Intervention de Christophe Béchu

Réunion du mercredi 2 juin 2021 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Christophe Béchu :

Monsieur Morenas, j'ai certainement beaucoup moins sillonné le Vaucluse que vous. L'agence n'est pas le seul opérateur à l'œuvre. Une partie du désenclavement, en fonction de la taille des communes, relève aussi de la compétence des collectivités départementales. En théorie, l'agence ne doit intervenir que sur les routes nationales ; or, dans bien des cas, on a davantage besoin d'un réseau local de qualité que d'une extension du réseau national. Nous touchons là du doigt la responsabilité qu'ont les élus locaux d'accompagner le développement d'un modèle de société qui est plébiscité par nos concitoyens et qui a été remis à l'honneur à l'occasion de cette crise.

Il fut un temps, et c'est encore vrai dans certaines familles politiques, où l'on considérait que construire de nouvelles routes était sale parce que cela engendrait des voitures. Cela me fait penser aux cours d'un ancien professeur de droit des affaires sociales qui expliquait que la réforme de l'assurance maladie devait reposer sur un principe simple : plus il y a de médecins, plus il y a d'ordonnances ; plus il y a d'ordonnances, plus il y a de médicaments ; plus il y a des médicaments, plus le trou de la sécurité sociale se creuse. Il oubliait seulement qu'indépendamment du nombre de médecins, il fallait prendre en considération le nombre de patients. Sa logique visait donc à diminuer le nombre de médecins pour diminuer le nombre d'ordonnances et, en conséquence, le nombre de médicaments, afin de réduire le trou de la sécurité sociale. Non seulement ce n'est pas ce qui s'est produit, mais il arrive même que les assurés soient obligés de payer certaines prestations.

Les routes font-elles les voitures ? Je n'en suis pas persuadé, notamment du fait de l'évolution des modes de transport. Comment peut‑on plaider pour les circuits courts et le télétravail et ne pas se demander comment répartir les activités humaines afin de pas les concentrer de manière excessive ? Tel est l'enjeu du désenclavement et de l'accompagnement que j'évoquais.

Monsieur Bolo, il est tout à fait exact que plus le nombre de voitures qui passent à la pompe diminue, plus le rendement de la TICPE baisse. Il me semble que cette question relève davantage de la commission des finances que de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, mais, connaissant la multiplicité de vos centres d'intérêt, je ne suis pas surpris que cela vous préoccupe, dans un souci de responsabilité.

Bien sûr, nous aurions tort de penser que ces 40 milliards d'euros sont là pour toujours. Cela étant, c'est aussi le cas de nombre de taxes ou d'impôts qui fondent notre budget. S'agissant par exemple des amendes radars, tous les ans, vous partez du principe qu'un nombre élevé de nos concitoyens ne respectera pas les limitations de vitesse. Quel pessimisme ! (Sourires.) Vous pourriez, au contraire, décider de ne rien inscrire, partant du principe que tout le monde les respecte, et constater a posteriori, avec effroi, qu'une partie de nos concitoyens ne le fait pas.

La logique veut que l'on trouve demain une forme d'accompagnement, car la TICPE se fonde pour partie sur l'idée assez moderne selon laquelle il est légitime que les utilisateurs d'infrastructures participent à leur entretien. Cela renvoie à une question qui n'a pas été évoquée, à savoir que nous avons des « passagers clandestins » sur notre réseau, qui sont les grands groupes de transport routier international qui font le plein à l'extérieur de nos frontières et qui, par conséquent, ne participent pas au financement de l'AFITF via la TICPE. Quand bien même leurs camions abîment nos routes ou, en tout cas, participent à leur usure, ils sont exonérés de toute responsabilité financière, alors que les transporteurs routiers français paient la TICPE. On pourrait imaginer qu'à l'avenir un autre principe s'applique, qui soit indépendant de la motorisation. Par le passé, j'avais plaidé pour l'instauration d'une eurovignette, sur laquelle on aurait déduit le montant de la TICPE effectivement acquittée ; les Français n'auraient ainsi presque pas eu à subir de surplus de fiscalité – celle-ci étant déjà élevée –, alors qu'à l'inverse, les transporteurs basés à l'étranger auraient participé de manière équitable au financement du réseau. Cette question, qui dépasse le cadre de l'AFITF, reste à régler.

En vous entendant parler de Guéthary, j'avais envie, monsieur Causse, de vous proposer de nous rendre sur place pour examiner ce que l'agence est en mesure de faire. J'y ai également pensé très fort en écoutant madame Maina Sage !

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