Respect des principes de la république — Texte n° 3797

Amendement N° 2663 (Irrecevable)

Publié le 28 janvier 2021 par : M. Villani, M. Orphelin, Mme Cariou, Mme Forteza, M. Julien-Laferrière, M. Chiche.

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Supprimer cet article.

Exposé sommaire :

Le présent amendement vise à supprimer l’article 21 afin de maintenir le régime déclaratif en vigueur.

L’article 21 vise à encadrer strictement la liberté reconnue aux parents d’instruire leurs enfants au sein de la famille. Il s’agit là d’un droit reconnu de longue date par la loi, consacré par de nombreux textes juridiques et confirmé par la jurisprudence. Tout au long de son histoire, l’École de la République s’est développée sur la base de la seule obligation d’instruction assortie du contrôle de l’État. Pour reprendre les mots de la Défenseure des droits, il n’y a donc pas d’incompatibilité de principe entre l’École républicaine et la liberté laissée aux parents d’instruire leurs enfants dans la famille. Pourtant, l’évolution s’est faite dans le sens d’une défiance toujours plus importante à l’égard de cette modalité d’instruction confortée par une législation toujours plus restrictive. Ce qui est une liberté déjà largement contrôlée, est en passe de devenir une exception strictement limitée. Or contrairement à ce que certains semblent vouloir croire, une exception n’est plus une liberté.

Cet article pose ainsi le principe de scolarisation obligatoire et ne permet l’instruction en famille, par dérogation à cette obligation, que pour quatre motifs limités et tirés de la situation de l’enfant. Il substitue à un régime de déclaration – qui est la norme en matière de libertés publiques et le dispositif retenu par la plupart des pays européens qui majoritairement garantissent cette liberté – un régime d’autorisation annuelle. Cette rupture drastique serait justifiée par les phénomènes de radicalisation, de séparatisme, ou encore de fuite de l’école. Pourtant, aucune donnée scientifique ne permet pour l’heure d’accréditer la thèse associant spécifiquement ces phénomènes aux familles instruisant à domicile. En outre, la forte croissance fréquemment évoquée des enfants concernés par cette modalité d’instruction s’explique essentiellement par l’élargissement de l’assiette du dénombrement entraîné par l’avancement de l’obligation d’instruction à l’âge de 3 ans en 2019. Enfin, cette liberté fait déjà l’objet d’un contrôle strict de l’État, qui n’a eu de cesse ces dernières années de se renforcer, et dont il conviendrait de dresser le bilan avant de légiférer de nouveau et dans un sens plus restrictif.

Le retrait de cette liberté impliquerait sans doute un important contentieux, pouvant aller jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme, devant laquelle les parents empêchés d’instruire leurs enfants à domicile auraient de véritables chances de gagner contre la France. En effet, si la convention n’oblige pas les États à légaliser cette modalité d’instruction, elle ne leur confère pas plus la faculté de supprimer une telle liberté lorsqu’ils l’ont déjà reconnue dans le droit national. Si une telle restriction venait à être adoptée, la France se rangerait ainsi, après une longue histoire d’autorisation et de liberté, dans la frange européenne minoritaire et antilibérale sur ce point.

S’il est sans conteste dans l’intérêt supérieur de l’enfant de recevoir l’instruction la plus complète et que si ce droit doit être garanti sans aucune réserve, la réalité rend compte de ce que parfois il est dans son intérêt supérieur de recevoir celle-ci précisément au sein de sa famille. Or les motifs dérogatoires visés à l’article 21 ne recouvre qu’une partie de cette réalité et laisse ainsi pour compte une multitude de familles. Bien plus, ces motifs correspondent largement aux situations dans lesquelles l’instruction en famille n’est pas choisie mais subie, faute d’autre possibilité.

L’urgence et l’émotion qui ont accompagné l’élaboration de ce texte ne peuvent avoir pour conséquence la restriction précipitée et infondée d’une liberté dont la réalité est en vérité largement méconnue. Le Conseil d’État lui-même, souligne que cette mesure n’est « pas appuyée par des éléments fiables et documentés ». À cet égard, cette restriction ne garantit donc aucunement les objectifs affichés du texte, et apparaît par conséquent sinon non nécessaire, à tout le moins disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi.

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