Intervention de Christophe Castaner

Réunion du jeudi 9 mai 2019 à 12h30
Commission d'enquête sur la lutte contre les groupuscules d'extrême droite en france

Christophe Castaner, ministre de l'intérieur :

Vous avez raison, nous avons des problèmes pour certains profils, liés aux règles de recrutement des titulaires et des contractuels, et aux niveaux de rémunération. Dans le secteur du big data, l'instabilité professionnelle est chronique, y compris dans le privé : on reste six mois à un an dans un poste, puis on bouge. Ce n'est pas la culture que nous recherchons dans des services de renseignement. C'est donc une petite difficulté. Mais nous commençons malgré tout à intéresser des gens de qualité.

En outre, nous disposons d'outils juridiques et d'algorithmes. Quelques expérimentations – encadrées et autorisées – sont en cours. Nous aurons l'occasion d'en reparler d'ici 2020 à la faveur du bilan qui doit être réalisé de la loi sur le renseignement. Certains pays sont dotés d'algorithmes dont l'efficacité est bien plus redoutable que les nôtres : trois mots-clés dans un échange suffisent pour déclencher un hit, qui est ensuite analysé. Il faut donc à la fois l'information, mais aussi le croisement de différentes informations pour en tirer la bonne conclusion. Ainsi, vous avez le droit de dire dans une conversation que « Castaner est nul » – même si ce n'est pas bien de le faire. Cela peut faire un hit sur « Castaner » s'il s'agit d'un mot-clé, mais cela n'implique pas automatiquement une menace d'attentat terroriste contre le ministère de l'intérieur. L'exercice est donc très compliqué…

Je le répète, certains pays sont, sur ces sujets, beaucoup plus offensifs avec des moyens impressionnants. Il y a, à travers les réseaux sociaux, une ingérence de pays étrangers qui peut se développer et contre laquelle il faut s'armer. Nous nous armons. D'autres pays ont de véritables armées qui sont en charge de ces questions…

Je le répète également, les moyens, ce sont à la fois les moyens humains, pour répondre à une partie de votre question, et les moyens juridiques. Par nature, le ministère de l'intérieur rêve de plus de liberté pour utiliser tous les moyens ! Je vous renvoie aux discussions que nous avons eues à plusieurs reprises à l'Assemblée – notamment sur la reconnaissance faciale dans les vidéos. Je sais que nos positions sont parfois divergentes, et je connais aussi les risques, qui impliquent des garanties. La France a su développer des dispositifs de vidéosurveillance et de vidéoprotection en quelques années parce qu'elle a montré qu'elle avait su les accompagner des garanties nécessaires. Les images des caméras piétons qui équipent les forces de sécurité ne sont pas accessibles aux policiers, qui se contentent de les poser sur un boîtier. Je ne revendique d'ailleurs pas qu'ils aient accès aux images. Par contre, les policiers qui en sont équipés – j'en rencontre régulièrement – m'expliquent que leur relation à l'autre a totalement changé. Ce dispositif qui visait initialement à les responsabiliser, responsabilise aussi l'autre, l'interlocuteur. C'est peut-être de la crainte, mais cela a surtout banalisé la relation. Si les moyens sont importants, garantir la sécurité de leur utilisation l'est encore plus.

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