Intervention de Jean Terlier

Réunion du mercredi 2 octobre 2019 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Terlier :

Réduire la durée de délivrance d'une ordonnance de protection de 42 à 6 jours me paraît une bonne idée. Cela va dans le bon sens. Mais j'aurai à ce sujet la même interrogation que notre collègue Didier Paris : quid si une ordonnance de protection n'est pas effectivement rendue dans les six jours ? Qu'advient-il ? Est-elle réputée nulle et non avenue ? Ce serait préjudiciable à la victime car elle devrait déposer à nouveau une demande. Ce n'est donc pas forcément la bonne solution.

En outre, aujourd'hui, une ordonnance de protection est rendue dans les 42 jours mais, dans un cas sur deux, la demande est rejetée… Si vous voulez mettre l'ordonnance de protection au coeur du dispositif, il ne faut pas tant se pencher sur la question du délai dans lequel elle est rendue que sur le nécessaire assouplissement des conditions qui doivent permettre sa délivrance. Le taux élevé de rejet fait que le dispositif est peu utilisé par les avocats. Si, en demandant une ordonnance de protection rendue dans un délai de 42 jours, ils savent qu'il y a au bout du compte une chance sur deux qu'elle soit rejetée, cette procédure ne leur apparaît d'aucun intérêt. Il est tout à fait légitime qu'ils utilisent d'autres voies.

Il convient de jouer sur les conditions d'obtention de ces ordonnances plutôt que sur les délais. La question a été abordée par notre collègue Caroline Abadie.

La première condition tient à la vraisemblance des faits de violence : comment permet-on aujourd'hui à une femme de rapporter par tous moyens la preuve qu'elle a été victime de violences ? Comment facilite-t-on la production d'éléments de preuve ?

La deuxième condition exige que la victime soit exposée à un danger. Notre collègue Caroline Abadie a évoqué la possibilité qu'on substitue à cette notion de danger celle d'une dégradation des conditions de vie. Je pense qu'il faut également travailler là-dessus. Vous avez eu, je pense, une très bonne idée, quand vous parliez d'un danger y compris en l'absence de cohabitation. Vous savez que la Cour de cassation considère aujourd'hui qu'il n'y a pas de danger lorsqu'il n'y a plus cohabitation ; c'est une des causes principales de rejet de l'ordonnance de protection.

Jouons donc plutôt, à mon sens, sur une facilitation des conditions de délivrance de cette ordonnance de protection, plutôt que sur les délais quand on ne maîtrise pas forcément les conséquences de leur violation par les magistrats.

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