Intervention de Yaël Braun-Pivet

Séance en hémicycle du lundi 19 novembre 2018 à 16h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Présentation commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

« Complexe, inaccessible, déroutante », tels étaient les mots qu'il m'arrivait d'entendre aux Restos du Coeur, lorsque j'oeuvrais en faveur de l'accès à la justice pour les plus démunis. De cet engagement, madame la garde des sceaux, j'ai retiré la même conviction que celle qui, je le crois, vous amène à nous présenter ce projet de réforme : plus d'humanité, plus de proximité, plus d'efficacité sont indispensables pour rapprocher encore les citoyens de la justice de la République.

Ce pour quoi nous nous engageons aujourd'hui est une transformation en profondeur pour une justice au service du justiciable, une justice qui protège la société. Ces enjeux méritent que nous avancions ensemble, que nous travaillions ensemble.

Ce fut le cas en commission. Pour examiner les deux textes que vous nous proposez, madame la garde des sceaux, nous avons mené neuf réunions en votre présence, représentant trente-trois heures d'échanges. Près de 1 000 amendements ont été examinés, dont 350 adoptés. Ce débat responsable et apaisé fut le terme, provisoire, d'un long chemin fait de concertations et de réflexion.

Il y eut, pour ce qui est du Gouvernement, les chantiers de la justice, dont les propositions constituent le socle solide et novateur de ce projet. Pour ce qui nous concerne, députés de tous bords, plusieurs missions d'information ont été menées : sur l'application d'une procédure d'amende forfaitaire au délit d'usage illicite de stupéfiants, sur le régime des fouilles en détention, sur les fichiers mis à la disposition des forces de sécurité, sur la justice des mineurs, sur les droits fondamentaux des majeurs protégés, et sur l'aide juridictionnelle.

Il y eut aussi nos travaux sur la détention, qui, comme vous le savez, me tiennent particulièrement à coeur. Souvenez-vous, il y a un peu plus d'un an, le 6 novembre 2017, les commissaires aux lois se sont rendus dans plusieurs dizaines d'établissements pénitentiaires sur l'ensemble du territoire français. Malgré la diversité des situations que nous avons pu observer, nous avons rapidement formulé un diagnostic commun : il était urgent d'apporter des réponses plurielles aux difficultés du monde carcéral ; il était nécessaire d'apporter notre soutien et notre reconnaissance à l'administration pénitentiaire, laquelle – c'est un euphémisme – n'a pas toujours bénéficié de l'attention qu'elle est en droit d'attendre.

À ce diagnostic commun répond une approche commune conduite à huit mains, avec trois de mes vice-présidents : Stéphane Mazars, pour le groupe La République en marche, Laurence Vichnievsky pour le groupe MODEM et Philippe Gosselin pour le groupe Les Républicains. Cette approche, qui a engagé l'ensemble des commissaires aux lois, nous a permis de valoriser nos convergences, plutôt que de faire état de nos divergences. Pour reprendre les mots de Philippe Gosselin, il s'agissait d'un « travail collectif », transpartisan, pragmatique, ponctué de très nombreuses visites de terrain et parachevé, le 17 octobre, par une réunion hors les murs de la commission des lois, au centre pénitentiaire de Fresnes.

Diagnostic commun, approche commune, et premiers fruits que nous récoltons ensemble aujourd'hui.

Nous disposerons désormais d'un panel d'établissements à sécurité différenciée, du plus sécurisé au plus allégé, adapté à tous les types de profils. La construction de nouveaux établissements sera plus systématiquement pensée en fonction des objectifs qui leur sont assignés. L'évaluation des dispositifs de prise en charge sera renforcée, pour mieux mesurer l'efficacité de nos politiques pénales. La situation des personnes détenues souffrant de troubles psychiatriques sera mieux prise en compte. Ce sont, je le crois, des avancées dont nous pouvons nous féliciter, alors que le sujet de la prison a plus souvent fait l'objet de crispations que de consensus.

Repenser la prison pour mieux réinsérer : voilà l'objectif que nous nous sommes fixé. En oeuvrant pour une meilleure réinsertion, nous ferons régresser la récidive et nous protégerons davantage la société. Nous le devons aux Français. C'est pour cela que, lorsque les portes de la prison s'ouvrent, il faut veiller à ce que les autres portes ne se referment pas.

Je sais que notre travail se poursuivra dans le même climat apaisé qui l'a toujours caractérisé. Je sais qu'ensemble nous suivrons sa mise en oeuvre et assurerons son évaluation, et je m'en réjouis.

Ce succès n'est pas un hasard. N'est-ce pas un peu dans la démarche collective qui fut la nôtre que l'on doit rechercher ses origines ? N'y a-t-il pas une leçon à retenir, pour nous qui recherchons les moyens d'améliorer la qualité du travail parlementaire ?

Pour terminer, madame la garde des sceaux, je souhaite vous adresser mes remerciements, vous qui avez été à notre écoute tout au long de ces travaux. Je souhaite également remercier nos deux rapporteurs et aussi tout particulièrement mes vice-présidents ainsi que l'ensemble des commissaires aux lois pour leur investissement. Enfin, je souhaite rendre hommage, à la justice et à ses acteurs, auxquels nous apportons une programmation budgétaire ambitieuse et des moyens renouvelés.

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