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Dominique Potier
Question N° 9300 au Ministère auprès de la ministre de l’europe


Question soumise le 27 juin 2023

M. Dominique Potier interroge M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger sur la position de la France quant aux négociations en cours sur l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur et les perspectives de ce traité de libre-échange. Les conclusions du rapport au Premier ministre rendues en septembre 2020 sur les effets de la partie commerciale de l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur sont claires « l'accord représente une occasion manquée pour l'Union européenne d'utiliser son pouvoir de négociation pour obtenir des garanties solides répondant aux attentes environnementales, sanitaires et plus généralement sociétales de ses concitoyens ». Au total, les émissions supplémentaires attribuables à cet accord seraient comprises entre 4,7 et 6,8 millions de tonnes équivalent CO2. Selon le scénario le plus pessimiste, la déforestation supplémentaire pourrait s'élever de 620 000 hectares à 1,35 million d'hectares, aggravant la situation de l'Amazonie et accélérant le dérèglement climatique et l'épuisement d'une partie de la réserve mondiale de biodiversité. Les pratiques de certains États du Mercosur en matière d'utilisation des pesticides sont une crainte pour la préservation de la santé et de l'environnement. Ainsi 27 % des ingrédients actifs utilisés au Brésil étaient interdits au sein de l'Union européenne en 2020. À défaut de clauses-miroirs négociées dans l'accord, les modes d'élevage ne correspondent pas aux normes européennes et aux attentes des consommateurs européens, qu'il s'agisse de l'alimentation animale, du bien-être des animaux ou encore de la traçabilité. En poursuivant les négociations sur cet accord de libre-échange, l'Union européenne s'engagerait dans un processus irréversible dans les domaines environnemental et social. On porterait atteinte également au respect des droits humains des peuples d'Amazonie et des paysans d'Amérique du Sud et par extension à ceux de France et d'Europe. Il est indispensable de sortir de l'opacité et de l'ambigüité des négociations complémentaires sur l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur qu'organise aujourd'hui la Commission européenne, avec notamment la possible dissociation du volet « commercial » qui lui permettrait de contourner une adoption formelle par les États membres. Une transparence totale est nécessaire, les règles du jeu démocratique dans l'Union européenne ne sont pas à géométrie variable au gré des circonstances géostratégiques. Les députés ont exprimé cette demande avec force dans la résolution transpartisane qu'ils ont votée le 13 juin 2023 : « l'accord conclu dans son intégralité devra donc être soumis à la procédure de ratification prévue pour les accords mixtes, c'est-à-dire soumis à un vote à l'unanimité des États membres, puis un vote au Parlement européen et à une ratification par l'ensemble des États membres selon la procédure prévue au niveau national, par l'Assemblée nationale et le Sénat dans le cas français ». Le défi de cette génération est celui du climat. Pour le relever tous ensemble, on doit inventer le juste échange et réaffirmer les valeurs que sont la régulation et le commerce équitable. Aussi, avec les députés Marie Pochon, Sébastien Jumel et François Ruffin, il demande au Gouvernement la position qu'il entend adopter à Bruxelles sur l'exigence démocratique d'un vote par les parlements nationaux sur la totalité de l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur.

Réponse émise le 3 octobre 2023

Comme pour tout accord international négocié par l'Union européenne (UE), il revient au négociateur, en l'occurrence ici la Commission Européenne, de présenter formellement la proposition d'accord au Conseil. Elle en a l'initiative, qu'il s'agisse de son contenu mais également de sa forme juridique. Le processus de signature et de conclusion de l'accord dépendra de l'analyse du contenu du texte transmis au Conseil. Tel que négocié, il apparaît que cet accord contient à la fois des stipulations relevant de la compétence exclusive de l'UE - en particulier le volet commercial - et des stipulations relevant de compétences que l'Union partage avec les États membres. La France estime donc qu'il s'agit d'un accord mixte, qui devra être à la fois conclu par l'Union et ratifié par chacun des États membres, selon ses procédures constitutionnelles. La France défend le respect de la répartition des compétences entre l'UE et les Etats membres, ainsi que le respect des attributions de chaque institution européenne. Au regard de la dimension de cet accord, et alors que plusieurs Parlements des États membres se sont déjà positionnés à ce sujet, le Gouvernement a informé la Commission européenne de sa volonté de maintenir un accord mixte, sous la forme d'un accord d'association, conformément au mandat confié par le Conseil à la Commission. Il a donc exprimé son opposition à une scission, pour permettre aux Parlements nationaux de participer pleinement à son processus de ratification. Enfin, le Gouvernement rappelle que l'accord sera également soumis à l'approbation du Parlement européen, comme c'est le cas pour l'ensemble des accords de commerce de l'UE.

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