Intervention de Pierre Dharréville

Réunion du lundi 11 octobre 2021 à 13h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

Après quatre années de compression des dépenses hospitalières enfin avouée, et en dehors du rattrapage prévu par le Ségur, soit plus de 4 milliards d'euros depuis 2017, vous avez enfin choisi de maintenir le niveau de l'année précédente. Cela ne permettra pas de réparer un hôpital en souffrance. Certes, cela marque une pause, mais ne casse pas l'engrenage des restructurations et des suppressions de lits, sous l'égide de groupements hospitaliers de territoire (GHT) dont le bilan est pour le moins mitigé. Environ 13 300 lits ont été supprimés depuis 2017, dont 5 700 en 2020, en pleine crise sanitaire. Quels sont donc vos plans, de ce point de vue, pour 2022 ?

Vous prévoyez une provision de 4,9 milliards d'euros pour absorber les frais de la crise sanitaire, qui n'est pas achevée. Or, l'année dernière, les réserves se sont avérées insuffisantes. Sur quelles prévisions sanitaires se fonde cette provision ?

Je ne peux que me féliciter, tout en regrettant un délai de latence singulièrement long, de voir étendues les mesures de rattrapage du Ségur – même si celles-ci sont insuffisantes – aux agents qui avaient été oubliés. C'était un choix intenable, qui n'a pas été sans effets. Ce n'est pas faute de vous avoir prévenus.

Le problème est que vous n'en tirez pas toutes les conséquences. Par exemple, vous vous entêtez à maintenir un système d'exonération qui est devenu la règle, et vous refusez d'envisager des recettes nouvelles pour financer une réponse à la hauteur des besoins. Les recettes de la branche maladie restent inférieures à leur niveau de 2018, alors que cette branche fait face à une explosion des dépenses. Il manque 21 milliards pour couvrir les dépenses de santé, soit l'équivalent de l'allégement des cotisations patronales d'assurance maladie ayant pris le relais du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).

La sécurité sociale est confrontée à une crise de financement. Les exonérations se chiffraient à 68 milliards d'euros en 2019, soit un doublement en cinq ans, pour un résultat économique contestable, et ce alors que les inégalités de revenus s'accroissent et que les paradis fiscaux prospèrent.

Vous êtes coincés dans votre logique libérale : les efforts se concentrent uniquement sur les dépenses. La reprise économique ne suffira pas à couvrir le delta, car les besoins en matière de santé et d'autonomie, par exemple, sont avérés. Il en résulte un déséquilibre budgétaire qui servira sans doute, à l'avenir, à imposer de nouvelles coupes claires dans la protection sociale. J'ai vu ressurgir le fantôme fatigué de la réforme des retraites. Vous avez évoqué également des transferts à la CADES. La manœuvre est grossière : visiblement, vous préparez des régressions sociales. C'est donc un budget qui ne prépare pas correctement l'avenir.

Vous avez renoncé à la grande réforme de l'autonomie, tant annoncée. Loin des besoins identifiés dans le rapport Libault et le rapport Fiat-Iborra, vous présentez une hausse de 6 %, qui sera en grande partie absorbée par les revalorisations du Ségur en faveur du secteur médico-social. Les annonces vont globalement dans le bon sens, mais vous n'avez présenté qu'un échantillon : on est très loin du compte. Par ailleurs, la branche sera financée à 90 % par la CSG, c'est-à-dire par les salariés et les retraités, les employeurs ne contribuant qu'à hauteur de 6 % à travers la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA). Cela témoigne d'une fiscalisation croissante de la sécurité sociale.

Nous soutiendrons les mesures positives, telles que l'extension jusqu'à 25 ans de la gratuité de la contraception, la constitution de droits à la retraite pour les indépendants pendant les périodes où le covid a affecté leurs activités, ou encore l'accès facilité à la complémentaire santé. Mais il y a tant à rattraper ! En outre, les largesses toutes relatives que vous inspire la période électorale ne suffisent pas à impulser les changements d'orientation nécessaires.

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