Intervention de Pierre Dharréville

Séance en hémicycle du lundi 10 juillet 2017 à 16h00
Renforcement du dialogue social — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

N'écrivez pas la loi pour faciliter la vie à vos amis DRH ou actionnaires. Que l'entreprise soit un bien commun, voilà un bel objectif que je pourrais partager… Mais, en l'état actuel des choses, il s'agit d'une pétition de principe. Je note au passage que ce sont souvent les salariés qui défendent le mieux leur entreprise, comme l'ont montré mes amis de Fralib, dans les Bouches-du-Rhône. Le code du travail n'est pas n'importe quel code : il a pour l'essentiel été conquis. Le législateur doit faire la loi pour permettre d'interdire les injustices, les inégalités et les dominations car, comme l'écrivait Rousseau, « la force ne produit aucun droit ».

Hélas ! Votre projet de loi vise à élargir la brèche ouverte par la loi El Khomri lorsque notre président était ministre de l'économie. Votre projet va d'abord, quoi que vous en disiez, renverser la hiérarchie des normes et instituer le principe de défaveur puisque la loi pourra ainsi être contournée par des accords d'entreprise. Chacune aura le droit d'établir ses propres règles – des règles au rabais. Et vous continuez de nous dire que vous voulez lutter contre la complexité du droit pour le rendre effectif, alors que vous allez démultiplier le dumping social au sein même de notre pays et à l'intérieur de chaque branche. Quelle force restera-t-il à la loi ?

Votre projet va fusionner et rabougrir les instances représentatives du personnel, faisant au passage disparaître le CHSCT, pourtant si décisif sur les enjeux de santé et de sécurité.

Votre projet va créer encore de meilleures conditions pour les chantages à l'emploi dont nous avons eu moult exemples dans la période passée. Quels outils restera-t-il aux salariés ?

Votre projet va sanctuariser un nouveau concept, le CDI précaire, et élargir les possibilités de modification unilatérale du contrat de travail. Ainsi, vous souhaitez augmenter la latitude des employeurs tandis que vous limiteriez le pouvoir des juges.

Vos ordonnances ressemblent à celles des docteurs de Molière. La représentation nationale doit savoir que les organisations syndicales représentatives des salariés n'ont quasiment émis que des inquiétudes, tant sur la forme que sur le fond. Si le Président de la République a expliqué aux salariés qu'il n'était pas le Père Noël, il distribue en revanche déjà des étrennes au MEDEF, qui en serait presque gêné. Sa gêne, je vous rassure, madame la ministre, ne dure jamais longtemps ; il continue à vouloir faire baisser le prétendu coût du travail et n'a même pas besoin de promettre d'hypothétiques créations d'emploi – que vos mesures ne provoqueront d'ailleurs pas – puisque tout lui est donné sans effort, comme on l'a vu encore ces derniers jours sur la question de la pénibilité. Je rappelle que la droite a donné en commission son blanc-seing à votre projet.

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