Intervention de Annick Girardin

Réunion du mardi 23 octobre 2018 à 17h15
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Annick Girardin, ministre des outre-mer :

Concernant le FEI, la transparence sera totale. Vous souhaitez un copilotage avec les territoires, mais tous les projets proviennent du terrain après négociation avec le préfet. Actuellement, cinq projets remontent par territoire ; nous en finançons quatre. C'est un système que vous n'avez jamais contesté. Je ne comprends donc pas ce que vous voulez dire : c'est bien une logique de projets puisqu'ils sont proposés par les collectivités. Rien n'est retenu qui n'émane d'une collectivité.

Comme vous, j'aimerais qu'un jour une somme globale soit allouée à chaque territoire, les priorités étant définies par le Livre bleu. Oui, le Livre bleu a une légitimité puisque ce sont les collectivités et les citoyens qui demandent un effort pour les réseaux d'assainissement, la construction d'écoles, de structures sportives, d'équipements culturels. Il n'existe aucun autre bénéficiaire du FEI que les collectivités.

Ne pourrait-on, me demandez-vous, mettre en place un FEI « entreprises » ? Il s'agit d'une réflexion à mener ensemble.

S'agissant de la TVA NPR, votre argument a été de dire que les territoires disposaient d'une certaine liberté par rapport à cet argent. Quelle liberté ? Ces crédits étaient alloués automatiquement à des entreprises pour financer environ 80 000 produits. Aujourd'hui, nous voulons une dynamique qui soit fonction, non de produits, mais de filières – filières que je ne choisirai pas seule depuis Paris, mais qui seront portées par les territoires.

Qu'entendons-nous par « accompagner une entreprise » ? L'accompagner lors de sa création, dans son développement, lors d'une transmission. Ce sont tous ces outils que nous allons mettre en place, des outils plus démocratiques, me semble-t-il, que la TVA NPR qui « tombait » en partie là où ce n'était pas vraiment utile. Pour la création, nous allons nous appuyer sur le micro-crédit, sur le plan de développement des DOM (PDDOM) révisé, sur le capital-risque ; pour le développement, nous allons lancer des appels à projets sectoriels ; pour les transmissions, il faut que nous arrivions à structurer le capital développement. Bien entendu, je suis favorable à ce que l'on aille plus loin en donnant la possibilité aux territoires de se saisir de ces outils. J'ai commencé à en discuter avec les collectivités concernées.

Je souhaite pouvoir, avant la fin du quinquennat, présenter devant vous, dans le cadre du budget, l'ensemble du document de politique transversale. J'estime qu'il appartient à la ministre des outre-mer de s'expliquer sur l'ensemble des crédits destinés aux outre-mer. Une réorganisation est en cours, ministère par ministère, chaque ministre devant formuler des propositions. Je me suis souvent nourrie de vos propos : je réfléchirai à une évolution vers cette possibilité mais il est important que nous le fassions ensemble.

Si les engagements que nous prenons pour les outre-mer ne sont pas à la hauteur des retards qu'ils connaissent, on ne peut cependant pas accuser l'État, la France, de ne pas faire preuve de solidarité. Ce sont, par exemple, 134 millions d'euros qui sont redistribués pour compenser la baisse de la taxe d'habitation. En outre, 2,1 milliards d'euros supplémentaires sont alloués, pour les quatre ans qui viennent et dans des périmètres élargis, aux contrats de convergence et de transformation (CCT). De même, plus de 700 millions d'euros seront consacrés à la formation des jeunes ultramarins sur l'ensemble du quinquennat. Concernant la santé, 50 % de l'enveloppe nationale annuelle est attribuée aux hôpitaux ultramarins – et c'est normal, nous en avons besoin. Vous ne pouvez pas dire que la solidarité n'est pas là. Autre exemple, la tarification de l'énergie : 1,3 milliard d'euros sont consacrés à faire baisser le coût de l'électricité outre-mer.

Nous aimerions tous aller beaucoup plus vite pour remettre nos territoires à niveau, notamment en ce qui concerne les investissements structurants. C'est justement ce que j'essaie de faire avec le FEI en m'assurant de l'efficacité des investissements – un euro investi doit être deux fois plus efficace qu'un euro de dépense fiscale.

Concernant le logement, il faut rappeler que 13 % du parc est insalubre et que 80 % de la population est éligible à un logement social.

Le projet de loi de finances comporte un certain nombre d'autres avancées. Il y a l'extension, dans les COM, de l'aide à la réhabilitation aux parcs des bailleurs sociaux. Il y a aussi l'allongement de six à douze mois du délai de mise en location des logements pour bénéficier de l'aide fiscale. Il y aura, grâce à des amendements à venir, l'anticipation du versement du crédit d'impôt dès l'achèvement des fondations ainsi que le relèvement des quotas de prêts locatifs sociaux (PLS) qui permettra de construire davantage de logements étudiants, notamment à La Réunion. Je citerai encore le maintien à 225 millions d'euros en autorisations d'engagement de la ligne budgétaire unique (LBU) – malgré une baisse des crédits de paiement, mais c'est une autre question. Il y a enfin le produit des cessions des SIDOM, à savoir 19 millions d'euros comme vous le verrez lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative.

S'agissant de l'accession à la propriété et l'aide à la rénovation de l'habitat privé, 17 millions d'euros sont inscrits dans la mission « Cohésion des territoires ». Nous allons financer l'ensemble des dossiers restés bloqués du fait de la suppression de l'APL-accession pour 2018, et mettre en place un nouveau système dont nous discuterons une fois rendues les conclusions du groupe de travail.

En ce qui concerne spécifiquement la rénovation de l'habitat privé, le rétablissement de l'article 199 undecies C n'est pas la solution. Je n'aime pas plus que vous, monsieur Letchimy, les annulations en fin de parcours : je les ai moi aussi contestées quand j'étais parlementaire. J'ai regretté de ne pas être présente ce jour-là dans l'hémicycle pour en débattre avec vous, mais huit dossiers seulement sont à traiter cette année – d'ailleurs déposés par le même monteur en défiscalisation. J'ajoute qu'il existe un risque de redressement pour tous ceux qui utilisent ce dispositif ; cela m'inquiète car, sous peu, certains vont regretter de l'avoir utilisé. Nous devons donc faire autrement. Actuellement, sur les 200 millions d'euros, seuls 10 millions sont consacrés aux DROM et tout le reste va aux COM. Et si vous pensez que mes chiffres sont faux, nous allons nous asseoir avec les services concernés et éplucher les documents, car je déteste que l'on mette ma franchise en doute.

Par ailleurs, je n'ai pas affirmé que le rétablissement de l'APL-accession allait tout résoudre. J'ai dit que le nouveau dispositif qui prendra la suite de l'APL-accession répondrait aux problèmes des propriétaires…

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