Intervention de Charles de Courson

Réunion du mercredi 12 juillet 2017 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Je suis un peu étonné de la faiblesse de l'argumentation présentée par M. Sapin. Certes, c'est le Conseil constitutionnel qui est compétent s'agissant de la sincérité du budget, et il a jugé – à la suite d'un recours de l'opposition, dont j'étais – que le projet de loi de finances pour 2017 n'était pas insincère ; mais c'est le Haut Conseil des finances publiques qui apporte les éléments sur lesquels il s'appuie.

Or le Haut Conseil n'a de compétence que sur les recettes, et la critique fondamentale de la Cour des comptes porte sur les dépenses ! En matière de recettes, M. Eckert a raison : un écart de 2 milliards sur 300, ce n'est pas énorme, et les recettes sont bien plus aléatoires que les dépenses. M. Sapin a d'ailleurs oublié de dire que la situation était inverse en 2012 : l'écart avait été constaté sur les recettes, et non sur les dépenses.

Avec Gilles Carrez et d'autres, nous avions déjà souligné les risques existants. Je lis dans le rapport de la Cour des comptes que « les investigations menées par la Cour montrent que les constats qu'elle a effectués étaient, pour l'essentiel, identifiés par les administrations et donc connus du Gouvernement dès l'automne 2016 et, de manière plus précise encore, en avril dernier » – dès l'automne 2016, mes chers collègues ! Le rapport conclut que « les textes financiers soumis à l'approbation de la représentation nationale [...] étaient ainsi manifestement entachés d'insincérités ».

Je prends l'exemple des missions Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales et Travail et emploi.

Dans le cas de l'agriculture – vous ne pouvez pas le contester, ce n'est pas moi qui le dis, mais la Cour des comptes – les contentieux relatifs aux refus d'apurement communautaires n'étaient pas budgétés. Or la décision européenne demandant le reversement de 1,078 milliard d'euros, et acceptant un étalement sur trois ans, remonte au 16 janvier 2015 ! Il en est de même pour la sous-budgétisation du coût des exonérations de cotisations sociales et des conséquences de l'épidémie d'influenza aviaire et du versement des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN).

De la même façon, dans le cas de la mission Travail et emploi, vous aviez budgété 200 millions pour le plan de formation de 500 000 chômeurs : il manquait, excusez du peu, 600 millions ! C'est une sous-budgétisation de 75 %... Et c'est encore la même chose pour les contrats aidés. Ces faits sont incontestables, et vous avez agi sciemment : ce ne sont pas les administrations qui sont responsables. Ce sont des arbitrages politiques, destinés à donner l'impression que le déficit s'élèverait à 2,7 % du PIB.

En ce qui concerne 2017, vous n'avez pas répondu précisément, monsieur Sapin, aux questions précises que soulève la Cour des comptes.

Je voudrais également dire quelques mots de 2018. En 2017, vous avez anticipé des recettes pour 1,6 milliard – Gilles Carrez et moi-même avions beaucoup insisté sur ce point. Merci pour vos successeurs ! Et vous avez, en sens inverse, reporté des dépenses 2017 à 2018. De surcroît, les reports de charges sont en forte augmentation. Les reports de charge – je le précise pour les nouveaux – c'est un vieux truc : on ne paye pas en fin d'année, on fait de la cavalerie. Mais les ministres successifs les avaient considérablement diminués.

Pouvez-vous répondre précisément aux questions précises de la Cour ? L'argumentation de M. Sapin, je le redis, ne tient pas la route !

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