Intervention de Daniel Labaronne

Réunion du mardi 17 janvier 2023 à 17h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Labaronne, rapporteur pour avis :

Notre commission examine le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (UE) en matière économique et financière, communément appelé projet de loi DDADUE.

Si cet exercice est une première sous cette législature, ce n'en est pas une pour notre commission, qui est régulièrement saisie de textes de ce type : les deux derniers projets de loi DDADUE ont été déposés en février 2020 et en avril 2021, et ils ont conduit à la promulgation des lois du 3 décembre 2020 et du 8 octobre 2021.

Le projet de loi qui nous est présenté s'inscrit dans ce prolongement et illustre, une nouvelle fois, la montée du droit de l'Union européenne dans le droit économique et financier national.

Comme tout texte de ce genre, ce projet de loi est technique, un peu fourre-tout, et embrasse des sujets assez larges. Il s'articule ainsi autour de quatre titres. Le premier porte sur l'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière. Les autres titres concernent le droit social, celui des transports et le droit agricole.

D'un point de vue procédural, je précise que neuf des onze articles qui ont été délégués à notre commission figuraient dans le texte initial. Deux articles ont été ajoutés par le Sénat, à son initiative ou à celle du Gouvernement. Un article a en revanche été supprimé par le Sénat et le Gouvernement propose de le rétablir, dans une version modifiée, à la suite des observations que votre rapporteur a faites.

Ces onze articles portent sur quatre domaines : le droit bancaire, le droit de l'assurance, le droit des sociétés et le droit des marchés et des produits financiers.

En matière de droit bancaire, deux articles tendent à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance sur des sujets très techniques. L'article 6 concerne les chambres de compensation et les contreparties centrales, tandis que l'article 13 porte sur les gestionnaires et les acheteurs de crédits.

Dans le domaine du droit de l'assurance, l'article 1er a pour objet les modalités d'actualisation des montants en euros de certains seuils prévus par le régime prudentiel des activités d'assurance et de réassurance. L'article 4 autorise le Gouvernement à transposer par ordonnance une directive en matière d'assurance automobile.

Trois articles concernent le droit des sociétés. L'article 7 habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance une directive relative à la communication, par certaines entreprises, d'informations relatives à l'impôt sur les revenus des sociétés qu'elles acquittent. L'article 3 corrige une divergence de champ d'application entre différents codes en matière de publication d'informations extra-financières. L'article 8, supprimé par le Sénat, habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance une directive portant sur la publication d'informations en matière de durabilité. C'est cet article que le Gouvernement propose de rétablir dans une version vraiment différente de celle qui figurait dans le projet de loi initial.

Le projet de loi concerne enfin le droit des marchés et des produits financiers, avec quatre articles. Les articles 5 et 5 bis intéressent le droit des marchés financiers, plus précisément les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués – ou blockchain –, ainsi que l'agrément qui peut être délivré par l'Autorité des marchés financiers (AMF) à tout acteur voulant exercer la profession de prestataire de services sur actifs numériques. Les articles 2 et 2 bis concernent les produits financiers, plus particulièrement le produit paneuropéen d'épargne retraite individuelle (PEPP).

L'ensemble de ces dispositions est assez technique. Je me limiterai à trois observations sur leur contenu.

Tout d'abord, ces articles peuvent avoir des effets très concrets pour nos concitoyens comme pour les entreprises.

L'article 4 traite ainsi des questions d'assurance automobile.

Les dispositions sur la publication d'informations extra-financières intéressent de nombreuses sociétés. Des grandes entreprises bien sûr, mais également des PME qui sont fournisseurs ou sous-traitants de grandes entreprises. Il s'agit là autant de finance durable que de développement économique.

Les enjeux de l'agrément délivré par l'AMF à tout acteur voulant exercer la profession de prestataire de services sur actifs numériques (Psan) intéressent directement la place financière de Paris. C'est une question de finance numérique mais aussi d'attractivité économique de la France.

Ma deuxième observation nous concerne en tant que législateur. Ce texte comporte un certain nombre d'habilitations à légiférer par ordonnance : sur les onze articles soumis à notre examen, cinq proposent une telle habilitation. Et nous pouvons tous avoir certaines réticences à déléguer ainsi notre capacité de légiférer au Gouvernement.

Cependant, il est fréquent de recourir aux ordonnances en matière d'adaptation au droit de l'Union européenne. Sur des sujets techniques, cela ne me choque pas dès lors que l'habilitation proposée est suffisamment précise – ce qui me semble être le cas : aucun chèque en blanc n'est signé.

Une seule habilitation trop large me paraissait contestable. Le Sénat l'a observé, je l'ai également souligné et le Gouvernement corrige le tir dans la nouvelle version.

Ma troisième observation concerne également notre rôle de législateur. Nous devons éviter toute surtransposition et résister à la tentation de distinguer le droit national du droit européen, en ajoutant de la norme à la norme. Quand les normes européennes définissent un standard, je ne crois pas utile d'y déroger pour en ajouter un supplémentaire.

Toute surtransposition revient à imposer un travail supplémentaire aux entreprises et entraîne une perte de compétitivité, de parts de marché et une baisse d'activité – au bout du compte cela veut dire moins d'emplois. En outre, les surtranspositions sont souvent mal faites. L'article 3 corrige par exemple une erreur de ce type concernant les mutuelles.

Faisons donc simple. Transposons les textes européens sans refaire le match qui a déjà eu lieu à Bruxelles et à Strasbourg, au sein notamment du Parlement européen. Je constate d'ailleurs avec satisfaction que, parmi les amendements qui ont été déposés, aucun ne propose de surtransposition.

Nous allons examiner une vingtaine d'amendements. Ceux que j'ai déposés sont pour l'essentiel rédactionnels. Un de mes amendements propose d'ajuster un article introduit par le Sénat.

En conclusion, je suis convaincu que ce projet de loi comporte des mesures techniques mais utiles pour adapter notre droit à celui de l'Union européenne. C'est un petit pas supplémentaire dans l'imbrication de notre droit avec celui de l'Union, ce qui va dans le bon sens.

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