Intervention de Paul-André Colombani

Séance en hémicycle du mardi 15 septembre 2020 à 15h00
Inclusion dans l'emploi par l'activité économique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul-André Colombani :

Nous n'en sommes qu'au début de la crise socioéconomique provoquée par l'épidémie de covid-19, et pourtant la crainte est vive qu'un grand nombre de personnes basculent dans la pauvreté et que celles déjà vulnérables s'enfoncent dans la précarité. Une attention particulière doit être portée aux plus jeunes, aux personnes dépourvues de qualification et, bien sûr, aux personnes durablement éloignées de l'emploi. Dès lors, nous devons nous réjouir que notre assemblée se saisisse en cette rentrée exceptionnelle d'un texte dont l'ambition est d'améliorer l'inclusion des personnes éloignées de l'emploi.

Notre groupe a toujours été favorable à la poursuite de l'extension de l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ». Cette démarche traduit l'importance que nous accordons aux questions de transition écologique de solidarité et d'emploi, mais également à la capacité qu'ont nos territoires de répondre à ces questions.

En 2016, la proposition de loi portée par notre ancien collègue, Laurent Grandguillaume, adoptée à l'unanimité, avait permis d'engager cette expérience sociale et humaine inédite sur dix territoires volontaires. Nous ne pouvons que souhaiter le même sort au texte que nous examinons aujourd'hui et espérer qu'un large consensus émerge de nos débats. Néanmoins, notre groupe insiste sur la nécessité de respecter les principes fondateurs de l'expérimentation, tout en tenant compte des enseignements tirés par cette première phase.

Nous saluons certaines des modifications introduites en commission, en particulier la suppression de l'avis supplémentaire du service public de l'emploi, qui n'était pas cohérent avec l'organisation et les missions du comité local de l'emploi. Cependant, il reste plusieurs points sur lesquels il est impératif d'avancer.

En ce qui concerne le nombre et la durée de l'expérimentation, plutôt que de fixer un plafond à 30 nouveaux territoires – ou même à 50, comme le prévoit un amendement du Gouvernement – , il est plus pertinent de procéder à une habilitation de nouveaux territoires au fil de l'eau, sans limiter leur nombre au préalable, afin de veiller à ne laisser aucun territoire de côté et d'éviter de procéder à un arbitrage qui risque de favoriser les grandes régions au détriment de territoires en situation de précarité, comme la Corse ou certains territoires ultramarins.

Il faut envisager une logique qui encourage les territoires et les acteurs à mûrir leurs projets, à se préparer à leur rythme : l'initiative des territoires doit rester au coeur de la démarche. Nous regrettons aussi et surtout l'absence de dispositions permettant de soutenir financièrement l'ingénierie des comités locaux pour l'emploi, qui sont pourtant la cheville ouvrière de l'expérimentation. C'est dans les comités que la précarité la plus importante, il est donc essentiel de les doter de moyens humains à travers une mobilisation du fonds d'expérimentation. Enfin, nous avons de sérieux doutes sur la cohabitation du nouveau dispositif créé par l'article 3 – le CDI renforcé – au sein du même fonds, mais nous aurons l'occasion d'y revenir.

Mes chers collègues, nous avons tous eu l'occasion de constater sur nos territoires les retombées positives de ce projet. Certes, l'équilibre économique des entreprises à but d'emploi n'est pas toujours assuré, mais ce n'est que le début. Surtout, il est essentiel de voir au-delà des raisonnements purement financiers et de comprendre l'importance de l'insertion sociale par le travail. En effet, cette expérimentation cible les invisibles, les oubliés, ceux qui passent sous les radars de Pôle emploi et qui, bien souvent, ne bénéficient même plus des aides publiques. Grâce aux initiatives lancées par les territoires, ces personnes ont pu retrouver confiance et dignité en retrouvant un emploi correspondant à leurs compétences au sein d'entreprises utiles à leur territoire.

Je pense à la commune de Pipriac, en Bretagne – chez notre collègue Paul Molac – , où l'entreprise à but d'emploi TEZEA a embauché cinquante personnes en dix mois en proposant de nombreux services tels que la transformation de bois en mobilier ; je pense également aux activités menées à Thiers, dans le Puy-de-Dôme, qui vont de la réparation automobile au broyage de déchets.

Qu'il s'agisse de l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » ou d'autres dispositifs contenus dans ce texte, il est plus que jamais nécessaire d'encourager l'inclusion par l'activité économique. Notre groupe a encore quelques réserves sur l'effectivité de certaines mesures et formulera des propositions avec l'espoir qu'ensemble nous parvenions à tirer le meilleur profit de l'opportunité qui nous est donnée d'améliorer l'accompagnement de l'emploi dans l'esprit des dispositifs des territoires zéro chômeur de longue durée.

Nul n'est inemployable, et ce ne sont ni le travail, ni l'argent, qui manquent. Mes chers collègues, efforçons-nous de ne pas perdre de vue ces préceptes avant l'examen de ce texte.

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