Publié le 27 janvier 2024 par : M. Labaronne, M. Batut.
Supprimer cet article.
La perte et la dégradation des habitats sont les principaux facteurs de déclin des populations d’espèces terrestres. Les changements démographiques et les demandes correspondantes de terre pour le développement augmentent dans les régions du globe riches en biodiversité, exacerbant la pression sur les espèces sauvages et rendant plus urgente la nécessité de mettre en place des mesures d’incitation viables pour la conservation.
D’après l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), les communautés autochtones et locales, dans de nombreuses régions du monde, ont choisi d’utiliser la chasse aux trophées comme stratégie de conservation de leur faune et de leur flore et d’amélioration des moyens pérennes de subsistance.
Un constat largement partagé et défendu à travers le monde par de nombreuses ONG, plus d’une centaine d’experts en conservation, WWF ou encore l’UICN. La chasse aux trophées incite les propriétaires fonciers à conserver ou à restaurer la faune sauvage sur leurs terres, génère des revenus pour la gestion et la conservation de la faune et accroît la tolérance à l’égard de la vie sauvage en réduisant les effets des conflits entre l’homme et la faune permettant ainsi de diminuer les abattages illégaux.
La chasse aux trophées est, par exemple, à l’origine des succès de la Namibie en matière de conservation communautaire des ressources naturelles. Ainsi, dans la région de conservation du Nord-ouest de la Namibie, la population de zèbres de montagne de Hartmann, menacée, est passée de moins de 1 000 à environ 27 000 individus, le nombre de rhinocéros noirs a plus que triplé, ce qui en fait la plus grande population en liberté d’Afrique et la population d’éléphants est, quant à elle, passée d’environ 7 500 en 1995 à plus de 20 000 aujourd’hui. Selon l’UICN, si les revenus de la chasse aux trophées disparaissaient, la plupart des aires de conservation communautaires seraient incapables de couvrir leurs coûts d’exploitation et les populations d’animaux sauvages ainsi que les bénéfices locaux diminueraient considérablement.
Par ailleurs, la présente proposition de loi fait considérablement courir le risque d’une surtransposition des règlements européens. En effet, contrairement à ce qui est indiqué, tant dans le titre que dans l’exposé des motifs, la présente proposition de loi ne se limite pas aux trophées mais à tout ou partie d’une espèce. Ses dispositions mettraient donc fin à tout commerce d’espèces menacées, contrairement à l’esprit même de la Convention de Washington (CITES) et du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Ce dernier permet de prendre des mesures plus strictes au niveau national uniquement lorsqu’elles sont dûment justifiées, nécessaires et proportionnées ; trois conditions sine qua none qui ne sont pas remplies dans le cas présent.
Enfin, ce sujet est actuellement examiné par la Commission européenne et les États membres dans le cadre du Plan d’action de l'Union européenne contre le trafic d'espèces sauvages dont l’objectif n°6 est de « veiller à ce que la politique de l’UE et nationale en matière de commerce des espèces sauvages et de trafic d’espèces sauvages soit complète et conforme aux engagements, aux normes et aux meilleures données probantes au niveau international ».Pour mener à bien cette action, le Groupe d'Examen Scientifique CITES de l'Union européenne étudie actuellement une liste de 146 espèces en prenant en compte leurs statuts de conservation, la tendance de leurs populations et le nombre de trophées importés dans l'UE au cours de la période 2012-2021. Il est important que cette analyse aille à son terme, afin que la science éclaire les réflexions préalables à la prise de décisions. Le commerce d'espèces menacées étant un sujet de compétence communautaire, il est essentiel que les adaptations réglementaires soient décidées au niveau de l'Union européenne, afin qu'elles s'imposent aux 27 États membres et ne donnent pas lieu à des divergences de régimes réglementaires au sein de l'Union.
Fort de ce constat, le présent amendement vise donc à supprimer l’article 1er de la présente proposition de loi qui, guidée par une vision ethnocentrique, nuirait considérablement à la conservation de la faune et de la flore des pays concernés par la chasse aux trophées.
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