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Julien Dive
Question N° 940 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 23 août 2022

M. Julien Dive interroge M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur les dispositifs d'accompagnement à la conduite des personnes très âgées. Si les statistiques démontrent que cette catégorie d'âge n'est pas la plus concernée par les accidents de la route, il convient néanmoins de protéger les ainés et les autres automobilistes de certains dangers qui peuvent subvenir durant un trajet en raison de certains symptômes du vieillissement (baisse de la vue, de l'ouïe, des capacités motrices...). Interrogé lui-même par une habitante de sa circonscription dont le père de 90 ans a provoqué un accident, cette dernière s'inquiète des risques encourus lors de l'usage du véhicule. Selon les propos exprimés par la concitoyenne, une personne âgée s'expose à des risques, pour elle-même et pour les autres, si elle continue à conduire, malgré la diminution de ses capacités. Pour faire face à cette situation sans remettre en cause leur indépendance, il lui demande quelles solutions et mesures préventives il pourrait apporter afin de limiter les incidents liés à la conduite des seniors.

Réponse émise le 11 avril 2023

Le principe général du Gouvernement, porté par la Délégation interministérielle à la Sécurité Routière (DSR), est bien d'assurer la sécurité de tous les usagers de la voie publique. Aucune personne sur la voie publique, qu'elle conduise ou non, ne peut être sciemment exposée au danger de la conduite d'autrui dès que ce risque est connu et évitable. L'inaptitude médicale à la conduite est un risque connu dans son principe, qui doit être reconnu à chaque fois qu'il est présent et conduire aux décisions nécessaires. Cependant, la visite médicale obligatoire pour tous les conducteurs des véhicules légers, ou systématiquement à partir d'un certain âge, n'est ni le seul, ni nécessairement le meilleur moyen, pour mettre en œuvre cet arrêt de la conduite dès qu'il s'avère nécessaire pour protéger autrui. L'European Transport Safety Council (ETSC), association à but non lucratif indépendante dont l'objet est la réduction du nombre de victimes de la route en Europe, a publié un rapport en mars 2021 qui compare les procédures d'évaluation de l'aptitude médicale à la conduite, pour le permis B, dans 32 pays dont les 27 pays de l'Union Européenne. Ce rapport constate que la visite médicale obligatoire basée sur l'âge des conducteurs n'a pas montré d'efficacité dans la prévention des accidents. L'âge n'est en effet pas un facteur discriminant pour l'aptitude médicale à la conduite. A l'inverse, certaines affections médicales, comme le risque de syncope ou la présence de troubles cognitifs, le sont. La consommation de certains médicaments ou la fatigue sont également des facteurs de risque pour la conduite. L'instauration d'une visite médicale obligatoire périodique, pour tous les conducteurs, ne présente pas de valeur ajoutée observée pour la sécurité routière et peut même s'avérer contre-productive en donnant au conducteur, lorsqu'elle est favorable, un sentiment de sécurité excessif. Le Gouvernement privilégie donc d'autres voies pour prendre en compte les risques liés à certaines affections médicales. Il s'agit en premier lieu de rappeler à chaque conducteur qu'il doit, à chaque fois qu'il souhaite prendre le volant, apprécier sa capacité à conduire au regard de son état de fatigue et de vigilance, de sa capacité de mobilité et de sa prise de médicaments ou de substances psychoactives ainsi que de vérifier qu'il a bien pris ses lunettes si besoin. Une plaquette a été élaborée pour tous les conducteurs qui s'intitule : « Santé et conduite, posez-vous les bonnes questions et parlez-en ». Elle est largement distribuée. Un deuxième axe de travail, essentiel, porte sur le dialogue avec les médecins généralistes. En effet, aujourd'hui, tout médecin a une obligation d'information de son patient sur les risques liés à sa pathologie. L'inaptitude médicale à la conduite fait partie de ces risques. Cette obligation d'information sur les risques est rappelée par un arrêt de la Cour de cassation du 25 février 1997, qui énonce que « le médecin est tenu d'une obligation particulière d'information vis-à-vis de son patient et qu'il lui incombe de prouver qu'il a exécuté cette obligation » (Chambre civile 1, 25 février 1997 n° 94-19.685). Cette obligation ne modifie pas le secret médical absolu que le médecin doit à son patient, indispensable pour conserver le lien de confiance. En France, le médecin ne peut pas signaler l'inaptitude à la conduite de son patient à l'administration. Seul le médecin agréé pour la sécurité routière peut rendre l'avis d'aptitude médicale au préfet, et jamais pour ses propres patients. Une convention a été signée le 1er février 2021 par la DSR avec le Collège de médecine générale (CMG), afin de sensibiliser les médecins généralistes sur leur place, importante, pour la sécurité routière. Tous les médecins généralistes de France recevront à cet effet un dossier complet sur « conduite et santé ». Enfin, la question d'une évaluation plus ciblée de l'aptitude médicale à la conduite est intégrée dans le projet de nouvelle directive européenne sur le permis de conduire, en cours de discussion.

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