Intervention de Stéphane Peu

Réunion du mercredi 6 décembre 2017 à 10h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

Nous abordons ce matin un sujet dont, je l'espère, la Commission sera amenée à reparler. Tout d'abord, ce n'est pas un pays, c'est une ville qui est candidate pour accueillir, avec quelques autres, les Jeux. L'essentiel des manifestations aura lieu dans les villes de ma circonscription, en particulier à Saint-Denis qui accueillera, outre la natation, les événements organisés au Stade de France, le village olympique ainsi que le village des médias. Je suis donc sensible à l'argument de Mme Vichnievsky : il ne nous paraît pas nécessaire d'instaurer, en matière d'urbanisme, des règles dérogatoires au droit commun. Les élus locaux que nous sommes ont l'habitude des grands événements sportifs : le Stade de France a accueilli de nombreuses manifestations, de la coupe du monde de football à l'Euro 2016, en passant par les championnats du monde d'athlétisme, de rugby et d'autres.

Pourquoi prévoir de telles exceptions alors que le principal bâtiment à construire est précisément le village olympique, au caractère pérenne, irréversible ? C'était même un des atouts de la candidature de Paris. Il ne faudra donc pas le penser sur le plan architectural et urbain au regard de l'événement lui-même, mais surtout en vue de sa reconversion. Or les Jeux d'Athènes, de Rio ou de Londres, pour ne considérer que les plus récents, ne nous ont jamais donné d'exemple de reconversion réussie.

On sait la pression que le temps et l'argent peuvent exercer. Si les collectivités – en l'occurrence, l'agglomération de Plaine Commune Grand Paris, qui regroupe notamment les villes de Saint-Denis, Saint-Ouen et L'Île-Saint-Denis, qui représentent pratiquement toutes les couleurs politiques de l'Assemblée – se voient dépouillées de leurs pouvoirs en matière d'urbanisme, je crains fort que l'on s'expose au risque d'une conversion mal pensée, et que l'on reproduise les erreurs déjà commises ailleurs.

Le projet de loi prévoit la création de SOLIDEO, chargée de la maîtrise d'ouvrage des équipements. Les collectivités locales demandent que cette structure soit organisée en autant de filiales qu'il y aura de lieux à aménager – une filiale pour le village olympique, une autre pour le village des médias, une autre pour le centre aquatique –, chacune associant les élus locaux concernés afin que ces bâtiments soient conçus au plus près des territoires et en fonction de l'usage qui en sera fait après les Jeux.

Nous pourrions également nous pencher, même si cela n'entre pas forcément dans notre champ de compétences, sur les questions fiscales. Une loi votée en 2016 exonère durablement les grandes manifestations sportives de quasiment tout impôt. Je regrette que le Parlement ait ainsi cédé aux pressions de la Fédération internationale de football association (FIFA). Avec le CIO, la FIFA et d'autres fédérations internationales sportives, nous avons affaire à des structures extrêmement riches ; défiscaliser des millions d'euros de recettes lors d'une compétition de football, c'est réduire d'autant les ressources dont dispose Saint-Denis pour organiser des manifestations culturelles et sportives associant les populations à un événement auquel elles ne peuvent participer directement. Nous souhaitons que cette question soit abordée et que l'on revienne sur la défiscalisation des grands événements sportifs.

Le problème de la publicité, enfin, ne vous aura pas échappé. Plusieurs associations commencent à s'émouvoir à l'idée que nos grands bâtiments historiques puissent être habillés aux couleurs des marques sponsors – puisqu'elles ne peuvent figurer sur les équipements des sportifs qui représentent des nations. Les défenseurs du patrimoine s'inquiètent à juste titre : je n'aimerais pas que la basilique de Saint-Denis soit transformée, le temps des Jeux, en bouteille de Coca-Cola !

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