Intervention de Muriel Pénicaud

Séance en hémicycle du mardi 1er août 2017 à 15h00
Renforcement du dialogue social — Présentation

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Le dialogue c'est, enfin, ce processus d'écoute réciproque que nous avons entamé ensemble depuis plus d'un mois. Nous pouvons être collectivement satisfaits du résultat que cet alliage entre démocratie sociale et démocratie politique a produit à ce stade. Ce processus n'est pas terminé puisque viendront ensuite les ordonnances et le projet de loi de ratification.

Cet alliage a permis d'affiner utilement les orientations retenues initialement par le Gouvernement. Je retiendrai trois exemples de modifications ou d'enrichissements nés du dialogue noué avec le Parlement tout autant qu'avec les partenaires sociaux.

Sur le premier volet du projet de loi dédié à la nouvelle articulation entre accord d'entreprise et accord de branche ainsi qu'à l'élargissement sécurisé du champ de la négociation collective, nous avons finalement choisi, conformément à notre volonté de décentraliser la négociation, de renforcer non seulement l'accord d'entreprise, mais aussi l'accord de branche. Un tel résultat est le fruit direct des discussions menées avec les partenaires sociaux et au Parlement : je pense notamment à l'attention toute particulière portée à la situation spécifique des très petites et moyennes entreprises. Cette volonté transparaîtra dans la rédaction des ordonnances, de façon à garantir l'effectivité des droits non seulement pour tous les salariés, mais également pour tous les employeurs, quelle que soit la taille de l'entreprise : tel est également l'esprit de la réforme du compte professionnel de prévention.

Sur le deuxième volet relatif aux instances de représentation du personnel, vous avez formulé deux observations essentielles qui nous ont amenés à modifier et à enrichir le projet de loi.

Première observation : pour permettre la pleine réussite de l'instance fusionnée, le futur comité social et économique – qui va regrouper le comité d'entreprise, le CHSCT et les délégués du personnel – , vous avez insisté sur la nécessité de renforcer davantage la formation et les parcours professionnels des représentants du personnel afin de leur permettre d'avoir un dialogue social de qualité et pour susciter des vocations permettant de le faire perdurer dans le temps. J'ai d'ailleurs à cet égard confié une mission M. Jean-Dominique Simonpoli, président de l'Association Dialogues, dont les recommandations auront vocation à se retrouver dans les ordonnances.

Deuxième observation que vous nous avez faite avec force, tant lors des débats à l'Assemblée nationale et au Sénat qu'au sein de la commission mixte paritaire : il est nécessaire de prendre en compte la spécificité de taille ou de secteur d'activité des entreprises pour s'assurer que le comité social et économique aura une commission spécialisée dédiée à l'hygiène, à la sécurité et aux conditions de travail. C'est en effet à chaque fois nécessaire.

Le troisième exemple d'enrichissement né du dialogue est relatif à la sécurisation des relations de travail. Vous avez longuement débattu, dans cette assemblée, des enjeux du télétravail qui est emblématique de la nécessité de réformer notre code du travail. Celui-ci s'est en effet, à ce jour, révélé incapable d'anticiper et de tirer le meilleur parti des innovations technologiques comme des nouvelles aspirations des salariés. J'ai particulièrement apprécié notre débat sur ce sujet car il nous a éclairés sur les orientations plus détaillées à prendre dans le cadre des ordonnances.

Mais il ne s'agit pas uniquement de sécuriser les nouvelles formes de travail : nous devons également lever les incertitudes juridiques qui, de par leur caractère anxiogène, brident l'embauche. C'est tout l'enjeu de l'accès simplifié au droit avec le code du travail digital, qui vise à mieux accompagner les petites et moyennes entreprises dans les décisions qu'elles prennent.

C'est aussi celui de la sécurisation de la procédure de licenciement, pour éviter le recours systématique au contentieux qui est néfaste tant pour l'employeur que pour le salarié, car tous deux se trouvent alors suspendus à des décisions de justice parfois lointaines et aléatoires qui les privent de leur capacité à se projeter dans l'avenir. C'est pourquoi nous avons souhaité encourager la conciliation en amont, augmenter les indemnités légales de licenciement et clarifier les barèmes de dommages et intérêts.

L'accord trouvé en commission mixte paritaire n'est pas, je le répète, un blanc-seing donné au Gouvernement. C'est un mandat qu'il appartient à celui-ci de respecter, de mettre en oeuvre et de rendre compte, sous l'oeil vigilant non seulement du législateur et des partenaires sociaux, mais aussi – à travers vous, mesdames, messieurs les députés – de tous nos concitoyens.

La mise en oeuvre de cette réforme et l'appropriation dont elle fera l'objet par les acteurs de terrain se feront en parallèle des prochains chantiers que le Gouvernement engagera ces dix-huit prochains mois. Je les ai déjà annoncés à cette tribune, mais il me paraît important d'en rappeler la cohérence pour la rénovation de notre modèle social. Cette rénovation repose sur le besoin et la volonté de doter chacun de nos compatriotes de protections plus efficaces contre le chômage, contre la précarité, face aux bouleversements actuels et à venir de notre environnement économique et social, à travers la réforme de l'assurance chômage.

Les premières de ces protections actives ce sont, d'abord, les compétences. C'est pourquoi je défendrai l'an prochain la réforme de la formation professionnelle et, conjointement avec le ministre de l'éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, celle de l'apprentissage.

C'est aussi la réforme des retraites que portera la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn. Enfin, plus largement, c'est l'esprit de l'action du Gouvernement en faveur de la diminution du coût du travail, de la baisse de la fiscalité et du soutien du pouvoir d'achat.

Cet ensemble de réformes doit permettre à la croissance, de retour dans l'hexagone, d'être pleinement porteuse d'emplois, préoccupation impérative que nous partageons je pense tous.

Ces réformes interdépendantes constituent le terreau sur lequel nos entrepreneurs pourront exprimer l'ampleur de leur potentiel d'innovation, de création d'emplois et de promotion de l'excellence du savoir-faire et de la créativité de la France dans notre pays, en Europe comme dans le monde. C'est en effet cette dynamique qui est créatrice d'emplois.

Plus de liberté et plus de protections grâce à un dialogue social renforcé au plus près du terrain, c'est le sens du projet de loi que j'ai l'honneur, mesdames, messieurs les députés, de soumettre à votre vote aujourd'hui, comme celui de la démarche dans laquelle nous inscrirons les réformes à venir.

Au terme de cette première phase du long chantier de rénovation que nous venons d'entreprendre, je tiens à remercier toutes celles et tous ceux qui se sont engagés dans les débats.

Je pense en particulier à la présidente de la commission des affaires sociales, Brigitte Bourguignon, qui a permis que la commission se réunisse rapidement, dans un climat actif, serein et propice au travail de fond.

Je veux également exprimer ma gratitude au rapporteur au fond, Laurent Pietraszewski, qui a conduit un travail remarquable de dialogue, d'écoute, de pédagogie et de négociation en CMP.

Je tiens aussi à remercier, au nom de mon collègue Gérald Darmanin, le rapporteur pour avis de la commission des finances sur l'article 9, Joël Giraud. Je salue également la démarche de Boris Vallaud qui, dès le début de l'examen du projet, s'est porté candidat au rapport sur la mise en application de la loi qui sera issue de ce texte.

1 commentaire :

Le 02/08/2017 à 22:43, Laïc1 a dit :

Avatar par défaut

" Je salue également la démarche de Boris Vallaud qui, dès le début de l'examen du projet, s'est porté candidat au rapport sur la mise en application de la loi qui sera issue de ce texte."

C'est bizarre : il s'oppose à ce texte, mais il se porte candidat au rapport sur la mise en application de la loi qui sera issue de ce texte ?

C'est vraiment contradictoire, chercherait-il à amadouer M. Macron pour un poste de ministre ? (et en montrant au passage qu'il n'a guère de suivi dans ses convictions, qui n'en sont pas finalement.)

Et pourquoi devait-il être choisi, lui plutôt qu'un autre ? Il n'y a pas de raison. Le rapport sur la mise en application de la loi, c'est aux employés qui seront les victimes de cette loi de le faire.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.