La réunion

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La séance est ouverte à 14 heures 35.

Présidence de M. Sacha Houlié, président.

La commission poursuit l'examen des articles du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration (n° 1855) (M. Florent Boudié, rapporteur général ; Mme Elodie Jacquier-Laforge, M. Ludovic Mendes, M. Philippe Pradal, M. Olivier Serva, rapporteurs)

Lien vidéo : https://assnat.fr/azVAZ8

Après l'article 4 bis (suite)

Amendements CL1645 de M. Sacha Houlié et CL1687 de Mme Élodie Jacquier-Laforge (discussion commune)

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L'amendement CL1645 vise à prévoir que la carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou la carte de séjour pluriannuelle portant la même mention vaut autorisation de travail.

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Cela représente une évolution importante et souhaitable dans l'accès des étrangers au travail. Demande de retrait au profit de mon amendement, qui restreint le dispositif à la carte de séjour pluriannuelle.

L'amendement CL1645 est retiré.

La commission adopte l'amendement CL1687.

Amendement CL1000 de M. Benjamin Lucas

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Pour donner plus de liberté aux étrangers salariés en cours de régularisation, nous proposons qu'ils puissent changer d'employeur sans que cela remette en cause l'examen de leur demande de titre de séjour, afin de prendre en compte les cas de travail temporaire forcé.

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La formulation de votre dispositif me semble curieuse. Rien n'interdit en l'état à l'étranger de changer d'employeur, auquel cas sa demande devra se faire sur la base du nouveau contrat. Par ailleurs, contrairement à ce que votre exposé sommaire indique, vous ne visez pas uniquement les cas de régularisation. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL1340 de Mme Maud Gatel

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Environ 70 % des livreurs indépendants seraient en situation irrégulière, alors qu'ils remplissent un rôle essentiel, notamment depuis le covid. Ils ne sont pas salariés mais peuvent être exploités par des filières qui leur sous-louent un compte, par des marchands de sommeil et, plus globalement, par nous-mêmes. Ils sont piégés dans une trappe à précarité, sans la moindre perspective, dans la mesure où la circulaire Valls ne concerne pas les travailleurs indépendants. L'objectif de l'amendement est de leur permettre de prétendre à la régularisation.

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Nous abordons une série d'amendements visant à créer une nouvelle voie de régularisation pour les étrangers exerçant en tant qu'indépendants. À titre personnel, je n'y vois aucune opposition. Néanmoins, je pense que nous devons réfléchir collectivement pour trouver un dispositif opérationnel. Demande de retrait, afin de nous laisser un peu de temps.

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Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

Même si je me suis déjà exprimé sur cette question ce matin, je veux bien me répéter. Ces gens bénéficient d'un statut d'autoentrepreneur que la législation leur a permis de créer sans vérifier la régularité de leur séjour. Ce sont donc des travailleurs réguliers présents irrégulièrement. Tous les autoentrepreneurs n'ont pas créé leur autoentreprise pour profiter du système et être régularisés. Si certains l'ont sans doute fait parce que l'administration a laissé faire, d'autres le font parce qu'on les y a obligés et qu'ils sont, en réalité, les salariés déguisés des plateformes ou du BTP. Ils subissent, à ce titre, une forme de rapport de force capitalistique, à l'image des salariés de l'article 4 bis.

Mais comparer les statuts de salarié et d'indépendant n'est pas facile. J'ai proposé ce matin que, dès le début du mois de décembre, un groupe de travail soit créé avec le ministère de l'économie et celui du travail. Si vous adoptez l'article 5, il ne sera en effet plus possible aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d'un statut d'autoentrepreneur. Il faudrait donc examiner les cas des indépendants qui sont en réalité des salariés de force et rédiger une circulaire, en étudiant la nature de leur activité, le temps depuis lequel ils sont présents, leur pays d'origine, afin d'exclure ceux qui ont détourné le statut d'autoentrepreneur. Je m'engage à accorder, à la suite de ces travaux, des régularisations au cas par cas.

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Les Républicains sont contre cet amendement, très révélateur de la vision utilitariste de la gauche et de la majorité. L'immigration est là pour faire les métiers que les étrangers en situation régulière ou les Français ne veulent pas faire. Un récent sondage prouve que les plus grands utilisateurs de ces plateformes de livraison, du type Uber Eats, se situent très à gauche et vivent dans les grandes métropoles, soit le cœur de l'électorat de la Nupes et de la majorité présidentielle – un tiers des électeurs exactement. À cette vision utilitariste d'une immigration sous-qualifiée et exploitée, nous préférons une immigration choisie et surqualifiée, qui permette de créer de l'emploi pour les Français et les étrangers en situation régulière, au lieu de les concurrencer en tirant les salaires de ces emplois sous-qualifiés vers le bas et en ne permettant pas d'améliorer les conditions de travail.

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Serait-il possible d'avoir une évaluation chiffrée de l'application de la circulaire Valls, monsieur le ministre ? Il aurait sans doute été plus simple de l'adapter.

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Gérald Darmanin, ministre

On sait qu'elle concerne grosso modo 30 000 personnes par an – environ 8 000 sont régularisées par le travail et 22 000 par la famille. Mais ce n'est pas vraiment le sujet. Le Conseil d'État a reconnu que le droit n'était en aucun cas opposable. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles nous avons proposé la disposition qui est devenue l'article 4 bis. Il y avait également des dispositions législatives et pas seulement réglementaires à prendre, ce qui explique pourquoi nous n'avons pas pu modifier la circulaire Valls.

On pourrait imaginer un travail transpartisan sur son application, qui intégrerait la question des indépendants. Je m'engage à proposer à la Première ministre de créer une mission de parlementaires auprès des ministères du travail, de l'économie et de l'intérieur pour évaluer les moyens de régularisation, leurs abus, leurs avantages et leurs faiblesses.

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Je retire mon amendement. Monsieur Dumont, le but est d'offrir des perspectives à ces personnes. Les livreurs sans-papiers sous-louent un compte à de véritables esclavagistes pour 150 euros par semaine ! L'objectif est de les faire sortir de ces trappes à la pauvreté.

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En ce cas, c'est le système qu'il faut changer et pas les individus !

L'amendement est retiré.

Amendement CL1339 de Mme Maud Gatel

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Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre ouverture sur cette question importante. Il faut regarder, évaluer. L'amendement fait plusieurs propositions sur la définition des critères de régularisation : « une activité régulière durant au moins douze mois au cours des vingt-quatre derniers mois » et « une période de résidence ininterrompue d'au moins trois années en France ». Ces livreurs peuvent justifier de facturations tous les mois. Mais en tant que non-salariés, ils ne sont pas éligibles à la circulaire Valls. Avançons, travaillons ensemble.

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Même avis que précédemment. Je me réjouis de cette volonté de travailler ensemble sur le sujet. Demande de retrait dans la perspective de ce qui a été annoncé par M. le ministre.

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Gérald Darmanin, ministre

Le Rassemblement national a dit que la disposition allait contribuer à augmenter les flux : elle les tarit, puisqu'on met fin au système d'embauche de personnes sans-papiers. Au Sénat, M. Brossat a fait une proposition pour lutter contre les marchands de sommeil : un titre de séjour temporaire est octroyé pour tout dépôt de plainte contre son marchand de sommeil. C'est la même disposition que celle qui avait été instaurée sous M. Hollande contre le proxénétisme ou que celle de l'amendement qu'avait fait adopter Marie-George Buffet contre les violences intrafamiliales. Il faut faire pareil avec les travailleurs indépendants, afin de les inciter à dénoncer ceux qui les embauchent en les faisant passer pour des indépendants alors qu'ils les exploitent. Plusieurs éléments seront à réviser, car lorsque M. Valls a pris sa circulaire les autoentreprises n'existaient pas sous cette forme et à ce point. Le Gouvernement n'avait pas choisi de les exclure ; c'était un autre monde.

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Je voulais saluer le travail de Maud Gatel sur cet angle mort. Un indépendant ne peut pas dépendre d'un seul client ; or c'est ce qui se passe avec ces opérateurs. Les gens se retrouvent dans des situations proches de l'esclavage. Regardez le surcoût d'un plat livré par rapport au temps que met le livreur. Je ne sais pas comment ils arrivent à se dégager un salaire qui leur permette de vivre. Au-delà de la question de la régularisation, il faut continuer à réfléchir au modèle économique de ces plateformes.

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Nous avons déjà eu ce débat dans l'hémicycle, lorsque la question s'était posée de savoir si nous faisions droit à la présomption de salariat pour les travailleurs des plateformes. Nous avions dénoncé la construction d'un tiers statut qui consacre, en réalité, l'ubérisation croissante d'un certain nombre de métiers qui n'ont rien d'indépendants, compte tenu, pour reprendre l'expression du ministre, de la domination capitalistique des donneurs d'ordres.

Si nous avions admis la présomption de salariat, les travailleurs des plateformes pourraient désormais bénéficier de la régularisation au titre du travail salarié. Mais vous l'avez refusée à l'Assemblée nationale et combattue au plan européen. Ne venez pas expliquer qu'on a un problème de modèle économique après avoir refusé d'en débattre dans l'hémicycle il y a quelques mois.

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Gérald Darmanin, ministre

On est plus lents que vous !

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Après quatre jours de débat, je souhaitais faire un bilan, pour que les Français qui nous écoutent comprennent ce qui se passe. Les petites avancées vers la fermeté, qui avaient été obtenues de manière intelligente au Sénat, ont totalement disparu : la restriction des conditions du regroupement familial, le remplacement de l'aide médicale de l'État (AME) au profit de l'aide médicale urgente (AMU), le rétablissement du délit de séjour irrégulier, les conditions de résidence de cinq ans pour bénéficier des aides personnalisées au logement (APL) et des allocations familiales, les restrictions en matière de droit du sol ou la suppression de l'article 3, qui organisait une régularisation massive des clandestins. Il faut être honnête : les Français n'arriveront pas à obtenir la fermeté qu'ils souhaitent depuis un grand nombre d'années en matière d'immigration. La seule solution sera de changer cette majorité et le Gouvernement le plus vite possible.

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Gérald Darmanin, ministre

Monsieur Ménagé, vous n'avez peut-être pas passé un bon déjeuner, mais nous travaillons à peu près tous correctement depuis lundi et nous allons encore passer peu ou prou trois semaines ensemble. Il serait bienvenu d'éviter les moments « capsule internet », à laquelle vous aurez, j'espère, l'honnêteté d'intégrer ma réponse.

Ce qui est certain, c'est que nous ne sommes pas esbaudis par vos propositions ! On aimerait bien connaître le projet alternatif du Rassemblement national. Pour l'instant, vous nous avez proposé l'amendement de Mme Diaz, qui n'avait peut-être pas tout à fait vu l'objet du texte, qui supprimait l'article 2. Le Rassemblement national voulait donc permettre aux entrepreneurs embauchant des personnes irrégulières, qui devaient apprendre le français, de se passer de l'obligation de les intégrer, alors que notre disposition permettait, d'une part, de mieux les intégrer pour qu'ils parlent français et, d'autre part, que ces entrepreneurs soient moins aidés que ceux qui embauchent des Français et des étrangers en situation régulière. Puis vous vous êtes aperçue que vous aviez fait une bêtise et l'avez retiré après des circonvolutions.

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Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer

Deuxièmement, quand on voit que vous considérez qu'un demandeur d'asile est un irrégulier, on comprend mieux vos chiffres sur l'immigration irrégulière. Ce faisant, vous contredisez non seulement la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) ou d'autres constitutions, mais la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen tout court. Aucun pays au monde n'organise la vie comme vous l'imaginez. Votre amie, Mme Meloni, est obligée d'appeler la Commission européenne à la rescousse pour régler ses problèmes de sécurité – je me réjouis de découvrir son intérêt pour l'Europe ! Quant à vos amis conservateurs britanniques, c'est le troisième ministre de l'intérieur que je rencontre en trois ans ! Leur problème, c'est qu'ils ont promis qu'en sortant de l'Europe, ils feraient baisser l'immigration irrégulière ; or elle n'a jamais autant augmenté ! Demandez à M. Dumont, qui en subit les conséquences ! Il a d'ailleurs dû voir ce matin qu'une grande opération de police avait été une nouvelle fois montée par le ministère de l'intérieur pour régler l'incurie et les mensonges du Brexit.

Vous protestez, mais souffrez que je réponde à vos inepties quand vous prenez la parole pour faire de la politique politicienne ! Comment pouviez-vous croire un seul instant qu'alors que vous preniez la parole sur un sujet qui n'avait rien à voir avec le texte, nous allions sagement vous écouter, en imaginant vos 3 millions de vues sur Twitter ? Arrêtons la démagogie ! Déposez des amendements constructifs ! Êtes-vous pour ou contre le fait que l'on demande un examen de français pour obtenir un titre de séjour ? Il faudra bien que le Rassemblement national se positionne sur ce texte. Ce sont 400 000 personnes qui sont concernées par an. Vous parlez, vous, de regroupement familial, soit de 12 000 personnes par an. Qui plus est, ce que vous avez dit est faux, puisque nous avons conservé des restrictions au regroupement familial. Arrêtez de dire n'importe quoi !

Ce qui est sûr, c'est que vous êtes gênés aux entournures, parce que vous n'avez pas travaillé ce texte. Le fait même que vous criiez que vous ne l'êtes pas montre que vous l'êtes… Ni Mme Meloni, ni les conservateurs britanniques n'arrivent à démontrer ce que vous démontrez. Vous vivez dans un monde parallèle, une partie du cyberespace sans doute. Si dans le cyberespace ça marche peut-être, ce n'est pas le cas dans la politique réelle. D'ailleurs, vous le savez très bien, et vous seriez les premiers, si malheureusement vous arriviez au pouvoir, à vous adapter à la réalité. Quand on demande aux élus du Rassemblement national de nous aider, en acceptant, par exemple, d'installer un centre de rétention administrative (CRA), pas un de vos maires ne répond oui. Les CRA, c'est bien, mais chez les autres.

L'amendement est retiré.

Amendements CL1646 de M. Sacha Houlié, CL98 de Mme Françoise Buffet et CL1580 de Mme Marie Pochon (discussion commune)

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Par mon amendement, le titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « travailleur saisonnier » pourrait exercer son activité auprès de plusieurs employeurs sans être contraint de solliciter une nouvelle autorisation de travail à chaque changement d'employeur.

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L'amendement CL98 tend à permettre à un travailleur saisonnier d'occuper plus simplement plusieurs emplois. La situation des titulaires d'une carte de séjour « travailleur saisonnier » est problématique puisqu'ils sont liés à leur employeur, ce qui entraîne deux conséquences préjudiciables : le travailleur est dans une situation de dépendance et de lien exclusif avec son employeur, ce qui peut le conduire à renoncer à ses droits sociaux par crainte de se voir retirer sa carte de séjour ; il ne peut pas exercer plusieurs activités saisonnières successivement, un cas pourtant très fréquent dans l'agriculture.

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L'amendement CL1580 permettrait d'éliminer le lien de subordination entre le premier employeur, qui fait la demande d'autorisation de travail, et le travailleur saisonnier. Cet été, dans plusieurs départements, des cas de maltraitance, d'hébergement dans des logements insalubres ou de conditions de travail indignes, voire de traite d'êtres humains ont été révélés, notamment dans le secteur agricole. Ces situations sont inacceptables et doivent absolument être évitées. Or, à l'heure actuelle, un travailleur saisonnier qui subit ces conditions indignes ne peut pas changer d'employeur sans perdre la validité de sa carte de séjour. L'amendement vise à éviter ces drames, en améliorant les droits des travailleurs saisonniers, qui ne seront plus obligés de travailler exclusivement pour leur premier employeur. Le travailleur pourra également changer de travail, ce qui semble une évidence, puisque le travail saisonnier est une variation d'activités en fonction du rythme des saisons.

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Lors des auditions de la commission des lois, notre attention avait été appelée sur ce sujet. Avis favorable à l'amendement CL1646 ; demande de retrait pour les deux autres. Les titulaires de la carte pourront ainsi changer d'employeur s'ils conservent une activité saisonnière.

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Gérald Darmanin, ministre

Un problème se pose tout de même : qu'est-ce vous définissez comme un travail saisonnier ? Un saisonnier, dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda), c'est quelqu'un qui vient faire la saison. Certaines personnes viennent quelques mois, dans le cadre d'un échange international négocié par les branches professionnelles avec leur pays, pour les vendanges ou les récoltes, et repartent. Il y a aussi des étrangers qui travaillent en tant que saisonniers, mais qui restent sur le territoire national, en dehors de tout échange. Il faudrait distinguer juridiquement ces deux types de personnes.

Par ailleurs, il existe bien des cas de maltraitance : logement insalubre, hypertravail, racisme ou xénophobie. Même s'ils ne sont pas la majorité, ces cas sont aussi dérangeants que condamnables. C'est pourquoi les moyens alloués au contrôle ont été renforcés dans le dernier budget que vous avez voté. Les branches professionnelles de l'agriculture dénoncent ces abus, qui représentent une concurrence déloyale. Je ne crois pas qu'il y ait de complicité de la part de quelque branche que ce soit.

Mais ce n'est pas la même chose de donner un titre sur le saisonnier. Encore une fois, le saisonnier, c'est quelqu'un qui vient quelques semaines ou quelques mois et repart dans son pays, comme les Marocains qui viennent pour les récoltes et les vendanges. Nous pourrons en reparler dans l'hémicycle et distinguer les différents cas. « Saisonnier » est, à mon avis, un terme impropre pour ce que vous souhaitez faire.

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Tout d'abord, excusez-nous de ne pas être plus nombreux : nous naviguons entre la commission et « la niche » dans l'hémicycle. Cette organisation en parallèle m'étonnera toujours…

Un flou entoure tout ce qui concerne le salariat et, plus généralement, le travail des étrangers et des réfugiés. Une entrée par les métiers en tension, par exemple, n'est pas opérante, parce qu'elle ne couvre pas les travailleurs indépendants, les intérimaires ou les saisonniers.

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C'est méconnu, mais le Maine-et-Loire est le département qui compte le plus de salariés agricoles de France, avec de très nombreux secteurs d'activité dans le végétal spécialisé : viticulture, arboriculture, maraîchage, culture des petits fruits rouges, des plantes médicinales, rosiculture… En définitive, tout au long de l'année, il y a du travail saisonnier mais dans des secteurs différents. Il faut vraiment sécuriser le statut des travailleurs saisonniers, français et étrangers. La proposition est peut-être à affiner, mais nous avons besoin d'un outil pour faciliter la vie de nos exploitants agricoles employeurs de main-d'œuvre.

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Gérald Darmanin, ministre

À l'article 15 bis, l'amendement de M. Brossat prévoit l'octroi d'un titre de séjour temporaire en cas de logement insalubre. Cela vaut aussi pour les saisonniers. Nous aurons donc l'occasion d'y revenir.

La commission adopte l'amendement CL1646.

En conséquence, les amendements CL98, CL1580 tombent ainsi que l'amendement CL1314 de Mme Maud Gatel.

Article 4 ter (nouveau) (art. L. 414-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Révision annuelle de la liste des métiers et des zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement

Amendements de suppression CL184 de M. Yoann Gillet, CL1173 de M. Davy Rimane et CL1632 de M. Sacha Houlié

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L'article 4 ter, qui est le prolongement de l'article 4 bis, que Les Républicains se sont réjouis d'avoir adopté au Sénat, ouvre une nouvelle voie de régularisation massive des étrangers. C'est la même prime à la clandestinité dans les métiers et zones géographiques en tension. La seule différence est que cette régularisation n'intervient plus de plein droit mais après instruction des dossiers par les préfets et à partir de critères favorables. Un dispositif proche de celui de la circulaire Valls de 2012 est ainsi inscrit dans la loi. Par cet appel d'air, vous dites clairement aux immigrés clandestins : « Venez en France illégalement, travaillez et vous serez régularisés. »

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Nous souhaitons également la suppression de cet article pour des raisons totalement différentes. Nous considérons que les travailleurs immigrés ne peuvent pas être la variable d'ajustement du marché du travail. On ne peut pas appeler les gens uniquement quand on a besoin d'eux. En aucun cas, nous ne craignons quelque appel d'air que ce soit. Nous sommes pour une vision humaniste du droit à l'immigration, en aucun cas utilitariste.

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L'amendement CL1632 vise également à supprimer l'article, pour une troisième raison : son adoption neutraliserait en partie l'article 4 bis.

Les membres du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires sont attachés à l'actualisation de la liste et à la territorialisation de la mesure. Je retirerai peut-être mon amendement à l'issue de la discussion.

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Avis défavorable. Il est utile de prévoir une fréquence de révision de la liste des métiers et des zones géographiques qui peinent à recruter, pour rendre le dispositif plus lisible.

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Gérald Darmanin, ministre

Je comprends l'argument du groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES, moins celui du groupe Rassemblement national : l'article 4 bis ayant été adopté, la suppression de l'article 4 ter figerait la liste, alors que l'objectif est d'adapter le dispositif au taux de chômage de chaque département, avec le concours des représentants des branches et des élus.

Monsieur le président, votre amendement est contradictoire avec le sous-amendement CL1743, précédemment adopté afin de passer de l'échelon régional à l'échelon départemental.

La liste des métiers en tension relève du domaine réglementaire. Inscrire la liste dans la loi obligerait à réviser celle-ci pour chaque modification. Le Sénat a donc introduit le présent article afin de prévoir une actualisation annuelle de la liste. Il est vrai qu'elle n'est pas mise à jour assez souvent, car la remontée des informations est compliquée. Par exemple, la restauration n'apparaît pas dans la liste en vigueur, ce qui est absurde. Par ailleurs, avec la territorialisation, la mesure ne s'appliquerait que dans les endroits où le chômage est inférieur à la moyenne nationale.

L'article 4 ter est indispensable, mais peut-être faut-il débattre de la fréquence de la révision.

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Une révision annuelle est nécessaire. Le monde économique est mouvant, on ne peut figer la liste dans le marbre.

Je défendrai deux amendements pour élargir la composition de la commission chargée de l'actualisation, afin d'avoir une vision du terrain.

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C'est une question de cohérence. Monsieur le président, cet article a été introduit dans le texte par l'adoption d'un amendement de vos collègues du groupe RDPI du Sénat Olivier Bitz et François Patriat.

Quant aux membres du groupe Rassemblement national, puisqu'ils n'ont pas réussi à supprimer l'article 4 bis, ils devraient chercher à en limiter les effets. En restant proche des réalités du terrain, on évite d'ouvrir une trop large voie à l'immigration régulière et à la régularisation. Vous devriez donc soutenir une révision annuelle et précise, même si elle est fastidieuse.

En fait, le groupe Rassemblement national retrouve sa vieille tendance à jouer la politique du pire : cet amendement de suppression vise à faire entrer le plus d'immigrés possible, parce que vous croyez que cela augmentera le nombre de vos électeurs.

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Vous voyez bien, monsieur Dumont, pourquoi j'avais déposé un amendement de suppression : il visait à éviter l'enfermement dans un système qui, faute de révision, paralyserait le dispositif prévu à l'article 4 bis !

L'amendement CL1632 est retiré.

La commission rejette les amendements CL184 et CL1173.

Amendements CL656 et CL660 de M. Christophe Naegelen, CL743 de Mme Danièle Obono et CL1431 de Mme Stella Dupont (discussion commune)

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Maintenant que nous avons décidé de réactualiser chaque année la liste des métiers en tension, nous devons la sécuriser. Je propose d'établir une commission placée sous l'égide du préfet et composée de représentants des chambres consulaires et des collectivités territoriales pour établir la liste. Étant les plus proches du terrain, ils en ont la connaissance la plus fine. L'amendement CL656 vise à prévoir que la décision du préfet sera soumise à l'avis conforme de ladite commission, tandis que l'amendement CL660, de repli, ne vise qu'à demander un avis consultatif.

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Nous mettons en cause la référence aux métiers en tension. Cette notion recouvre des réalités mouvantes et nous dénonçons le caractère subjectif, voire arbitraire, de la mesure.

Les gens qui travaillent participent à la richesse du pays ; leur travail est, par définition, utile. Nous demandons donc la régularisation de tous les travailleurs sans papiers. De surcroît, cela simplifiera tout et évitera la création d'usines à gaz.

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La définition et l'actualisation de la liste sont des éléments essentiels du débat. La liste en vigueur me met en colère : comment comprendre que les secteurs de l'hôtellerie, de la restauration et de la propreté en soient exclus ? On peut imaginer toutes les réunions possibles, on n'arrivera à rien sans objectiver des critères d'inscription précis. L'absence de la propreté permet à de grandes entreprises d'exploiter l'immigration irrégulière : il faut que cela cesse. Le texte vise l'efficacité. Le présent amendement tend donc à prendre en compte le taux de poste non pourvus, le taux de postes vacants et le taux d'étrangers en emploi dans le secteur donné, pour avoir une vue d'ensemble.

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Nous avons déjà adopté l'échelon départemental. Nous devrons donc effectuer un travail supplémentaire en vue de la séance, car nous aurons besoin de statistiques départementales et nous devons trouver le dispositif le plus pertinent, en lien avec les bassins de vie. Personnellement, je ne crois pas utile de créer une commission ad hoc ; mieux vaut s'appuyer sur l'existant. Les maisons de l'emploi, Pôle emploi et les intercommunalités ont déjà une vision très fine de la situation. Demande de retrait ou avis défavorable sur les amendements CL656 et CL660.

L'exposé sommaire de l'amendement CL743 n'est pas cohérent avec son dispositif. Selon le premier, vous voulez supprimer la référence aux métiers en tension dans le cadre de la délivrance des titres de séjour et régulariser tous les sans-papiers. Or le dispositif vise à abroger l'article L. 414‑13 du Ceseda, qui dispose : « Lorsque la délivrance du titre de séjour est subordonnée à la détention préalable de l'autorisation de travail prévue à l'article L. 5221-2 du code du travail, la situation du marché de l'emploi est opposable au demandeur sauf lorsque le présent code en dispose autrement, et notamment lorsque la demande de l'étranger concerne un métier et une zone géographique caractérisée par des difficultés de recrutement. » Avis défavorable.

S'agissant de la méthode de révision de la liste, je suis prête à y travailler. Effectivement, il est important d'objectiver les critères. Avis favorable sur l'amendement CL1431.

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Gérald Darmanin, ministre

Mêmes avis que Mme la rapporteure. Monsieur Naegelen, votre proposition n'est pas conforme à l'esprit du texte, mais nous allons retravailler sur le sujet, en fonction des articles 4 bis et 4 ter, tels qu'ils seront adoptés.

Madame Dupont, je partage votre courroux et votre intention.

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M. Naegelen propose d'instaurer une commission qui participerait à élaborer la liste des métiers en tension. Elle serait composée d'un grand nombre de responsables politiques. Or la politique de régularisation suscite des opinions contradictoires : nos collègues de gauche, par exemple, réclament une régularisation massive. Je tremble à l'idée qu'ils siègent dans ladite commission, fût-elle consultative, et pèsent de leur poids institutionnel sur les décisions des préfets, des chambres consulaires et des représentants de filières. C'est très risqué ; j'invite à observer une grande prudence.

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Je regrette que les amendements de suppression aient été rejetés ; la vision de l'autorisation de séjour reste très utilitariste.

Les métiers en tension sont ceux qui ne parviennent pas à embaucher, parce que les conditions de travail et les rémunérations ne sont pas assez bonnes pour attirer des candidats. Une théorie économique de base veut que l'augmentation des salaires et l'amélioration des conditions de travail fassent venir les volontaires. Il faudrait objectiver la définition.

L'emploi en sous-qualification des personnes migrantes pose également un problème. On cantonne des personnes diplômées dans des métiers en tension, quand ils pourraient enrichir bien davantage le pays en occupant d'autres emplois.

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Je défendrai dans un instant l'amendement CL1569, qui vise également à territorialiser le dispositif, en établissant la liste des métiers par département. Certains départements sont ultraspécialisés dans un secteur d'activité ; dans l'Isère, c'est la logistique, qui connaît une grande pénurie de main-d'œuvre. Nous ne voulons pas non plus créer une usine à gaz, nous avons donc calqué un dispositif existant. Pôle emploi, les directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (Dreets) et les chambres consulaires connaissent très bien les territoires et peuvent délivrer les informations nécessaires.

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La notion de métier en tension laisse le groupe Démocrate dubitatif. La réalité désignée est difficile à définir, varie selon les territoires. L'amendement de Mme Stella Dupont est donc opportun.

Faut-il conserver ce critère ? Quand quelqu'un est là, travaille, paie ses impôts et cotisations, n'est-ce pas suffisant pour le régulariser ? J'entends déjà crier à l'appel d'air ; en réalité, les gens concernés sont déjà là, et nous les plaçons dans une situation qui les empêche de s'intégrer. Quand vous ne pouvez pas vous déplacer seul dans la rue par crainte d'un contrôle de police, il est difficile de se fondre dans la communauté nationale.

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Quelle que soit leur sensibilité politique, des parlementaires ont demandé des dérogations pour obtenir des régularisations dans leur circonscription. Il faut faire confiance aux élus et aux représentants des instances syndicales et des chambres consulaires : ce sont eux qui connaissent le mieux nos territoires. Je suis désolé de faire trembler Mme Genevard mais il s'agit de laisser décider des acteurs engagés plutôt que des données statistiques et les représentants de l'État.

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Mme Genevard craint une commission représentative de notre assemblée, c'est-à-dire, finalement, le vote des Français. Vous pourrez opérer un tri avec la référence aux métiers en tension mais, sur le plan démocratique, il sera plus difficile de maîtriser cet aspect.

Nous craignons plutôt l'usine à gaz. Mieux vaut donner des papiers aux personnes qui occupent déjà un emploi, afin de reconnaître leur contribution et simplifier leur vie. S'ils ont du travail, c'est que nous avons besoin d'eux. Les personnes ne sont pas des objets ; ne les instrumentalisons pas.

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Depuis tout à l'heure, la gauche et l'extrême gauche réclament la régularisation des travailleurs sans papiers, au seul motif qu'ils sont à plaindre. Une fois que vous leur aurez donné un titre de séjour, la protection que confère le droit du travail et un meilleur salaire, croyez-vous que les employeurs se satisferont de la situation, sans faire appel à d'autres étrangers, venus d'autres pays ? Régulariser les employés des métiers en tension ne constitue pas une solution.

La commission rejette successivement les amendements CL656, CL660 et CL743.

Elle adopte l'amendement CL1431 et l'article 4 ter est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements CL82 de Mme Emmanuelle Ménard, CL1101 de M. Gilles Le Gendre, CL658 de M. Christophe Naegelen et CL661 de M. Michel Castellani tombent.

Après l'article 4 ter

Amendement CL97 de Mme Françoise Buffet.

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En vertu de l'article 4 bis tel que nous l'avons adopté, une nouvelle autorisation de travail sera nécessaire à chaque changement d'employeur. Le présent amendement vise à éviter de multiplier les démarches des salariés étrangers, en les dispensant de solliciter une nouvelle autorisation de travail à chaque changement de contrat, que ce soit dans le cadre de la procédure d'obtention d'un premier titre de séjour ou dans celui d'une demande de titre de séjour pluriannuelle. Cette simplification servira également l'employeur et rendra la relation de travail plus fluide ; enfin, elle participera à désengorger les services d'instruction.

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Il est satisfait par l'adoption de l'amendement CL1687. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

L'amendement est retiré.

Amendement CL1569 de Mme Caroline Abadie

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Nous en avons débattu. Il est inspiré de l'article L. 414-13 du Ceseda, qui mentionne déjà la liste des métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement, et vise à territorialiser la liste. Puisque cet aspect doit faire l'objet d'un travail supplémentaire en vue de l'examen en séance, je vais le retirer. Le groupe Renaissance sera heureux d'être associé à ce travail.

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Il est satisfait par la nouvelle rédaction de l'article 4 bis, notamment grâce à l'adoption du sous-amendement CL1743.

L'amendement est retiré.

Article 5 (art. L. 526-22 du code de commerce) : Conditionnement de l'accès au statut d'entrepreneur à la régularité du séjour

Amendements de suppression CL507 de M. Julien Bayou, CL741 de M. Andy Kerbrat, CL897 de M. Boris Vallaud et CL1174 de Mme K/Bidi

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L'article prévoit d'assujettir le statut d'autoentrepreneur à la régularité du séjour ; nous y sommes opposés.

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Si un exilé sans papiers parvient à développer une activité en autoentrepreneur, c'est qu'il répond à un besoin. Personne ne se lancerait dans une activité inutile. Votre vision des travailleurs sans papiers est utilitariste. Dans le cas de l'autoentreprenariat, l'utilité est manifeste.

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Le présent amendement tend à supprimer l'article 5, qui prévoit de conditionner le statut d'autoentrepreneur à la preuve de la régularité du séjour. Il s'inscrit dans la même logique que nos précédents amendements visant à élargir le champ de la régularisation au-delà des salariés.

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J'ajoute que le Conseil d'État a jugé la mesure inutile et l'a déconseillée.

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L'article 5 prévoit de préciser dans le code du commerce que les étrangers ressortissants de pays non-membres de l'Union européenne (UE), d'un autre État partie à l'espace économique européen ou de la Confédération suisse ne peuvent accéder au statut d'autoentrepreneur s'ils ne disposent pas d'un titre de séjour les autorisant à exercer sous ce statut. La mesure est nécessaire. Avis défavorable.

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Gérald Darmanin, ministre

Cet article est capital. On peut se déclarer autoentrepreneur en étant en situation irrégulière. Depuis 2008, date de la création du statut, les gouvernements successifs ont permis qu'il en soit ainsi, sans doute par ignorance du problème. Or on estime que, sur 100 000 autoentreprises créées chaque année, entre 50 000 et 60 000 le sont par des personnes en situation irrégulière. Le phénomène a pris beaucoup d'ampleur avec l'essor des plateformes. Depuis trois jours, vous parlez de masse, or, je le répète, le regroupement familial ne concerne que 12 000 à 14 000 personnes par an. L'État, peut-être sans le savoir, a ainsi organisé une filière d'immigration irrégulière.

Le Conseil d'État n'a pas déclaré la mesure inutile ; il a souligné qu'elle relevait du domaine réglementaire. Nous souhaitons l'inscrire dans la loi parce que, malgré plusieurs tentatives d'accord avec les plateformes, celles-ci refusent de réguler elles-mêmes la situation en demandant aux personnes concernées leur titre de séjour, avant la création du statut d'autoentrepreneur. À la demande d'Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein-emploi et de l'insertion, la plateforme Uber Eats a récemment désactivé 2 500 comptes et envisage d'en supprimer 7 000 autres, à l'issue d'une campagne de vérification que nous lui avons imposée, mais d'autres plateformes n'obtempèrent pas.

Le meilleur moyen d'assécher ce flux d'immigration irrégulière, c'est d'exiger que les déclarants aient le droit de travailler, comme c'est le cas pour n'importe quelle activité professionnelle.

La suppression de l'article maintiendrait les personnes concernées dans l'hypervulnérabilité. Les plateformes opposent aux demandeurs d'emploi en situation irrégulière les risques que leur embauche leur ferait courir et leur proposent de créer leur microentreprise : elles-mêmes ne prennent aucun risque et peuvent exploiter les personnes ainsi privées de la protection du droit du travail. C'est vrai pour la distribution de repas et le transport, mais aussi dans le bâtiment, dans la restauration en restaurant où dans le nettoyage. C'est de la maltraitance sociale : les personnes restent deux, trois, cinq ans dans cette situation, paient des impôts et des cotisations sociales, ne bénéficient de rien, et ne peuvent demander leur régularisation, parce que la circulaire Valls ne prévoit pas leur cas. Les patrons continuent à profiter de ces salariés déguisés, et l'État est complice.

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Vous nous apprenez qu'un autoentrepreneur sur deux est en situation irrégulière – c'est très grave ! Nous voterons contre les amendements de suppression : il va de soi qu'on ne peut pas travailler en France sans papiers, et nous voulons renforcer le contrôle. Il faut d'ailleurs sanctionner ces personnes. En fait, la gauche propose d'encourager la fraude au travail.

La France est le pays d'Europe qui a le taux de prélèvements sociaux le plus élevés ; les artisans-commerçants traditionnels croulent sous les charges et sous les taxes, or une partie de l'hémicycle veut autoriser les travailleurs illégaux à poursuivre leur activité – c'est ahurissant !

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L'article 5 constitue un des aspects les plus importants du texte pour réguler l'immigration. La création du statut d'autoentrepreneur, qui a participé à libéraliser l'économie, est une bonne chose ; elle a permis à beaucoup de jeunes Français d'exercer une activité. Cependant, je le constate tous les jours dans les Alpes-Maritimes, de nombreux étrangers en situation irrégulière s'engouffrent dans la brèche. Nous nous opposerons donc aux amendements de suppression.

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Les membres du groupe Renaissance voteront contre ces amendements de suppression. Le présent article est essentiel. Nous avons longuement débattu de l'article 4 bis, qui concernait 7 000 personnes ; il est ici question de dizaines de milliers de personnes. Il s'agit d'un outil de lutte contre l'immigration illégale, ainsi que contre des plateformes plus qu'indélicates, qui profitent du lien de subordination caché.

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Je maintiens l'amendement mais nous le retravaillerons en vue de la séance, pour prendre en considération les éclairages apportés.

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Pour éviter la maltraitance que vous évoquiez, monsieur le ministre, il serait bien plus simple de régulariser les travailleurs.

J'aimerais être certaine de vous avoir bien compris. Vous avez dit que le fait que certaines plateformes, en France, n'exigent pas de titre de séjour de la part de ceux qui s'inscrivent comme autoentrepreneurs auprès d'elles crée un flux d'immigration, c'est bien cela ?

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Gérald Darmanin, ministre

Non, vous ne m'avez pas bien compris, ou alors je me suis très mal exprimé.

J'ai dit que sur 100 000 créations d'autoentreprises par an, nous considérions – sur la base de contrôles et compte tenu des difficultés à évaluer exactement, par définition, les phénomènes de fraude – qu'à peu près la moitié émane de personnes en situation irrégulière. Cela crée a posteriori une situation où ces personnes ont un statut validé par Bercy, paient des impôts et des cotisations, et, indépendamment de leur vulnérabilité capitalistique, viennent trouver l'État au bout de trois ou quatre ans pour demander à être régularisées sur le fondement de ce statut. D'un côté, le ministère des finances leur donne un statut fiscal ; de l'autre, le ministère de l'intérieur leur demande de partir en prononçant une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Incontestablement, cela entraîne des régularisations de fait, d'ailleurs impossibles pour une partie d'entre elles, la circulaire Valls ne prévoyant pas la régularisation de ces personnes ; ainsi, cela crée des « ni-ni ».

Nous avons vu dans quelques enquêtes judiciaires que des passeurs disaient aux personnes qu'ils faisaient passer qu'en France, on leur présenterait quelqu'un – il s'agit d'un employeur véreux qui ne les embauche pas, mais leur dit qu'il faut créer leur autoentreprise parce que c'est comme ça qu'ils y arriveront. Le premier responsable de cette situation, madame la députée, c'est l'État. Voilà pourquoi nous corrigeons ce point. Nous avons voulu le faire dès que je suis arrivé au ministère, en 2020, mais, au bout de deux ans de discussions avec les plateformes, certaines jouent le jeu, d'autres non.

Les sénateurs avaient supprimé cet article en commission, non parce qu'ils y étaient opposés, mais parce qu'ils considéraient qu'il relevait du domaine réglementaire. J'ai bien lu l'avis du Conseil d'État sur ce point. Je souhaite que la disposition soit de niveau législatif, pour pouvoir forcer les plateformes à accepter que l'État demande la preuve de la régularité du séjour à ceux qui veulent créer une autoentreprise.

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Les sénateurs avaient peut-être aussi été sollicités par des employeurs… mais ils ont montré, en rétablissant l'article en séance, qu'ils avaient compris qu'il était dans l'intérêt de l'État de pouvoir interdire ce recrutement frauduleux.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte l'article 5 non modifié.

Après l'article 5

Amendement CL1327 de Mme Maud Gatel

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Je me réjouis de l'adoption de l'article 5, qui empêchera que de trop nombreuses personnes soient maintenues dans la précarité et soumises au bon vouloir de certaines plateformes et de certains employeurs.

On a vu apparaître de faux indépendants et certains indépendants pourraient être requalifiés – je ne parle pas seulement des plateformes. Cela nécessitera de traiter les questions de l'exploitation des personnes, du travail illégal et, plus globalement, de la juste rémunération.

Pour améliorer les contrôles et professionnaliser cette activité, nous proposons la création d'une carte professionnelle pour les livreurs indépendants, à l'image de ce qui s'est fait pour les conducteurs de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC).

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Il me semble que l'article 5 correspond très précisément à ce que vous souhaitez, mais je laisserai le ministre répondre.

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Gérald Darmanin, ministre

Le raisonnement me paraît de bon sens, mais il s'agit clairement d'un cavalier législatif : la disposition n'a rien à voir avec le code des étrangers. Le sujet pourra être évoqué dans le cadre du groupe de travail avec les ministères de l'économie et du travail dont nous avons parlé. Le mieux serait de retirer l'amendement.

L'amendement est retiré.

Article 6 (Partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, art. L. 421-8, L. 421-16, L. 421-17 et L. 421-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Remplacement de la dénomination de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention « passeport talent » par la mention « talent », et fusion de trois de ces titres

Amendement CL1402 de M. Christopher Weissberg

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L'article 6 vise à transformer le passeport talent, qui concerne la partie la plus qualifiée et importante de notre immigration économique – 7 000 à 10 000 personnes par an : investisseurs, chercheurs, créateurs d'entreprise très qualifiés. Le Gouvernement a proposé de le simplifier à la suite du rapport Hermelin.

Notre amendement vise à aller un peu plus loin en créant, dans le cadre de notre compétition avec les autres grandes économies, un système de points comme celui qui existe au Canada et a été repris en Allemagne, à la place des critères qui figurent dans l'article.

Député des Français de l'étranger, je travaille beaucoup avec nos consuls sur l'attractivité. Le dispositif actuel n'attire guère. En objectivant chaque critère par des points selon une formule à élaborer avec le Gouvernement, le système que nous proposons permettrait de développer cette immigration.

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La modification que vous proposez est considérable. Si le système du passeport talent peut encore gagner en clarté et en lisibilité – c'est tout le sens de l'article 6 –, cette refonte totale à ce stade me semble excessive et nous n'en voyons pas tous les effets de bord. Je propose que nous validions déjà l'article 6 avant de retravailler plus largement sur le sujet si certains le souhaitent. Avis défavorable.

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Gérald Darmanin, ministre

L'article 6 vise à simplifier le passeport talent, inventé en 2016 par Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'intérieur. Le dispositif fonctionne notamment, mais pas seulement, dans les nouvelles technologies. L'article fusionne les dix titres de séjour qui existent à ce titre ; cela concourt à la diminution attendue du nombre de titres de séjour.

Monsieur le député, je salue le travail que vous avez conduit avec M. Ferracci et je comprends votre intention. Vous proposez une révision très profonde de la façon dont l'immigration économique est conçue. Pourquoi pas ? Mais elle ne semble pas faire l'unanimité parmi les acteurs économiques. J'ai ainsi reçu une lettre de France digitale, première association de start-up en Europe – vous avez reçu, j'imagine, une lettre similaire. Elle craint une complexification du passeport talent, lequel a montré son efficacité notamment dans le secteur de la French Tech, et préférerait que l'on en reste à l'article 6 proposé par le Gouvernement. Elle aimerait aborder la question en lien avec le travail et non avec l'immigration.

Peut-être est-ce avec le ministre du travail qu'il vous faudrait y réfléchir. Sur le principe, le système à points ne pose pas de problème. Il existe dans d'autres pays. Pourquoi, d'ailleurs, ne pas attribuer des points positifs et des points négatifs, parmi lesquels le trouble à l'ordre public, en lien avec le ministère de l'intérieur ? Créer ce régime ainsi, au détour d'un article, sans avoir échangé avec l'écosystème, me paraît prématuré. Mais une action collective d'ici à quelques mois ou années, avec les ministères du travail et de l'économie, semble envisageable.

Demande de retrait, sinon avis défavorable.

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C'est en effet une réforme profonde que je propose. Le système à points est plus dynamique et cumulatif – on peut ajouter d'autres critères, comme la maîtrise de la langue française. J'ai reçu, moi aussi, le courrier de France digitale et je ne suis pas sûr qu'ils aient parfaitement compris ce système : ils ont l'impression qu'il remettrait en cause le dispositif actuel alors que l'idée est de procéder de la même façon en affectant un nombre de points donné à tel ou tel des critères qui figurent dans la loi.

De nombreuses personnes ne comprennent pas notre système. Beaucoup d'Américains me disent avoir choisi un autre pays que la France parce que nos critères leur échappent. Le texte tente de les rendre plus efficaces, mais j'ai peur que nous n'y arrivions pas. Quand ce type de profil s'expatrie, il cherche à être rassuré sur les conditions de son arrivée et de l'obtention du titre.

Il faudrait que nous œuvrions ensemble, avec le ministère du travail, pour quantifier ces points, ce qui, sans vous enlever vos prérogatives gouvernementales, vous donnerait plus d'éléments pour développer un tel système. Le nombre de personnes concernées est trop faible ; nous avons besoin de beaucoup plus de monde. Le système à points rendrait le dispositif plus visible par les publics que nous voulons attirer.

Je retire volontiers mon amendement, en souhaitant que nous y réfléchissions d'ici à la séance.

L'amendement est retiré.

La réunion est suspendue de seize heures à seize heures trente.

Amendement CL746 de Mme Danièle Obono

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D'un côté, on juge nécessaire une carte talent ; de l'autre, on limite sa durée de validité à une année. Cela revient à surexploiter les talents en question – qui manquent peut-être ailleurs – sans leur offrir aucune stabilité. Nous souhaitons porter à au moins quatre ans la durée maximale de validité du passeport talent.

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Le critère de rémunération me semble tout à fait pertinent pour obtenir ce type de titre ; rien ne justifie de le supprimer. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL744 de Mme Danièle Obono

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Nous souhaitons supprimer la durée maximale de quatre ans des titres de séjour talent et talent-porteur de projet.

Ces deux types de titre sont attribués, pour le premier, aux étrangers exerçant des activités professionnelles hautement qualifiées, titulaires majoritairement de diplômes français de grade élevé, et, pour le second, aux étrangers porteurs d'un projet économique ou réalisant un investissement économique en France. Il s'agit donc de professionnels très qualifiés qui participent au rayonnement de l'économie française et qui ont besoin de sécurité administrative afin de se projeter et d'évoluer professionnellement et personnellement. Le délai maximal de quatre ans est insuffisant et peut les décourager au bénéfice d'États plus accueillants.

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Il n'est pas possible d'octroyer un titre de séjour sans durée maximale. Avis défavorable.

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Nous soutenons l'amendement.

On entend souvent dire que le passeport talent sert à alimenter des filières hautement qualifiées dans lesquelles on peine à recruter en France comme à l'étranger. Évidemment, toutes les améliorations qui pourront simplifier la vie de personnes cherchant à être régularisées seront bienvenues. Mais ne croyez pas une seconde que c'est ainsi que nous attirerons plus de personnes hautement qualifiées. Pour elles non plus, il n'y a pas d'appel d'air ! Ce qu'il faut pour cela, c'est travailler au développement de la recherche, à son financement et à la reconnaissance des diplômes.

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Si le passeport talent produisait vraiment un appel d'air, vous auriez intérêt à voter l'amendement : il permettrait de faire venir des personnes hautement qualifiées à des fonctions auxquelles nous avons du mal à recruter en France même. Vous avez décelé notre piège, madame la rapporteure : nous souhaitons que des personnes hautement qualifiées, ayant travaillé pendant quatre ans au service de notre pays, s'étant intégrées à la communauté nationale, n'aient pas à pointer en préfecture et à subir ce genre de galères ; c'était donc bien, à nouveau, une tentative pour régulariser les travailleurs sans papiers.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL804 de Mme Annie Genevard

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Les conditions d'obtention du passeport talent-salarié qualifié sont détaillées aux alinéas 6, 7 et 8. À l'alinéa 6, il est question d'activité professionnelle résultant d'une formation dans un établissement d'enseignement supérieur. À l'alinéa 7, d'« exercer des fonctions en lien avec le projet de recherche et de développement ». À l'alinéa 8, en revanche, il ne s'agit que « d'une mission entre établissements d'une même entreprise ou entre entreprises d'un même groupe ». Il me semble qu'il manque une précision. Je suggère d'ajouter « de recherche et de développement » après « mission ».

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L'alinéa 7 est plus large que ce que vous voulez préciser dans l'alinéa 8. Ce à quoi vous songez est bien couvert par l'alinéa 7. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.

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Je me suis peut-être mal exprimée. Prenons l'exemple d'une entreprise de production basique qui a une antenne en Tunisie et qui voudrait faire venir des salariés de ce pays – au sein du même groupe, donc – pour combler des besoins en main-d'œuvre en France. Ils ont assurément un certain talent – il y a des talents à tous les niveaux professionnels dans une entreprise. Cet exemple correspond à l'alinéa 8. Or votre optique est plutôt de favoriser les établissements d'enseignement supérieur et les projets de recherche et développement. L'alinéa 8, lui, est très large : il couvre toutes les entreprises voulant faire venir des salariés de l'étranger pour tout type de fonction.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL292 de M. Stéphane Rambaud

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Pour la sécurité de l'étranger et celle de la société, il nous est apparu opportun d'assortir d'une condition de ressources personnelles suffisantes la délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent-porteur de projet ». Cela garantirait qu'à son arrivée en France, l'étranger ait les moyens de subvenir à ses besoins, indépendamment du projet économique ou de l'investissement qui justifie sa demande.

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Les trois critères visés à partir de l'alinéa 20 ne contiennent aucune condition de rémunération, contrairement à ce qui est prévu pour d'autres motifs de délivrance. Rien ne justifie de l'instaurer pour les étrangers qui viennent créer ou investir sur notre sol. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL1560 de Mme Caroline Abadie

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L'article 6 vise à accroître la lisibilité et la cohérence des titres de séjour dits passeport talent, d'un côté, et des titres délivrés pour création de projet économique innovant, de l'autre, en fusionnant les deux. Ce sont 72 titres qui ont été délivrés pour création d'entreprise en 2022, plus 128 renouvellements la même année.

Notre amendement, travaillé avec l'Adie, l'Association pour le droit à l'initiative économique, vise à favoriser l'entrepreneuriat. Il est exigé ici cinq ans d'expérience professionnelle cumulés à un master, soit un total de dix ans : de quoi décourager certains jeunes talents. Une expérience professionnelle de trois ans serait largement suffisante. La valeur d'un projet d'entreprise n'attend pas le nombre des années ! Steve Jobs et Mark Zuckerberg avaient respectivement 19 et 21 ans quand ils ont créé Apple et Facebook.

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Je vous propose de retirer votre amendement pour y travailler d'ici à la séance.

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Gérald Darmanin, ministre

Je suis d'accord pour que la délivrance du titre ne dépende pas de critères étrangers à la création d'entreprise ou au talent : il faut viser le talent indépendamment de l'expérience professionnelle et éviter que les talents nous échappent. Mais il convient de garantir la lisibilité en matière de droit au séjour et de critères de durée, et le but est de vérifier que le projet est durable.

Nous pourrions en reparler dans l'hémicycle, ce qui nous laissera le temps d'établir une comparaison avec les pays voisins. À cette fin, je suggère le retrait pour que nous y travaillions avec la rapporteure et vous-même.

L'amendement est retiré.

Amendement CL485 de M. Frédéric Falcon

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Pour ne pas concurrencer des entrepreneurs français, mais aussi pour combler certains manques, cet amendement prévoit que le ministre de l'économie dresse une liste de secteurs dans lesquels la France souhaite que des étrangers viennent investir.

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En l'état du texte, la personne étrangère doit justifier d'un projet économique innovant, reconnu par un organisme public. Ce dernier critère me semble suffisant. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'article 6 non modifié.

Après l'article 6

Amendements CL421 et CL1562 de M. Guillaume Vuilletet

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En 2005, j'avais fait un rapport pour le Conseil économique et social sur la mobilité internationale des étudiants. Beaucoup d'étudiants arrivés en fin d'études ne pouvaient pas repartir porter un projet dans leur pays d'origine, notamment parce qu'ils manquaient d'expérience : il leur fallait une expérience supplémentaire.

Il y avait à l'époque, rue de Fleurus, une officine nord-américaine qui recrutait des étudiants que nous avions formés et leur permettait d'être employés directement dans l'industrie aux États-Unis. Je trouvais un peu bête que nous subventionnions l'industrie américaine à hauteur de 60 000 euros par an.

L'idée est de permettre à ces étudiants de rester chez nous dès lors qu'ils ont un projet et peuvent l'assumer et le financer, dans les mêmes conditions que pour le passeport talent, mais en leur évitant un aller-retour dans leur pays d'origine pour déposer leur demande.

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En réalité, votre dispositif durcit les conditions d'accès à la carte passeport talent mention « création d'entreprise », car il ajoute le critère de présence sur le territoire français depuis au moins cinq ans, qui ne figure par exemple pas à l'article L. 421-16 du Ceseda à propos du projet économique réel et sérieux.

Je vous propose de retirer vos amendements et de les retravailler en vue de la séance pour les faire correspondre à votre objectif.

Les amendements sont retirés.

Amendement CL1112 de Mme Violette Spillebout

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Il vise à créer une passerelle entre le statut d'apprenti et celui de travailleur, afin que l'étudiant majeur ayant fait son apprentissage dans une entreprise, diplômé et titulaire d'une promesse d'embauche dans la même entreprise puisse bénéficier d'un titre de séjour de travailleur.

Il s'agit de répondre aux besoins des entreprises qui s'investissent dans la formation de ces jeunes en leur évitant le délai et la complexité d'un nouveau dossier et d'une nouvelle publication de l'offre auprès de Pôle emploi. Il s'agit aussi de permettre au travailleur de ne pas repartir de zéro dans la constitution de son dossier d'autorisation de séjour en préfecture. Enfin, cela désengorgera les services administratifs.

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Cette passerelle serait vraiment intéressante. Je vous demande cependant de retirer votre amendement pour que nous puissions affiner le dispositif en vue de la séance.

L'amendement est retiré.

Article 7 (art. L. 421-13-1 [nouveau] du code de l'entrée et du séjour des étrangers, art. L. 4111-2-1 [nouveau], L. 4221-12-1 [nouveau], L. 4111-2 et L. 4221-12 du code de la santé publique) : Création d'une carte de séjour pluriannuelle « talent-professions médicales et de la pharmacie » et modification du régime juridique relatif aux praticiens de santé à diplôme hors Union européenne (Padhue)

Amendement CL706 de Mme Edwige Diaz

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Il s'agit de tenter de remédier à la diversification médicale, très grave dans notre pays : 30 % des Français vivent dans un désert médical. Ma circonscription est particulièrement concernée.

Vous proposez de faire venir des médecins étrangers quand nous préférons l'arrêt du numerus clausus. L'accès aux soins de nos compatriotes étant une urgence absolue, nous souhaitons assortir votre dispositif de plusieurs conditions : qu'il soit limité à cinq ans et que les professionnels de santé aient été formés en France et aient pratiqué le français, pour bien comprendre le patient.

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Une proposition de loi sur le même sujet est en cours d'examen et il faut une cohérence d'ensemble.

L'amendement CL1636 du président Sacha Houlié a été retiré avant la réunion au profit de l'amendement CL1242, qui rétablit la carte de treize mois pour les praticiens non encore lauréats des épreuves de vérification des connaissances (EVC). Mon avis sur les autres amendements sera défavorable afin que, dans le cadre du présent texte, nous nous calions sur le dispositif à venir.

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Cet amendement témoigne de l'incohérence du Rassemblement national. Il dit qu'il faut supprimer le numerus clausus, mais c'est déjà fait – on manque simplement de places dans les universités. Il dit qu'il faut former les praticiens en France, mais défend d'autres amendements pour interdire aux gens de venir y étudier.

Si on vous suivait, les déserts médicaux deviendraient encore plus désertiques. Par pure xénophobie, vous ne voulez pas dans nos hôpitaux de médecins de nationalité étrangère. Nous préférons nous préoccuper de la santé de tout le monde, et s'il faut pour cela que nous embauchions des médecins et des soignants qui n'ont pas la nationalité française, c'est très bien.

Nous voterons évidemment contre l'amendement.

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On voit à nouveau la mauvaise foi de nos collègues de la Nupes. Le numerus clausus a été remplacé par un numerus apertus et nous ne souhaitons pas faire venir de nouveaux médecins, de nouvelles personnes étrangères. Voilà pourquoi nous proposons de limiter le dispositif à cinq ans. Notre position s'explique par notre vision humaniste : nous ne voulons pas vider des pays défavorisés de leurs élites médicales.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CL1177 et CL1176 de Mme Emeline K/Bidi

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Par l'amendement CL1177, nous proposons d'abaisser à trois mois la durée d'occupation d'un emploi dans un établissement public ou privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social requise pour bénéficier de la carte pluriannuelle mention « talent-profession médicale et de la pharmacie ».

Ce titre relève d'une logique libérale d'utilisation du personnel hospitalier : les professionnels à diplôme étranger sont considérés comme une variable d'ajustement dans le mauvais fonctionnement de notre système hospitalier et placés dans une situation précaire. Nous voulons leur apporter plus de sécurité.

L'amendement CL1176 s'oppose à la limitation de la rémunération des personnels de santé titulaires de la même carte qui travaillent au sein du système hospitalier français.

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Le premier des deux amendements aurait pour effet de supprimer les critères de la décision d'affectation, de l'attestation permettant un exercice temporaire ou de l'autorisation d'exercer pour l'octroi de la carte de quatre ans. De plus, l'accès à l'exercice d'une profession médicale serait trop assoupli, ce qui comporterait des risques. Je peine enfin à voir en quoi l'amendement concourt à « une véritable revalorisation des Padhue », qu'il s'agisse du statut, de la rémunération ou de l'affectation.

En ce qui concerne l'amendement suivant, je suis favorable au maintien du critère de rémunération. Il est évident que le décret en Conseil d'État fixera un niveau de rémunération inférieur à celui des praticiens nationaux, mais il importe de maintenir un seuil pour s'assurer de la qualité des praticiens qui viendront exercer dans nos établissements.

Avis défavorable aux deux amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements identiques CL1705 de Mme Élodie Jacquier-Laforge et CL1175 de M. Davy Rimane

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Il s'agit de supprimer l'ajout sénatorial en vertu duquel la carte serait délivrée « sous réserve de la signature de la charte des valeurs de la République et du principe de laïcité ».

Cette mention est superflue : comme l'ensemble des étrangers sollicitant un document de séjour, les praticiens étrangers des professions médicales et de la pharmacie qui demandent une carte de séjour talent créée par le présent article auront à souscrire au contrat d'engagement prévu par l'article 13.

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Déjà, on les fait venir dans un système hospitalier dont vous peinez à atténuer les dysfonctionnements, et en plus, il faudrait qu'ils signent une charte spéciale. Cela fait beaucoup de suspicion pour des gens que l'on envoie au charbon.

La commission adopte les amendements.

Amendement CL748 de Mme Danièle Obono

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Nous souhaitons inclure dans la liste des praticiens et praticiennes étrangères pouvant bénéficier d'une carte pluriannuelle portant la mention « talent‑profession médicale et de la pharmacie » celles et ceux qui exercent sous les fallacieuses fonctions de « faisant fonction d'interne », « praticiens attachés » ou « praticiens attachés associés ». Cette demande émane des associations et syndicats de Padhue. La satisfaire ne serait que justice.

Les Padhue ont tenu l'hôpital public français à bout de bras pendant la pandémie. Environ 5 000 exercent dans nos hôpitaux. Ils ont les mêmes fonctions et les mêmes responsabilités que leurs collègues français, mais leurs titres et rémunérations sont souvent bien inférieurs. Le parcours pour l'obtention de l'autorisation d'exercer, long et complexe, passe obligatoirement par la réussite aux épreuves de vérification des connaissances, difficiles pour ces praticiens et praticiennes.

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Je propose que nous adoptions déjà le dispositif prévu par le texte, afin de pouvoir faire un point d'étape et voir comment il est appliqué, avant d'envisager de l'étendre. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL1242 de M. Laurent Marcangeli

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Cet amendement vise à rétablir l'autorisation temporaire d'exercice à destination des professionnels médicaux et de la pharmacie diplômés de pays situés hors de l'Union Européenne. Nous sommes attachés à l'accès aux soins dans l'ensemble du territoire. Dans un contexte de pénurie croissante de professionnels de santé, ne nous privons pas des talents et des compétences dont nous manquons cruellement.

La rédaction proposée est consensuelle puisqu'elle a recueilli l'assentiment du Sénat lors de l'examen de la proposition de loi de notre collègue Frédéric Valletoux.

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J'avais déposé un amendement sur cet article, mais je l'ai retiré au profit du vôtre.

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Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, je suis favorable à cet amendement.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 7 modifié.

Après l'article 7

Amendements CL520, CL522 et CL524 de Mme Sarah Tanzilli

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Ces amendements visent à apporter une réponse à l'embolie des services des étrangers dans les préfectures.

Le premier permet à l'étranger de justifier de la régularité de son séjour pendant une durée de six mois à l'expiration de son titre de séjour, plutôt que de trois mois. Cela offre une meilleure sécurité juridique au demandeur qui, compte tenu des délais de traitement des demandes, peut se trouver temporairement en situation irrégulière, avec de lourdes conséquences, car il peut perdre son activité professionnelle et ses droits sociaux.

L'amendement CL522 propose un régime de renouvellement tacite des titres de séjour pluriannuels et des cartes de résident dans les six mois suivant la demande. Ce délai offre le temps nécessaire à l'administration pour refuser le renouvellement en cas de nécessité, respecte le délai de réponse de six mois exigé de l'administration depuis 2018 et sécurise le parcours du demandeur, notamment s'agissant de son travail.

Un effort significatif a été consenti pour augmenter le nombre de personnels disponibles en préfecture pour gérer les demandes. Il convient maintenant de chercher de nouvelles solutions à cette embolie. Le renouvellement tacite dans le silence de l'administration limiterait ce problème.

J'appelle enfin votre attention sur le fait que le titre II du présent projet de loi prévoit la possibilité de retirer un titre de séjour en cas de non-respect de nos valeurs ou de trouble à l'ordre public. La période de renouvellement du titre ne sera donc plus le seul moment où un étranger qui pose problème pourra se voir retirer son droit au séjour.

Je retire l'amendement CL524 qui présente une erreur de rédaction.

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En ce qui concerne l'amendement CL520, l'article L. 433-3 du Ceseda dispose que « lorsque l'étranger titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle d'une durée de quatre ans, d'une carte de résident ou d'un titre de séjour d'une durée supérieure à un an prévu par une stipulation internationale en demande le renouvellement, il peut justifier de la régularité de son séjour entre la date d'expiration de ce document et la décision prise par l'autorité administrative sur sa demande par la présentation de la carte ou du titre expiré, dans la limite de trois mois à compter de cette date d'expiration ». Pendant cette période, « l'étranger conserve l'intégralité de ses droits sociaux ainsi que son droit d'exercer une activité professionnelle ».

Je n'ai pas d'opposition de principe à l'allongement du délai à six mois, mais l'amendement impliquerait aussi que l'étranger conserverait ses droits sociaux pendant six mois après l'expiration de son titre de séjour. Ce serait à mon sens trop long.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

En ce qui concerne l'amendement CL522, je juge utile que l'autorité administrative vérifie à chaque renouvellement si l'étranger remplit toujours les conditions nécessaires pour obtenir un titre de séjour. Le ministre nous a indiqué que les dispositifs seraient revus et certainement allégés. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

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Je maintiens les deux amendements CL520 et CL522.

Dans mon expérience, il est rare que l'administration réponde dans les trois mois. Cela pose de vrais problèmes, je le constate sur le terrain. L'allongement du délai me paraît tout à fait raisonnable. Par ailleurs, nous n'avons pas beaucoup d'informations sur ce qu'entend faire le ministre pour simplifier le renouvellement des titres pluriannuels et des cartes de résident.

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Le problème est bien réel, nous le savons tous : l'embolie des services des étrangers crée des clandestins malgré eux. Mais, avec le dispositif que vous prévoyez pour la régularisation de clandestins dans les métiers en tension, vous allez demander aux préfets de justifier toute démarche contraire à la régularisation. Le corps préfectoral, que vous mettez sous la coupe du juge administratif, devra justifier encore davantage ses décisions. L'embolie va donc s'aggraver ; il y aura de moins en moins de rendez-vous, de moins en moins de dossiers traités.

La proposition de notre collègue n'est pas, je crois, la bonne solution ; mais il y a là un vrai problème. Il ne faut pas alourdir la charge des préfets.

L'amendement CL524 est retiré.

La commission rejette successivement les amendements CL520 et CL522.

Amendement CL1317 de M. Mathieu Lefèvre

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Cet amendement vise à étendre aux bénéficiaires de la protection temporaire dont bénéficient les déplacés d'Ukraine les procédures d'autorisation d'exercice médical existant en faveur des autres bénéficiaires de la protection temporaire internationale, par exemple les réfugiés.

Suivant la logique d'intégration par le travail qui sous-tend l'ensemble de ce texte, cet amendement permettrait d'apporter des solutions à la désertification médicale.

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Votre proposition supprime la condition de réciprocité mais maintient la reconnaissance du diplôme par le ministre de la santé. Or, s'agissant des infirmiers, les conditions de formation sont hétérogènes : en Ukraine, elle dure deux ans contre trois en France. Demande de retrait.

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J'entends votre argument concernant les infirmiers. Je retire l'amendement afin que nous puissions le retravailler en vue de la séance.

L'amendement est retiré.

Article 7 bis (nouveau) (art. 175-2 du code civil) : Extension du sursis à la célébration de mariage prononcé par le procureur de la République en cas de suspicion de mariage frauduleux

Amendements de suppression CL751 de Mme Andrée Taurinya et CL1178 de M. Davy Rimane

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Nous proposons de supprimer cet article qui vise à étendre le sursis à la célébration du mariage, qui passerait de quinze jours à deux mois renouvelables. Une telle disposition montre, une fois de plus, une méfiance systématique vis-à-vis des étrangers qui s'immisce dans tous les espaces de la vie privée. Elle porte ainsi atteinte au droit à la vie privée et au droit à mener une vie familiale normale, garantis par la Constitution à tous, sans considération de nationalité.

Nous rappelons que nous sommes favorables au rétablissement d'un titre de séjour de dix ans comme titre de référence pour les étrangers respectant le droit au regroupement familial, et à la régularisation automatique de tout conjoint marié ou pacsé. Ces mesures sont prévues par notre programme « L'Avenir en commun ».

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Avis défavorable. Je vous invite à vous rallier à mon amendement CL1763, qui supprime les alinéas 2 et 3 de cet article.

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Nous ne voterons pas ces amendements de suppression, car l'article 7 bis améliore le dispositif existant. Le préfet aura davantage de temps pour diligenter une enquête lorsqu'il est saisi par l'officier d'état civil qui a un doute sur la sincérité d'au moins un des mariés.

Je regrette que nos amendements visant à interdire le mariage aux personnes en situation irrégulière aient été déclarés irrecevables. Il est ahurissant que nous ne puissions pas débattre de ce sujet. Des maires sont attaqués en justice parce qu'ils refusent, légitimement, de marier des gens en situation irrégulière. C'est arrivé à Béziers, où le maire a à juste titre refusé de marier quelqu'un qui était sous OQTF. Les Français ne comprendraient pas que nous ne nous saisissions pas de ce sujet majeur !

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On entend parfois des commentaires sur le vote des différents groupes… Je n'aurai pas l'outrecuidance de souligner que certaines des positions de la minorité présidentielle sont manifestement soutenues par le Rassemblement national.

On retrouve ici la suspicion systématique à l'égard des étrangers, qui ne nous paraît pas justifiée. Par ailleurs, ce qui s'est passé à Béziers n'était pas légal.

La commission rejette les amendements.

Amendements CL158 et CL159 de M. Éric Pauget

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Ces deux amendements – le second est un amendement de repli – reprennent des propositions formulées au Sénat. Le Gouvernement s'était alors dit favorable au travail sur une nouvelle rédaction.

Un officier d'état civil peut saisir le procureur s'il a un doute sur le consentement d'un des mariés, mais pas si ce doute porte sur la finalité du mariage ; il peut notamment craindre de se trouver face à un mariage frauduleux conclu uniquement pour obtenir la nationalité, un titre de séjour ou des protections particulières.

Je vous propose de permettre à l'officier d'état civil de saisir le procureur dès lors qu'il nourrit un doute.

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Avis défavorable.

La liberté de mariage est garantie par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et par l'article 12 de la Convention européenne des droits de l'homme. Il convient donc d'agir avec la plus extrême précaution.

L'article 175-2 du code civil s'applique aux situations que vous décrivez, c'est-à-dire celles où il n'existe pas de véritable intention matrimoniale. En outre, l'article L. 823-11 du Ceseda punit de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende « le fait, pour toute personne, de contracter un mariage […] aux seules fins d'obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour ou le bénéfice d'une protection contre l'éloignement ou aux seules fins d'acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française ». Le droit actuel me paraît donc suffisant.

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Vous n'avez pas bien saisi ce que je propose, madame la rapporteure. L'officier d'état civil, et donc les services de la mairie qui instruisent le dossier de mariage, ne peuvent aujourd'hui saisir le procureur que s'ils doutent du consentement d'un des mariés ; je propose qu'ils puissent également le faire en cas de doute sur la finalité du mariage, c'est-à-dire s'ils pensent que le mariage est destiné à faire obtenir un titre de séjour, une protection… Le procureur pourra alors appliquer le texte que vous citez.

Cette question a été débattue au Sénat. C'est une réalité que vivent les maires.

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Gérald Darmanin, ministre

Je m'excuse d'arriver avec retard dans votre conversation.

Au Sénat, la discussion, notamment avec Mme la sénatrice Valérie Boyer, a porté sur les difficultés rencontrées par les maires pour obtenir des réponses du parquet. Beaucoup de maires reçoivent les futurs mariés pour vérifier que leur consentement est éclairé – ce que je faisais moi-même quand j'étais maire. Quand il y a un doute, ils le signalent, mais souvent, le parquet ne répond pas ou indique qu'il faut procéder tout de même au mariage. Le maire se trouve alors dans une situation délicate.

Vous insistez sur le fait qu'au-delà du défaut de consentement, il arrive de s'interroger sur la nature du lien, de se demander si les mariés veulent vraiment une vie commune au sens du code civil et si le mariage n'est pas seulement organisé pour obtenir des papiers. Cela arrive, je peux en témoigner.

C'est un sujet qui doit être travaillé avec les services du garde des sceaux : le maire agit en l'occurrence en tant qu'agent de l'État. Je ne peux donc pas m'avancer, même si je ne vois pas d'obstacle à vous donner satisfaction.

Les parquets ne sont pas organisés pour répondre aux signalements de plus en plus nombreux des officiers d'état civil. Il faut trouver le meilleur délai et se demander quelle doit être la règle si le parquet ne répond pas : il ne faudrait pas que les maires soient à nouveau en difficulté.

Je vous propose d'en reparler lors de l'examen en séance publique, après un travail avec la Chancellerie et avec Mme la rapporteure.

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Vous avez bien compris le sujet, monsieur le ministre. Donnons la capacité à l'officier d'état civil de faire connaître ses doutes au procureur ; celui-ci mènera l'enquête. C'est un sujet que l'on rencontre de plus en plus dans nos mairies et qu'il faut traiter.

Je prends acte de votre proposition de retravailler l'amendement en vue de la séance.

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Cet amendement est très intéressant. Il existe une contradiction entre deux droits : la liberté de fonder une famille et l'obligation de lutter contre les mariages blancs.

L'été dernier, à Béziers, on a dit au maire qu'il avait l'obligation de marier quelqu'un qui faisait l'objet d'une OQTF. Pour un maire qui veut faire respecter dans sa commune les obligations légales concernant le séjour des étrangers, devoir marier un clandestin est un crève-cœur. Profitons de ce projet de loi pour régler ce problème, comme vous vous y étiez engagé, monsieur le ministre.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL1763 de Mme Élodie Jacquier-Laforge

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Les modifications prévues par l'article 7 bis entraîneraient un surcroît d'activité important pour les parquets, tenus de rendre une décision d'injonction de procéder au mariage même dans des situations qui ne posent pas de difficulté particulière. Le sursis à la célébration ne serait pas motivé par la nécessité de procéder à une enquête, mais par l'impossibilité pour le parquet de délivrer des injonctions de procéder au mariage dans le délai prévu par la loi. Le sursis ne présenterait, par ailleurs, aucune plus-value puisqu'en l'absence de difficulté particulière, le procureur de la République ne diligentera aucune enquête.

Il apparaît, en revanche, opportun de conserver l'allongement de la durée du sursis à deux mois prévu par le Sénat.

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S'agissant des amendements de M. Pauget, je voudrais dire que l'intérêt de permettre à l'officier d'état civil d'effectuer cette démarche, c'est qu'il connaît très bien la population. Cette compétence est très précieuse.

S'agissant de l'amendement de Mme la rapporteure, vous supprimez la mention de l'enquête à laquelle doit procéder le procureur ainsi que le fait que l'avis soit réputé favorable au sursis en l'absence de réponse. Je le regrette. M. le ministre vient de le dire, ce dont les maires se plaignent, c'est l'absence de réponse du parquet. Votre amendement ne répond pas à ce problème.

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Puisque les maires se plaignent, à juste titre, de ne pas obtenir de réponse du parquet, la proposition de M. Pauget est tout à fait pertinente puisqu'il permet de suspendre les mariages en attendant qu'une enquête soit réalisée.

Il ne faut pas fermer les yeux : la fraude existe. Il y a des gens qui se marient, non par amour, mais pour obtenir des papiers, tous les maires vous le diront. Il y a aussi des femmes qui sont contraintes de contracter un mariage. Des personnes importent parfois d'ailleurs des cultures où la femme n'a pas son mot à dire. Nous pensons à ces femmes malheureusement trop soumises à l'homme et contraintes de se marier. Oui, ça existe, allez voir dans les quartiers de vos circonscriptions, allez rencontrer les associations de femmes qui se battent !

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Gérald Darmanin, ministre

Madame Ménard, vous posez une question un peu différente de celle de M. Pauget : vous souhaiteriez que le maire puisse s'opposer à un mariage si l'une des personnes est en situation irrégulière. Le Sénat a essayé de travailler cette question et n'a finalement pas retenu cette proposition.

Le fait de marier quelqu'un sur le territoire national n'empêche aucunement de l'expulser – ce qui s'est passé à Béziers, ce que vous auriez pu dire. Je peux comprendre que l'élu ne veuille pas procéder à la cérémonie parce qu'il pense que celle-ci ne sert qu'à récupérer des papiers ; mais on ne peut pas exclure que ce mariage soit le résultat de l'amour de deux personnes et destiné à fonder une famille. Il n'est pas toujours facile de le savoir.

Le législateur s'est depuis longtemps penché sur cette question. Je vous renvoie à une question écrite posée au Gouvernement par M. Gaymard en 2010. Le Gouvernement avait alors répondu qu'interdire le mariage d'une personne clandestine ne serait pas constitutionnel, en renvoyant à deux décisions du Conseil constitutionnel de 1993 et 2003, qui s'appuient sur les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et affirment le principe de la liberté de fonder une famille. Une circulaire du 2 mai 2005 précise qu'« en aucun cas, l'officier de l'état civil ne peut refuser de célébrer le mariage d'une personne au seul motif qu'elle est en situation irrégulière ». C'était sous la présidence de Jacques Chirac, mais la règle a été confirmée sous celle de Nicolas Sarkozy. Comme vous le voyez, il n'est pas facile de résoudre cette difficulté, sauf si – et nous rejoignons là la question de M. Pauget – le mariage ne se fait pas par amour mais pour récupérer des papiers. Je redis aussi que le mariage n'empêche pas l'expulsion.

La question posée par M. Pauget et Mme Genevard n'est pas idéologique, mais pratique. Lorsqu'il célèbre un mariage, le maire agit au nom de l'État. Il peut, à ce titre, mener lui-même une enquête administrative, recevoir les gens, voire refuser de célébrer le mariage s'il constate un défaut de consentement ou la vulnérabilité de quelqu'un – ce qui concerne singulièrement, mais pas uniquement, des femmes. Mme Genevard a raison de dire que le maire est le mieux placé pour constater la réalité de la situation, et j'imagine qu'on ne refuse jamais un mariage de gaieté de cœur ; mais il peut aussi y avoir des situations militantes : le maire ne doit pas pouvoir décider de tout tout seul.

Le procureur de la République peut lui enjoindre de procéder au mariage : dans ce cas-là, le maire doit bien accepter qu'il exerce cette fonction sous l'autorité du procureur.

Le problème survient lorsque le procureur ne répond pas. Or je ne crois pas que les parquets soient à même de répondre, même avec un délai allongé. Je soutiens donc la position de la rapporteure, ce qui ne veut pas dire que nous ne pouvons pas en reparler en séance publique. Nous devons travailler avec le garde des sceaux.

Et si nous permettons aux maires d'intervenir davantage, ou même si nous l'exigeons d'eux, cette règle sera-t-elle applicable partout ? On voit ce genre de mariages dans les communes les plus rurales, dont les maires ont très peu de services.

Encore une fois, nous devons chercher l'efficacité. Je vous engage à reposer la question en séance. Je m'engage, d'ici là, peut-être avec Mme la rapporteure si elle le souhaite, à rencontrer les services du garde des sceaux pour voir comment améliorer les choses. Ces interrogations sont de plus en plus nombreuses et il faut y répondre.

L'idée de Mme Boyer, sur laquelle elle a d'ailleurs été battue dans l'hémicycle du Sénat, c'était que si le procureur de la République exige que le mariage soit célébré, il n'a qu'à procéder lui-même à la cérémonie. Cela ne me paraît pas acceptable.

Encore une fois, ce n'est pas une question idéologique, mais pratique. Votre amendement pose une bonne question mais il ne me semble pas que la réponse qu'il apporte améliore la situation pour les maires, puisque le parquet ne verra pas ses moyens augmenter et ne répondra pas plus. La solution du Sénat ne me paraît pas adaptée non plus. Bref, travaillons cette question en vue de la séance pour aboutir à un compromis.

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Je proposais, non seulement un délai supplémentaire, mais aussi la création des actes de nullité, qui n'existent pas aujourd'hui. Le parquet disposerait ainsi des outils pour répondre au maire. On ne peut pas justifier par une insuffisance des moyens de la justice le fait de ne pas répondre à ce que vivent nos communes, à ce que vit notre pays.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 7 bis modifié.

Article 7 ter (nouveau) (art. L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Durcissement des conditions d'attribution du titre de séjour pour les jeunes majeurs qui ont été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance avant l'âge de 16 ans

Amendements de suppression CL1706 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, CL1634 de M. Sacha Houlié, CL752 de Mme Élisa Martin, CL902 de M. Boris Vallaud, CL1179 de Mme Elsa Faucillon, CL1303 de M. Jean-Claude Raux, CL1328 de Mme Blandine Brocard et CL1563 de Mme Marie Guévenoux

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L'article 7 ter, introduit par le Sénat, durcit les conditions d'attribution de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » aux jeunes majeurs ayant été confiés au service de l'aide sociale à l'enfance (ASE) au plus tard le jour de leurs 16 ans, en disposant que l'étranger ne doit plus n'avoir aucun lien avec sa famille restée dans son pays d'origine.

La rédaction actuelle de l'article L. 423-22 du Ceseda me paraît plus pertinente, car elle permet une analyse individuelle de la situation du jeune majeur concerné : un étranger confié à l'ASE ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses 16 ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » d'une durée d'un an, sous réserve notamment de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. Je propose de conserver cette disposition, donc de supprimer l'article 7 ter.

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Nous souhaitons aussi supprimer l'article, qui laisse entendre que ces jeunes chercheront à bénéficier d'une carte de séjour alors qu'ils sont encore en contact avec leur famille restée dans le pays d'origine. Cela n'a aucun sens. La vraie difficulté à laquelle ils sont confrontés est d'avoir une prise en charge sociale et éducative, qui leur permette de construire leur chemin parmi nous, hors de logiques xénophobes et suspicieuses. Il est vrai que cela empêche l'individualisation de la mesure, un principe qui nous est cher.

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C'est une mesure supplémentaire pour pourrir la vie de jeunes pris en charge par l'ASE, dont le parcours de migration n'a pas été parsemé de pétales de roses. Les arguments sont vains face à l'imbécillité.

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L'article vise à stigmatiser encore plus les jeunes majeurs qui, pour reconstituer leur état civil, sont parfois obligés de contacter une famille sur place. Il y a une différence entre « existence de liens » ou « nature des liens » avec une famille restée dans le pays d'origine. Nous sommes tous capables de le comprendre.

En matière de protection de l'enfance, parmi tous les autres chantiers de l'ASE, il est impératif de former les agents afin que les mineurs non accompagnés (MNA) soient accompagnés dans leur procédure de régularisation.

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Demander à un jeune de couper toute relation avec sa famille dans son pays d'origine est une aberration. Cette condition est néfaste pour son bien-être et disproportionnée pour l'obtention d'un titre de séjour d'une année. Nous parlons ici de jeunes majeurs intégrés, précédemment pris en charge par l'aide sociale à l'enfance, qui doivent avoir le droit de poursuivre leur parcours en France. Aucune condition de cette sorte ne devrait être nécessaire ; un mineur arrivé en France a droit, une fois majeur, à voir sa situation régularisée. Ce critère ouvre également la voie à l'arbitraire sur l'existence ou l'absence de liens avec sa famille : c'est la porte ouverte à la loterie du traitement des situations individuelles.

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Tel qu'il est rédigé, l'article L. 423-22 prévoit déjà des conditions drastiques, qui semblent suffisantes. Ces enfants qui deviennent adultes ont reçu une éducation dans notre pays et sont souvent intégrés ; en tout cas, ils en ont la volonté forte. Il n'est pas concevable de dire à un enfant, qui est arrivé en France à 14 ans et qui a eu la chance d'aller à l'école de la République pendant quatre ans, qu'à 18 ans, il doit retourner dans son pays – d'autant que s'il était arrivé seul, c'était sans doute pour de bonnes raisons. C'est pourquoi nous voulons supprimer l'article.

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Les conditions sont déjà drastiques dans le droit existant. Elles semblent suffisantes pour donner une chance à ces jeunes dont l'éducation et la formation ont été prises en charge par l'État français pendant plusieurs années. Pour cette raison, nous souhaitons supprimer l'article.

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Gérald Darmanin, ministre

L'article est superfétatoire car, depuis 2021, par l'instruction que j'ai donnée aux préfets, tous les MNA bénéficient d'un examen anticipé du droit au séjour, ce qui évite les difficultés évoquées : 93 % des demandes traitées ne sont pas contestées ; elles sont soit acceptées, soit refusées par de jeunes majeurs qui retournent dans leur pays.

L'article 7 ter s'adresse aux 7 % des demandes qui font l'objet de contestations, toujours de la part de l'administration, parce qu'elle a constaté des fraudes à l'état civil manifestes. Nous avons réglé cette question à l'article 1er ter, lequel prévoit la légalisation des actes d'état civil, qui manque cruellement aux services des préfectures, pour effectuer des vérifications.

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Votre explication est kafkaïenne : les mineurs non accompagnés, pris en charge par l'ASE, sont censés ne pas avoir de parents. Quand on demande à s'en assurer, on dit que cela n'est pas possible. Par vos amendements de suppression, vous êtes en train de valider une filière d'immigration par laquelle des enfants mineurs de pays en voie de développement sont envoyés en France pour être pris en charge par l'ASE dans les départements en tant que MNA, et, au final, recevoir un titre de séjour.

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Comme d'habitude, par ces amendements, vous détricotez les dispositions que le Sénat avait durcies. En l'occurrence, il s'agit des conditions d'attribution de titres de séjour pour les jeunes majeurs pris en charge par l'ASE avant 16 ans. Ce statut n'est pas marginal : notre pays comptait 16 000 MNA en 2019, contre 5 000 en 2014. Surtout, il est entouré d'une suspicion de fraude. Selon différents interlocuteurs, 60 % à 90 % des mineurs non accompagnés déclarés seraient majeurs.

Dans votre exposé sommaire, vous dites que « ces enfants placés donnent le meilleur d'eux-mêmes pour réussir leurs études ». Je ne peux me satisfaire de ce présent valant vérité générale : c'est peut-être le cas de certains mais, à Paris, les MNA représentent 75 % des mineurs déférés devant le parquet. En 2020, en Gironde, 42 % de la délinquance des mineurs étaient le fait de MNA.

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Vous êtes immonde ! On parle de gosses qui galèrent, qui sont seuls, à qui il arrive des folies dans la rue, qui vont d'hôtel en hôtel. Les départements ont du mal à s'en occuper, car les MNA sont souvent la variable d'ajustement des budgets. Ils doivent enchaîner les formations courtes pour être rapidement employables, dans un pays qu'ils ne connaissent pas, où ils sont seuls. Vous voulez faire de la démagogie sur leur dos, pour essayer de montrer une prétendue fermeté. Enfin, vous avez des enfants ! Vous êtes en train de raconter que des parents enverraient leurs gosses dans un pays pour optimiser la loi et obtenir un titre de séjour.

On ne fait pas de la politique uniquement pour récupérer des points dans les sondages sur la part de xénophobie qui peut exister en France. Des gens paient les conséquences de ce que nous votons. Là, vous votez contre des gosses qui vivent le pire de ce que peuvent vivre les gosses dans le monde !

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M. Boyard a dit les choses justement : ce sont des enfants, qui ne sont pas systématiquement arrivés par des filières illégales.

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Non, madame Diaz, je reste au Mouvement démocrate, un parti qui met l'homme au centre de ses préoccupations, quand vous n'arrivez même pas à y mettre les enfants. Pour vous, ces enfants-là sont des délinquants, ils n'obtiennent pas de bons résultats à l'école. Mais comme nos propres enfants, qui peuvent y échouer ou être parfois turbulents ! Parce que ce sont des enfants étrangers, on devrait être impitoyable avec eux. J'aime que ce texte révèle ce que vous êtes : le parti de la haine, de la xénophobie, du rejet de l'autre.

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Une chose est sûre, ces enfants ont été accueillis par l'ASE parce qu'ils sont mineurs – au moindre doute sur leur minorité, ils en sont sortis. Ces enfants n'arrivent pas dans les meilleures conditions en France. Ils ont vécu des parcours de migration traumatisants puis l'accueil de l'ASE qui, dans la plupart des départements, les place à l'hôtel. Souvent, les jeunes filles se prostituent pour s'y maintenir. Lorsqu'ils atteignent 18 ans, ils ont des droits, que cela ne vous plaise ou non. Ce n'est pas parce qu'ils ont la peau noire que l'on doit leur dénier tous les droits humains. Nous avons une responsabilité dans cette assemblée !

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Gérald Darmanin, ministre

J'ai du mal à suivre nos débats tant ils s'éloignent parfois du texte.

Le Sénat a modifié le second alinéa de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de sorte à vérifier, pour la délivrance de la carte de séjour, entre autres conditions, l'absence avérée de liens familiaux du mineur étranger dans son pays d'origine, plutôt que la nature de ces liens. Il n'y a pas là de quoi créer une nouvelle filière d'immigration : les dispositions sont déjà en vigueur. Restons calmes sur cette mesure ! J'ai expliqué que la difficulté était réglée pour les 7 % de demandes contestées en raison de fraudes documentaires.

En tout cas, la rédaction du Sénat ne règle rien puisque le mineur devrait prouver l'absence avérée de liens avec sa famille d'origine. Actuellement, il justifie de la nature de ses liens, à charge pour le préfet d'évaluer leur intensité. La disposition proposée semble donc moins efficace que le droit en vigueur, y compris pour refuser un titre de séjour à un mineur devenu majeur.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 7 ter est supprimé et les amendements identiques CL1070 de M. Boris Vallaud et CL1304 de M. Jean-Claude Raux tombent.

Après l'article 7 ter

Amendement CL664 de M. Bertrand Pancher

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L'amendement est satisfait par la décision du 3 juin 2022 du Conseil d'État, qui précise le cadre juridique du recours obligatoire à un téléservice. S'agissant plus spécifiquement des demandes de titres de séjour, le Conseil d'État a posé l'obligation de prévoir une solution de substitution à l'usage d'un téléservice, afin de s'adapter aux besoins des demandeurs. Demande de retrait.

L'amendement est retiré.

Article 8 (art. L. 8253-1, L. 8254-2, L. 8254-2-1, L. 8254-4, L. 8256-2, L. 8271-17, L. 5221-7, et L. 8272-6 [nouveau] du code du travail, section II du chapitre II du titre II du livre VIII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Instauration d'une nouvelle amende administrative sanctionnant les employeurs d'étrangers ne détenant pas un titre les autorisant à travailler

Amendement CL755 de Mme Danièle Obono

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Je ne crois pas que les Français sont contre l'immigration : ils sont contre le bordel. Et la façon dont vous organisez l'immigration met le bordel. Quand vous interdisez à des personnes de travailler, comment peuvent-elles survivre, payer leur loyer, manger ?

Depuis des décennies, vous faites des lois répressives sur l'immigration et le chaos continue. Là, vous allez continuer la répression – il faut bien sûr faire semblant d'arranger la situation – et ce sera encore plus le bordel.

Nous proposons que les personnes puissent travailler pour payer leur loyer, leurs soins, avoir le minimum pour vivre. Malheureusement, vous les en empêchez. C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 8.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.

Amendement CL1707 de Mme Élodie Jacquier-Laforge

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Dans sa rédaction actuelle, l'article 8 a pour objet de supprimer la solidarité financière pour l'amende administrative entre l'employeur et son cocontractant, ce qui est non conforme à la directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Le présent amendement vise à rétablir cette solidarité financière pour le cocontractant.

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J'ai entendu des cris quand mon collègue Boyard a dit que les Français n'aimaient pas le bazar. Mais qui est au pouvoir, qui est responsable de cette situation qui ne convient pas à nos compatriotes ? Certainement pas nous !

Par notre programme et nos amendements, nous proposons des solutions de bon sens. Nous disons qu'accueillir avec efficacité les gens qui viennent dans notre pays évite qu'il y ait du bazar, de la misère, de la pauvreté.

Mais il y a un corollaire, que vous oubliez toujours : c'est la question du partage de la richesse. Nous avons un programme global de partage de la richesse, pour faire en sorte que personne dans notre pays ne soit dans une situation difficile, y compris les personnes étrangères en situation régulière, et même celles en situation irrégulière.

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Gérald Darmanin, ministre

L'article 8 fonctionne avec les articles 2 et 5 pour compléter l'article 3 du projet de loi initial, devenu l'article 4 bis. Il s'agit de sanctionner efficacement les employeurs indélicats, pour ne pas dire voyous, qui organisent des filières d'immigration irrégulière.

L'autorisation de régulariser les salariés sans-papiers embauchés prévue à l'article 3 devenu 4 bis ne permet pas de connaître le nombre d'entreprises qui embauchent des sans-papiers de façon organisée, à des fins de maltraitance ou pour renforcer leur compétitivité. Malgré les très nombreuses enquêtes des ministères du travail et de l'intérieur, seules 500 condamnations judiciaires sont prononcées par an, alors que l'on sait que plus de la moitié de ces employeurs sont eux-mêmes des étrangers. La difficulté relève donc parfois de la filière d'immigration illégale.

Il n'y aurait pas tant de personnes à régulariser dans cet article si l'on avait été très dur contre les employeurs voyous ailleurs – c'est le parallèle que l'État fait avec lui-même dans l'article 5 sur les autoentrepreneurs. L'article donne donc au préfet le pouvoir administratif de prononcer des sanctions pécuniaires, si bien que les patrons n'ont pas intérêt à embaucher un sans-papiers : ils risquent non seulement une sanction pénale, mais aussi de très fortes amendes. En cas de récidive, une fermeture administrative de l'entreprise peut être prononcée. Ces dispositions, qui ont été validées par le Conseil d'État, sont de nature à lutter très fortement contre l'immigration irrégulière.

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L'article avait été supprimé en commission par le Sénat. Il a été rétabli après qu'a été démontré l'intérêt de supprimer le pouvoir abusif que détenaient les employeurs sur les salariés précarisés par leur situation au regard de l'état civil.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'amendement CL667 de M. Jean-Louis Bricout tombe.

Amendement CL245 de M. Yoann Gillet

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Il vise à renforcer les sanctions contre les employeurs qui embauchent des clandestins parce qu'ils acceptent des salaires plus bas que les Français. Ces patrons ferment aussi les yeux sur le fait que les contrats sont signés par d'autres personnes que celles qui travaillent pour eux. C'est notamment le cas chez Amazon, selon un salarié que j'ai rencontré avec Edwige Diaz. Cette situation existe au détriment des 5 millions de nos compatriotes qui cherchent un emploi. Il est donc nécessaire de sanctionner fortement ces employeurs qui ne respectent pas la loi.

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Avis défavorable. L'article 8 augmente déjà le plafond de l'amende pénale de 15 000 à 30 000 euros, et de 100 000 à 200 000 euros lorsque l'infraction est commise en bande organisée.

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Gérald Darmanin, ministre

J'entends cet amendement comme un soutien à l'article 8 – ce dont je me réjouis –, mais par le renforcement de sanctions pénales. Je ne suis pas contre le principe d'allonger les peines de prison, mais la rapporteure a raison de rappeler les montants des sanctions financières, notamment lorsque l'infraction est commise en bande organisée. Surtout, les sanctions pénales ne sont pas prononcées par la justice, ou elles le sont très peu.

Mieux vaut conserver la rédaction actuelle, afin de ne pas fragiliser l'article 8 pour des raisons constitutionnelles de proportionnalité, notamment le principe de droit en vertu duquel on ne condamne pas deux fois une personne pour une même infraction. Il semble plus utile de renforcer le pouvoir de sanction du préfet, par la sanction administrative – au moins sera-t-elle à la main de l'État plutôt que de la justice.

Si vous tenez à conserver l'article 8, soutenant la lutte contre l'immigration irrégulière, je vous recommande de retirer l'amendement. Je ne veux pas croire que vous jouiez de la politique du pire pour conduire à sa censure par le Conseil constitutionnel.

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Les députés du Rassemblement national pratiquent la préférence nationale même quand il s'agit de l'exploitation des salariés. Les premières victimes de l'exploitation, ce sont les travailleurs sans papiers : ils subissent des conditions dégradées parce qu'ils sont embauchés par des patrons voyous.

Vous les opposez aux travailleurs français, alors qu'il y a une offre d'emploi disponible pour dix-huit personnes qui cherchent du travail. Votre slogan, le même que celui de Jean-Marie Le Pen dans les années 1980, ne marche pas : il ne vise qu'à opposer les citoyens entre eux. Vous êtes véritablement le parti de la division.

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Je ne comprends pas pourquoi les collègues de la Nupes ont appelé à supprimer cet article qui vise à sanctionner plus lourdement les employeurs d'étrangers en situation irrégulière, se livrant à une forme d'exploitation. Le groupe Renaissance soutient l'article, qui double les montants de la sanction financière et prévoit une fermeture administrative pour la société qui se livrerait à ce trafic. Je vous remercie pour cet article important du projet de loi.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'article 8 modifié.

Après l'article 8

Amendement CL1403 de M. Hervé de Lépinau

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La lutte contre le travail dissimulé d'étrangers en situation irrégulière est évidemment une bonne chose. La responsabilisation du donneur d'ordre en est un des leviers. Néanmoins, certains viticulteurs ou agriculteurs sont parfois obligés de recruter des personnes hors de France, notamment pour les vendanges, et n'ont pas toujours la possibilité de vérifier l'état civil de leurs salariés. L'amendement de mon collègue Hervé de Lépinau vise donc à ce que l'obligation faite au donneur d'ordre de vérifier si les personnes employées par son prestataire sont en règle au regard des lois sur l'immigration ne s'applique pas pour les entreprises de moins de 11 salariés.

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Il ne me semble pas opportun d'écarter de cette obligation prévue par l'article L. 8222-1 du code du travail les entreprises de moins de 11 salariés – cela reviendrait à exclure plus de 96 % des entreprises françaises, qui emploient 2,3 millions de salariés.

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Gérald Darmanin, ministre

Cet amendement est intéressant : j'entends que, dans votre circonscription, faute de trouver des travailleurs français, des entreprises viticoles embauchent des étrangers, parfois irréguliers, et que mieux vaudrait en faire porter la responsabilité à d'autres sociétés. Le raisonnement me paraît un peu bizarre pour un député du Rassemblement national. Au bout de trois jours de débat, vous reconnaissez qu'on a peut-être besoin de main-d'œuvre étrangère dans les secteurs agricole et viticole. En général, vous êtes contre, mais, apparemment, des entreprises de votre circonscription vous ont demandé d'intervenir. C'est un premier pas vers la reconnaissance : merci de ce bel aveu.

C'est surtout particulièrement hypocrite. Voyant que nous renforçons le pouvoir de sanction des préfets et de la justice à l'encontre des employeurs de personnes en situation irrégulière – alors que votre collègue cherchait à l'instant à augmenter les peines de prison –, vous demandez que les chefs d'entreprise de votre circonscription soient exemptés de leurs obligations. Cela est bien dommage, car The Huffington Post a récemment révélé l'ouverture d'enquêtes pour traite d'êtres humains dans le cadre des vendanges en Champagne, certains viticulteurs ayant proposé des conditions indignes de travail et de logement à des étrangers.

En quelques instants, nous avons appris que vous êtes pour la main-d'œuvre étrangère ; que vous laissez embaucher des irréguliers dans les entreprises de votre circonscription ; que vous ne souhaitez pas faire assumer ces actes par les patrons pour ne pas les sanctionner. Voilà qui est très intéressant. Cet amendement du Rassemblement national mériterait sans doute un scrutin public. Celui-là, je ne suis pas certain que vous le publierez sur Twitter, monsieur Guitton.

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Cet amendement pourrait s'appeler l'amendement de Fournas, du nom du député du Rassemblement national qui a été épinglé pour avoir embauché des travailleurs étrangers dans son vignoble. Quand il s'agit de défendre des intérêts, contrairement à ce qu'il affirme, le RN suit plutôt l'intérêt patronal que l'intérêt national.

Petite coquetterie, le vin, qui fait la fierté et le rayonnement de notre pays, a été importé, selon les historiens, d'Iran par les Grecs. Si l'on parle de l'immigration, on doit aussi parler de ses apports positifs.

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Vous essayez de détourner le sujet. Vous voulez régulariser durablement des milliers de clandestins sur le territoire français. L'amendement vise des travailleurs temporaires, bien souvent de l'Union européenne, qui viennent travailler pour quelques jours dans notre pays, pendant les vendanges ou les récoltes. Il tend à rendre les prestataires de services responsables des vérifications nécessaires, car ceux-ci peuvent abuser de la naïveté des viticulteurs ou des agriculteurs. J'entends vos arguments, mais assumez que vous voulez régulariser des clandestins et arrêtez de divertir les gens dès que l'on vous reproche quelque chose. Ce ne sont là que des paroles, toujours des paroles.

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Nous assumons parfaitement de vouloir régulariser les travailleurs dans les métiers en tension ; nous l'avons dit partout. Pour votre part, non seulement vous ne voulez pas les régulariser, mais vous refusez même de sanctionner les patrons qui abusent d'eux. Là est la différence entre nous.

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Gérald Darmanin, ministre

Je vois votre énervement et la gêne de vos collègues – il n'est d'ailleurs pas certain qu'ils voteront votre amendement.

Assumez, madame Diaz, que vous allez voter un amendement qui prévoit de soustraire les entreprises de moins de 11 salariés de l'obligation de vigilance en matière de formalités liées au travail dissimulé, sous prétexte que ces sociétés sont nombreuses dans votre circonscription. Alors que vous expliquez depuis des semaines, des mois, des années qu'il faut faire travailler les Français, vous convenez que, parfois, dans votre circonscription, dans les milieux agricoles, des chefs d'entreprise ont peut-être besoin de main-d'œuvre étrangère. Vous êtes pour la régularisation des travailleurs sans papiers, assumez-le ! Ce n'est pas grave.

Vous présentez un amendement qui vise à ne pas sanctionner les patrons qui embauchent des travailleurs irréguliers, qui n'ont ni les moyens ni le temps pour vérifier les déclarations fournies. Soit vous avez copié-collé un amendement que vous avez reçu, ce qui n'est pas bien. Soit vous souhaitez faire un coming out politique car vous n'êtes finalement pas bien au Rassemblement national. Soit vous vous êtes aperçu que des étrangers, et même des irréguliers, travaillaient dans votre circonscription, et vous avez peur que les sanctions fortes que nous adoptons contre les entrepreneurs voyous soient prononcées contre certains de vos amis – je parle de manière générale, sans viser la situation particulière de M. de Fournas, que M. Léaument a rappelée. Assumez !

J'ai toujours dit que je voulais que les étrangers délinquants s'en aillent et que ceux qui travaillent et sont honnêtes vis-à-vis de la République soient régularisés. Je ne suis pas hypocrite, monsieur le député. Vous, vous l'êtes, et vous tenez des discours différents. J'espère que la presse qui nous suit, qui a tendance à penser que vous êtes normalisés, s'aperçoit de votre hypocrisie. Tenant compte du fait que des travailleurs irréguliers travaillent dans votre circonscription, vous voulez exonérer les employeurs de leur responsabilité au regard de l'insalubrité ou des conditions de travail. Et puis des membres de votre groupe m'écriront pour demander la régularisation – il y en aura, comme partout. Je n'ai même pas besoin de dire qui le fera, car, par cet amendement, vous le dites, vous souhaitez la présence de travailleurs irréguliers dans votre circonscription.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL1564 de M. Ludovic Mendes

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En complément de l'article 8, il vise à rendre presque obligatoire la fermeture administrative en cas de récidive dans les cinq ans et à assurer la judiciarisation de ces dossiers. En effet, l'exploitation des travailleurs sans-papiers est trop rarement judiciarisée, avec 500 cas par an remontés ces derniers temps. À l'inverse de La France insoumise, qui ne cesse de dire qu'elle veut lutter contre le travail dissimulé, l'exploitation humaine et l'esclavage moderne, mais qui a refusé cet article 8, nous voulons être encore plus durs envers les employeurs qui trichent et, à l'inverse du Rassemblement national qui affirme qu'il préfère les protéger, mais pas dans les entreprises de moins de onze salariés, nous voulons lutter contre toute forme de détournement au détriment de ces personnes qui, parce qu'elles n'ont pas de papiers, sont exploitées volontairement, ne sont pas rémunérées comme les autres et n'ont pas les mêmes horaires de travail. C'est de l'esclavagisme moderne. Pour lutter contre la traite humaine, il faut faire en sorte que les employeurs qui ont déjà fait l'objet d'une mesure administrative d'amende, puissent être sanctionnés par la fermeture administrative temporaire de l'entreprise, car c'est un coup qui fait très mal.

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La sanction administrative ne peut pas être automatique. Avis défavorable.

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Il faut naturellement sanctionner les employeurs qui ont recours à une main-d'œuvre irrégulière. Une fermeture administrative comporte toutefois des risques pour une entreprise qui n'emploie peut-être pas seulement des travailleurs en situation irrégulière. Cette mesure pourrait en effet mettre en difficulté l'ensemble des salariés, voire l'entreprise elle-même. Il faut donc y regarder de plus près.

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Gérald Darmanin, ministre

Madame Genevard, je partage votre opinion, mais la fermeture administrative dont il est question n'interviendra pas à la première infraction – ce qui, du reste, n'aurait pas été validé par le Conseil constitutionnel –, mais seulement en cas de récidive après une première occurrence de travail dissimulé sanctionnée par une amende forte. Perseverare diabolicum ! Un contradictoire sera alors organisé, évidemment susceptible de recours auprès du tribunal administratif, après quoi, si la bonne foi de l'entreprise n'est pas démontrée, pourra intervenir la fermeture administrative, afin d'interrompre le flux. Par ailleurs, je le répète, plus de 50 % des entreprises confondues par des poursuites pénales sont détenues par des étrangers, dans les secteurs du BTP ou de l'agriculture, où elles faussent ainsi la concurrence.

J'invite donc M. Mendes à travailler avec Mme la rapporteure en vue de l'examen du texte en séance publique. En effet, certains aspects de l'amendement mériteraient sans doute d'être améliorés pour passer le contrôle de constitutionnalité en permettant un contradictoire.

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Le caractère obligatoire de la mesure pose en effet problème et nous retravaillerons ce point pour la séance.

Madame Genevard, je tiens à vous rassurer : les personnes visées sont des patrons de mauvaise foi, qui ont déjà été condamnés une première fois à une amende administrative. Il s'agit, en cas de récidive, de démontrer la mauvaise foi de l'employeur. La mesure a effectivement un impact, afin de lutter contre la traite humaine. Les situations sont beaucoup trop complexes et pas assez judiciarisées : c'est ce à quoi l'amendement vise à remédier en permettant à la fois la fermeture administrative et la judiciarisation automatique du chef d'entreprise qui triche et sait qu'il emploie volontairement des personnes sans-papiers pour les exploiter.

L'amendement est retiré.

Chapitre IV (nouveau) Distinguer les parcours d'intégration réussis

Article 8 bis (nouveau) : Création d'un diplôme de l'intégration

Amendements identiques de suppression CL373 de Mme Edwige Diaz, CL670 de M. Michel Castellani, CL760 Mme Danièle Obono, CL1180 de Mme Elsa Faucillon et CLA1331 de M. Emmanuel Mandon

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Nous souhaitons supprimer cet article, car la nationalité française n'est pas un diplôme qui mérite la délivrance d'une note. Il est réducteur d'octroyer des bons points ou des distinctions méritoires, car la nationalité ne peut pas être une récompense. Il n'y a pas lieu d'établir une distinction entre les Français, quelle que soit la manière dont ils ont acquis la nationalité française.

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Les dispositions de l'article contreviennent au principe d'égalité, qui est une base du fonctionnement de la démocratie.

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Cet article est une aberration. Il n'y a pas lieu de regarder les parcours de vie des citoyennes et des citoyens français, et encore moins pour décerner un diplôme qui différencierait certains Français au motif qu'ils auraient acquis la nationalité française d'une manière qui mériterait plus de respect ou d'honneur. Il n'y a que des citoyennes et des citoyens français, et cet article n'a pas lieu d'être.

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Quand le Rassemblement national est confronté à la réalité, qui est loin de ses fantasmes xénophobes, ses contradictions se révèlent. Ce nouveau diplôme ou cette médaille n'a aucun sens et devrait être supprimé. Cela relève d'une vision simpliste et manichéenne – même si le ministre a ouvert la voie en la matière en opposant, d'une manière assez simpliste, les gentils et les méchants. Jusqu'à quand faudra-t-il que ceux qui sont nés sur un autre sol fassent leurs preuves et disent à quel point ils veulent vivre dans ce pays ? La demande de naturalisation ou de titre de séjour qu'ils déposent révèle une volonté d'intégration dans la société française. Ils travaillent, scolarisent leurs enfants et apprennent la langue : quels papiers faudra-t-il encore qu'ils signent pour prouver qu'ils veulent s'intégrer ? Ça suffit !

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Je souscris aux idées qui viennent d'être exposées, et mon amendement est défendu.

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Rien ne justifie que l'on fasse une différence entre Français de naissance et Français par acquisition. De surcroît, il existe de nombreuses médailles pour récompenser tous les Français. Avis favorable aux amendements de suppression de l'article.

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Gérald Darmanin, ministre

Je suis moi aussi favorable à la suppression de cet article. Dans les débats au Sénat, la création d'une médaille de l'intégration a été proposée par Mme Valérie Boyer et M. Olivier Paccaud, mais cela s'est révélé impossible pour de nombreuses raisons, notamment faute de levée du gage. Quant à la création d'un diplôme d'intégration pour distinguer les citoyens ayant acquis la nationalité française, l'idée est assez étonnante. Je dois avouer que cette mesure a été adoptée par le Sénat à quelques voix près, à une heure assez avancée, où nous avions tous envie d'en finir, et je ne crois pas trahir des débats internes en disant que le président de la commission des lois et moi-même pensions alors que cet article n'était peut-être pas le plus intelligent du texte.

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Après l'amendement de M. de Fournas, qui montre les incohérences du Rassemblement national, en voilà une autre : alors que ce parti ne cesse de nous répéter depuis toujours que la nationalité française s'hérite ou se mérite, il nous dit maintenant que la nationalité ne peut pas être une récompense. Cela signifie donc qu'elle ne se mérite plus, et ne peut donc que s'hériter. Le Rassemblement national a donc la volonté xénophobe de supprimer le droit du sol et d'instaurer une nationalité qui ne s'acquerrait que par les liens du sang. Dans notre pays, seul le régime de Vichy a fait cela ! Le Rassemblement national n'a pas changé et sa logique est toujours celle de Vichy, mais il y aura toujours face à lui des républicains pour l'empêcher d'arriver au pouvoir et, heureusement, le camp républicain est assez large.

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J'ai été rassuré par l'avis de la rapporteure et du ministre. On ne peut pas vouloir à la fois intégrer – voire « assimiler » – une partie de la population et instaurer une différenciation par l'octroi d'un diplôme aux personnes qui ont acquis la nationalité française. Cela revient à recréer une inégalité après nous être efforcés de créer l'égalité. Sur ce principe, nous souhaitons la suppression de cet article.

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Bien que n'étant pas une fan absolue de ce diplôme de l'intégration, j'en ai une vision légèrement différente. D'abord, il ne s'agit pas d'une condition à l'acquisition de la nationalité, puisqu'il vient après, pour récompenser une intégration exemplaire. J'ajoute que, si cet article était maintenu – ce que je ne crois pas, et d'ailleurs je ne le voterais pas –, il faudrait ajouter aux conditions d'obtention de ce diplôme le service rendu par des personnes capables d'héroïsme, de bravoure ou de courage pour protéger notre nation.

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Monsieur Léaument, je vous confirme qu'être français, cela s'hérite ou se mérite. Depuis lundi, où nous avons commencé l'examen de ce texte en commission, les députés de la NUPES et le ministre, qui semblent tous bien fébriles, nous donnent un spectacle caricatural de mauvaise foi. On comprend pourquoi : en 2012, Marine Le Pen obtenait un résultat de 18 % à la présidentielle. En 2017, ce score atteignait 34 %, puis 42 % en 2022. En 2027, vous le savez, Marine Le Pen remportera l'élection présidentielle, car elle a les solutions en matière d'immigration, de sécurité, de pouvoir d'achat, de souveraineté, d'éducation, de santé et d'écologie. Vous le savez et cela vous fait trembler, mais les Français l'attendent.

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Monsieur Gillet, beaucoup ont annoncé des victoires autoproclamées, mais cela s'est généralement mal terminé aux élections présidentielles.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 8 bis est supprimé et l'amendement CL85 de Mme Emmanuelle Ménard tombe.

Titre II

améLiorer le dispositif d'éloignement des étrangers représentant une menace grave pour l'ordre public

Chapitre Ier Rendre possible l'éloignement d'étrangers constituant une menace grave pour l'ordre public

Avant l'article 9

Amendement CL424 de Mme Edwige Diaz

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Au Rassemblement national, nous considérons que tout étranger qui constitue une menace pour l'ordre public doit être expulsé du territoire national, car notre priorité est de protéger les Français. Nous assumons le fait de dire qu'il existe un lien entre l'immigration et l'insécurité – les chiffres parlent d'eux-mêmes. Je suis désolée, monsieur Darmanin, de devoir exposer votre bilan piteux, mais les chiffres valent le détour : les étrangers représentent 24 % des personnes détenues en France, 48 % des personnes interpellées à Paris, 55 % des personnes interpellées à Marseille, 93 % des individus mis en cause pour des vols sans violence dans les transports en communs franciliens et 63 % des mis en cause pour les agressions sexuelles dans les transports en commun d'Île-de-France. Si donc votre priorité est d'avoir la mauvaise foi d'attaquer le Rassemblement national, la nôtre est de travailler pour protéger les Français, qui en ont bien besoin.

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Cette présentation n'a pas grand-chose à voir avec l'amendement, qui vise à retirer le mot « grave » du titre II. Avis défavorable, car je ne vois pas ce que le retrait de cet adjectif apporte ou enlève à un texte intéressant, dont j'espère que nous pourrons parler en détail.

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Monsieur le ministre, pourriez-vous nous communiquer le nombre d'étrangers mis en cause pour fraude et évasion fiscales et des montants en jeu ? La question est certes un peu piquante, car il ne peut pas y en avoir, étant donné que pour être redevable de l'impôt sur le revenu, il faut déjà y être assujetti …

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Gérald Darmanin, ministre

Et alors ? On peut être étranger et payer l'impôt sur le revenu !

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C'est même l'un des éléments justifiant la régularisation !

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L'amendement porte en effet sur le titre seulement, mais il est néanmoins intéressant de savoir ce que peut signifier « grave » et comment améliorer le dispositif d'éloignement des étrangers représentant une menace grave pour l'ordre public. De fait, tout au long du titre II, nous jugerons quels étrangers doivent être éloignés, et comment. Il serait donc intéressant qu'en préambule, le rapporteur et le ministre nous expliquent où ils placent le curseur.

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Gérald Darmanin, ministre

Le titre II est très important car il vise à obtenir du Parlement les moyens d'expulser ou d'éloigner du territoire national – car ce sont deux choses différentes – des étrangers délinquants. Pour résumer les choses à gros traits, en 2022, j'ai fait expulser 2 500 étrangers en raison des actes délinquants ou criminels qu'ils ont commis, tandis que 4 000 autres, qui auraient pu être expulsés ou éloignés pour les mêmes faits, ne l'ont pas été parce que la loi les protège au titre de « réserves d'ordre public », par suite de la suppression, sous le mandat de M. Chirac, de la « double peine », c'est-à-dire du cumul de l'expulsion et/ou de l'éloignement avec une peine de prison accomplie par une personne condamnée par la justice.

C'est, comme le dit le Conseil d'État lui-même, la loi française, sans que l'adhésion de la France à la Convention européenne des droits de l'homme ni la Constitution y aient à voir, qui empêche le ministre de l'intérieur et ses services d'expulser des personnes qui seraient pourtant aussi redevables d'expulsion, par principe d'égalité, que d'autres étrangers, la différence étant que ces derniers ne sont pas arrivés avant l'âge de 13 ans sur le territoire national, ne sont pas mariés ou n'ont pas eu d'enfants en France – autant de motifs qui relèvent des réserves réserve d'ordre public que le Gouvernement propose précisément de lever, compte tenu de la gravité des infractions considérées.

Ce mécanisme existe déjà pour les personnes qui menacent les intérêts fondamentaux de la nation, c'est-à-dire qui commettent des actes de terrorisme. Nous ne demandons pas, toutefois, la levée de la réserve pour les mineurs qui ont commis des actes graves pendant leur minorité, car la France est signataire de la Convention européenne des droits de l'enfant et, par ailleurs, ces expulsions relèvent du juge judiciaire, et en aucun cas le juge administratif.

Les articles 9, 10 et 13, qui se complètent, sont très importants. L'article 9 vise les arrêtés ministériels d'expulsion (AME) et l'article 10 l'application des OQTF dans les cas d'éloignement. Le Conseil d'État nous a en effet rappelé à plusieurs reprises qu'il s'agissait de deux régimes différents, même si le législateur et la jurisprudence les ont progressivement rapprochés, et qu'ils ne correspondent pas à la même unité d'action, apportant des garanties et une efficacité différentes. En cas de confusion, si l'éloignement était trop rapproché de l'expulsion, le risque serait donc assez fort d'une censure du dispositif par le juge constitutionnel.

L'article 9 vise à permettre au ministre de l'intérieur de prendre des arrêtés ministériels d'expulsion à l'encontre d'étrangers réguliers sur le territoire national si ces personnes ont commis des actes graves, notamment des crimes ou des délits encourant une peine de cinq ou dix ans ou en récidive. L'arrêté ministériel d'expulsion ainsi conçu est plus efficace pour le ministre de l'intérieur, en ce qu'il suppose beaucoup moins de difficultés administratives, de recours et de possibilités pour le pays d'origine de s'y opposer. La contrepartie est un plus grand encadrement, notamment par une commission qui n'est certes que consultative, mais qui fait parfois un peu traîner les choses. Un régime d'expulsion est donc bien prévu pour les personnes régulières qui commettent des crimes ou des délits, le débat portant alors sur la peine encourue justifiant ce dispositif.

L'article 10, quant à lui, porte sur l'éloignement des personnes irrégulières faisant l'objet d'une OQTF mais relevant des réserves de protection liées à la fin de la double peine, qui rendent systématiquement cette sanction inopérante. Ainsi, je ne peux pas signifier une OQTF à une personne de 19 ans qui aurait, par exemple, tué quelqu'un si cette personne est arrivée sur le territoire national avant l'âge de 13 ans – si je le faisais, cette mesure serait cassée par le tribunal administratif. Je pourrais, en revanche, l'expulser pour le même acte si elle était arrivée à 13 ans et demi.

Nous relevons donc les réserves d'ordre public pour les personnes ayant commis des crimes ou des délits graves pour l'ordre public, notamment le fait de s'être attaqué à des policiers, à des élus ou à des personnes dépositaires de l'autorité publique – ce qui n'est actuellement pas le cas –, des crimes, quels qu'ils soient, des tentatives d'homicide, le trafic de stupéfiants ou la fraude fiscale, ainsi que les violences conjugales. Aujourd'hui, quelqu'un qui frappe sa mère et qui est arrivé avant l'âge de 13 ans sur le territoire national ne peut pas être expulsé : c'est le cas du tueur d'Arras, connu par les services de police, mais sans casier judiciaire, qui avait été mis en garde à vue pour avoir frappé sa mère, mais auquel nous n'avons pas pu signifier d'OQTF parce qu'il était arrivé avant l'âge de 13 ans sur le territoire national.

Avec ces nouvelles dispositions, le ministère de l'intérieur pourra procéder à l'éloignement de 4 000 étrangers délinquants par an, ce qui permettrait de multiplier par trois le nombre d'expulsions et d'éloignements.

Ces mesures sont complétées par l'article 13, qui prévoit la possibilité de retirer son titre de séjour à toute personne adhérant à une idéologie radicale. Nous pourrons évidemment en discuter. Le rapporteur général et le rapporteur ont précisé le dispositif en procédant par copier-coller des formules que nous avons adoptées dans la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, dite loi séparatisme, validée par le Conseil constitutionnel.

Les trois articles que je viens d'évoquer manquaient au ministre de l'intérieur, qui pourra désormais, si vous les votez, prendre un arrêté ministériel d'expulsion en vertu de l'article 9 ou, avec l'article 10, signifier une OQTF et, avec l'article 13, dégrader le titre de séjour d'une personne condamnée pour trouble à l'ordre public ou adhérant à une idéologie radicale. Si on constate à l'occasion d'une perquisition qu'un étranger a dans son téléphone portable cent photos de décapitations – ce qui n'est pas bon signe –, on peut le poursuivre pénalement, mais je ne peux actuellement pas l'expulser en lui retirant son titre de séjour. Si donc, avec l'article 13, on lui retire son titre de séjour, cette personne tombera sous le coup de l'article 10 et je pourrai procéder à son éloignement.

Ces trois articles consistent donc, je le répète, à retirer toutes les réserves d'ordre public – à l'exception des actes commis par un mineur, qui relèvent du juge judiciaire, et non du juge administratif –, à procéder à l'expulsion de personnes régulières par AME ou à l'éloignement de personnes irrégulière par OQTF, et à permettre que des personnes soient jugées non pas parce qu'étrangères, mais parce qu'ayant commis des actes contraires à ce que suppose l'accueil sur le sol républicain.

Ces dispositions ont toutes été validées par le Conseil d'État, qui n'y a rien vu à redire en termes de constitutionnalité et de conventionalité. J'ajoute que le Conseil d'État a jugé ce texte constitutionnel et conventionnel dans la mesure où le Gouvernement s'y attache aux crimes ou aux délits graves – de fait, il ne serait pas constitutionnel d'expulser des gens condamnés à de la prison avec sursis pour le vol de pommes ou d'une mobylette.

Je remercie le Sénat d'avoir, à une exception près, eu la sagesse nécessaire pour éviter la non-constitutionnalité qui aurait frappé ces dispositions si les protections avaient été trop réduites. De fait, si tous les délits devaient être susceptibles d'expulsion, tous ceux qui commettent des excès de vitesse seraient menacés d'être expulsés, ce qui serait évidemment disproportionné et ferait censurer le dispositif que nous proposons.

Ces articles sont très importants et je suis donc défavorable à l'amendement de Mme Diaz.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL396 de Mme Marie-France Lorho

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L'intitulé du chapitre 1er a suscité mon interrogation. L'éloignement des étrangers constituant une menace grave pour l'ordre public est une mesure déjà satisfaite, à quelques dérogations près, par l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui dispose que « l'autorité administrative peut décider d'expulser un étranger lorsque sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public, sous réserve des conditions propres aux étrangers mentionnés aux articles L. 631-2 et L. 631-3. »

Pourquoi, alors, supposer qu'il n'est pas possible, comme le laisse entendre la rédaction du chapitre 1er, d'appliquer la loi ? Le taux d'application des OQTF, qui n'était, de l'aveu de l'Élysée, que de 15 % en 2021, révèle que d'énormes progrès sont encore à faire. Cet amendement rédactionnel entend donc reformuler l'objet du présent chapitre en proposant l'élargissement des mesures d'éloignement, plutôt que leur applicabilité.

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Je m'appuie sur les propos que vient de tenir le ministre pour émettre un avis défavorable. En effet, il s'agit bien de rendre possible le dispositif cumulé des articles 9, 10 et 13 qui, à partir du droit existant, rend possible l'exécution des mesures. Il ne s'agit donc pas d'un élargissement de ces mesures.

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Gérald Darmanin, ministre

Ces dispositions n'élargissent rien du tout, mais elles permettent au ministre de l'intérieur, que la loi française empêche actuellement de le faire, de procéder à certaines expulsions. Par facétie, je me demande si M. Mariani, que vous connaissez sans doute au niveau territorial dans le Sud et qui était rapporteur du texte qui a mis fin à la double peine, n'a pas fait une erreur. À l'époque, c'étaient MM. Ciotti, et Estrosi qui étaient au banc pour porter ce texte. Au début des années 2000, on applaudissait cette mesure, qu'on qualifiait alors d'humaniste, mais c'était une erreur, et la société a changé.

Madame Lorho, lorsque des députés de votre groupe – ou d'autres groupes – s'étonnent que telle personne, récidiviste, n'ait pas été expulsée, c'est parce que je ne peux pas le faire. Il ne s'agit donc pas d'élargir les conditions mais bien de rendre possible les expulsions et les éloignements.

La commission rejette l'amendement.

Article 9 (art. L. 252-2, L. 631-2, L. 631-3, L. 641-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, art.131-30, 131-30-1, 131-30-2, 435-14, 441-11, 444-8 du code pénal, art. 41 du code de procédure pénale) : Assouplir les régimes de protection bénéficiant à certaines catégories de ressortissants étrangers pour faciliter les décisions d'expulsion et le prononcé de la peine d'interdiction du territoire

Amendement de suppression CL905 de M. Boris Vallaud.

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Il n'est, tout d'abord, pas certain ni démontré qu'un régime exceptionnel de restriction des droits des étrangers soit nécessaire et justifié pour garantir l'objectif de protection de l'ordre public. Rien, en tout cas, dans l'étude d'impact, ne permet de le démontrer.

En second lieu, il faut se garder du mélange des genres qui consiste à utiliser le droit des étrangers pour sanctionner les troubles à l'ordre public et à mobiliser le droit pénal pour sanctionner le droit des étrangers. Ce mélange entretient en effet une confusion entre étrangers et délinquants. Il n'existe pas d'étrangers absolument inexpulsables, car ils ne peuvent pas être expulsés à n'importe quel prix et de n'importe quelle manière. C'est l'équilibre qu'avait trouvé Nicolas Sarkozy en mettant fin à la double peine.

Votre proposition entraîne un risque d'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale, à l'intérêt supérieur de l'enfant et à l'individualisation des peines, consacrée par le Conseil constitutionnel, ainsi qu'un risque de justice automatique.

Il y a une confusion très grave entre la peine encourue et la peine effectivement prononcée, ce qui est d'autant plus grave que l'écart est considérable entre les deux.

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Avis défavorable. Le point important que vous avez évoqué n'est pas visé par l'article 9. Vous reprochez en effet au texte d'établir une sorte de confusion entre l'étranger et le délinquant, or l'article 9 vise seulement l'étranger délinquant, sans confusion entre un étranger qui serait délinquant ou ne le serait pas, ou qui serait supposé tel. Il traite expressément de l'étranger qui a rompu une partie du pacte social qu'il a conclu en venant sur notre territoire et qui suppose d'en respecter les lois. Ne les ayant pas respectées, il encourt des sanctions qui entraînent, comme l'expliquait M. le ministre, et toujours sous le contrôle du juge, notamment administratif pour tout ce qui concerne l'expulsion, des mesures administratives qui peuvent conduire à son expulsion ou à son éloignement.

L'article 9 tend à assouplir les protections dont peuvent bénéficier les étrangers dans ce cas, et aucunement à créer de nouveaux cas. Il ne s'agit aucunement de supprimer des garanties, mais de parvenir à une construction équilibrée, sans nouvelles définitions, mais en se référant, au contraire, à des jurisprudences constantes ou à des articles du code pénal relatifs aux peines encourues, afin de déterminer dans quel cadre un comportement peut conduire l'État, par le biais du préfet ou du ministre de l'intérieur, à prononcer une mesure administrative conduisant un étranger à quitter le territoire. L'équilibre de l'article 9 est donc nécessaire pour l'ensemble des mesures.

Cet article 9 est cohérent non seulement avec les autres articles du titre II, et en particulier les articles 10 et 13, mais également avec l'ensemble du texte, dont il est l'un des éléments cardinaux, qui contribuent à son équilibre.

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Gérald Darmanin, ministre

Monsieur Vallaud, vous avez dit deux inexactitudes. La première est que l'étude d'impact ne donnerait pas les raisons justifiant ces articles. Or, aux pages 146 et 147, on lit :

« Ainsi, en l'état actuel du droit, un étranger bénéficiant de la protection dite “quasi absolue” prévue à cet article ne peut être expulsé alors même que son comportement mettrait en évidence une particulière dangerosité à raison de condamnations pour des crimes ou délits touchant à l'intégrité des personnes et des biens, dès lors que ces agissements ne sont pas rattachables à l'un des trois types de comportements visés de façon exhaustive au premier alinéa de l'article. Cela a pour conséquence de maintenir sur le territoire français, une fois leur peine d'emprisonnement purgée, des ressortissants étrangers qui continuent de représenter une menace particulièrement grave pour l'ordre et la sécurité publics. Ce peut être le cas notamment de violeurs présentant un risque de récidive, de trafiquants de stupéfiants, d'auteurs de vol à main armée, ou encore d'assassins. Plusieurs exemples concrets permettent d'illustrer cette situation. » Je n'en citerai que trois :

Étranger entré en France à l'âge de 1 an et y résidant habituellement depuis plus de vingt ans, ayant commis treize faits de viol avec actes de torture et de barbarie, enlèvement et séquestration, pour lesquels il a été condamné à une peine de vingt ans de réclusion criminelle, dont l'évaluation met en évidence une absence de prise en compte de la gravité des faits et un nouveau passage à l'acte. Impossibilité de procéder à son expulsion.

Étranger résidant régulièrement en France depuis plus de vingt ans et ayant, dans une période de vingt ans, commis trente-huit viols et agressions sexuelles sur sa propre fille et les filles de ses compagnes successives, âgées de 3 à 11 ans au moment des faits. Ont en outre été découvertes sur son ordinateur plusieurs centaines d'images et vidéos mettant en scène des enfants dans des situations à caractère pédopornographie téléchargées par des logiciels. L'intéressé a été condamné à une peine de treize ans d'emprisonnement, assortie de mesures de suivi socio-judiciaire de cinq ans, l'évaluation post-peine ayant abouti à un risque de réitération. Cette personne ne peut être expulsée du territoire national.

Étranger résidant habituellement en France depuis l'âge de 13 ans, auteur, sur une période de plus de vingt ans, notamment de faits de violences volontaires trente-trois fois, avec ou sans la menace d'une arme, sans incapacité, vol et tentative de vol avec violence, violences volontaires sur agent des forces publiques, agressions sexuelles, menaces de mort, meurtre ayant pour objet la préparation d'un délit ou l'impunité de son auteur, vol aggravé par deux circonstances. Son quantum de peine s'élève à vingt-six ans. Impossibilité de procéder à son expulsion.

Je vous ai également fait parvenir quelques cas très concrets fournis par les préfets et dans lesquels le ministre de l'intérieur ne peut procéder à des expulsions, du fait de la loi.

La décision qu'il pourra désormais prendre ne sera toutefois pas sans recours et je prendrai mes responsabilités comme je le ferais dans le cas d'un étranger qui n'est pas arrivé avant l'âge de 13 ans. À l'heure actuelle, pour les mêmes faits, je peux l'expulser s'il est arrivé à 13 ans et demi, mais pas s'il est arrivé à moins de 13 ans, ce que personne ne comprend. Le juge jugera au nom du droit à la vie privée et familiale et mettra en balance, comme il le fait en matière de terrorisme, la dangerosité de la personne et sa vie privée et familiale. Au demeurant, pour une personne qui viole plusieurs fois sa propre fille et celles de ses compagnes successives, la notion de vie privée et familiale est un argument fragile. En tout cas, ça se plaide devant le juge.

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Dans certains des cas que vous venez de citer, monsieur le ministre, la loi permettait l'expulsion de l'étranger, tout comme dans le cas d'Arras. Je mesure la difficulté à trouver un équilibre juridique dans de tels cas.

Je comprends la nécessité de répondre à des situations qui pourraient être considérées en l'état du droit comme des situations orphelines, mais je ne suis pas sûr que certaines dispositions du texte soient équilibrées. Je pense aux nouvelles exceptions à l'impossibilité de prononcer une mesure d'expulsion fondées sur le critère de la peine encourue plutôt que celui de la peine prononcée, car de nombreux cas – comme celui d'une condamnation à une peine de prison avec sursis pour prise illégale d'intérêt – seraient alors concernés. Je pense également à la possibilité pour le préfet de prendre une mesure d'expulsion systématique alors que la juridiction répressive saisie des mêmes faits n'aura pas prononcé de peine complémentaire d'ITF. Je pense enfin à la suppression de l'exigence de motivation spéciale au prononcé d'une peine d'ITF dans le cas d'un étranger déclaré coupable d'un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement. Ces dispositions portent une atteinte excessive à certains droits. Elles doivent être retravaillées.

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Les Français ne comprennent pas que les personnes étrangères ayant commis des crimes ou des violences sur notre sol ne puissent pas être expulsées. La semaine dernière, en audition, les professionnels soulignaient la difficulté d'éloigner des personnes dangereuses, comme celle citée par M. le ministre, qui a été condamnée à plus de vingt ans de prison pour violences et viols. Je vous invite à vous reporter aux auditions.

Les Français, quelle que soit leur origine, attendent des mesures fortes en la matière. Il est donc capital de maintenir l'article 9 permettant d'éloigner des criminels et des délinquants reconnus coupables d'une infraction passible d'une peine de prison de cinq ans au moins. Il faudrait peut-être même aller encore plus loin.

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Je soutiens les dispositions de l'article 9. À Mayotte, qui connaît un phénomène d'immigration hors du commun, des milliers d'enfants et de jeunes abandonnés se constituent depuis plusieurs années en bandes extrêmement violentes. Les mesures prévues seraient particulièrement bienvenues à Mayotte. D'abord parce que les tribunaux se retrouvent impuissants face à des adolescents, qui avec l'âge deviennent plus musclés et plus violents, se sachant non expulsables. Ensuite parce que, du fait de l'insularité, les victimes sont contraintes de côtoyer leurs bourreaux, ce qui leur est insupportable. De façon plus générale, la société ne peut comprendre que des individus dont elle connaît la violence et le passif pénal soient maintenus sur le territoire national.

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Gérald Darmanin, ministre

Je ne peux pas laisser dire M. Vallaud que, dans les cas que j'ai cités, les étrangers incriminés étaient expulsables et c'est justement l'objet de l'article 9 de le permettre. Le juge s'appuie sur la loi pour prononcer la peine complémentaire d'expulsion et la loi prévoit l'interdiction du prononcé de cette peine pour les personnes arrivées sur notre territoire avant l'âge de 13 ans. Je souhaitais apporter cette précision pour rétablir la vérité des faits.

Dans le cas d'Arras, je rappelle que la famille de l'assassin est arrivée en France alors que celui-ci avait moins de 13 ans. Leur demande d'asile ayant été refusée, une OQTF a été prononcée et il aurait pu être procédé à l'éloignement de cette famille, quand bien même rien de pénalement répréhensible ne pouvait lui être reproché. Après des interventions politiques et une mobilisation citoyenne, le gouvernement de M. Hollande n'est pas passé à l'acte. La famille n'est finalement pas montée dans l'avion à la sortie du centre de rétention du Mesnil-Amelot.

Quelques mois avant l'assassinat du professeur d'Arras, le futur terroriste, qui n'a pas de casier judiciaire, tape sur sa mère, ce qui constitue un délit. Le préfet du Pas-de-Calais saisit alors la justice afin de pouvoir l'expulser, mais l'intéressé étant arrivé en France avant l'âge de 13 ans, l'expulsion est refusée. Bien qu'étant majeur, se trouvant en situation irrégulière et ayant commis un délit grave puisqu'il a tapé sur sa maman – il aurait pu taper sur sa compagne, c'est exactement la même chose –, il n'était plus éloignable. Il était certes inscrit sur le fichier S, mais cette inscription est une preuve non pas de culpabilité mais de suivi. On ne peut donc s'appuyer sur le fichier S pour procéder à une expulsion, d'autant que dans le cas d'Arras rien ne laissait prévoir de façon concrète qu'il pouvait passer à l'acte. Aujourd'hui, nous pouvons l'éloigner du territoire car il a commis un acte terroriste et a atteint aux intérêts fondamentaux de l'État. Nous n'avons donc pas pu éloigner cet individu au titre de son agression contre sa maman parce que la loi protège des mesures d'éloignement les personnes arrivées en France avant l'âge de 13 ans.

De très nombreux cas relèvent aujourd'hui de la protection de la loi alors qu'ils concernent des actes extrêmement graves. J'ai ainsi à ma disposition une liste de 500 de ces cas, remontés par les préfets, dont certains sont cités dans l'étude d'impact. C'est bien la loi ordinaire, et non la Constitution ou la Convention européenne des droits de l'homme – je le précise à l'attention des groupes qui pensent qu'un changement de ces textes est nécessaire –, qui interdit l'expulsion ou l'éloignement dans ces cas. Aucun autre pays en Europe n'a adopté une telle législation protectrice. Je le répète : la loi interdit l'éloignement d'un étranger ayant commis un crime ou un délit ne relevant pas du terrorisme et, s'il commet un acte terroriste, c'est hélas trop tard.

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Je mesure la gravité des situations que vous évoquez mais je ne suis pas sûr que nous ayons trouvé l'équilibre.

Vous admettez que l'expulsion est possible en cas de comportement de nature à porte atteinte aux intérêts fondamentaux de l'État ou lié à des activités à caractère terroriste. Il s'agit donc bien du comportement et non de la commission d'un acte. Les personnes inscrites au fichier S ou sur d'autres fichiers de renseignement le sont au titre de leur comportement. A-t-on, oui ou non, procédé à des expulsions sur cette base ?

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On n'expulse pas les fichés S. Suivre les fichés S permet de remonter les filières afin d'empêcher la commission d'attentats. Les personnes font l'objet le plus souvent de notes blanches, qui ne peuvent constituer un élément probant pour la justice. Cela ne suffit pas non plus administrativement pour fonder un arrêté d'éloignement ou pour prendre une mesure d'expulsion.

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La loi actuelle autorise l'expulsion sur le fondement d'une appréciation du comportement.

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Gérald Darmanin, ministre

J'ai essayé de procéder à l'expulsion et à l'éloignement de personnes arrivées en France avant l'âge de 13 ans inscrites dans le fichier de renseignement de la radicalisation. La radicalisation ne suffit pas à caractériser une atteinte aux intérêts fondamentaux de l'État. La pratique extrêmement rigoureuse d'une religion, quelle qu'elle soit, est permise dans notre pays et n'est pas forcément le signe d'un passage à l'acte terroriste. Les juges ont systématiquement refusé l'expulsion de personnes radicalisées, alors qu'elles fréquentaient des mosquées pour y écouter des prêches violents ou qu'elles affichaient un drapeau de Daech chez elles, au motif de leur arrivée en France avant l'âge de 13 ans. Taper sur sa mère ou sa compagne est quelque chose de terrible, mais cela ne porte pas atteinte aux intérêts fondamentaux de l'État, pas plus que de s'en prendre à un policier ou à un gendarme – je regrette d'ailleurs que les députés du groupe Les Républicains ne soient pas présents, car nous avions eu une discussion à ce sujet à propos d'un amendement.

Je propose donc dans l'article 9 que les personnes protégées puissent faire l'objet d'une mesure d'expulsion si elles ont été reconnues coupables de crime ou de délit graves passibles de cinq ans de prison. L'appréciation de la proportionnalité de cette disposition est une question d'opinion et je respecte la vôtre, monsieur Vallaud. L'article 10 propose que les étrangers protégés puissent faire l'objet d'un éloignement – qui offre davantage de garanties à l'étranger – si leur comportement « constitue une menace grave pour l'ordre public ».

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La sanction judiciaire de l'ITF et l'acte administratif d'expulsion sont deux sujets distincts. L'ITF est une peine complémentaire qui peut être prononcée par le juge pour sanctionner des faits précis dont il est saisi dans le cadre du jugement. La décision d'expulsion prise par le préfet ne peut se fonder exclusivement sur une procédure judiciaire en cours. Il doit justifier sa décision, sous le contrôle du juge administratif, à partir d'autres éléments.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CL1047 de M. Benjamin Lucas et CL671 de M. Michel Castellani (discussion commune)

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Mon amendement tend à supprimer plusieurs alinéas de l'article 9. Il offre donc une session de rattrapage à celles et ceux qui auraient une révélation subite d'amour de l'État de droit ou qui seraient sensibles aux paroles de la Défenseure des droits qui considère que ces dispositions concourent « à bouleverser l'équilibre actuellement ménagé par la loi entre […] l'objectif de préservation de l'ordre public et […] le respect des droits fondamentaux des étrangers » et des engagements internationaux.

La substitution du critère de la peine prononcée par celui de la peine encourue constitue une folle dérive, que l'on constate d'ailleurs depuis le début de l'examen du texte. Il est temps de revenir à la raison et au respect des principes fondant l'État de droit.

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Il est inutile de voter pour un dispositif d'éloignement qui risque d'être censuré par le Conseil constitutionnel. En effet, le dispositif voté au Sénat abaisse de manière disproportionnée le quantum de peines permettant l'éloignement et conduit au prononcé de peines automatiques d'interdiction du territoire, ce qui est contraire à notre Constitution.

Nous proposons donc par cet amendement, lorsque l'étranger dispose d'une protection absolue, de permettre de prononcer à son encontre une expulsion ou une peine d'interdiction du territoire français en cas de condamnation à un crime ou délit passible de dix ans de prison et, lorsqu'il dispose d'une protection relative, de permettre l'expulsion en cas de condamnation d'un crime ou délit passible de cinq ans de prison.

La mesure proposée est plus stricte que le droit en vigueur tout en restant dans les limites du cadre constitutionnel.

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Gérald Darmanin, ministre

Monsieur Lucas, je me permets de vous lire le considérant 26 de l'avis que le Conseil d'État, qui est le garant de l'État de droit, a rendu sur ce projet de loi : « Le Conseil d'État considère que le fait d'excepter des protections prévues aux articles L. 631-2 et L. 631-3 l'étranger qui, d'une part, a été condamné à une peine, quel qu'en soit le quantum, pour des faits pour lesquels la peine maximale encourue est, selon les cas, de cinq ans d'emprisonnement ou plus ou de dix ans d'emprisonnement ou plus et, d'autre part, continue de menacer gravement l'ordre public ne se heurte à aucun obstacle d'ordre constitutionnel ou conventionnel dès lors que les décisions d'expulsion sont soumises au respect du principe de nécessité et de proportionnalité et de l'article 8 de la CEDH, et qu'elles sont placées sous le contrôle du juge. » Vous avez évoqué les propos de la Défenseure des droits et l'amour de l'État de droit : le Conseil d'État a précisément considéré que ces dispositions sont constitutionnelles, conventionnelles et proportionnées.

La législation actuelle, inventée par le ministre de l'intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, n'a pas d'équivalent en Europe. Certes, le recours au juge est toujours possible, mais il faut utiliser le moment de l'expulsion ou de l'éloignement et ne pas s'autocensurer en anticipant la décision du juge. C'est ainsi que nous avons pu expulser M. Iquioussen. Le Conseil d'État a d'ailleurs jugé que, dans le cas de son expulsion, l'intérêt de la nation justifiait l'atteinte au respect de sa vie privée et familiale.

Monsieur Lucas, le critère de l'exception à la protection de l'étranger n'est pas la peine encourue. Le texte de l'article 9 est clair : « Par dérogation au présent article, peut faire l'objet d'une décision d'expulsion en application de l'article L. 631‑1, l'étranger mentionné aux 1° à 4° du présent article lorsqu'il a déjà fait l'objet d'une condamnation définitive pour des crimes ou des délits punis de trois ans ou plus d'emprisonnement. » Il s'agit donc bien, comme le dit le Conseil d'État, de faits pour lesquels la peine maximale encourue est, selon les cas, de trois à cinq ans. La personne a donc eu un procès et elle a bien été reconnue coupable. Vos propos sur le critère de la peine encourue pourraient laisser penser que le projet de loi permet d'expulser quelqu'un qui est simplement soupçonné d'un crime, sans qu'il soit passé devant un tribunal.

Vous me dites que je n'aime pas l'État de droit, cela me choque, car, en tant que ministre de l'intérieur, je suis ministre des libertés publiques. Je respecte donc à ce titre la Convention européenne des droits de l'homme. Nous pourrons poursuivre cette discussion sur l'État de droit plus tard.

Je le répète : le texte ne permet pas l'expulsion d'un étranger simplement soupçonné par les services de police. Cette personne doit avoir été condamnée, en première instance ou en appel, pour des faits sanctionnés par une peine de prison d'au moins cinq ans pour pouvoir être expulsée. Elle pourra l'être même si, en raison de circonstances atténuantes par exemple, elle n'a pas été effectivement condamnée à la peine maximale. Cet article est dur, mais il est juste. Je pense que personne ne contestera que l'expulsion est méritée pour les cas que j'ai cités tout à l'heure.

Monsieur Lucas, vous devez accepter l'idée que l'état de droit consiste aussi à protéger les victimes et, précisément, ces dispositions sont nécessaires à la sécurité de nos concitoyens.

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Le ministre des libertés publiques que vous êtes devrait se soucier des condamnations de la France par plusieurs instances internationales et européennes.

Il est plaisant de débattre avec un ministre qui en a le goût, ce qui est rare dans ce gouvernement, mais vous avez la fâcheuse habitude de répondre à des questions que personne n'a posé et d'avancer des contre-arguments à des arguments que personne n'a exposés. Notre débat mérite mieux que cela.

Je n'ai pas dit que cet article était contraire à la Constitution et je ne remets pas en cause l'avis du Conseil d'État – je vous invite d'ailleurs à respecter scrupuleusement ses avis, car vous avez déjà eu des petites difficultés pour certaines de vos décisions : je me suis contenté de souligner la remise en cause par ce texte de l'équilibre actuel de notre droit, souligné par la Défenseure des droits.

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Au-delà des considérations juridiques évoquées par mes collègues, je voudrais rappeler le sens, à la fois politique et social, de la protection des étrangers arrivés en France avant l'âge de 13 ans. Imaginons le cas d'un étranger arrivé bébé en France et qui y a vécu jusqu'à sa condamnation à l'âge de 25 ans. Cette personne aura vécu toute sa vie au sein de la société française, qui l'a intégrée, notamment par l'éducation – il faut d'ailleurs se demander si la société n'a pas failli. Elle n'a donc aucune attache avec son pays d'origine.

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Lors de la discussion des articles du titre Ier, la gauche nous avait accusé d'empêcher les familles de se rejoindre et de ne pas respecter l'amour. Elle nous accuse maintenant de ne pas respecter l'état de droit. J'invite chacun à être raisonnable dans ses prises de parole : les articles 9, 10 et 13 respectent l'État de droit et ont été validés par le Conseil d'État.

La plupart des immigrés qui sont présents sur notre sol, comme la plupart des Français, n'aspirent qu'à la tranquillité. C'est pourquoi il faut être ferme à l'encontre de la minorité qui trouble l'ordre public. C'est le sens de l'article 9. Les arguments de la gauche me semblent difficiles à justifier auprès des victimes d'étrangers ayant commis des faits graves.

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Nous devons envoyer un message fort à l'attention d'étrangers, arrivés très jeunes sur le territoire national et qui se savent non expulsables à ce titre. Ils ont un sentiment d'impunité. Nous l'observons tous les jours dans le seul tribunal de Mayotte. Ce message fort aura un effet préventif non négligeable puisqu'il sera répercuté dans l'entourage qui mettra en garde les intéressés.

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Gérald Darmanin, ministre

Monsieur Castellani, je pense vous avoir rassuré en précisant que l'exception à la protection de certains étrangers contre une mesure d'expulsion dépendait d'une condamnation définitive. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

Madame Faucillon, j'entends vos arguments sur la situation d'un étranger supposé ne posséder aucune attache avec son pays d'origine. Prenons le cas de M. Iquioussen, qui a été expulsé pour atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, et non au titre d'une condamnation pénale. C'est en raison de son comportement – pour reprendre l'expression de M. Vallaud – que le Conseil d'État nous a finalement donné raison. Ses quatre enfants sont nés en France, il parle très correctement le français, il est propriétaire de biens situés en France et il s'est marié en France. Tous ces éléments ont conduit le tribunal administratif de Paris à invalider la décision d'expulsion. L'avocat avait également plaidé l'absence de lien avec le Maroc, le pays d'origine de M. Iquioussen, mais nous avons pu prouver qu'il possédait une propriété au Maroc et qu'il y retournait très régulièrement. Que faire face à un imam radicalisé qui prêche la violence ou à l'auteur d'un grave délit dont on veut obtenir l'expulsion ? Faut-il se fier simplement à ses déclarations ?

La protection contre l'expulsion ne concerne pas seulement les personnes arrivées en France avant l'âge de 13 ans, mais également les parents d'un enfant mineur résidant en France, un étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française ou un étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans. Le respect de la vie privée et familiale doit-il s'appliquer à un pédophile qui violente ses propres enfants ou à un criminel récidiviste ?

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Gérald Darmanin, ministre

On peut aussi supprimer les juges, mais c'est un autre débat, monsieur Marleix. Dans 70 % des cas, le juge donne raison au ministère de l'intérieur, mais, aujourd'hui, j'ai 4 000 cas pour lesquels la loi m'empêche de prendre une mesure d'expulsion. La question est donc de savoir si vous souhaitez m'autoriser à expulser 70 % de ces 4 000 cas ou si vous préférez qu'on ne les expulse pas. M. Retailleau ainsi que l'ensemble des membres du groupe Les Républicains au Sénat ont choisi : ils ont voté cet article.

Je rappelle que les réserves ne concernent pas que les personnes arrivées en France alors qu'elles étaient un bébé. Elle concerne également l'étranger titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 %, l'étranger qui réside en France depuis plus de vingt ans, l'étranger dont le conjoint est français, l'étranger parent d'un enfant français de moins de 16 ans et l'étranger dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale.

Aujourd'hui, 2 500 personnes sont expulsées ou éloignées par an après avoir transité par un centre (CRA) ou un local (LRA) de rétention administrative. Il s'agit d'étrangers auteurs de graves troubles à l'ordre public (TOP). Leurs dossiers complets sont à votre disposition. Mais il existe 4 000 personnes que je ne peux ni expulser ni éloigner – une OQTF serait immédiatement invalidée – en raison d'une loi votée au début des années 2000. La question qui se pose est à présent de savoir si on prend ses responsabilités ou pas.

L'amendement CL671 est retiré.

La commission rejette l'amendement CL1047.

Amendement CL383 de M. Yoann Gillet

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En France, on aime parfois compliquer les choses et le droit de l'expulsion n'y échappe pas.

L'article 9 va dans le bon sens et nous proposons par cet amendement d'aller plus loin en imposant à l'autorité administrative l'obligation d'expulser tout étranger dont la présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public. Les menaces graves sont constituées lorsque l'étranger a fait l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou un délit puni d'une peine d'au moins trois d'emprisonnement. Cet amendement supprime ainsi le statut protecteur pour certains étrangers.

Nous avons visité il y a quelques jours, avec ma collègue Edwige Diaz, le CRA de Vincennes où nous avons pu constater que 65 % des TOP ne sont pas expulsés. Il existe pourtant des moyens d'action. Nous réclamons des sanctions contre les pays qui refusent de délivrer des laissez-passer consulaires.

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La mesure proposée par cet amendement pose trois difficultés : le caractère automatique de la sanction viole le principe de proportionnalité ; une mesure d'expulsion ne peut se fonder uniquement sur une condamnation pénale ; son application à des mineurs de 16 ans est contraire à nos engagements internationaux. J'ajoute que ceux-ci, comme la Convention des droits de l'enfant, ne sont pas un carcan, mais des principes généraux du droit que nous devrions tous avoir à cœur d'appliquer.

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Gérald Darmanin, ministre

Monsieur Gillet, la situation que vous avez constatée au CRA de Vincennes ne s'explique pas par un refus de délivrance de laissez-passer mais par une libération prononcée par le juge des libertés et de la détention (JLD) avant le délai maximal de rétention de trois mois. Le projet de loi propose en son article 24, qui a été voté par le Sénat, une réforme du régime du JLD.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CL822 de Mme Edwige Diaz, CL1335 de M. Emmanuel Mandon, amendements identiques CL1637 de M. Sacha Houlié et CL1682 de M. Philippe Pradal, amendements CL99 de Mme Françoise Buffet et CL472 de M. Éric Ciotti (discussion commune)

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L'amendement CL1335 répond à notre volonté de bien équilibrer le dispositif.

Le Sénat a remplacé, pour la définition des exceptions aux protections créées par l'article 9, la référence à la peine effectivement prononcée en raison de la commission d'un crime ou d'un délit par la référence à la peine fixée par la loi pour réprimer ce crime ou ce délit. Une telle substitution fait peu de cas de l'appréciation portée par le juge pénal sur la situation individuelle de l'étranger condamné. Elle peut donc aboutir à une expulsion qui serait fondée sur des faits d'une gravité limitée, ce qui caractériserait une sanction disproportionnée.

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Je laisse M. le rapporteur présenter son amendement CL1682, identique à celui que j'ai déposé.

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Le Sénat a modifié le seuil des peines encourues pour définir les exceptions aux protections contre l'expulsion en le portant à trois ans, ce qui nous semble excessif et fait courir un risque d'inconstitutionnalité. Nous proposons par cet amendement de revenir à la version initiale du projet de loi, qui prévoyait un seuil de cinq ans.

Avis favorable aux amendements identiques et défavorables aux autres amendements de cette discussion commune.

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L'amendement CL472 propose de renforcer l'article 9 et d'abaisser les seuils permettant de lever les protections quasi absolues et relatives pour l'expulsion d'un étranger constituant une menace grave à l'ordre public, en les fixant à une condamnation définitive pour des crimes ou des délits punis d'un an ou plus d'emprisonnement pour les protections relatives et à une condamnation définitive pour des crimes ou délits punis de trois ans ou plus d'emprisonnement pour une protection quasi absolue.

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Gérald Darmanin, ministre

Je rappelle que c'est la peine encourue et non pas prononcée qui est prise en compte. Les délits passibles d'une peine d'un an à trois d'emprisonnement sanctionnent des faits très divers – délit routier, vol à l'étalage. Or tous ne justifient pas une expulsion, qui concerne, je le répète, un étranger en situation régulière. Sans compter que si nous retenions ce critère, la disposition serait déclarée inconstitutionnelle. Nous avions, dans une première version du texte, établi les seuils d'exception pour condamnation pénale à un et trois ans, mais le Conseil d'État a considéré que ces seuils n'étaient pas acceptables.

Certes, il existe des délits passibles de trois ans d'emprisonnement qui pourraient justifier une expulsion, mais le critère est celui du seuil et non d'une liste de délits spécifiques. Nous avons donc retenu le seuil de cinq ans, qui reste proportionnel et n'est donc pas inconstitutionnel. Nous n'avons pas opté pour le critère de la peine effectivement prononcée, car les tribunaux ne condamnent pratiquement jamais à la peine maximale encourue. Le dispositif retenu englobe donc plus de gens.

Je comprends les raisons de cet amendement, car certains délits passibles d'un ou trois d'emprisonnement sont suffisamment graves pour justifier une expulsion, mais, pour toutes les raisons que j'ai évoquées, le seuil de cinq ans me semble préférable.

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Je regrette ce petit détricotage supplémentaire.

Mais je voudrais surtout revenir sur l'un des principaux arguments de vente de votre projet : l'expulsion que permettra ce texte de 4 000 délinquants étrangers qui disposent actuellement de protections légales.

Depuis l'assassinat de Dominique Bernard, chaque jour ou presque vous communiquez sur les expulsions que vous décidez en publiant un tweet. Notons au passage que vous y arrivez parce qu'en réalité celles-ci se font à dose assez homéopathique ; si elles étaient massives, vous auriez plus de mal à le faire.

J'aimerais que vous précisiez vos chiffres : en 2021, et alors que vous exerciez déjà vos fonctions, il y a eu 344 expulsions pour motif d'ordre public, dont 292 à l'initiative des préfets et 52 à celle du ministre de l'intérieur. On est loin des 2 500 que vous évoquez.

Vous dites donc que, grâce à ce projet de loi, vous expulserez 4 000 personnes supplémentaires, mais les arrêtés d'expulsion que vous prendrez pourront être cassés par le juge, puisque vous refusez la modification de la Constitution que nous proposons. Celle-ci aurait pourtant permis d'empêcher au juge d'écarter l'application de la loi au nom de son interprétation de la proportionnalité de la mesure avec le respect dû à la vie privée et familiale. En réalité, ce texte ne garantit pas que vous pourrez expulser ces 4 000 étrangers délinquants.

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Je crois que M. Marleix confond les mesures d'expulsion et celles d'éloignement.

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Gérald Darmanin, ministre

En effet, vous confondez deux choses, monsieur Marleix : l'éloignement et l'expulsion.

J'ai pris bien soin de distinguer les deux régimes lorsque nous avons abordé l'examen des article 9, 10 et 13.

L'expulsion suppose que le préfet ou le ministre prenne un arrêté. C'est une procédure qui reste exceptionnelle, puisqu'on en compte en moyenne moins de 500 par an. Cela concerne des personnes en situation régulière sur le territoire national et qui ont commis des crimes ou des délits graves. Cette procédure représente une petite partie du total des expulsions et des éloignements – ces derniers, qui concernent les personnes en situation irrégulière, faisant l'objet de l'article 10.

Comment procédons-nous actuellement ? Nous retirons le titre de séjour des personnes qui commettent des actes graves. Cela peut être par exemple le cas d'une personne en situation régulière qui sortirait de prison. Dès lors qu'on lui a retiré son titre de séjour, on peut la placer dans un centre de rétention administrative (CRA) et délivrer une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Il est beaucoup plus simple de procéder ainsi et d'éloigner la personne une fois qu'elle est en CRA.

En 2022, il y a eu environ 400 arrêtés ministériels d'expulsion (AME) et autour de 2 200 OQTF, ces dernières étant appliquées à des individus dits TOP (trouble à l'ordre public) qui sont retenus dans les CRA. Les personnes visées par les AME sont par définition en situation régulière et elles sont assignés à résidence – à moins que l'on puisse retirer leur titre de séjour, auquel cas elles peuvent être placées en CRA.

Vous confondez donc deux régimes différents, monsieur Marleix.

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Vous unifiez les deux régimes dans ce projet de loi.

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Gérald Darmanin, ministre

Non, ce n'est pas vrai. Le projet comporte deux articles bien distincts, l'article 9 et l'article 10 – et nous avons discuté de ces dispositifs pendant près d'une heure et demie.

L'article 9 traite bien du régime d'expulsion et des arrêtés ministériels pris à cet effet. Vous avez parfaitement compris que l'objectif est d'en augmenter le nombre, car actuellement je ne peux pas prendre un certain nombre d'AME en raison de réserves d'ordre public.

L'article 10 porte quant à lui sur les OQTF. Je répète qu'on en comptait environ 2 500 par an et qu'il devrait y en avoir plus de 3 000 cette année en raison de la politique menée dans les CRA – nous reviendrons plus en détail sur cette question lorsque nous aborderons le rôle du juge des libertés et de la détention (JLD).

Je confirme donc le chiffre de 2 500 personnes que j'ai donné précédemment, avec grosso modo un quart d'AME et trois quarts d'OQTF.

Je le répète, la France est le seul pays en Europe à avoir imaginé des réserves d'ordre public. Cela a été fait lorsque l'on a supprimé la double peine. Ce dispositif n'est ni constitutionnel ni conventionnel. Dans un grand nombre de cas, il a pour effet d'empêcher le ministre de l'intérieur de procéder à des expulsions. Le régime de l'éloignement étant plus simple – puisqu'il concerne des personnes en situation irrégulière –, nous sommes actuellement amenés à retirer d'abord le titre de séjour d'un étranger qui a commis un crime ou un délit pour pouvoir ensuite lui appliquer le régime de l'éloignement.

Mais comme la décision de retrait du titre de séjour est susceptible de recours, je perds du temps. En outre, et vous le savez, il n'est pas si facile que cela de retirer un tel titre. Lorsque la personne est titulaire d'une carte de résident de dix ans, il est seulement possible de la dégrader en ramenant la durée de son titre de séjour à un an. C'était auparavant le cas pour les citoyens algériens et c'est désormais le droit commun – par pudeur, je ne rappellerai pas le nom de celui qui a prévu cette mesure pour les ressortissants d'autres pays que l'Algérie.

La décision de retrait d'un titre de séjour étant susceptible de recours, parfois je gagne, parfois je perds. En tout cas, c'est lorsque le titre de séjour est définitivement retiré et que la personne se retrouve en situation irrégulière, que je peux appliquer le régime de l'éloignement et non plus celui de l'expulsion.

Avec ce texte, je propose d'aller beaucoup plus vite et de considérer que les personnes en situation régulière qui ont commis des crimes et des délits passibles d'une peine de cinq ans peuvent directement faire l'objet d'un AME. Le fait de ne pas avoir à retirer préalablement le titre de séjour supprime une étape de recours juridictionnel – et même deux si l'on prend en compte l'appel.

Actuellement, j'éloigne une personne parce qu'elle est en situation irrégulière et non pas parce qu'elle a commis un délit. Avec l'article 9, je pourrais le faire parce qu'elle a commis un délit. Cela change tout.

Monsieur Marleix, même avec votre réforme constitutionnelle, le juge pourra encore intervenir. Vous ne proposez pas de supprimer l'état de droit, n'est-ce pas ? Je précise au passage que je n'ai jamais dit que j'étais défavorable à une réforme constitutionnelle ; il faut qu'elle soit bien faite. En l'occurrence, je pense que celle que vous proposez, et dont nous débattrons en séance le 7 décembre, comporte des inexactitudes.

Il est quand même très étonnant de ne pas vouloir supprimer les réserves d'ordre public qui figurent dans la loi ordinaire, dont la famille politique à laquelle nous avons appartenu est à l'initiative. Il est vrai qu'à l'époque je n'avais pas encore le bac… En tout cas, la question peut être réglée au niveau de la loi ordinaire : pour éloigner ou expulser les étrangers délinquants, il suffit de voter ce texte. Il faut en revanche une réforme constitutionnelle pour prévoir des quotas prescriptifs.

On peut toujours souhaiter que 100 % des décisions prises par le ministre de l'intérieur soient suivies d'effet – ce n'est pas moi qui vais dire le contraire –, mais ces décisions s'inscrivent dans un ordonnancement juridique où le juge joue son rôle. De ce point de vue, votre réforme constitutionnelle ne réglera pas mieux le problème que ne le fait mon projet, puisque vous ne proposez de modifier ni le Préambule de la Constitution de 1946 ni la Déclaration de droits de l'homme et du citoyen. On pourrait imaginer de s'affranchir des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme – encore que la question ne soit pas vraiment tranchée. Comme je l'ai déjà mentionné, la Cour suprême britannique a en effet estimé que, même dans ce cas, un certain nombre de principes relatifs à la vie privée et familiale continueraient à s'appliquer.

En revanche, vous avez parfaitement raison sur un point : je ne parviendrai pas à expulser ou à éloigner l'ensemble des 4 000 personnes qui sont actuellement protégées par les réserves d'ordre public qui ont été inscrites dans la loi – et non dans la Constitution – il y a vingt ans. Mais, dans 75 % des cas, le juge me donne raison. Nous n'y serions pas arrivés si j'avais écouté ceux qui me disaient que le juge s'y opposerait de toute manière. Il est en effet difficile d'exercer des responsabilités. Je n'aurais pas non plus réussi à expulser M. Iquioussen si j'avais écouté tous ceux qui disaient que ce ne serait pas possible du fait du droit à la vie privée et familiale. Le fait est qu'il vivait en France depuis trente ans et que personne ne l'avait expulsé. Nous y sommes parvenus, parce qu'un préfet courageux me l'a proposé et que nous avons été persévérants.

Heureusement que nous n'attendons pas ad vitam æternam qu'il n'y ait plus de juge pour procéder à ces expulsions.

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La disposition introduite par le Sénat est innovante et correspond à un besoin, mais elle présente un risque d'inconstitutionnalité car le quantum de peine encourue est trop bas. Il est impératif d'augmenter ce dernier.

La rédaction proposée par le rapporteur avec l'amendement CL1682 préserve l'intention du Sénat, écarte le risque d'inconstitutionnalité et permet de préparer une éventuelle commission mixte paritaire (CMP) dans de bonnes conditions.

Je suggère donc à mes collègues du groupe Démocrate qui ont signé l'amendement CL1335 de se rallier à la proposition du rapporteur.

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Beaucoup d'arguments ont déjà été donnés, notamment par Elsa Faucillon, pour démontrer que la mesure proposée par cet article n'est pas pertinente.

J'en ajoute un : la tendance très prononcée, depuis le début de cette législature, à augmenter les peines encourues. J'appelle votre attention sur le fait que cela va conduire à augmenter le nombre de cas où un étranger, alors qu'il a purgé sa peine – laquelle est normalement destinée à la réparation, même si cela ne correspond pas tout à fait à ce qui se passe dans nos prisons –, risque d'être renvoyé dans un autre pays, peut-être le sien – on ne sait pas bien en l'occurrence ce que ce pronom possessif veut dire.

La commission rejette successivement les amendements CL822 et CL1335.

Elle adopte les amendements CL1637 et CL1682.

En conséquence, les amendements CL99 et CL472 tombent, ainsi que les amendements CL278 de M. Yoann Gillet, CL769 de Mme Élisa Martin, CL1667 de M. Éric Ciotti et CL289 de M. Fabien Di Filippo.

Amendement CL514 de Mme Emmanuelle Ménard

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Si l'on peut saluer la nouvelle rédaction de l'alinéa 2 de cet article, il n'en reste pas moins qu'il serait opportun de maintenir la possibilité d'expulser quiconque porte ou risque de porter préjudice à la sûreté de l'État ou à la sécurité publique.

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Avis défavorable. Ce que vous proposez est déjà prévu par l'article L. 252-2 du Ceseda.

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Gérald Darmanin, ministre

Je suis d'accord avec votre amendement, mais il est déjà satisfait par l'article L. 631-2 de ce code, qui mentionne bien les motifs de sûreté de l'État et de sécurité publique, et par l'article L. 631-3 qui ne fait pas obstacle à une telle expulsion.

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Je reviens sur le débat sur le quantum de peine, car certains faits qui sont punis par un an de prison ne sont pas anodins.

Parmi eux figure celui de procéder à un examen visant à attester la virginité d'une femme, l'introduction sans autorisation sur un terrain affecté à l'autorité militaire ou le fait de participer sciemment à un groupement formé en vue de la préparation de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens. C'est aussi le cas du bizutage sur des personnes particulièrement vulnérables.

J'entends ce que vous me dites à propos du fort risque d'inconstitutionnalité. Mais alors, il faut changer la Constitution. C'est ce que nous proposons dans l'article 7 de notre proposition de loi constitutionnelle.

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Gérald Darmanin, ministre

J'ai dit que certains des faits punis par trois ans de prison, voire par un an, pouvaient légitimement justifier une expulsion. Mais j'ai également indiqué que cet ensemble d'infractions comporte aussi, par exemple, le fait de refuser de donner le code d'accès de son téléphone en garde à vue ou le harcèlement scolaire pendant moins de huit jours, pour lesquels on peut s'interroger sur la proportionnalité d'une mesure d'expulsion.

J'ai aussi dit que j'étais disposé à examiner un amendement qui permette de compléter l'article par une liste d'infractions. Mais vous voyez bien que cette démarche est très difficile car on peut aussi en oublier certaines. S'agissant du délit de délivrance d'un certificat de virginité, l'expulsion est possible grâce à la loi confortant le respect des principes de la République. Mais vous avez parfaitement raison en ce qui concerne l'introduction sans autorisation sur un terrain militaire ou la participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences volontaires. On pourrait aussi penser à l'abus de faiblesse, qui est puni d'une peine de trois ans de prison.

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On pourrait aussi relever le quantum de peine pour ces infractions.

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Gérald Darmanin, ministre

Il faut que le quantum de peine retenu dans l'article 9 soit conforme au principe de proportionnalité. J'imagine que vous ne souhaitez que le bien et la sécurité des Français, madame Genevard. Nous serions tous bien avancés si le Conseil constitutionnel censurait ces dispositions…

Je vous propose de conserver le quantum de cinq ans de prison, pour s'assurer de la constitutionnalité de la mesure – je vous accorde que tout cela est subjectif et nous verrons bien ce que décide le juge constitutionnel, mais l'enjeu est important. Vous pouvez proposer en séance publique un amendement prévoyant une liste d'infractions punies d'une peine moindre et qui pourraient néanmoins autoriser une expulsion, compte tenu de leur gravité. Les infractions punies de trois ans d'emprisonnement visent des faits très différents. J'estime qu'il serait un peu disproportionné d'expulser une personne en situation régulière parce qu'elle refuse de donner son code de téléphone ou pour faux et usage de faux.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL398 de Mme Marie-France Lorho

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Selon l'Observatoire international des prisons (OIP), au 1er janvier 2021 les détenus exécutant une peine comprise entre deux ans et cinq ans inclus constituaient la part principale de la population carcérale, soit 24,1 %. La part des détenus ayant effectué de deux à trente ans inclus s'élève quant à elle à 52 %, voire à 53 % si l'on ajoute ceux condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité.

Eu égard à la part importante d'étrangers en prison, qui atteignait 25 % au 1er juillet 2022, il apparaît très probable que la part d'étrangers ayant déjà été punis de trois ans ou plus d'emprisonnement soit extrêmement élevée.

Il est donc anormal que le législateur ne prévoit pas l'expulsion systématique d'un étranger lorsqu'il s'est rendu coupable de tels crimes ou délits. C'est le sens de cet amendement, qui prévoit de généraliser l'expulsion des étrangers ayant déjà exécuté une peine de trois ans d'emprisonnement ou plus.

De cette mesure dépendent non seulement le respect de l'ordre en France, mais aussi la réduction de la surpopulation carcérale.

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Avis défavorable, car ce que vous proposez ne respecte pas le principe de proportionnalité.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL1071 de M. Boris Vallaud

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Cet amendement, ainsi que l'amendement CL1072 qui suit, ont été suggérés par Unicef France. Ils visent à mieux prendre en compte l'intérêt supérieur de l'enfant en levant les dérogations à la protection des parents d'enfants français contre l'expulsion.

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La situation de l'étranger parent d'un enfant mineur doit être prise en considération.

Doit-elle pour autant priver l'autorité administrative de la possibilité d'agir lorsque le comportement de l'étranger est manifestement incompatible avec le respect de nos valeurs et qu'il présente une menace grave pour l'ordre public ?

Dans ce cas, il faut pouvoir lever les régimes de protection, comme le propose cet article. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à votre amendement et que je le serai pour tous les amendements qui écartent de manière systématique la levée de ces protections. Il faut préserver la marge d'appréciation et l'autonomie d'action de l'autorité administrative.

Je suis défavorable aux protections automatiques, comme je le suis aux peines automatiques.

La commission rejette l'amendement.

Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL1072 de M. Boris Vallaud.

Amendements identiques CL1736 de M. Sacha Houlié et CL1686 de M. Philippe Pradal

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Cet amendement rétablit le critère relatif à l'appréciation de l'actualité de la menace que représente le comportement de l'étranger et qui permettra de lever les protections dont il bénéficie. Cette mesure figurait dans le texte initial du Gouvernement et n'avait pas été modifiée lors de son examen en commission au Sénat. Ce critère est nécessaire pour préserver le caractère constitutionnel de l'article.

Il ne faut pas trop s'éloigner de ce qui a été pesé au trébuchet tant par les services du ministère de l'intérieur que par le Conseil d'État.

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Je souhaite prendre la défense du ministre contre les attaques qui viennent de sa gauche.

Alors que le projet essaye de donner davantage de pouvoir au ministre de l'intérieur pour lui permettre d'expulser les étrangers délinquants, le président de la commission des lois nous explique que, finalement, un délit ne suffira pas. Il faudra en outre que l'étranger délinquant continue à représenter une menace actuelle pour l'ordre public – dont on ne sait absolument pas comment elle sera caractérisée et dont, une fois encore, l'appréciation sera laissée au seul juge.

On est en train d'ôter une grande partie de sa portée à cet article 9, qui est le principal argument de vente de M. Darmanin.

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En fait, je souhaite protéger cette mesure contre une censure par le Conseil constitutionnel, monsieur Marleix.

Le Conseil d'État nous a averti qu'il y avait un grand risque sur ce point. Il serait tout de même dommage de voter un texte qui soit ensuite déclaré inconstitutionnel. Je sais que telle est la nature de beaucoup de vos propositions, mais, nous, nous souhaitons adopter des mesures efficaces pour protéger les Français.

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Gérald Darmanin, ministre

J'espère que l'obsession de M. Marleix contre ma personne ne le conduira pas à renoncer à protéger les Français.

Si je comprends bien, vous avez l'intention de voter contre cet article – et peut-être contre l'ensemble de ce projet – alors que cela permettrait d'expulser plus de 4 000 délinquants et criminels tout simplement parce que vous n'avez pas envie que le Gouvernement réussisse à faire voter ce texte.

Faites un peu de droit, monsieur Marleix. Confondre expulsion et éloignement est un peu fort de café !

Vous ne me protégez pas contre ma gauche. Ne vous inquiétez pas, je le fais très bien moi-même. Et si c'est à M. Pradal que vous faites allusion, on devrait pouvoir s'en sortir… Vous l'avez très bien connu également et votre attaque contre lui ne me paraît pas très justifiée.

Je vous rappelle que ces amendements proposent de revenir à la rédaction initiale du Gouvernement.

Je n'ai pas compris votre démonstration, monsieur Marleix. Encore une fois, nous parlons du régime de l'expulsion, et pas de celui de l'éloignement. Cet article concerne des personnes qui sont en situation régulière et qui font l'objet d'un AME – et non pas des personnes en situation irrégulière à qui l'on délivre une OQTF. Ces personnes en situation régulière peuvent vivre en France depuis quinze ou vingt ans et elles bénéficient de garanties supérieures à celles accordées aux personnes en situation irrégulière – ce qui est bien normal.

Pour que l'on comprenne mieux ce que prévoient les amendements du président et du rapporteur, je reviens sur le cas de l'assassin de Dominique Bernard à Arras.

En l'occurrence, il était en situation irrégulière et il relevait du régime de l'OQTF.

Mais, s'il avait été en situation régulière, faute de mention dans la loi sur la nécessité du caractère actuel de la menace, nous n'aurions pas pu procéder à son expulsion. Il avait été placé en garde à vue pour avoir frappé sa mère, mais celle-ci n'avait pas porté plainte. Je le répète, le préfet du Pas-de-Calais a fait son travail dans cette affaire.

Ne faites pas comme s'il y avait des difficultés là où il n'y en a pas, monsieur Marleix. Au fond c'est assez simple : soit vous permettez aux policiers, aux gendarmes et aux préfets d'expulser ces personnes, soit vous ne le permettez pas.

La commission adopte les amendements.

Amendement CL1089 de Mme Estelle Youssouffa

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Cet amendement propose de lever certaines protections absolues et relatives qui concernent les mesures d'expulsion pour les étrangers condamnés en première instance pour des faits de violence, de viol et d'agression sexuelle.

Je rappelle que le Sénat avait proposé de lever ces protections en cas de condamnation définitive pour des crimes ou délits passibles d'une peine de trois ans de prison ou plus.

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Avis défavorable. Il me semble difficile de fonder la décision d'expulsion sur un jugement de première instance, lequel peut faire l'objet d'un appel aboutissant à une relaxe.

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Nous ne pouvons pas poursuivre nos travaux.

En tant que président de la commission des lois, vous devez interrompre immédiatement cette réunion afin que nous puissions participer à la discussion en séance publique d'une proposition déposée par notre groupe et dont notre commission a été saisie au fond. C'est une question de respect démocratique et républicain – je ne vais évidemment pas parler avec vous de courtoisie.

Si vous ne suspendez pas je vous garantis que nous demanderons un vote par scrutin pour tous les amendements. Absolument tous !

(Exclamations.)

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Le principe selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude s'applique ici comme ailleurs.

Il était prévu de suspendre nos travaux à vingt et une heures trente pour pouvoir examiner en séance la proposition de loi de Mme Danièle Obono tendant à la réouverture des accueils physiques dans les services publics. Afin d'accélérer son examen, vous avez retiré votre proposition de loi précédente avant que la discussion arrive à son terme en séance. La discussion générale sur la proposition de Mme Obono vient de commencer et nous pourrons tous participer à l'examen des amendements tout à l'heure.

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On poursuit nos travaux alors qu'un texte sur lequel la commission des lois est saisie au fond est examiné dans l'hémicycle ! Qu'est-ce que c'est que ces méthodes ?

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Ça suffit, monsieur Bernalicis. Vous vous comportez comme un enfant ! Cela n'est pas acceptable et nous allons poursuivre nos travaux.

La commission rejette l'amendement.

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Je souhaitais défendre l'amendement CL765 de M. Thomas Portes.

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Cet amendement est tombé en raison de l'adoption d'un amendement précédent.

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Les commissaires aux lois doivent être présents dans l'hémicycle !

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Ça suffit.

L'amendement CL767 de Mme Andrée Taurinya est-il défendu ?

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Vous devez mettre un terme à cette réunion !

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Monsieur Bernalicis, cessez de faire l'enfant capricieux. Écoutez la vice-présidente.

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J'étais présente en conférence des présidents lorsque la question de la surcharge de travail de la commission des lois a été évoquée. Le président Houlié avait alors souligné qu'un trop grand nombre de textes devaient être examinés. Et il a demandé que l'agenda soit revu, précisément pour nous permettre de participer aux travaux aussi bien en commission qu'en séance publique.

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Le président de notre commission a fait état des difficultés entraînées par l'ordre du jour, car nous ne pouvons effectivement pas nous dédoubler. Aucun des présidents de groupe présents lors de cette conférence – dont la présidente du groupe LFI – ne s'est exprimé sur le sujet.

Je constate les faits de manière objective et je déplore autant que vous cette situation. La conférence des présidents a décidé de ne pas modifier l'agenda. Il faudra aborder cette question lors de sa prochaine réunion.

Amendements CL1093 et CL1100 de Mme Estelle Youssouffa, amendement CL1683 de M. Philippe Pradal (discussion commune)

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Et je suis insoumis aux insoumis !

Prenez garde, car ceux qui créent des troubles au sein de l'Assemblée risquent des sanctions.

(La discussion se poursuit dans le brouhaha.)

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L'amendement CL1093 propose de lever certaines protections absolues et relatives qui concernent les mesures d'expulsion pour les étrangers condamnés en première instance pour des faits de violence, de viol et d'agression sexuelle.

L'amendement de repli CL1100 propose de lever ces protections pour les étrangers condamnés définitivement pour les mêmes faits.

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Suspendez, comme on l'a toujours fait ! Sur tous les textes, en tout temps, jamais la commission des lois ne s'est réunie alors qu'un texte dont elle est saisie au fond est discuté dans l'hémicycle !

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Il faudra recourir à la force physique pour me mettre dehors !

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Arrêtez de vous comporter comme un gamin turbulent.

Lorsque nous avons examiné en séance publique la proposition de résolution visant à faire respecter le droit international dans le secours des migrants en mer Méditerranée, notre commission s'est réunie alors que la discussion générale avait lieu, et cela ne vous a posé aucun problème car ce texte avait été proposé par un autre groupe. Il y en a assez de votre indignation à géométrie variable. Vous n'avez pas raison, donc vous arrêtez votre cinéma.

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Ce n'est pas du cinéma, c'est la démocratie ! Que faut-il dire pour que cela monte jusqu'à votre cerveau ?

(La discussion se poursuit dans le brouhaha.)

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Avis défavorable aux amendements CL1093 et CL1100. En effet, le champ des infractions concernées est plus large que les exemples que vous avez donnés. Il comprend aussi par exemple les appels téléphoniques malveillants et les menaces. Vous allez trop loin dans la levée des protections.

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Gérald Darmanin, ministre

Comme je l'ai dit précédemment à Mme Genevard, on peut toujours envisager de modifier le quantum de peine mais je suis disposé à ce que nous travaillions d'ici à la séance pour définir une liste précise de délits qui entraîneraient la levée des protections.

Comme il y a beaucoup de bruit, j'espère que vous avez entendu ma réponse – et j'espère aussi que ceux qui nous écoutent comprennent ce qui est en train de se passer.

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Suspendez les travaux ! Vous ne réunirez pas cette commission alors même que nous devons discuter d'une proposition en séance ! Nous nous y opposerons !

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Je voudrais dire avec calme et gravité que la journée d'initiative réservée à chaque groupe d'opposition est un droit essentiel pour assurer la pluralité démocratique – ce que chacun ici reconnaît.

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Président Maillard, vous n'intervenez pas ? Vous laissez faire ?

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La discussion générale vient à peine de commencer dans l'hémicycle.

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Et tout le monde se fiche de la discussion générale ?

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Un texte extrêmement important – et même s'il ne l'était pas cela ne changerait rien – est discuté en séance publique. Il concerne tous les membres de cette commission. Nous n'en sommes peut-être qu'à la discussion générale, monsieur le président Maillard, mais celle-ci éclaire le débat. Il n'y a pas que les votes qui importent. La démocratie, c'est aussi la discussion.

Monsieur le président, dans un souci d'apaisement et alors que nos travaux ont très bien avancé cet après-midi, je vous demande au nom de mon groupe d'interrompre cette réunion, afin que nous puissions aller en séance participer à l'examen de la proposition de loi de Mme Obono et faire ainsi notre travail de législateur dans de bonnes conditions.

Nous serons à vos côtés pour souligner devant la conférence des présidents la surcharge de travail de notre commission et les conditions dramatiques dans lesquelles on contraint les députés à faire la loi.

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J'aurais aimé que vous soyez à mes côtés lorsque je suis intervenu lors de la conférence des présidents il y a deux semaines. Tel n'a pas été le cas malheureusement !

Je répète que lorsqu'il s'est agi de l'examen en séance de la proposition de résolution de résolution européenne de M. Dumont visant à faire respecter le droit international dans le secours des migrants en mer Méditerranée, cela ne vous a posé aucun problème !

Nous ne reprendrons donc pas nos travaux à vingt et une heures trente, comme prévu.

La commission rejette successivement les amendements CL1093 et CL1100.

Elle adopte l'amendement CL1683.

En conséquence, les amendements CL100, CL1601, CL1074, CL825, CL473, CL389, CL807, CL417 et CL517 tombent.

Amendement CL672 de M. Christophe Naegelen

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Il est hors de question que cette commission continue de se réunir !

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Monsieur Bernalicis, vous n'avez aucune autorité ici. Ce n'est pas vous qui décidez.

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Nous ne pouvons pas travailler en même temps en commission et dans l'hémicycle. C'est du bon sens. Il faut appliquer le règlement. Nous avons toujours suspendu nos travaux lorsqu'une proposition était examinée dans l'hémicycle !

(La discussion se poursuit dans le brouhaha.)

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Cet amendement vise à lever un obstacle à l'expulsion de certains étrangers présentant une menace grave pour l'ordre public en supprimant l'une des catégories de protection prévues à l'article L. 631-3 du Ceseda.

Cela permettra d'aller plus loin, en permettant d'expulser un étranger résidant habituellement en France depuis l'âge de 13 ans en cas de menace grave à l'ordre public.

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Je le répète : il est hors de question de continuer ainsi ! Je m'y opposerai !

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Avis défavorable.

Retirer la protection dont bénéficient les mineurs qui résident en France depuis l'âge de 13 ans me paraît excessif.

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Jamais vous n'aviez été aussi loin ! Jamais !

Tout cela pourquoi ? Pour respecter l'agenda du ministre Darmanin, qui souhaite que ce texte soit voté avant Noël ?

Suspendez cette réunion !

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Il y a eu plusieurs problèmes au cours de cette réunion – des députés du Rassemblement national se sont notamment mis à fumer en pleine réunion, ce qui montre que certains d'entre eux sont en train de craquer.

Si nous voulons continuer à débattre sereinement, il serait bon de suspendre nos travaux. Si tel n'est pas le cas, je suis au regret de vous prévenir que nous demanderons des scrutins publics non seulement jusqu'à la fin de cette réunion, mais aussi sur l'ensemble des amendements qui restent à discuter.

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Je tiens à faire part de mon soutien au président Naegelen qui a essayé de défendre son amendement malgré le bruit, le chaos et les menaces.

Je répète donc que son amendement vise à lever un obstacle à l'expulsion de certains étrangers qui présentent une menace grave pour l'ordre public en supprimant l'une des catégories de protection.

Vous pouvez continuer à vociférer mais, avec le groupe LIOT, je continuerai à travailler car notre rôle est de débattre. Votre mise en scène ne servira à rien, monsieur Bernalicis.

Je vous invite à vous comporter avec moi comme vous l'avez fait avec le président Naegelen, c'est-à-dire vous interposer physiquement en haussant la voix. Continuez ! Venez menacer une femme, j'ai hâte de voir ça !

Vous donnez un spectacle lamentable de la démocratie ! Vous mettez en scène votre nullité !

(La discussion se poursuit dans le brouhaha.)

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Les menaces envers Mme Youssouffa ne sont pas acceptables. Les révolutionnaires en carton que vous êtes pourraient-ils enfin se taire ?

Chacun fera part de ce sujet au bureau et à la conférence des présidents, qui décideront de ce qu'ils ont à faire. Mais en attendant, arrêtez de vous comporter de cette manière. Nous ne sommes ni dans un cirque ni dans l'une de vos manifestations.

La commission rejette l'amendement.

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Les amendements sur lesquels vous avez demandé des scrutins ne sont pas défendus…

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Gérald Darmanin, ministre

Je voudrais revenir sur l'amendement CL672.

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Non parce que nous ne pouvons pas remplir notre rôle de parlementaire !

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Gérald Darmanin, ministre

Monsieur Bernalicis, depuis que je suis ministre je suis présent lors de tous les débats législatifs qui me concernent au sein de cette commission – même si je n'y suis pas obligé – et je ne vous ai pas beaucoup vu sur ses bancs. Vous n'avez manifestement pas envie d'étudier ce texte. C'est votre problème, mais vous n'avez pas à menacer une parlementaire comme vous l'avez fait.

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Gérald Darmanin, ministre

Personnellement je n'ai crié sur personne.

Quant à mon agenda, je serai présent ici samedi, dimanche, lundi et jusqu'à Noël si vous le souhaitez. Encore une fois, j'ai assisté à toutes les réunions de la commission sur ce texte, ce qui n'est pas votre cas. Vous pouvez donc garder pour vous vos leçons de maintien.

Tout le monde n'a pas le bonheur de vous avoir comme voisin de circonscription, monsieur Bernalicis. Ceux qui connaissent vos habitudes dans le Nord ne sont pas surpris par votre comportement.

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Ce n'est pourtant pas compliqué de suspendre cette réunion !

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Gérald Darmanin, ministre

Je ne préside pas cette commission. Je ne me mêle pas de vos relations avec vos collègues et ne participe pas à votre cirque. Je vous réponds simplement, puisque vous m'avez attaqué sur mon agenda, que je suis à la disposition totale du Parlement.

Reprenons dans le calme.

Je voudrais dire à Mme Youssouffa et à M. Naegelen que si je peux comprendre la proposition qu'ils font à travers l'amendement CL672, le dispositif présente une sérieuse difficulté juridique. Je ne sais plus très bien quel a été le résultat du vote en raison de la confusion qui règne – cela commence donc à poser un problème…

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Le plus jeune président de l'histoire de cette commission ne se donne pas la peine d'appliquer le règlement !

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Gérald Darmanin, ministre

Vous ne vous comportez pas comme un parlementaire de la nation, monsieur Bernalicis. Chacun le constate.

Ugo n'est manifestement pas prêt pour Beauvau. Il va falloir mûrir un petit peu. Vous êtes éventuellement prêt pour une assemblée générale d'étudiants, mais pas pour le ministère de l'intérieur. Certes, il vous reste encore au moins quatre ans à attendre…

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Cet amendement a bien été rejeté, monsieur le ministre.

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Gérald Darmanin, ministre

Eh bien nous aurons l'occasion d'en reparler dans l'hémicycle.

Amendement CL1077 de M. Boris Vallaud

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Les conditions ne sont pas réunies pour un examen serein.

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Je suis désolé mais je n'en suis pas responsable.

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Suspendez cette réunion. Un peu de décence démocratique !

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Monsieur le président, cela fait un quart d'heure que l'on n'arrive pas à s'entendre. Cela s'explique, car nos collègues demandent à pouvoir aller en séance pour la discussion d'une proposition de loi.

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Ce problème aurait pu être anticipé. Je ne comprends plus rien à cette discussion et je ne peux plus faire mon travail de parlementaire de manière sereine, alors même que nous débattons de choses importantes – l'amendement CL1077 a été suggéré par l'Unicef et concerne des enfants.

Le niveau sonore est insupportable et porte atteinte à la qualité du débat parlementaire.

Il est vingt heures et je vous demande de mettre un terme à cette réunion.

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J'avais constaté que la discussion générale de la proposition de loi avait commencé en séance publique, dans la plus grande indifférence du groupe LFI. Au bout de quarante minutes, M. Bernalicis est venu mettre un bazar incroyable en commission.

Je saisirai la présidente de l'Assemblée au sujet des troubles graves qu'il a causés et je demanderai des sanctions.

La commission rejette l'amendement.

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La commission reprendra ses travaux demain matin à neuf heures, puisque nous serons en séance publique ce soir, comme vous le savez.

La séance est levée à 20 heures

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Caroline Abadie, M. Erwan Balanant, M. Romain Baubry, M. Ugo Bernalicis, Mme Pascale Bordes, M. Florent Boudié, M. Louis Boyard, Mme Blandine Brocard, M. Michel Castellani, Mme Émilie Chandler, Mme Clara Chassaniol, M. Arthur Delaporte, Mme Mathilde Desjonquères, Mme Edwige Diaz, M. Pierre-Henri Dumont, Mme Elsa Faucillon, Mme Annie Genevard, M. Yoann Gillet, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Marie Guévenoux, M. Jordan Guitton, M. Sacha Houlié, M. Timothée Houssin, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Marietta Karamanli, Mme Emeline K/Bidi, M. Andy Kerbrat, M. Philippe Latombe, M. Gilles Le Gendre, M. Antoine Léaument, Mme Marie Lebec, Mme Marie-France Lorho, M. Benjamin Lucas, M. Emmanuel Mandon, M. Laurent Marcangeli, Mme Élisa Martin, M. Thomas Ménagé, Mme Emmanuelle Ménard, M. Ludovic Mendes, Mme Laure Miller, Mme Naïma Moutchou, M. Christophe Naegelen, Mme Danièle Obono, M. Didier Paris, M. Éric Pauget, M. Emmanuel Pellerin, M. Thomas Portes, M. Éric Poulliat, M. Philippe Pradal, M. Stéphane Rambaud, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Sandra Regol, Mme Béatrice Roullaud, Mme Sandrine Rousseau, M. Thomas Rudigoz, M. Raphaël Schellenberger, M. Philippe Schreck, M. Olivier Serva, Mme Sarah Tanzilli, Mme Andrée Taurinya, M. Jean Terlier, M. Boris Vallaud, M. Guillaume Vuilletet, Mme Caroline Yadan

Excusés. - M. Ian Boucard, M. Éric Ciotti, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, M. Davy Rimane

Assistaient également à la réunion. - M. Carlos Martens Bilongo, M. Christophe Blanchet, Mme Émilie Bonnivard, Mme Françoise Buffet, M. Arthur Delaporte, Mme Stella Dupont, Mme Maud Gatel, M. Laurent Jacobelli, M. Mathieu Lefèvre, Mme Brigitte Liso, M. Sylvain Maillard, M. Olivier Marleix, M. Laurent Panifous, Mme Michèle Peyron, Mme Marie Pochon, Mme Violette Spillebout, M. Christopher Weissberg, Mme Estelle Youssouffa