Intervention de Émilie Chalas

Réunion du jeudi 2 mai 2019 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉmilie Chalas, rapporteure :

Ayant déjà eu l'occasion de m'exprimer lors de l'audition du ministre il y a deux semaines, je concentrerai mon intervention, madame la présidente, sur quelques sujets que j'estime essentiels : la précarité, la déontologie et la rupture conventionnelle.

Ce projet de loi de transformation de la fonction publique nous donne l'occasion d'oeuvrer en faveur de l'égalité, principe qui s'impose, bien sûr, en matière d'accès à la fonction publique et de lutte contre les discriminations, mais qui doit aussi s'appréhender vis-à-vis de l'extérieur, c'est-à-dire en comparaison avec les règles applicables dans le secteur privé. Or, précisément, il est un domaine dans lequel une injustice demeure, c'est celui de la précarité, notamment des personnels de catégorie C, qui sont souvent les plus fragiles. Sans tomber dans les stéréotypes, ces personnels sont souvent des femmes seules avec enfants à charge, sujet auquel le Gouvernement est particulièrement sensible.

Le code du travail prévoit, dans le secteur privé, le versement d'une prime de précarité s'élevant à 10 % de la rémunération brute du salarié en contrat à durée déterminée à l'échéance de celui-ci, tandis que, dans la fonction publique, aucune disposition similaire n'existe aujourd'hui pour les agents contractuels. Voilà un exemple flagrant d'inégalité de traitement manifeste, à situation professionnelle identique. Face à ce constat, j'ai proposé, comme d'autres collègues issus d'horizons politiques différents, d'instaurer le versement d'une prime de précarité pour les contrats à durée déterminée (CDD) de courte durée dans la fonction publique. J'ai été confrontée, comme eux, à l'obstacle de la recevabilité financière, mais cela n'altère en rien ma détermination sur ce sujet.

Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, si le Gouvernement est disposé à prendre l'engagement ferme de mettre en place le versement d'une prime de précarité en faveur des agents contractuels dont le CDD, d'une durée inférieure ou égale à douze mois, arrive à échéance, hors contrats saisonniers et contrats de projet, à hauteur de 10 % de la rémunération brute versée à l'agent.

Le cas échéant, je proposerai cette mesure lors du débat dans l'hémicycle, car ce serait une avancée importante, et plus que légitime, pour nombre de nos concitoyens. Il y va de la responsabilité et de l'exemplarité sociale de l'ensemble des employeurs publics.

J'en viens à la déontologie, sujet qui nous tient tous particulièrement à coeur. Nos collègues Fabien Matras et Olivier Marleix ont rendu l'année dernière, au nom de notre commission, un excellent rapport sur la question et feront plusieurs propositions, comme beaucoup d'entre vous, pour compléter le projet de loi qui nous est soumis.

Le premier sujet est la fusion de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et de la Commission de déontologie de la fonction publique (CDFP), évoquée depuis longtemps et proposée par plusieurs amendements. Nous sommes nombreux ici à y être favorables, pour des raisons évidentes d'unité de la doctrine, ainsi que de renforcement de l'indépendance et de l'expertise de l'autorité chargée de ces questions. Le groupe La République en Marche et moi-même proposerons plusieurs dispositions en ce sens, sachant que nous nous réservons la possibilité de compléter ces amendements en séance pour préciser la composition de la nouvelle autorité et ses missions.

Le deuxième sujet est celui de la publicité des avis en matière de déontologie : nous y sommes également tous favorables, selon des modalités sensiblement différentes.

Sur ces deux questions, étant donné leur importance et notre volonté partagée d'avancer, j'espère que nous nous retrouverons, d'ici l'examen du texte en séance, sur des positions communes, au-delà de nos clivages politiques.

Enfin, je suis tout à fait favorable à l'instauration d'une rupture conventionnelle pour les fonctionnaires. Je me réjouis donc que le présent projet de loi l'introduise, à titre expérimental, à l'article 26. Néanmoins, il m'a semblé que cet article n'était pas assez encadré et n'offrait pas de garanties suffisantes aux fonctionnaires. J'ai donc déposé un amendement permettant de mieux définir la rupture conventionnelle, de prévoir le principe d'une homologation et d'un montant minimum de l'indemnité de rupture, et d'affirmer le principe du libre consentement des parties.

Je voudrais, en conclusion, aborder un dernier sujet essentiel en termes de lisibilité et d'accessibilité du droit : la codification du droit de la fonction publique. Monsieur le ministre, me confirmez-vous votre accord pour avancer sur cette question ? La codification permettrait de reconnaître la situation des fonctionnaires, qui ne disposent pas de l'équivalent du code du travail applicable aux salariés du privé, de graver dans le marbre l'importance, la spécificité et l'unité de la fonction publique française. Elle nous permettrait également d'y voir plus clair, car lorsque l'on rassemble les dispositions, on voit les incohérences, ce qui ne fonctionne pas, ce qu'il faut dépoussiérer, toutes choses indispensables lorsque l'on veut moderniser et transformer la fonction publique. Il y a donc un vrai enjeu opérationnel, pour les fonctionnaires comme pour les employeurs publics, mais j'y vois aussi, et surtout, l'affirmation de symboles forts de l'importance et de la qualité de notre fonction publique.

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