Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du jeudi 30 novembre 2023 à 14h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Gérald Darmanin, ministre :

Je ne peux pas laisser dire M. Vallaud que, dans les cas que j'ai cités, les étrangers incriminés étaient expulsables et c'est justement l'objet de l'article 9 de le permettre. Le juge s'appuie sur la loi pour prononcer la peine complémentaire d'expulsion et la loi prévoit l'interdiction du prononcé de cette peine pour les personnes arrivées sur notre territoire avant l'âge de 13 ans. Je souhaitais apporter cette précision pour rétablir la vérité des faits.

Dans le cas d'Arras, je rappelle que la famille de l'assassin est arrivée en France alors que celui-ci avait moins de 13 ans. Leur demande d'asile ayant été refusée, une OQTF a été prononcée et il aurait pu être procédé à l'éloignement de cette famille, quand bien même rien de pénalement répréhensible ne pouvait lui être reproché. Après des interventions politiques et une mobilisation citoyenne, le gouvernement de M. Hollande n'est pas passé à l'acte. La famille n'est finalement pas montée dans l'avion à la sortie du centre de rétention du Mesnil-Amelot.

Quelques mois avant l'assassinat du professeur d'Arras, le futur terroriste, qui n'a pas de casier judiciaire, tape sur sa mère, ce qui constitue un délit. Le préfet du Pas-de-Calais saisit alors la justice afin de pouvoir l'expulser, mais l'intéressé étant arrivé en France avant l'âge de 13 ans, l'expulsion est refusée. Bien qu'étant majeur, se trouvant en situation irrégulière et ayant commis un délit grave puisqu'il a tapé sur sa maman – il aurait pu taper sur sa compagne, c'est exactement la même chose –, il n'était plus éloignable. Il était certes inscrit sur le fichier S, mais cette inscription est une preuve non pas de culpabilité mais de suivi. On ne peut donc s'appuyer sur le fichier S pour procéder à une expulsion, d'autant que dans le cas d'Arras rien ne laissait prévoir de façon concrète qu'il pouvait passer à l'acte. Aujourd'hui, nous pouvons l'éloigner du territoire car il a commis un acte terroriste et a atteint aux intérêts fondamentaux de l'État. Nous n'avons donc pas pu éloigner cet individu au titre de son agression contre sa maman parce que la loi protège des mesures d'éloignement les personnes arrivées en France avant l'âge de 13 ans.

De très nombreux cas relèvent aujourd'hui de la protection de la loi alors qu'ils concernent des actes extrêmement graves. J'ai ainsi à ma disposition une liste de 500 de ces cas, remontés par les préfets, dont certains sont cités dans l'étude d'impact. C'est bien la loi ordinaire, et non la Constitution ou la Convention européenne des droits de l'homme – je le précise à l'attention des groupes qui pensent qu'un changement de ces textes est nécessaire –, qui interdit l'expulsion ou l'éloignement dans ces cas. Aucun autre pays en Europe n'a adopté une telle législation protectrice. Je le répète : la loi interdit l'éloignement d'un étranger ayant commis un crime ou un délit ne relevant pas du terrorisme et, s'il commet un acte terroriste, c'est hélas trop tard.

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