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Danielle Simonnet
Question N° 8692 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 6 juin 2023

Mme Danielle Simonnet interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer suite au drame ayant touché trois mineurs qui ont été percutés par une voiture de police alors qu'ils étaient en scooter sur les ambitions du ministère pour empêcher tout drame du même type de se reproduire. Le jeudi 13 avril 2023, aux alentours de 23 h 50, trois jeunes, âgés de 13 ans, 14 ans et 17 ans et circulant à scooter ont été percutés par une voiture de police, entraînant la chute du scooter sur un plot de stationnement, à l'angle des rues de Bagnolet et Lesseps (20e arrondissement de Paris). Ce drame a eu lieu au cours d'une course poursuite, dans laquelle les jeunes auraient été menacés avec l'arme de service d'une des policières, avant que celle-ci n'essaie d'ouvrir la portière afin de déstabiliser le scooter, sans succès, pour finalement les renverser à l'aide de la technique du « parchocage ». Les témoins présents sur place ont contredit la version de la préfecture qui indiquait « une perte de contrôle du véhicule » puisqu'ils dénoncent que les policiers les auraient « percutés volontairement ». Alors que cette dernière avait saisi le service du traitement judiciaire des accidents, même si les témoins se sont immédiatement manifestés sans que les policiers ne prennent aucune déposition ou contact. L'IGPN a finalement été saisie par l'avocat de la famille et la conductrice a été placée en examen et poursuivie pour « violences avec arme ayant entraîné une incapacité de travail et faux en écriture publique par personne dépositaire de l'autorité publique ». La technique du « parchocage », aussi appelée « contact tactique », consistant pour les policiers à percuter un deux-roues lors d'une poursuite pour le stopper, est interdite en France. Le préfet de police, M. Laurent Nunez, a lui même rappelé son interdiction et a jugé cette pratique « totalement irresponsable ». De l'aveu même de M. le ministre, on est face à « une intervention qui n'est pas conforme à ce que le droit et la déontologie permettent ». Pourtant, ce n'est pas la première fois qu'elle est employée et de nombreuses poursuites par la police, notamment dans les quartiers populaires où la BAC est très présente, aboutissent souvent à des accidents aux conséquences dramatiques. Depuis de nombreuses années, différents observateurs des droits humains et sociologues alertent sur ces pratiques policières, notamment en quartier populaire où le droit et la déontologie semblent laisser place à l'arbitraire et au racisme. De plus, le manque de formation des policiers doit inquiéter : au lieu des 12 mois de formation avant 2015, les policiers recrutés aujourd'hui n'en font plus que 8, de plus la moyenne aux concours diminue puisqu'un 8 à l'examen suffit pour être accepté. À cela, vient s'ajouter le manque de rappel du cadre légal, entraînant une dérive des pratiques jusqu'à la non-conformité avec le droit et la déontologie. Mme la députée interroge M. le ministre : quelles sont les ambitions du ministère en matière de formation des élèves policiers et de formation continue puis des policiers ? Quelles mesures compte-t-il prendre pour relever le niveau de la formation, notamment en rallongeant la durée initiale de celle-ci, mais aussi en renforçant les formations tout au cours de la carrière permettant le rappel du cadre légal d'exercice ? Elle souhaite enfin savoir ce qu'il prévoit pour que l'interdiction du « parchocage » soit respectée et qu'un tel drame ne puisse se reproduire.

Réponse émise le 22 août 2023

Le 14 avril 2023 vers 23 h 50, rue des Balkans à Paris (20e), à la suite de multiples infractions routières, les policiers locaux ont souhaité procéder au contrôle de trois individus qui circulaient sur un scooter. Le conducteur, refusant de s'arrêter, a pris la fuite et a emprunté la rue de Bagnolet à contresens. Dans des conditions que l'enquête devra établir, le conducteur a perdu le contrôle de son véhicule et percuté un plot de stationnement. Les trois individus sur le scooter ont été transportés en milieu hospitalier puis interpellés. L'inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie de cette enquête qui est toujours en cours. Un des trois policiers, mis en examen, a été placé sous contrôle judiciaire fin avril. La technique consistant à percuter un véhicule deux-roues lors d'une poursuite, pour le stopper, est interdite en France. Cette règle est à la fois intégrée au cursus de formation des policiers et fait l'objet de rappels auprès des personnels actifs. Le ministère de l'intérieur et des outre-mer porte une attention toute particulière au recrutement des policiers et à la qualité de la sélection des candidats postulant dans les métiers de la police et à la formation des nouvelles recrues. L'importance qui s'attache à la formation des policiers, comme des gendarmes, est expressément soulignée dans le rapport annexé à la loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur. La durée de la formation des gardiens de la paix est désormais de 24 mois, composée de 12 mois en école et de 12 mois en qualité de gardien de la paix stagiaire dans un service de police. L'abaissement de la durée initiale de formation à 8 mois avec un allongement de la durée de stage à 16 mois, n'a pas été jugé probant, et ne s'est donc étendu que de juin 2020 à fin 2021. Tout au long de la période en école, les apprentissages professionnels et les entraînements sportifs ou en techniques d'intervention ont pour objectif que les élèves acquièrent les savoir-faire et savoir-être nécessaires à l'exercice de missions opérationnelles. Les élèves qui ne remplissent pas ces conditions sont présentés au jury d'aptitude professionnelle qui peut décider du redoublement de leur période scolaire. Il s'agit ainsi de garantir la capacité professionnelle des futurs policiers à exercer un métier difficile et exigeant. Les stagiaires intègrent ensuite, pour une durée de 12 mois, un programme qui s'appuie sur deux piliers pédagogiques : des modules d'enseignement à distance et un accompagnement sur des situations clés. Ensuite, les directions des services actifs de police prennent le relais pour poursuivre la formation initiale des futurs policiers qui sont titularisés, après évaluation, à la fin de cette deuxième phase de formation. La récente création, en juillet 2023, de l'académie de police – direction chargée du recrutement et de la formation de la police natio, ale -, qui s'inscrit dans le cadre de la réforme de la police nationale, lance une nouvelle étape dans la politique de formation ambitieuse, moderne et adaptée aux défis à venir menée par la police nationale. Elle va notamment permettre de mieux coordonner la formation des policiers et de renforcer les outils de formation, avec en particulier le recrutement de 1 500 formateurs sur 5 ans. Par ailleurs, l'appareil de formation de la police nationale s'adapte avec notamment l'intensification du recrutement des formateurs aux techniques et à la sécurité en intervention. Plusieurs nouvelles écoles et centres de formation seront en outre créés d'ici à 2027, notamment un centre de formation au maintien de l'ordre. D'ores et déjà, comme précédemment indiqué, la formation initiale des gardiens de la paix a été rénovée, comme annoncé par le Président de la République au terme du « Beauvau de la sécurité ». Depuis mai 2022, la période d'apprentissage en école a été portée à 12 mois – contre 8 précédemment -, auxquels s'ajoutent 12 mois de formation d'adaptation au premier emploi, en qualité de gardien de la paix stagiaire dans un service. Cette nouvelle architecture permet de bénéficier de plus de temps sur les compétences les plus importantes mais également d'intégrer la préparation à la qualification d'officier de police judiciaire. La mise en œuvre d'une formation continue plus dense interviendra dans le courant du second semestre 2023.

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