Intervention de Stéphane Pallez

Réunion du mercredi 3 juillet 2019 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Stéphane Pallez, président-directeur général de La Française des jeux :

Je vais commencer par répondre à la question du président, relative aux relations entre le PMU et La Française des jeux. La vérité est que nous sommes aujourd'hui deux entreprises, pour l'essentiel titulaires de droits exclusifs, chacune sur une activité spécifique. Nous avons les droits exclusifs sur la loterie en point de vente et en ligne et sur les paris sportifs en point de vente. Le PMU a les droits exclusifs sur les paris hippiques en point de vente. Nous avons des monopoles sur des activités différentes et, en théorie, nous sommes plutôt des cousins que des concurrents. Nous sommes d'autant plus des cousins que nous partageons une partie du réseau physique. Une partie qui est en fait assez faible, parce qu'aujourd'hui le nombre de points de vente communs et de l'ordre de 7 000, sur un réseau de 30 000 points de vente. Donc, quand on dit que ce développement de La Française des jeux dans les paris sportifs dans les points de vente a un impact sur le PMU, je rappelle toujours que nous partageons peu de points de vente. Ensuite, nous sommes très différents sur le plan capitalistique – comme vous le savez – puisque nous sommes une entreprise publique, alors que le PMU est un GIE privé, qui est régulé mais a une gouvernance très différente. Depuis cinq ans, j'ai toujours cherché à entretenir une bonne relation avec les dirigeants du PMU, parce que je pense que nous avons beaucoup à partager, en termes de régulation, de territorialité, d'investissement dans des causes d'intérêt général. Ainsi, nous nous ressemblons. Nous avons, je pense, chacun nos enjeux, qui sont en partie communs, mais qui sont aussi assez spécifiques. Nous nous parlons très fréquemment pour voir s'il y a des choses que nous pourrions faire davantage en commun, mais dans les limites du monopole, puisque nous sommes deux monopoles.

Là où nous sommes en concurrence – mais nous le sommes avec beaucoup d'autres – c'est sur le marché des paris sportifs en ligne. La vérité, c'est qu'aujourd'hui la véritable concurrence, ce n'est pas entre le PMU et nous, c'est entre le PMU, La Française des jeux et les opérateurs en ligne, qui sont aujourd'hui les leaders du marché. Chaque fois qu'on me dit qu'il y a un problème de concurrence entre le PMU et La Française des jeux, je rappelle que le marché en ligne croît de 50 %, principalement au bénéfice des leaders de ce marché, qui ne sont pas le PMU et La Française des jeux.

Je souhaite pleine réussite au PMU, qui est dans une situation qui n'est pas facile aujourd'hui, mais qui a pris à bras-le-corps un certain nombre de réformes.

Sur la question du rapporteur général relative au calendrier et aux modalités de la privatisation, je pourrais dire que c'est à l'État de répondre à cette question. Le ministre a dit qu'il souhaitait préparer une introduction en bourse de l'entreprise qui pourrait se dérouler – si les conditions de marché le permettent – avant la fin 2019. C'est le premier créneau possible. Il est aujourd'hui imprécis, parce qu'une opération de privatisation dépend de beaucoup de conditions. La première condition, c'est que le cadre de régulation soit en place. Cette condition, qui a été fixée par le Parlement, est essentielle. Qui imagine que la Française des jeux puisse être privatisée, si nous ne savons pas quelle est l'autorité de régulation et quels sont les régulateurs ? Tout cela est prévu par la loi. Nous y travaillons beaucoup avec les services de l'État, mais il y a encore beaucoup de choses à faire sur ce chemin. Mais nous essayons de les faire rapidement. Il y a donc la préparation de l'opération de marché éventuelle en tant que telle, où l'État a procédé au recrutement du syndicat bancaire. Mais d'une certaine manière, tout le reste est beaucoup plus important. Nous essayons de faire tout cela en même temps, de manière à être éventuellement prêts à l'automne, si les conditions de marché le permettent.

Sur la manière dont l'opération peut être envisagée, là aussi, j'ai quelques indications qui peuvent permettre de répondre à plusieurs questions. L'État a dit qu'il comptait conserver au minimum 20 % du capital. Comme il détient 72 % du capital, cela veut dire qu'il peut vendre à peu près 50 % des actions de l'entreprise. Ce qui paraît le plus probable aujourd'hui, c'est que les actionnaires historiques restent au capital, notamment les actionnaires représentant les anciens combattants qui détiennent presque 14 % si j'additionne les Gueules cassées et la Fondation Maginot, qui sont toutes les deux représentées au conseil d'administration et qui ont souhaité que l'État les rassure sur le fait qu'elles pourraient rester actionnaires. Cela a été le cas, et je pense que c'est une très bonne chose pour l'entreprise. À mon avis, beaucoup d'autres actionnaires dits historiques ou existant au capital de l'entreprise sont susceptibles de rester.

Concernant les actions qui seront cédées par l'État, ce dernier doit proposer 10 % de ce qu'il cède aux salariés de l'entreprise. Aujourd'hui, nous avons déjà 5 % des salariés qui sont actionnaires de La Française des jeux, car l'entreprise a trouvé une manière d'offrir des actions à ses salariés et de les gérer dans le cadre d'un FCPE. C'est l'entreprise qui doit voir quel type d'avantages elle peut offrir aux salariés pour leur proposer des incitations à souscrire qui les engagent dans la durée. L'intérêt d'avoir ces salariés, c'est de les avoir dans la durée.

Avoir un actionnariat populaire est un objectif qui a été très fortement affirmé par le gouvernement et qui est tout à fait bon pour l'entreprise. Aujourd'hui, dans le cadre du recrutement du syndicat bancaire, nous essayons surtout de mobiliser l'ensemble des réseaux bancaires français. C'est pour cela qu'ils sont bien représentés dans le syndicat. Et nous essayons également de voir quels types d'avantages – essentiellement des décotes pour les actionnaires individuels – pourraient être proposés de manière à ce qu'ils aient une petite incitation.

Surtout, je pense qu'il va nous revenir de bien expliquer ce qu'est l'entreprise, ce que sont ses perspectives, y compris de rentabilité, pour que cet actionnariat populaire soit bien informé et si possible attiré par ce type d'investissement. Il est difficile aujourd'hui de donner un volume pour l'actionnariat individuel.

Je ne réponds pas sur la valeur de l'entreprise, non pas que je ne sache pas calculer la valeur d'une entreprise, mais parce que c'est une donnée évidemment tout à fait sensible et d'ailleurs encadrée par des règles de marché. Nous allons présenter dans les semaines qui viennent notre « business plan » aux banques, qui vont donner un avis à l'État. L'État consultera également la Commission des participations et des transferts, qui lui donnera une valeur minimale pour préserver les intérêts patrimoniaux de l'État.

En ce qui concerne le réseau, aujourd'hui, nous avons réussi à stabiliser celui-ci à environ 30 000 points de vente. Il faut savoir qu'il y a plus de dix ans, il y avait 42 000 points de vente sur le territoire français, et quand je suis arrivée, la réduction du réseau était de 700 à 1 000 par an. Je considère que ce n'est pas un hasard si nous avons réussi à stabiliser, parce que c'est le fruit d'une action extrêmement forte, consistant à recréer des points de vente de La Française des jeux sur l'ensemble du territoire, en concertation avec le réseau historique. Le réseau historique est parfois inquiet quand nous venons implanter un agrément de la Française des jeux dans un autre bar-tabac. Nous procédons aux nouvelles implantations dans le cadre d'une concertation avec nos partenaires de la Confédération des buralistes et de Culture Presse. Et le fait d'avoir réussi avec eux à recréer 800 points de vente de La Française des jeux en 2018 est un record absolu. Si nous l'avons fait, ce n'est pas parce que nous voulons uniquement être responsables et avoir un bon maillage territorial. C'est parce que le modèle économique de l'entreprise repose énormément sur ce très bel actif, qui est le premier réseau de proximité de France et qui, s'il est bien géré et modernisé, est un actif fondamental pour l'entreprise, quels que soient ses actionnaires. Nous n'investissons pas forcément de la même manière dans les petits points de vente, dans les moyens ou dans les grands. Mais avoir des points de vente partout, notamment dans les territoires ruraux, c'est tout à fait essentiel pour l'entreprise et la pérennité de son modèle. Notre réseau a bénéficié de cette stratégie pendant cinq ans, puisque la croissance des mises – qui a été de l'ordre de 4 à 5 % au total – a été de 3 à 4 % dans le réseau. Nous n'avons pas du tout vidé le réseau pour aller en ligne. Nous avons boosté la croissance du réseau par l'investissement dans le numérique. C'est l'intérêt de l'entreprise et c'est l'intérêt de la communauté nationale.

Sur les implantations dans des centres commerciaux, nous ne sommes pas dans des supermarchés mais nous sommes dans des galeries marchandes. Des points de vente de presse ou des points de vente de tabac sont situés dans ces galeries marchandes, qui souvent font partie de l'écosystème du commerce local. Nous sommes parfois dans des petits supermarchés, mais plutôt en centre-ville. Et nous pouvons être conduits à aller dans ce type de commerces de proximité lorsque nous n'avons plus de distributeurs classiques, tels qu'un bar-tabac ou un distributeur de presse. Nous passons beaucoup de temps pour valider avec nos partenaires du réseau les cas dans lesquels il n'y a pas d'autres solutions. Nous sommes de plus en plus en concertation et transparents. Cela ne veut pas dire que 100 % de nos décisions font l'objet d'un consensus complet, mais je peux vous assurer qu'elles sont concertées comme cela n'a jamais été le cas. Je pense que la relation que j'ai aujourd'hui avec le président de la Confédération des buralistes est une relation gagnant-gagnant. Sans le réseau, la Française des jeux ne peut pas continuer sa croissance. Et pour ce faire, il faut dialoguer, se concerter, expliquer.

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