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Bastien Lachaud
Question N° 9166 au Ministère du ministère de l’intérieur et des outre-mer


Question soumise le 20 juin 2023

M. Bastien Lachaud interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les restrictions à la liberté de circulation des supporters du Paris Saint-Germain dans le cadre de leur déplacement à Troyes, ce dimanche 7 mai 2023. Au début de ce mois de mai 2023, la direction du club de football du Paris Saint-Germain Football Club (PSG) a fait l'objet d'un mouvement de contestation mené par une partie de ses supporters, appartenant notamment à l'association « Collectif Ultras Paris » (CUP). Dans ce contexte, la direction du PSG, a pris la décision d'annuler l'ensemble des places réservées aux membres du CUP, soit 450 billets, pour la rencontre du championnat de Ligue 1 opposant le PSG au club de l'Espérance Sportive Troyes Aube Champagne (ESTAC) au stade de l'Aube, à Troyes, ce dimanche 7 mai 2023 à 20 h 45. Les fondements d'une telle décision, prise par la direction du PSG en sa qualité de gestionnaire de la billetterie du parcage visiteur dans le cadre des rencontres ayant lieu à l'extérieur, interrogent cependant. À en croire les informations fournies par la presse, dans ses conditions générales de vente (CGV), le PSG précise dans la partie « infractions à l'extérieur du stade » que « tout comportement en relation avec les activités du PSG » et « susceptible de nuire à autrui, de porter atteinte à l'image du PSG ou à l'honneur de leurs dirigeants ou personnels » entraînera « si bon semble au PSG et selon la gravité des manquements, la suspension ou la résiliation du titre d'accès ou le refus d'accès aux matchs de plein droit ». C'est sur ce fondement qu'aurait été prise la décision d'annuler 450 billets réservés aux membres du CUP. La légalité d'une telle disposition pose toutefois question, dès lors qu'elle a été prise à titre collectif, visant un groupe de personnes au seul titre de leur appartenance à une association et non pas des individus sur la base de faits précisément établis. L'annulation a été signifiée aux personnes concernées sur la base d'un simple courriel, ne comportant aucune mention d'un motif et, a fortiori, d'une motivation circonstanciée liée à un comportement individuel précis. Si l'annulation des billets attribués aux membres du CUP interroge, la mobilisation des services de l'État et des forces de police pour empêcher leur déplacement à Troyes soulève des questions plus graves encore. Selon le récit livré par la presse, malgré l'annulation de leurs billets, cinq cars de supporters ont quitté Paris pour rejoindre Troyes ce dimanche 7 mai 2023 dans l'après-midi. Un premier groupe de trois cars auraient été contrôlés et bloqués par des unités de gendarmerie placés en faction à la sortie de l'autoroute A5 arrivant de Paris, en présence du sous-préfet de l'Aube. Un second groupe de deux autres cars, ayant emprunté une autre sortie, aurait réussi à rejoindre la ville de Troyes. Un cortège de cent cinquante supporters parisiens se dirigeant vers le stade aurait été intercepté aux environs de 20 heures par les forces de police et confinés sur le parking du stade, encadrés par quatre camions de gendarmerie et une centaine de gendarmes et policiers. Les deux groupes de supporters auraient finalement regagné Paris dans la soirée, dans le calme et sans qu'aucun incident n'ait été signalé. La légalité d'une telle opération de police imposant une restriction à la liberté de circulation de plusieurs centaines de personnes pose question. Il semble que la préfecture de l'Aube n'ait pris aucun arrêté encadrant la venue des supporters parisiens. Selon les informations données par la presse et le témoignage de plusieurs supporters présents sur les lieux, le sous-préfet et les membres des forces de l'ordre présents à la sortie de l'autoroute A5 n'auraient pas été mesure de communiquer le fondement juridique de leurs actions et d'expliquer aux supporters pourquoi ils se trouvaient empêchés de poursuivre leur chemin. Ils auraient refusé d'échanger avec les avocats du CUP accompagnant les supporters. Il faut observer, par ailleurs, que les personnes ayant vu leurs billets annulés par le PSG, ne faisant l'objet d'aucune interdiction de déplacement ou de stade, elles sont libres de circuler sur le territoire, de se rendre dans la ville de Troyes et même à proximité du stade. L'annulation d'un billet par une société privée, annulation au fondement par ailleurs discutable, ne peut valoir à elle seule interdiction de se déplacer et de circuler librement, ni, à plus forte raison, justifier le déploiement des moyens de l'État. Un dispositif de sécurité est naturellement justifié pour empêcher des individus de forcer l'entrée d'un stade sans billet ou de se livrer à des débordements et à des actes répréhensibles. Il ne peut en revanche être question de priver arbitrairement des personnes de toute liberté de circulation. Les faits survenus le 7 mai 2023 à Troyes ajoutent un nouvel élément à un contexte plus large de restrictions des libertés publiques, des dérives (restrictions à la liberté de circulation, interdictions de se rassembler et de manifester, placements en garde à vue sans fondement apparent) que de nombreux observateurs français et internationaux ont dénoncé et jugé inquiétantes, notamment lorsqu'elles ont frappé des personnes impliquées dans le mouvement de contestation sociale contre la réforme des retraites portées par l'actuel gouvernement. La multiplication de ces faits, contraires au droit et qui attentent aux libertés des citoyens et citoyennes, pose question et appelle à la plus grande vigilance. C'est pourquoi il souhaite apprendre sur quels fondements juridiques précis s'appuient les restrictions à la liberté de circulation imposée aux supporters du Paris Saint-Germain ce 7 mai 2023 et dans quelles circonstances exactes les moyens de l'État, de la gendarmerie et des forces de police, ont été déployés.

Réponse émise le 23 avril 2024

S'agissant de la rencontre Troyes-PSG du 7 mai 2023 comptant pour la 34ème journée du championnat de France de football de Ligue 1, il n'appartient pas à la police nationale de juger du bien-fondé de la décision prise par la direction du club de football du Paris-Saint-Germain d'annuler les billets réservés par les 450 supporteurs ultras du Collectif Ultras Paris (CUP). La Division nationale de lutte contre l'hooliganisme (DNLH) de la Direction nationale de la sécurité publique (DNSP) a participé aux réunions de préparation de la rencontre avec la préfecture de l'Aube, les services de police territoriaux, notamment le renseignement territorial, et les représentants des deux clubs. Lors de la première réunion, le 21 avril 2023, il a été envisagé de classer cette rencontre au niveau 1 sur une échelle de 5, au motif qu'en l'absence d'antagonisme entre les supporteurs des équipes adverses, les 928 supporteurs parisiens constituaient néanmoins un flux important et inhabituel de spectateurs pour le stade de Troyes. En raison des difficultés opposant le club du PSG à ses supporters ultras du CUP, créant un contexte dégradé susceptible de générer des débordements de la part de ces supporters, le risque a été réévalué, au cours de l'ultime réunion de préparation du 4 mai 2023, au niveau 2 sur une échelle de 5. Une unité de forces mobiles a été allouée aux autorités locales pour qu'un service d'ordre adapté à l'enjeu puisse être mis en place. Compte tenu de l'absence d'antagonisme entre les soutiens des deux équipes, la préfecture de l'Aube a décidé de ne pas prendre de mesure réglementaire pour encadrer le déplacement des supporteurs parisiens et a préconisé uniquement un point de rendez-vous au péage de Torvilliers sur l'autoroute A5, pour escorte jusqu'au stade, des supporteurs ultras, point que le club du PSG, en concertation avec ses abonnés, s'était engagé à faire respecter. Informée le 6 mai du risque de déplacement sauvage des supporteurs parisiens sans billet, la DNLH a immédiatement alerté les autorités locales. Au regard des renseignements portés à la connaissance des autorités, la crainte de voir se greffer des supporteurs à risque non affiliés aux ultras parisiens du CUP et exclus par le club a encore dégradé la situation. Prenant acte de cette dégradation, la DNLH a de nouveau augmenté le niveau de risque du match, en le classant à 3 sur l'échelle de 5, correspondant à des risques de troubles liés à un contentieux entre supporteurs ou au comportement habituel de certains supporteurs. Compte tenu de l'évolution du risque, la préfecture de l'Aube a sollicité le renfort d'une unité de forces mobiles supplémentaire. La préfecture de l'Aube, en raison des délais trop contraints, n'était plus en mesure d'édicter de mesures réglementaires opposables aux supporteurs ultras du CUP et ne pouvait pas non plus, sans risquer de troubles à l'ordre public, accueillir les supporteurs ultras du CUP ayant effectué le déplacement même sans disposer de billets.  L'autorité préfectorale a donc privilégié le dialogue auprès des supporteurs répartis dans six bus (quatre au péage et deux autres venus directement au stade sans passer par le point de rendez-vous) pour les convaincre de faire demi-tour et regagner la région parisienne. Les supporteurs ont effectivement regagné l'Île-de-France de leur plein gré sans causer d'incident. Si les risques de troubles à l'ordre public n'ont pas pu être davantage anticipés, il doit être noté que les conditions d'organisation de cette rencontre se sont progressivement dégradées pour des raisons internes au club du PSG et aux relations qu'il entretient avec ses supporteurs. L'État ne saurait donc en être tenu responsable.

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