Intervention de Huguette Bello

Séance en hémicycle du lundi 10 juillet 2017 à 16h00
Renforcement du dialogue social — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHuguette Bello :

Monsieur le président, trois raisons au moins plaident en faveur de cette motion de rejet préalable. La première tient au fait qu'un seul postulat sous-tend cette réforme, un postulat selon lequel la protection des salariés et le code du travail sont des obstacles majeurs à l'embauche et à la compétitivité des entreprises. Ce dogme, qui se veut moderne, s'est imposé en dépit de nombreuses études internationales et malgré la réalité elle-même.

L'OCDE, l'Organisation internationale du travail – OIT – et la Banque mondiale ne cessent de montrer l'absence de corrélation entre la protection des salariés et le niveau du chômage. De son côté, l'INSEE a consacré sa note de conjoncture du mois dernier aux résultats de son enquête sur les barrières à l'embauche. Nous y apprenons que, pour les entreprises, ce sont les incertitudes économiques et l'indisponibilité des compétences qui constituent les principales barrières, loin devant le droit du travail. Par conséquent, l'élaboration des nouvelles normes sociales, que nous appelons de nos voeux, ne se fera que sur de bonnes bases, si et seulement si nous avons d'abord le courage d'abandonner cette corrélation erronée, qui commence d'ailleurs à dater.

Deuxièmement, le recours aux ordonnances, sur une matière aussi sensible, ne se justifie que par son annonce lors de la campagne présidentielle. C'est vrai, mais c'est court, surtout après les ajustements, voire les reculs, déjà annoncés. Quant au rapprochement historique avec 1982, 1959, voire 1936, il souffre d'un biais comparatif. Les 39 heures, les congés payés, la retraite à soixante ans coïncidaient avec une profonde aspiration populaire. Peut-on en dire autant aujourd'hui, quand près de 70 % des Français se déclarent défavorables à la présente réforme et quand celle qui l'a précédée, il y a un an à peine, a été adoptée dans les conditions que l'on sait ? Vous parlez d'ailleurs, madame la ministre, d'un « pari ». Par ailleurs, il faut bien reconnaître qu'il y a un certain paradoxe à vouloir à ce point se passer du Parlement au moment même où la fin du cumul des mandats est censée rendre les députés plus disponibles pour légiférer !

Enfin, le texte est encore trop imprécis sur de nombreux points, parfois même totalement muet, singulièrement en ce qui concerne les outre-mer, qui enregistrent pourtant les plus forts taux de chômage de la République.

En votant cette motion de procédure, chers collègues, nous rétablirons le Parlement dans ses prérogatives.

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