Intervention de Joël Giraud

Réunion du mercredi 5 juillet 2017 à 8h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoël Giraud, rapporteur général :

Merci, monsieur le Premier président, de vous être exprimé avec franchise. Cette sortie de route sur la carte des trajectoires est effectivement préoccupante, vous venez de le souligner de la manière la plus pédagogique.

La problématique de la gouvernance globale des finances publiques compte parmi nos préoccupations les plus fortes, et l'évolution des procédures budgétaires serait en effet de nature à permettre une meilleure maîtrise de la trajectoire des finances publiques. Rappelons qu'il n'est pas une collectivité territoriale qui ne fonderait sa politique budgétaire de l'année suivante sur une analyse précise de son compte administratif – il est vrai que l'évolution tendancielle des dotations de l'État y a incité... Faire preuve de la même discipline pour les comptes de la nation me semble particulièrement important.

Vous faites notamment allusion à la masse salariale des administrations publiques, qui s'élève à 284 milliards d'euros, et vous indiquez, en page 152 du rapport, que des mesures sont nécessaires pour revenir à un rythme d'évolution plus soutenable. Avez-vous constaté, au cours des dernières années, une hausse de la masse salariale par rapport au produit intérieur brut ?

Vous proposez un gel du point d'indice, un gel provisoire des avancements d'une année ou encore la suppression de plusieurs indemnités. Cela représenterait au total des économies d'un montant d'une dizaine de milliards d'euros. Ce sont certes des économies importantes, mais, à l'heure où le souci de préserver le pouvoir d'achat des Français est un facteur important de la décision publique, avez-vous évalué le possible effet récessif de telles mesures ? Le cas échéant, que suggérez-vous pour le limiter et quel serait le montant des pertes de recettes consécutives ?

Vos propositions portent essentiellement – c'est typique des rapports de la Cour des comptes – sur les dépenses, dépenses fiscales comprises. Il me paraît cependant possible d'augmenter les recettes sans forcément augmenter les impôts, par le soutien à la croissance ou la lutte, qui nous est chère, contre l'optimisation fiscale agressive. Le redressement des finances publiques ne doit-il pas aussi passer par les recettes ? Pourquoi ne pas avoir chiffré les recettes mobilisables au titre de la lutte contre l'optimisation fiscale agressive ou encore l'aboutissement d'une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés au niveau européen ?

Vous constatez en dépenses un dépassement de 9,6 milliards d'euros en 2017, en intégrant le coût de la recapitalisation d'Areva, et vous évoquez trois mesures de compensation probables – les économies potentielles sur les prélèvements sur recettes, sur la charge d'intérêts et des annulations de crédits – pour un montant prévisionnel de 3,7 milliards d'euros. Au total, les dépassements en dépenses ressortent donc à 5,9 milliards. Au-delà des économies que vous mentionnez, ne pensez-vous pas que les méthodes que je qualifierai de « traditionnelles » de régulation budgétaire – décrets d'avance et gels de crédits jusqu'en fin de gestion – pourraient compenser en tout ou partie ces dépassements ?

Enfin, permettez-moi d'évoquer un sujet qui m'a beaucoup préoccupé pendant la législature précédente : la comptabilisation dans le déficit public des dépenses liées à la lutte antiterroriste. Vous le savez, l'Assemblée nationale a adopté au mois de juin 2015, à l'initiative du groupe socialise, républicain et citoyen, une résolution relative à la juste appréciation des efforts en matière de défense et d'investissements publics dans le calcul des déficits publics. Compte tenu de la menace terroriste accrue et en l'absence d'une politique européenne de la défense, il s'agirait d'utiliser les flexibilités permises par les textes budgétaires européens. Certes, il existe depuis 2004 un mécanisme de financement des coûts communs des opérations militaires de l'Union européenne en matière de défense, mais ceux-ci ne représentent que 10 % à 15 % du coût des opérations militaires. M. Le Drian, alors ministre de la défense, s'était prononcé en faveur de l'exclusion de ces dépenses militaires du calcul des dépenses publiques. Qu'en pensez-vous ? Je sais très bien que ce genre d'argument pourrait très bien être utilisé dans d'autres cadres – l'Italie pourrait estimer que la politique qu'elle mène en faveur des migrants pèse sur ses finances publiques, et pas seulement – mais il faudrait pouvoir comparer au niveau européen des choses comparables. Or la France fournit en matière de lutte antiterroriste un effort particulier, qui mérite d'être souligné.

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