020. Plusieurs obstacles se dressent toutefois face à la généralisation du principe de la résidence alternée. D'une part, le juge est lié par les demandes des parties. Or, dans la grande majorité des cas, les parents s'accordent sur les modalités d'organisation de la résidence des enfants et ne choisissent pas la résidence alternée. En cas de désaccord, les parents sollicitent rarement la résidence alternée. Le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes relevait ainsi, dans son rapport en date du 22 novembre 2017, que « Si la résidence des enfants est majoritairement fixée aujourd'hui chez les mères, c'est parce que les pères ne la demandent pas. En effet, 93,4 % des décisions des juges aux affaires familiales sont rendues conformément à la demande des pères et 95,9 % conformément à la demande des mères. ». Le juge étant lié par les demandes des parties, il appartient donc aux parents et à leurs conseils de solliciter davantage la résidence alternée s'ils le souhaitent. D'autre part, la résidence alternée paritaire ne peut être un modèle unique pour tous. Elle peut être adaptée à la situation de l'enfant dans certains cas et ne pas l'être dans d'autres. La résidence alternée doit être le mode privilégié en particulier lorsque chacun des parents a eu un investissement réel auprès de l'enfant du temps de la vie commune et que les conditions de vie de chacun le permettent afin de maintenir, autant que faire se peut, la stabilité du cadre de vie de l'enfant après la séparation de ses parents. En revanche, elle ne sera pas adaptée en cas d'éloignement géographique ou bien dans un contexte de violences. C'est pourquoi, lorsque le juge rejette une demande de résidence alternée, ce refus est motivé par l'intérêt de l'enfant (en particulier au regard de l'éloignement entre les domiciles des deux parents, de l'âge de l'enfant, des mauvaises relations entre les parents, de l'indisponibilité d'un des deux parents,  des conditions matérielles, ou des capacités éducatives insuffisantes d'un des deux parents). Il est essentiel de conserver la possibilité pour le juge de prendre en compte la réalité de chaque situation familiale et d'apprécier au cas par cas l'intérêt de l'enfant afin d'ajuster sa décision aux multiples configurations familiales. Les règles existantes permettent dès lors déjà de répondre à la demande des parents à ce titre. Aucune évolution législative n'est donc envisagée à ce jour.

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