Intervention de Cécile Untermaier

Réunion du mercredi 29 décembre 2021 à 14h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

L'article 3 modifie le code de la santé publique, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Il conforte le rôle du JLD dans les mesures de contention et d'isolement dans les hôpitaux psychiatriques. Il ne s'agit donc pas seulement de tenir compte d'une censure par le Conseil constitutionnel pour des raisons de procédure parlementaire, mais bien de répondre à une exigence sur le rôle du juge. En cela, cet article est important.

S'agissant des autres dispositions, nous ferons plusieurs observations.

Près de 90 % de la population éligible à la vaccination dispose d'un schéma vaccinal complet. Ce taux cache d'importantes disparités territoriales. Il reste 10 % de personnes qui ne s'inscrivent pas dans un chemin vaccinal, soit cinq millions de Français, dont quatre millions d'adultes. La frilosité envers les vaccins à ARN messager est toujours là. On n'a pas constaté une augmentation significative des primo-vaccinés à la suite de la dernière intervention du Président de la République, malgré la déferlante du variant omicron. Cette résistance se cristallise autour d'arguments qui méritent d'être davantage discutés, et le projet de loi ne traite pas de cette fracture dont nous ne voulons pas dans notre société. Les non vaccinés ne sont pas nos ennemis.

Les neuf millions de personnes qui n'ont plus de médecin référent et qui renoncent aux soins s'inscrivent très certainement pour partie dans cette frange de la population rétive à un vaccin : le professionnel de santé n'est plus là pour donner en confiance les motifs scientifiques qui peuvent emporter l'adhésion. Beaucoup attendent le vaccin Novavax ou Valneva, distinct du vaccin à ARN. Que pouvez-vous nous en dire, monsieur le ministre ? Que pouvez-vous nous dire aussi des campagnes de rappel qui confortent le doute de certains sur l'efficacité des vaccins actuels, avec un rappel tous les trois mois ?

Pour mon groupe, le vaccin reste un outil essentiel de lutte contre cette pandémie. Nous l'avons toujours défendu pour des motifs scientifiques – sans trouver de raison de le mettre en doute. Son efficacité pour limiter la contagion et la gravité de l'état de santé des personnes contaminées est vérifiée par les scientifiques – trois doses de vaccin protégeraient de l'infection à 75 % contre les formes sévères. C'est aussi une question de solidarité envers les malades souffrant d'un cancer, victimes d'un infarctus ou d'un accident. Il s'agit de morale individuelle mais aussi d'un devoir moral pour les pouvoirs publics, lesquels doivent préserver l'accès aux soins des plus fragiles. Le vaccin aide à gérer les flux dans les hôpitaux, au bénéfice des malades et des professionnels de santé – et ce, quelle que soit l'analyse critique que nous pouvons faire de la politique de santé publique hospitalière. Il apparaît par ailleurs que les personnes non vaccinées constituent une petite minorité des cas graves hospitalisés. Le vaccin permet aussi de limiter les risques d'apparition de nouveaux variants.

L'instauration du passe vaccinal doit toutefois s'accompagner d'un travail d'explication. L'imposition de nouvelles règles sera contre-productive si elle n'est pas complétée par un respect accru des gestes barrières, et nous regrettons que le projet de loi ne le dise pas de manière plus claire.

Le nombre de passes sanitaires reposant sur un test négatif est introuvable sur internet. Pourriez-vous préciser, monsieur le ministre, la part de la population – qui n'a pas envie de s'isoler de toute vie sociale mais qui ne s'est pas encore engagée pas dans une démarche vaccinale – qui va perdre son passe sanitaire à partir du 15 janvier ?

La lutte contre la fraude relève des pouvoirs publics et l'arsenal pénal doit être à la hauteur. Selon nous, il existe déjà. Les restaurateurs, les organisateurs de foires et l'ensemble des professionnels concernés ont suffisamment à faire en se faisant présenter le passe vaccinal par leurs clients. Nous nous opposerons à la mesure qui leur impose de se substituer aux forces de l'ordre et de contrôler l'identité en cas de doute. Outre le fait que cette notion de doute est difficile à appliquer, ce n'est pas leur rôle. Faire face aux litiges potentiels requiert une formation – c'est celle dont disposent les officiers de police judiciaire.

Deux remarques en conclusion.

Premièrement, si les mesures en faveur de la vaccination vont dans le bon sens, elles sont tardives et on peut craindre qu'elles soient insuffisantes. L'instauration d'un couvre-feu le 31 décembre méritait par exemple d'être envisagée plus sérieusement, lorsqu'on sait qu'un jeune sur trente à Paris est testé positif, soit un taux d'incidence de 3 000 pour 100 000.

Deuxièmement, la pandémie exige une réponse mondiale qui passe par la levée des brevets et par l'accès facilité au vaccin pour l'ensemble de la population. Le Président de la République a fait part de sa volonté d'y travailler aux côtés de Joe Biden, il y a plus d'un an. Cela suppose aussi un volet européen, avec l'action des États en faveur de la vaccination la plus large possible au niveau mondial, qui constitue notre salut commun.

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