Intervention de Julien Dive

Séance en hémicycle du jeudi 1er décembre 2022 à 15h00
Juridiction spécialisée dans les violences intrafamiliales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Dive :

Vous pensez que les maris et les femmes violents, que les pères et les mères qui battent leur enfant vont s'arrêter jusqu'au rendu des conclusions ?

Si nous devons aller vers une spécialisation de pôles dans chaque tribunal judiciaire, c'est parce que ces violences sont particulières, du fait que les victimes entretiennent ou ont entretenu des relations familières avec leur auteur et qu'au nom de cette complicité, elles n'osent pas dénoncer les faits. Pour comprendre ces violences et pour les traiter il faut une justice spécialement formée. Elle contribuera à restaurer la confiance des victimes en l'institution judiciaire et à enrayer un phénomène de société qui ne fait qu'augmenter chaque année : rappelons qu'en 2021, 143 personnes dont 122 femmes ont connu une mort violente au sein du couple, soit une hausse de 14 % par rapport à 2020.

Nous nous emparons encore une fois de ce sujet car des exemples étrangers démontrent que le dispositif proposé fonctionne. Comme l'a dit M. le rapporteur, en Espagne, où ce modèle a été instauré en 2004, les faits parlent d'eux-mêmes : le nombre de femmes tuées a diminué de 36 % depuis 2003 ; le nombre de plaintes enregistrées par les tribunaux spécialisés a augmenté de 29 % depuis 2007 ; les juges espagnols ont tous suivi une formation sur ce contentieux. Les tribunaux spécialisés sont compétents à la fois sur le volet civil de la procédure et sur le volet pénal : ils ont ainsi une vision transversale du dossier. C'est ce que nous proposons ici.

Vendredi dernier, le 25 novembre, se tenait la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Ce serait plus qu'un symbole de leur prouver que nous ne renonçons jamais. Il n'est jamais trop tôt pour agir, mais il ne faut surtout pas patienter, car après il sera trop tard.

Comment mettre en place le système proposé ? Ce sujet doit nous unir : il est trop important pour en faire l'objet d'une lutte partisane. C'est pourquoi tous les groupes d'opposition ont fait des propositions pour faire évoluer ce texte qui pourra être affiné au cours des débats parlementaires puis de la navette parlementaire. La proposition de loi rassemble une majorité sur tous les bancs de gauche et de droite. Malheureusement, une partie de la majorité, qui méprise parfois les propositions venant de l'opposition, a décidé de voter contre. Drôle de manière de mettre en œuvre l'esprit de coconstruction que vous vantez !

Bien sûr, nous pouvons exposer des interrogations ; c'est normal et légitime. C'est pour cela que le rapporteur a souhaité travailler avec chacun d'entre vous, pour coconstruire une proposition plus forte. C'est aussi pour cela qu'il a lui-même modifié son texte après avoir entendu des professionnels et des demandes des autres groupes politiques. C'est ainsi que nous envisageons le travail parlementaire. Pour reprendre votre conclusion, monsieur le garde des sceaux, quand on travaille ensemble, on va toujours plus loin ; c'est bien dommage que ce soit si souvent affirmé au lieu d'être appliqué.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion