Intervention de Stéphane Mazars

Séance en hémicycle du mardi 15 janvier 2019 à 15h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Mazars :

Nous arrivons aujourd'hui au terme d'un long parcours législatif visant à réformer notre justice.

La justice est un idéal auquel nos concitoyens aspirent, tout en pouvant se montrer critiques à l'égard de l'institution et de son mode de fonctionnement. Cette réforme était donc nécessaire et attendue par nos concitoyens. Elle se doit d'être portée avant tout dans leur intérêt.

Tout d'abord, et pour faire taire dès à présent la critique de ceux qui considèrent que le Gouvernement est resté sourd aux revendications des professionnels, qu'ils soient fonctionnaires ou auxiliaires de justice ou encore, aux contestations des élus locaux, je tiens une nouvelle fois à saluer, madame la ministre, la méthode qui a été la vôtre, celle du dialogue et de la coconstruction.

En premier lieu, avec les cinq chantiers de la justice, lancés en octobre 2017 et achevés janvier 2018, vous avez permis, par l'intermédiaire d'acteurs de la justice aux compétences reconnues, de mettre en exergue les nombreux défis qu'un État moderne et démocratique doit relever au XXIe siècle en matière de justice, que ce soit dans les domaines de l'organisation judiciaire, du sens à donner à la peine, de l'accès au juge, ou encore de la simplification des procédures tant civiles que pénales.

Vous avez ensuite confronté les conclusions de ces chantiers aux remarques des acteurs, au plus près du terrain, en n'hésitant pas à vous rendre personnellement dans les juridictions, et ce en tous lieux de notre territoire, notamment dans des départements ruraux où la présence des services publics est un enjeu important, comme dans celui de l'Aveyron, département qui, je le sais, madame la ministre, vous est cher.

Réformer avec ambition notre justice, c'est d'abord la doter de moyens supplémentaires et pérennes, qui vont enfin faire sortir la France des profondeurs du classement s'agissant des moyens que le pays consacre à la justice. Il convient donc, une nouvelle fois, de saluer ce projet de loi dit de programmation, qui comporte une augmentation sans précédent des moyens dédiés à la justice, que ce soit en matière d'infrastructures ou de personnel.

Sur le plan pénal, ce projet vise à accroître l'efficacité de la réponse qui doit être apportée à une délinquance de plus en plus organisée et protéiforme. C'est ainsi qu'une rationalisation et une harmonisation des conditions de mise en oeuvre des moyens d'investigation sont prévues, au regard des différents cadres d'enquête.

Il est précisé que cette efficience recherchée au bénéfice de la sécurité de nos concitoyens ne se fera pas au détriment ni des libertés individuelles ni des droits de la défense, auxquels notre pays est très attaché. En effet, les procédures seront toujours menées sous le contrôle du juge des libertés et de la détention, en enquête préliminaire ou en flagrance, ou du juge d'instruction, après ouverture d'une information judiciaire.

En outre, certains dispositifs de simplification contenus dans ce texte rendront du temps de travail effectif d'enquête aux officiers de police judiciaire, en les déchargeant de tâches chronophages ou superflues.

Par ailleurs, ce projet vise à rendre la justice plus accessible à nos concitoyens, tout particulièrement les plus vulnérables d'entre eux, à savoir les victimes. C'est notamment le dispositif de la plainte en ligne qui permettra à celles dont la parole est parfois la plus difficile à libérer de passer le pas de la première révélation des faits, étant précisé que ce nouveau mode de plainte ne se substituera pas aux dispositifs actuels et n'évitera pas la nécessaire mise en présence de la victime avec un enquêteur ou un juge, pour les faits les plus graves.

C'est aussi pour un meilleur traitement judiciaire des faits criminels que ce texte prévoit à titre expérimental la mise en oeuvre du tribunal criminel départemental. Cette nouvelle juridiction permettra de juger les crimes passibles de quinze ou vingt ans de réclusion, ce qui permettra de désengorger les cours d'assises actuelles et de remédier aux délais de jugement particulièrement longs, parfois attentatoires à la présomption d'innocence des accusés et préjudiciables aux plaignants dans l'attente d'une reconnaissance du statut de victime.

C'est aussi, nous le savons, une procédure qui permettra de limiter la pratique, trop fréquente, de correctionnalisation de crimes tels que les viols ou les viols aggravés, qui s'apparentent souvent à de véritables dénis de justice.

Enfin, cette loi vise à améliorer l'efficacité de la réponse que la société se doit d'apporter à ceux qui en enfreignent gravement les règles. C'est ainsi notamment que, sans revenir sur le principe de la personnalisation des peines, qui donne tout son sens à l'action du juge, les sanctions inefficaces telles qu'inférieures à un mois de prison ne seront plus prononcées et celles supérieures à un an seront effectivement exécutées par le condamné.

Madame la ministre, après avoir beaucoup dialogué et consulté, vous nous avez présenté votre projet, lequel a été largement discuté et amendé. Il continuera à l'être au cours de cette semaine par la représentation nationale.

Viendra ensuite le temps d'appliquer cette réforme de la justice. C'est sans nul doute à ce moment que prendront fin certaines réserves et certains a priori, qui, encore aujourd'hui, s'expriment, à tort ou à dessein, sur notre territoire.

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